Vu la requête, enregistrée le 1er août 2007, présentée pour la SARL C.I.E.M. dont le siège est 208 rue Saint-Maur B.P.276 75464 Paris Cedex 10 par Me Belot, avocat ; la SARL C.I.E.M.demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n°s 0407486/1-2 - 0409082 - 0200967 du Tribunal administratif de Paris en date du 19 juin 2007 en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés et à la contribution de 10 % sur ledit impôt auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 1995 et 1996, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée et des cotisations au prélèvement spécial sur les bénéfices résultant de la vente, la location ou l'exploitation d'oeuvres pornographiques ou d'incitation à la violence, auxquels elle a été assujettie au titre des années 1994, 1995 et 1996 ainsi que des pénalités y afférentes, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été assignés au titre de la période du 1er janvier 2000 au 31 décembre 2001 ainsi que des intérêts de retard y afférents et du prélèvement spécial sur les bénéfices résultant de la vente, la location ou l'exploitation d'oeuvres pornographiques ou d'incitation à la violence, auquel elle a été assujettie au titre des années 1999 et 2000 ainsi que des pénalités y afférentes ;
2°) de prononcer la décharge des impositions restant en litige ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 22 octobre 2008 :
- le rapport de M. Magnard, rapporteur,
- et les conclusions de Mme Evgenas, commissaire du gouvernement ;
Considérant que la SARL CIEM conteste le jugement du Tribunal administratif de Paris en date du 19 juin 2007 en tant qu'il a rejeté sa demande en décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée et des cotisations au prélèvement spécial sur les bénéfices résultant de la vente, la location ou l'exploitation d'oeuvres pornographiques ou d'incitation à la violence, auxquels elle a été assujettie au titre des années 1994, 1995 et 1996 ainsi que des pénalités y afférentes, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été assignés au titre de la période du 1er janvier 2000 au 31 décembre 2001 ainsi que des intérêts de retard y afférents, et du prélèvement spécial sur les bénéfices résultant de la vente, la location ou l'exploitation d'oeuvres pornographiques ou d'incitation à la violence, auquel elle a été assujettie au titre des années 1999 et 2000 ainsi que des pénalités y afférentes ;
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
Considérant, en premier lieu, que le différend opposant la société requérante à l'administration ne portait pas sur la détermination de son chiffre d'affaires taxable, mais sur le taux de la taxe sur la valeur ajoutée applicable ou était relatif aux conditions d'application du prélèvement spécial prévu par les articles 235 ter L à 235 ter MC du code général des impôts ; que ce désaccord, alors même qu'il porterait sur une question de fait, n'entrait pas dans le champ de compétence assigné par l'article L. 59 A du livre des procédures fiscales à la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires ; que le service a pu, dès lors à bon droit, sans priver l'intéressée d'une garantie procédurale, s'abstenir de donner suite à sa demande de saisine de cette instance ;
Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article R.* 256-1 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction alors en vigueur : « L'avis de mise en recouvrement individuel prévu à l'article L.256 comporte : 1°) Les indications nécessaires à la connaissance des droits, taxes, redevances, impositions ou autres sommes qui font l'objet de cet avis ; 2°) Les éléments du calcul et le montant des droits et des pénalités ou intérêts de retard, qui constituent la créance. Toutefois, les éléments du calcul peuvent être remplacés par le renvoi au document sur lequel ils figurent lorsque ce document a été établi ou signé par le contribuable ou son mandataire ou lui a été notifié antérieurement (...) » ; que le prélèvement spécial sur les bénéfices résultant de la vente, la location ou l'exploitation d'oeuvres pornographiques ou d'incitation à la violence est régi, à la section IX du chapitre III du titre Ier du code général des impôts, par les dispositions de l'article 235 ter L et suivants dudit code ; que les articles 235 ter M et 235 ter MB se bornent à étendre aux activités qu'ils désignent, soit respectivement les représentations théâtrales à caractère pornographique et les établissements dont l'accès est interdit aux mineurs en raison de leur caractère licencieux et pornographique, mentionnés au 4° de l'article 279 bis du même code, le prélèvement prévu par les dispositions de l'article 235 L ; que la société requérante exerçait une activité unique soumise au prélèvement spécial sur les bénéfices résultant de la vente, la location ou l'exploitation d'oeuvres pornographiques ou d'incitation à la violence prévu à la section IX du chapitre III du titre Ier du code général des impôts ; que si l'avis de mise en recouvrement rendu exécutoire le 12 février 1999 vise l'article 235 ter M du code général des impôts relatif aux prélèvement spécial sur les bénéfices qui résultent de représentations théâtrales à caractère pornographique, alors que les redressements étaient fondés sur les dispositions de l'article 235 ter MB du code général des impôts relatif aux établissements dont l'accès est interdit aux mineurs en raison de leur caractère licencieux et pornographique, mentionnés au 4° de l'article 279 bis du même code, cette erreur non substantielle ne saurait avoir eu d'incidence sur la compréhension par le contribuable des droits mis à sa charge, dès lors qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus, l'article 235 ter M et l'article 235 ter MB se bornent à étendre aux activités qu'ils désignent le prélèvement prévu par les dispositions de l'article 235 L ; que la société requérante a été ainsi correctement informée de la nature des droits en cause et mise à même d'identifier l'impôt mis en recouvrement ;
Sur le bien-fondé de l'imposition :
En ce qui concerne la taxe sur la valeur ajoutée collectée :
Considérant qu'aux termes de l'article 279 du code général des impôts repris depuis le 1er janvier 1993 à l'article 278 bis du code général des impôts : « La taxe sur la valeur ajoutée est perçue au taux réduit de 5,50 % en ce qui concerne les opérations d'achat, d'importation, de vente, de livraison, de commission, de courtage ou de façon portant sur les produits suivants (...) /6° livres, y compris leur location » ; que doit être regardé comme un livre au sens de ces dispositions tout ouvrage constituant un ensemble homogène comportant un apport intellectuel ;
Considérant que la société CIEM soutient que ses publications intitulées Spartacus, Gai Pied et Gayway doivent être regardées comme des livres au sens des dispositions précitées ; que pas plus devant la cour que devant les premiers juges, la société CIEM n'a produit d'exemplaire datant des années en cause des publications litigieuses dont l'administration soutient qu'elles se présenteraient non pas comme des guides touristiques mais comme des ensembles de fiches indépendantes et comprenant essentiellement des adresses et des publicités destinées au public homosexuel ; que si la société requérante fait valoir que lesdites publications seraient pour l'essentiel consacrées à l'information du public homosexuel, la cour ne dispose d'aucun élément permettant de regarder ces informations comme constitutives d'un ensemble homogène comportant un apport intellectuel ; que, par suite, elles ne peuvent être regardées comme des livres légalement susceptibles de bénéficier du taux réduit de la TVA ;
En ce qui concerne le prélèvement spécial :
Considérant d'une part qu'aux termes de l'article 235 ter L du code général des impôts : « Un prélèvement spécial de 33 % est perçu sur la fraction des bénéfices industriels et commerciaux imposables à l'impôt sur les sociétés ou à l'impôt sur le revenu qui résulte de la production, de la distribution ou de la représentation de films pornographiques ou d'incitation à la violence » ; qu'aux termes de l'article 235 ter MB : « Le prélèvement spécial prévu à l'article 235 ter L s'applique également aux bénéfices industriels et commerciaux imposables à l'impôt sur le revenu ou à l'impôt sur les sociétés réalisés par des établissements mentionnés au 4° de l'article 279 bis » ; que les établissements mentionnés à l'article 279 bis, 4° du code général des impôts sont les établissements, tels les sex-shops, qui, en raison de leur caractère licencieux ou pornographique, sont interdits d'accès aux mineurs en vertu soit des pouvoirs de police des maires et des préfets, soit de l'ordonnance n° 59-28 du 5 janvier 1959 ;
Considérant d'autre part qu'aux termes de l'ordonnance du préfet de police n° 70-15878 du 8 septembre 1970, publiée au bulletin municipal officiel de la Ville de Paris du 16 septembre 1970 : « Dans le ressort de la Préfecture de police, est interdite aux mineurs de 18 ans l'entrée dans les librairies spécialisées vendant des publications présentant un caractère licencieux ou pornographique et offrant à la vente des publications interdites aux mineurs en application de l'article 14 de la loi du 16 juillet 1949, modifié par la loi n° 67-17 du 4 janvier 1967 » ; que cette ordonnance a été complétée le 14 septembre 1973 par l'obligation de rendre opaques les vitrines des établissements concernés ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction et qu'il n'est pas contesté que l'établissement de la société CIEM, dont l'activité est la vente ou la diffusion de produits destinés à la communauté homosexuelle, comporte un panonceau en interdisant l'accès aux mineurs ; que les annonces publiées par la société dans les guides spécialisés font état de la nécessité d'être majeur pour acheter les articles vendus par ledit établissement ainsi que de la mise en vente de produits à caractère pornographique ; que cet établissement étant ainsi au nombre de ceux visés par les dispositions précitées de l'article 235 ter MB du code général des impôts, la société CIEM, qui ne saurait dans ces conditions utilement se prévaloir de ce que la circonstance que l'établissement exploité soit spécialisé dans la vente d'ouvrages destinés à la communauté homosexuelle ne permet pas à elle seule de déduire que les publications vendues présenteraient un caractère licencieux ou pornographique, n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que l'administration a soumis ses bénéfices imposables des années litigieuses au prélèvement spécial prévu par ledit article ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société CIEM n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ;
D E C I D E :
Article 1er : La requête de la société CIEM est rejetée.
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N° 07PA02927