Vu la requête, enregistrée le 10 avril 2008, et les deux mémoires complémentaires enregistrés respectivement le 12 juin 2008 et le 5 décembre 2008 présentés pour Mme Nafissatou X et M. Hans Stefan X, demeurant ... par Me Senah ; M. et Mme X demandent à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0800052 du 12 mars 2008 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté la demande de Mme X tendant à l'annulation de la décision du 12 décembre 2007 par laquelle le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination, à ce qu'il soit enjoint au préfet de réexaminer sa situation dans un délai de quinze jours à compter de la notification du jugement et de lui délivrer durant cet examen un récépissé ou, à défaut, une autorisation provisoire de séjour, sous astreinte de 150 euros par jours de retard ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cette décision ;
3°) d'enjoindre au préfet de police de délivrer à Mme X une carte de séjour de résident permanent portant la mention ressortissant UE ou membre de famille dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;
4°) à défaut, d'enjoindre au préfet de police de réexaminer la situation de Mme X dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt et de lui délivrer durant cet examen un récépissé et à défaut une autorisation provisoire de séjour sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;
5) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 20 mai 2009 :
- le rapport de M. Bossuroy, rapporteur,
- et les conclusions de Mme Samson, rapporteur public ;
Considérant que Mme X, de nationalité camerounaise, et son mari, de nationalité allemande, relèvent appel du jugement du 12 mars 2008 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 12 décembre 2007 par lequel le préfet de police a refusé de délivrer un titre de séjour à Mme X, l'a obligée à quitter le territoire français et a désigné notamment le Cameroun comme pays de destination de son renvoi ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
Considérant que, par le jugement contesté, le Tribunal administratif de Paris a statué sur la légalité, tant de la décision de refus de titre de séjour, que sur les décisions faisant obligation à Mme X de quitter le territoire et fixant le pays de destination ; que le moyen tiré de ce que le jugement serait entaché d'une omission à statuer doit par suite être écarté ;
Sur la légalité des décisions litigieuses :
En ce qui concerne la légalité externe :
Considérant que l'arrêté du préfet de police du 12 décembre 2007 comporte les motifs de droit et de fait sur lesquels il se fonde ; que le préfet n'était notamment pas tenu de faire référence à la convention franco-camerounaise du 24 janvier 1994 dont l'arrêté ne faisait pas application ; que le moyen tiré d'un défaut de motivation dudit arrêté doit par suite être écarté ;
En ce qui concerne la légalité interne :
Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article L. 121-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, tout citoyen de l'Union européenne... a le droit de séjourner en France pour une durée supérieure à trois mois s'il satisfait à l'une des conditions suivantes : 1° S'il exerce une activité professionnelle en France... 4° S'il est un descendant direct âgé de moins de vingt et un ans ou à charge, ascendant direct à charge, conjoint, ascendant ou descendant direct à charge du conjoint, accompagnant ou rejoignant un ressortissant qui satisfait aux conditions énoncées aux 1° ou 2° et qu'aux termes de l'article L. 121-3 du même code : Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, le membre de famille visé aux 4° ou 5° de l'article L. 121-1 selon la situation de la personne qu'il accompagne ou rejoint, ressortissant d'un Etat tiers, a le droit de séjourner sur l'ensemble du territoire français pour une durée supérieure à trois mois. S'il est âgé de plus de dix-huit ans... il doit être muni d'une carte de séjour. Cette carte, dont la durée de validité correspond à la durée de séjour envisagée du citoyen de l'Union dans la limite de cinq années, porte la mention : carte de séjour de membre de la famille d'un citoyen de l'Union ;
Considérant, d'autre part, qu'aux termes des dispositions de l'article R. 121-1 du code : Tout ressortissant mentionné au premier alinéa de l'article L. 121-1 muni d'une carte d'identité ou d'un passeport en cours de validité est admis sur le territoire français, à condition que sa présence ne constitue pas une menace pour l'ordre public. Tout membre de sa famille mentionné à l'article L. 121-3, ressortissant d'un Etat tiers, est admis sur le territoire français à condition que sa présence ne constitue pas une menace pour l'ordre public et qu'il soit muni, à défaut de titre de séjour en cours de validité, d'un passeport en cours de validité, d'un visa ou, s'il en est dispensé, d'un document établissant son lien familial. L'autorité consulaire lui délivre gratuitement et dans les meilleurs délais le visa requis sur justification de son lien familial et qu'aux termes de l'article R. 121-2 : Il est accordé aux ressortissants mentionnés au premier alinéa de l'article L. 121-1 et à l'article L. 121-3 qui ne disposent pas des documents d'entrée prévus à l'article R. 121-1 tous les moyens raisonnables leur permettant de se les procurer dans un délai raisonnable ou de faire confirmer ou prouver par d'autres moyens leur qualité de bénéficiaires du droit de circuler et de séjourner librement en France, avant de procéder à leur refoulement ;
S'agissant de la décision de refus de délivrance d'un titre de séjour :
Considérant, en premier lieu, qu'il résulte des dispositions précitées de l'article R. 121-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que le membre de la famille d'un citoyen de l'Union européenne séjournant régulièrement en France ne peut obtenir un titre de séjour que s'il dispose d'un visa en cours de validité, sauf s'il est ressortissant d'un Etat dont les nationaux sont dispensés de visa ; que Mme X, si elle était mariée avec un citoyen de l'Union européenne séjournant régulièrement en France, n'était pas, en tant que camerounaise, dispensée de visa et ne disposait pas d'un visa en cours de validité à la date de la décision litigieuse ; que l'administration n'était pas tenue, avant de refuser de lui délivrer un titre de séjour, de la faire bénéficier des dispositions de l'article R. 121-2 du même code dès lors qu'il résulte des termes mêmes de cet article qu'il ne s'applique qu'aux mesures de refoulement ;
Considérant, en deuxième lieu, que les époux X se sont mariés le 28 juillet 2007, moins de quatre mois avant la décision refusant de délivrer à Mme X un titre de séjour et que Mme X était entrée en France le 27 décembre 2006, six mois avant son mariage ; que, dans ces conditions, la décision de refus de titre de séjour ne porte pas au droit au respect de sa vie familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vues desquels elle a été prise, nonobstant la circonstance que l'intéressé était enceinte de deux jumeaux, et ne méconnaît pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'il ne résulte pas des circonstances de l'espèce que la décision serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation de Mme X ;
Considérant, en troisième lieu, que le moyen tiré des risques encourus par Mme X en cas de voyage en avion et de retour au Cameroun du fait de sa grossesse gémellaire présentant un risque de pathologie est inopérant à l'encontre de la décision de refus de titre de séjour qui ne constitue pas une mesure d'éloignement ; qu'il n'y a pas lieu d'ordonner sur ce point l'expertise médicale sollicitée par les requérants ;
S'agissant des décisions portant obligation de quitter le territoire français et désignant le pays de destination :
Considérant qu'il est constant qu'avant de prendre la décision d'obliger Mme X à quitter le territoire français et de désigner le pays de destination le préfet de police n'a pas offert à l'intéressée la faculté prévue par l'article R. 121-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que ces décisions sont par suite entachées d'illégalité ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. et Mme X sont seulement fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande en tant qu'elle tendait à l'annulation des décisions par lesquelles le préfet de police a obligé Mme X à quitter le territoire français et a désigné le pays de destination ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les conclusions des requérants tendant à ce que la cour enjoigne au préfet de police de délivrer un titre de séjour à Mme X ne peuvent qu'être rejetées ; qu'il y a lieu, en revanche, d'enjoindre au préfet de police de réexaminer la situation de Mme X dans un délai d'un mois à compter la notification du présent arrêt et de délivrer à Mme X dans cette attente une autorisation provisoire de séjour, sans qu'il soit besoin d'assortir cette injonction d'une astreinte ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce de mettre à la charge de l'Etat la somme de 500 euros sur le fondement des dispositions précitées du code de justice administrative ;
D E C I D E :
Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Paris du 12 mars 2008 est annulé en tant qu'il a rejeté les conclusions tendant à l'annulation des décisions du préfet de police du 12 décembre 2007 obligeant Mme X à quitter le territoire français et fixant le pays de destination.
Article 2 : Les décisions du préfet de police du 12 décembre 2007 obligeant Mme X à quitter le territoire français et fixant le pays de destination sont annulées.
Article 3 : Il est enjoint au préfet de police de réexaminer la situation de Mme X dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt et de lui délivrer dans l'attente une autorisation provisoire de séjour. Le préfet de police tiendra le greffe de la cour (service de l'exécution) immédiatement informé des dispositions prises pour répondre à cette injonction.
Article 4 : L'Etat versera à M. et Mme X une somme de 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
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N° 08PA01903