Vu la requête, enregistrée le 12 décembre 2008, présentée par le PREFET DU VAL- DE-MARNE ; le PREFET DU VAL-DE-MARNE demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0805804/7 du 15 octobre 2008 par lequel le Tribunal administratif de Melun a, d'une part, annulé sa décision par laquelle il a implicitement refusé de délivrer à Mme Safaa épouse Boukitab une carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale , lui a fait obligation de quitter le territoire français et fixé le pays à destination duquel elle pourra être reconduite et, d'autre part, lui a enjoint de délivrer à Mme épouse Boukitab une carte de séjour temporaire ;
2°) de l'autoriser à procéder au retrait de la carte de séjour délivrée à Mme épouse Boukitab en exécution du jugement attaqué ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 1er décembre 2009 :
- le rapport de M. Rousset, rapporteur,
- les conclusions de Mme Descours-Gatin, rapporteur public ;
- et les observations de Me Flamen Baum, pour Mme épouse Boukitab ;
Considérant que le PREFET DU VAL-DE-MARNE fait appel du jugement du 15 octobre 2008 par lequel le Tribunal administratif de Melun a, d'une part, annulé sa décision par laquelle il a implicitement refusé de délivrer à Mme épouse Boukitab une carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale , lui a fait obligation de quitter le territoire français et fixé le pays à destination duquel elle pourra être reconduite et, d'autre part, lui a enjoint de délivrer à Mme épouse Boukitab une carte de séjour temporaire ;
Sur la régularité du jugement :
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a annulé les décisions par lesquelles le PREFET DU VAL-DE-MARNE a implicitement fait obligation à Mme épouse Boukitab de quitter le territoire français et a implicitement fixé le pays à destination duquel elle pourra être reconduite ; que de telles décisions, qui ne peuvent naître implicitement, sont matériellement inexistantes ; qu'il s'ensuit que le jugement attaqué doit être annulé en tant qu'il a annulé les deux décisions implicites précitées ;
Considérant que Mme épouse Boukitab n'ayant pas, dans sa demande devant le tribunal, mentionné l'existence de décisions implicites du PREFET DU VAL-DE-MARNE lui faisant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays à destination duquel elle pourra être reconduite ni conclut à leur annulation, les premiers juges ont statué au-delà des conclusions de la demande et ainsi entaché leur jugement d'irrégularité ; qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande tendant à l'annulation de la décision du préfet refusant implicitement à Mme épouse Boukitab un titre de séjour ;
Sur la légalité de la décision implicite de refus de séjour :
Sans qu'il soit besoin d'examiner les fins de non-recevoir opposées par le PREFET DU VAL-DE-MARNE ;
Considérant en premier lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1°) Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2°) Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme épouse Boukitab est entrée en France en 2004 pour poursuivre ses études ; que des cartes de séjour temporaire portant la mention étudiant lui ont été délivrées et régulièrement renouvelées jusqu'au 12 janvier 2008 ; que si le 4 avril 2008 elle a présenté une nouvelle demande de titre de séjour, sur le fondement de l'article L. 313-11 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, justifiée par la nécessité de soutenir sa mère résidant régulièrement en France et qui souffre depuis 1989 d'une grave maladie hématologique, il ne ressort pas des pièces du dossier que cette dernière aurait engagé des démarches en vue de bénéficier de l'assistance appropriée à sa situation médicale et sociale auprès des services spécialisés et se serait vu opposer un refus ; qu'ainsi, Mme épouse Boukitab n'établit pas le caractère indispensable de sa présence en France auprès de sa mère ; qu'enfin il est constant que la requérante n'est pas dépourvue d'attaches familiales au Maroc, pays où résidaient, à la date de la décision contestée son mari et son père et où elle a elle-même vécu jusqu'à l'âge de 22 ans ; qu'il s'ensuit que Mme n'est pas fondée à soutenir que la décision attaquée n'a pas apporté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale et méconnu ainsi les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée familiale est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée ;
Considérant qu'il résulte de ces dispositions, que la carte de séjour temporaire mention vie privée et familiale est uniquement délivrée à l'étranger lui-même malade et non à l'accompagnant de ce dernier ; que, dès lors, Mme épouse Boukitab qui, a déposé le 4 avril 2008 une demande de titre de séjour en qualité d'accompagnant d'étranger malade, ne saurait se prévaloir utilement des dispositions de l'article L. 313-11 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile pour contester la décision implicite de refus qui lui a été opposée le 4 août 2008 ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le PREFET DU VAL-DE-MARNE est fondé à demander le rejet de la demande présentée par Mme épouse Boukitab devant le tribunal administratif ; qu'en revanche le PREFET DU VAL-DE-MARNE, qui a le pouvoir de procéder au retrait ou à l'abrogation des actes qu'il a édictés, n'est pas recevable à demander à la cour de l'autoriser à retirer la carte de séjour qu'il a délivrée à Mme épouse Boukitab sur injonction du Tribunal administratif de Melun ; que ses conclusions en ce sens doivent par suite être rejetées ; que l'exécution du présent arrêt n'implique pas qu'il soit enjoint au PREFET DU VAL-DE-MARNE de délivrer à Mme épouse Boukitab un récépissé de demande de titre de séjour ; qu'enfin, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante, verse à Mme épouse Boukitab la somme demandée par celle-ci au titre des frais exposés dans la présente instance et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Melun du 15 octobre 2008 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par Mme épouse Boukitab devant le Tribunal administratif de Melun et ses conclusions tendant à ce que la cour fasse injonction au préfet de lui délivrer un récépissé de demande de titre de séjour et mette à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête du PREFET DU VAL-DE-MARNE est rejeté.
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N° 08PA06111