Vu la requête, enregistrée le 16 janvier 2010, présentée pour M. Bouhadjar A, demeurant ..., par Me Boudjelti ; M. A demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0919115/8 en date du 8 décembre 2009 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet des Hauts-de-Seine en date du 3 décembre 2009 ordonnant sa reconduite à la frontière ;
2°) d'annuler ledit arrêté pour excès de pouvoir ;
3°) d'enjoindre au préfet des Hauts-de-Seine de lui délivrer un titre de séjour portant la mention vie privée et familiale sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative à verser à son conseil, Me Boudjelti, en application des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991 ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu le code de justice administrative ;
Vu la décision du 1er septembre 2010 par laquelle le président de la Cour a désigné M.Couvert-Castéra, magistrat, pour se prononcer notamment sur les appels dirigés contre les décisions juridictionnelles rendues en application de l'article L. 512-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Après avoir au cours de l'audience publique du 26 novembre 2010, présenté son rapport et entendu :
- les conclusions de Mme Larere, rapporteur public ;
- et les observations orales de Me Karim Ouelhadj, substituant Me Boudjelti, pour
M. A ;
Sur les conclusions à fin d'annulation :
Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête :
Considérant qu'aux termes du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : L'autorité administrative compétente peut, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : / 1° Si l'étranger ne peut justifier être entré régulièrement en France, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité ; (...) ;
Considérant que M. A soutient qu'il est entré régulièrement en France le
9 décembre 2000 sous couvert d'un visa qu'il ne peut produire du fait qu'il a remis son passeport le 30 octobre 2003 aux services de la préfecture de police, ainsi que l'atteste le récépissé qui lui a été remis à cette occasion ; que ces allégations n'ont pas été contredites par le préfet des
Hauts-de-Seine, qui n'a pas produit de mémoire en défense ; qu'invité par lettre du 18 octobre 2010 à produire une photocopie du passeport de M. A, valable du 17 avril 2000 au
16 avril 2005, remis contre récépissé à la préfecture de police le 30 octobre 2003, le préfet des Hauts-de-Seine n'a pas produit ce document ; que, dans ces conditions, l'entrée régulière en France de M.A doit être regardée comme établie ; que, par suite, le préfet des
Hauts-de-Seine ne pouvait légalement ordonner la reconduite à la frontière de l'intéressé sur le fondement des dispositions du 1° de l'article L. 511-1-II du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que M. A n'entrait dans le champ d'application d'aucun des autres cas envisagés par le II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile permettant au préfet d'ordonner la reconduite d'un étranger à la frontière ; que l'arrêté de reconduite à la frontière pris par le préfet des Hauts-de-Seine à l'encontre de M. A, le 3 décembre 2009, est, dès lors, dépourvu de base légale ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 3 décembre 2009 ordonnant sa reconduite à la frontière ;
Sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. ;
Considérant que le présent arrêt prononce l'annulation pour excès de pouvoir d'un arrêté ordonnant la reconduite à la frontière de M. A et non pas d'une décision refusant de délivrer à celui-ci une carte de séjour temporaire ; qu'il y lieu, par suite, de rejeter les conclusions de M. A tendant à ce qu'il soit enjoint au préfet des Hauts-de-Seine, sous astreinte, de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale ; qu'il incombe seulement au préfet des Hauts-de-Seine, en application de l'article L. 512-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, de munir M.A d'une autorisation provisoire de séjour jusqu'à ce que l'autorité administrative ait à nouveau statué sur son cas ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :
Considérant que M. A a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce et sous réserve que Me Boudjelti renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de l'Etat la somme de
1 000 euros ;
D E C I D E :
Article 1er : Le jugement n° 0919115/8 du 8 décembre 2009 du magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Paris et l'arrêté du préfet des Hauts-de-Seine en date du 3 décembre 2009 ordonnant la reconduite à la frontière de M. A sont annulés.
Article 2 : L'Etat versera à Me Boudjelti une somme de 1 000 euros en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve qu'il renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. A est rejeté.