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23/03/2011 | FRANCE | N°10PA03477

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, Juge des reconduites à la frontière, 23 mars 2011, 10PA03477


Vu la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés les 9 juillet 2010 et 4 mars 2011, présentée pour M. Sukhjinder A, ..., par Me Boamah ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 1004071/9 du 11 juin 2010 par laquelle la présidente du Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de Seine-et-Marne du 8 juin 2010 décidant sa reconduite à la frontière ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir ledit arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer une carte de séjour temporaire da

ns le délai de quinze jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte...

Vu la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés les 9 juillet 2010 et 4 mars 2011, présentée pour M. Sukhjinder A, ..., par Me Boamah ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 1004071/9 du 11 juin 2010 par laquelle la présidente du Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de Seine-et-Marne du 8 juin 2010 décidant sa reconduite à la frontière ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir ledit arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer une carte de séjour temporaire dans le délai de quinze jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour ;

4°) à défaut d'enjoindre au préfet de réexaminer sa situation administrative et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans le délai de quinze jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du 1er décembre 2010 par laquelle le président de la Cour a désigné M. Magnard, magistrat, pour se prononcer notamment sur les appels dirigés contre les décisions juridictionnelles rendues en application de l'article L. 512-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir au cours de l'audience publique du 9 mars 2011, présenté son rapport et entendu :

- les conclusions de M. Egloff, rapporteur public,

- et les observations de Me Boamah, pour M. A ;

Considérant que M. A demande à la Cour d'annuler l'ordonnance du 11 juin 2010 par laquelle la présidente du Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de Seine-et-Marne du 8 juin 2010 décidant sa reconduite à la frontière ;

Sur la régularité de l'ordonnance attaquée :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 512-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : L'étranger qui fait l'objet d'un arrêté de reconduite à la frontière peut, dans les quarante-huit heures suivant sa notification par voie administrative, demander l'annulation de cet arrêté au président du tribunal administratif (...) ; que par ailleurs, aux termes de l'article R. 776-2-1 du code de justice administrative : Le président du tribunal administratif ou le magistrat qu'il délègue peut, par ordonnance : (...) 3° rejeter les recours entachés d'une irrecevabilité manifeste non susceptible d'être couverte en cours d'instance ;

Considérant que le premier juge a rejeté la demande qui lui était soumise au motif que l'arrêté attaqué du préfet de Seine-et-Marne a été notifié à l'intéressé le 8 juin 2010 à 15h35 et que la demande de M. A tendant à l'annulation de cet arrêté n'a été enregistrée au greffe du tribunal administratif que le 10 juin 2010 à 15h42, soit après l'expiration du délai de

quarante-huit heures fixé par les dispositions susmentionnées ; que toutefois le journal d'émission du télécopieur appartenant au conseil du requérant et produit au dossier fait état non seulement de ce que la demande en cause a été envoyée par télécopie à 15h30, mais également de ce que la transmission de la télécopie a nécessité plus de 7 minutes, ce dernier fait étant d'ailleurs confirmé par les mentions portées sur ladite demande par le télécopieur du greffe du tribunal ; que compte tenu de cette durée de transmission ainsi que d'une différence possible de quelques minutes dans le réglage des appareils de télécopie, la demande de M. A doit être regardée comme ayant été adressée en temps utile au greffe du tribunal ; que, par suite, c'est à tort que la présidente du Tribunal administratif de Melun a rejeté cette demande comme tardive ; qu'il y a lieu en conséquence d'annuler l'ordonnance attaquée, d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. A ;

Sur les conclusions aux fins d'annulation de l'arrêté attaqué :

Considérant en premier lieu que l'arrêté attaqué comporte les considérations de droit et de fait sur lesquels il se fonde ; qu'il est par suite suffisamment motivé ;

Considérant en deuxième lieu qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1°) Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2°) Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ; que selon l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ... dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ;

Considérant que M. A, ressortissant indien est arrivé en France en août 2009, à l'âge de 17 ans ; qu'il fait valoir qu'il a fait l'objet d'un placement à l'aide sociale à l'enfance par décision du juge des enfants de Bobigny avant de bénéficier, à compter de sa majorité, d'une prise en charge financière et éducative dans le cadre d'un contrat jeune majeur , que ses parents sont décédés, qu'il n'a plus d'attaches dans son pays d'origine et qu'enfin, il suit des études sérieuses qui témoignent de son intégration en France où il a noué des relations amicales ; qu'il ressort, toutefois, des pièces du dossier qu'à la date à laquelle l'arrêté attaqué, M. A résidait en France depuis moins de deux ans ; que s'il a suivi des cours de français et de mathématiques et effectué un stage en entreprise, il n'a débuté une formation professionnelle que postérieurement à l'arrêté attaqué ; que s'il fait valoir que ses parents sont décédés, il n'apporte au dossier aucun élément permettant d'étayer cette affirmation, n'établit en tout état de cause pas être dépourvu d'attaches dans son pays d'origine, où il a vécu jusqu'à l'âge de 17 ans, et ne démontre pas être dans l'impossibilité de poursuivre sa vie d'adulte dans ce pays ; qu'il ne se prévaut d'aucune attache familiale en France ; qu'il suit de là que l'arrêté attaqué n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue duquel il a été pris ; qu'il n'a donc méconnu ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que pour les mêmes motifs, il ne saurait être regardé comme entaché d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de M. A ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêté attaqué ;

Sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte :

Considérant que le présent arrêt n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions de M. A tendant à ce qu'il soit fait injonction au préfet de police de réexaminer sa situation administrative et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ne peuvent qu'être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme que M. A demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : L'ordonnance n° 1004071/9 du 11 juin 2010 de la présidente du Tribunal administratif de Melun est annulée.

Article 2 : La demande présentée par M. A devant le Tribunal administratif de Melun et le surplus de ses conclusions devant la Cour sont rejetées.

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N° 10PA03477


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : Juge des reconduites à la frontière
Numéro d'arrêt : 10PA03477
Date de la décision : 23/03/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Franck MAGNARD
Rapporteur public ?: M. EGLOFF
Avocat(s) : SCP MC GRANJON - Y. BILLET

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2011-03-23;10pa03477 ?
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