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31/03/2011 | FRANCE | N°08PA04874

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 8ème chambre, 31 mars 2011, 08PA04874


Vu la requête, enregistrée le 22 septembre 2008, présentée pour la SOCIETE COFINDEX ayant pour siège social 92-98 boulevard Victor Hugo à Clichy (92110), la SOCIETE BIO CP, ayant pour siège social 1A rue Velpeau à Antony (92160), le LABORATOIRE SAINT MARTIN, ayant pour siège social, 18 rue des Rocquemonts à Caen (14000), Mme Pascale A demeurant ..., M. Xavier B, demeurant ..., par Me Bigot, la SOCIETE COFINDEX et autres demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0414968-0415194-0502270 en date du 15 juillet 2008 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejet

leurs demandes tendant, d'une part, à l'annulation de la mise en ...

Vu la requête, enregistrée le 22 septembre 2008, présentée pour la SOCIETE COFINDEX ayant pour siège social 92-98 boulevard Victor Hugo à Clichy (92110), la SOCIETE BIO CP, ayant pour siège social 1A rue Velpeau à Antony (92160), le LABORATOIRE SAINT MARTIN, ayant pour siège social, 18 rue des Rocquemonts à Caen (14000), Mme Pascale A demeurant ..., M. Xavier B, demeurant ..., par Me Bigot, la SOCIETE COFINDEX et autres demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0414968-0415194-0502270 en date du 15 juillet 2008 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté leurs demandes tendant, d'une part, à l'annulation de la mise en demeure du 18 mai 2004 adressée par le président du conseil central de la section G de l'Ordre national des pharmaciens aux directeurs de la société d'exercice libéral Biogam de régulariser la situation du capital de leur société ; d'autre part, à l'annulation de la mise en demeure du 25 mai 2004 adressée par le président du conseil central de la section G de l'Ordre national des pharmaciens aux directeurs de la société d'exercice libéral Bio CP de régulariser la situation du capital de leur société, et enfin à la condamnation de l'Ordre national des pharmaciens à verser à la SOCIETE COFINDEX la somme de 63 000 000 euros assortie des intérêts en réparation du préjudice causé par les mises en demeure précitées ;

2°) de faire droit à leur demande de première instance et d'annuler les mises en demeure susvisées ;

3°) subsidiairement, de surseoir à statuer et saisir la Cour de justice de l'union européenne sur renvoi préjudiciel en interprétation des articles 43 et 56 du traité ;

4°) de condamner l'Ordre national des pharmaciens à verser à la SOCIETE COFINDEX la somme de 63 500 000 euros assortie des intérêts au taux légal à compter du 18 octobre 2004 ;

5°) d'ordonner la capitalisation des intérêts ;

6°) de condamner l'Ordre national des pharmaciens à verser à la SOCIETE COFINDEX et autres la somme de 30 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

.....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la Constitution notamment son article 61-1 ;

Vu le Traité instituant la Communauté européenne ;

Vu le Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ;

Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel, notamment ses articles 23-1 à 23-12 ;

Vu la loi organique n° 2009-1523 du 10 décembre 2009 relative à l'application de l'article 61-1 de la Constitution ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu la loi n° 90-1258 du 31 décembre 1990 relative à l'exercice sous forme de sociétés des professions libérales soumises à un statut législatif ou réglementaire ou dont le titre est protégé et aux sociétés de participation financières de professions libérales ;

Vu le décret n° 92-545 du 17 juin 1992 relatif aux sociétés d'exercice libéral de directeurs et directeurs adjoints de laboratoires d'analyses et de biologie médicale ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 14 mars 2011 :

- le rapport de Mme Amat-Clot, rapporteur,

- les conclusions de Mme Seulin, rapporteur public,

- les observations de Me Scanvic, représentant de la SOCIETE COFINDEX et autres, et de Me Cordier, représentant l'Ordre national des pharmaciens,

- et après avoir pris connaissance de la note en délibéré présentée pour l'Ordre national des pharmaciens par Me Guillou et de celle présentée pour la SOCIETE COFINDEX et autres par Me Bigot ;

Considérant que la SOCIETE COFINDEX détient 25% du capital social des sociétés d'exercice libéral Biogam et BIO CP exploitant des laboratoires d'analyses de biologie médicale ; que par lettres en date des 18 mai 2004 et 25 mai 2004, le président du conseil central de la section G de l'Ordre national des pharmaciens a mis en demeure les directeurs des sociétés Biogam et BIO CP de mettre en conformité dans un délai d'un mois la situation de ces sociétés avec les dispositions de l'article 12 du décret du 17 juin 1992 ; que la SOCIETE COFINDEX et autres relèvent appel du jugement en date du 15 juillet 2008 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande tendant à l'annulation des mises en demeure précitées ainsi que la demande de la SOCIETE COFINDEX tendant à ce que l'Ordre national des pharmaciens soit condamné à l'indemniser des préjudices causés par ces mises en demeure ;

Sur la demande de transmission d'une question prioritaire de constitutionnalité :

Considérant qu'aux termes de l'article 61-1 de la Constitution : Lorsque, à l'occasion d'une instance en cours devant une juridiction, il est soutenu qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés que la Constitution garantit, le Conseil constitutionnel peut être saisi de cette question sur renvoi du Conseil d'État ou de la Cour de cassation qui se prononce dans un délai déterminé. Une loi organique détermine les conditions d'application du présent article ;

Considérant qu'aux termes de l'article 23-1 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel, modifiée par la loi organique susvisée du 10 décembre 2009 relative à l'application de l'article 61-1 de la Constitution : Devant les juridictions relevant du Conseil d'Etat... le moyen tiré de ce qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution est, à peine d'irrecevabilité, présenté dans un écrit distinct et motivé. Un tel moyen peut être soulevé pour la première fois en cause d'appel. Il ne peut être relevé d'office. ; qu'aux termes de l'article 23-2 de la même ordonnance : La juridiction statue sans délai par une décision motivée sur la transmission de la question prioritaire de constitutionnalité au Conseil d'Etat ou à la Cour de cassation. Il est procédé à cette transmission si les conditions suivantes sont remplies : 1° La disposition contestée est applicable au litige ou à la procédure, ou constitue le fondement des poursuites ; 2° Elle n'a pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances ; 3° La question n'est pas dépourvue de caractère sérieux. En tout état de cause, la juridiction doit, lorsqu'elle est saisie de moyens contestant la conformité d'une disposition législative, d'une part, aux droits et libertés garantis par la Constitution et, d'autre part, aux engagements internationaux de la France, se prononcer par priorité sur la transmission de la question de constitutionnalité au Conseil d'Etat ... ;

Considérant que les articles 5, 5-1 et 6 de la loi du 31 décembre 1990 susvisée ont pour objet d'imposer la détention de plus de la moitié du capital social des sociétés d'exercice libéral par des professionnels exerçant au sein de la société, prévoient des exceptions à ces règles tant pour certaines personnes que, s'agissant des professions médicales, pour le montant du capital détenu lequel ne peut excéder un quart du montant total et déterminent la qualité de certaines personnes physiques ou morales autorisées à détenir le reliquat du capital tout en renvoyant à un décret en Conseil d'Etat le soin de compléter la liste desdites personnes ; que le litige soulevé par la SOCIETE COFINDEX et autres a trait à l'application, non des articles précités, mais de l'article 7 de la loi du 31 décembre 1990 qui dispose que : Des décrets en Conseil d'Etat, propres à chaque profession, pourront interdire la détention, directe ou indirecte, de parts ou d'actions représentant tout ou partie du capital social non détenu par des personnes visées au premier alinéa ou aux 1° à 4° de l'article 5, à des catégories de personnes physiques ou morales déterminées, lorsqu'il apparaîtrait que cette détention serait de nature à mettre en péril l'exercice de la ou des professions concernées dans le respect de l'indépendance de ses membres et de leurs règles déontologiques propres. Les dispositions des articles 5 et 6 autorisant la détention d'une part de capital social par des personnes n'exerçant pas au sein de la société ne peuvent bénéficier aux personnes faisant l'objet d'une interdiction d'exercice de la profession ou de l'une des professions dont l'exercice constitue l'objet de la société et sur le fondement duquel a été édicté l'article 12 du décret du 17 juin 1992 dont la section G du conseil de l'ordre national des pharmaciens a fait application à la SOCIETE COFINDEX et autres ; que, les dispositions contestées au regard de la Constitution ne sont par conséquent pas applicables au présent litige ; qu'ainsi, en vertu des dispositions précitées du 1° de l'article 23-2 de l'ordonnance du 7 novembre 1958, la demande de transmission au Conseil d'Etat, à fin de saisine du Conseil constitutionnel, de la question de la constitutionnalité des articles 5, 5-1 et 6 de la loi du 31 décembre 1990 doit être rejetée ;

Sur la recevabilité des conclusions de la société d'exercice libéral LABORATOIRE SAINT MARTIN et de M. B :

Considérant qu'en vertu des principes généraux de la procédure, tels qu'ils sont rappelés au premier alinéa de l'article R. 811-1 du code de justice administrative aux termes duquel Toute partie présente dans une instance devant le tribunal administratif ou qui y a été régulièrement appelée, alors même qu'elle n'aurait produit aucune défense, peut interjeter appel contre toute décision juridictionnelle rendue dans cette instance (...) , le droit de former appel est ouvert aux personnes qui ont été parties à l'instance sur laquelle la décision qu'elles attaquent a statué ; qu'il est constant que la société LABORATOIRE SAINT MARTIN et M. B n'étaient pas les auteurs de l'une des requêtes sur lesquelles le Tribunal administratif de Paris s'est prononcé par le jugement attaqué ; que, par suite, ils n'ont pas qualité pour interjeter appel dudit jugement ;

Sur la régularité du jugement :

Considérant, en premier lieu, qu'aucune disposition législative ou règlementaire ni aucun principe général de procédure n'imposait aux premiers juges, avant de statuer, d'informer les parties, par la communication d'un moyen soulevé d'office, qu'ils étaient susceptibles d'écarter le moyen tiré de la méconnaissance du droit communautaire comme étant inopérant ;

Considérant, en second lieu, que si la SOCIETE COFINDEX et autres soutiennent que le jugement attaqué a omis de statuer sur le moyen tiré de ce que les mises en demeure étaient illégales en tant qu'elles contenaient un paragraphe demandant à leurs destinataires d'attester sur l'honneur que les titres de leurs sociétés ne faisaient l'objet d'aucun démembrement, il ressort toutefois des pièces du dossier, et notamment des écritures de première instance, que la SOCIETE COFINDEX et autres n'ont pas fait valoir un tel moyen dans le cadre des instances enregistrées sous les n° 0414968, 0415194 et 0502270 au Tribunal administratif de Paris ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SOCIETE COFINDEX et autres ne sont pas fondés à soutenir que le jugement attaqué est entaché d'irrégularité ;

Sur les conclusions à fin d'annulation des mises en demeure :

Sans qu'il soit besoin de statuer sur les fins de non recevoir ;

Considérant, en premier lieu, que les mises en demeure litigieuses, qui n'ont pas le caractère de sanctions et qui permettent à leurs destinataires de s'expliquer devant l'Ordre national des pharmaciens avant tout engagement éventuel d'une procédure disciplinaire, n'ont pas à être précédées d'une procédure contradictoire en vue de respecter les droits de la défense ; qu'en outre, et en tout état de cause, il ressort des pièces du dossier que par lettres en date du 21 mai 2003, la société mère de la SOCIETE COFINDEX et les directeurs des sociétés de laboratoires d'analyses de biologie médicale ont été invités à faire valoir leurs observations et explications sur les irrégularités qui leur étaient reprochées concernant la détention du capital ; que, d'ailleurs, la SOCIETE COFINDEX a exposé ses explications le 19 juin 2003 ; que, par suite, la SOCIETE COFINDEX et autres ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a écarté le moyen tiré d'un vice de procédure ;

Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 12 du décret du 17 juin 1992 susvisé alors en vigueur et aujourd'hui codifié à l'article R. 6212-83 du code de la santé publique : Dans une société d'exercice libéral visée à l'article 1er du présent décret, la détention directe ou indirecte de parts ou d'actions représentant tout ou partie du capital social non détenu par des personnes visées au premier alinéa ou aux 1° à 4° du deuxième alinéa de l'article 5 de la loi du 31 décembre 1990 susvisé est interdite à toute personne physique ou morale exerçant sous quelque forme que ce soit : a) Soit une autre profession de santé ; b) Soit une activité de fournisseur, distributeur ou fabricant de matériel ou de réactifs d'analyses de biologie médicale. Sont également exclus les entreprises d'assurance et de capitalisation, tous les organismes de prévoyance, de retraite et de protection sociale obligatoires ou facultatifs, ainsi que les établissements de santé, sociaux et médico-sociaux de droit privé. ;

Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article 34 de la Constitution (...) La loi détermine les principes fondamentaux ...du régime de la propriété ; qu'aux termes de l'article 7 de la loi du 31 décembre 1990 susvisée : Des décrets en Conseil d'Etat, propres à chaque profession, pourront interdire la détention, directe ou indirecte, de parts ou d'actions représentant tout ou partie du capital social non détenu par des personnes visées au premier alinéa ou aux 1° à 4° de l'article 5, à des catégories de personnes physiques ou morales déterminées, lorsqu'il apparaîtrait que cette détention serait de nature à mettre en péril l'exercice de la ou des professions concernées dans le respect de l'indépendance de ses membres et de leurs règles déontologiques propres. Les dispositions des articles 5 et 6 autorisant la détention d'une part du capital social par des personnes n'exerçant pas au sein de la société ne peuvent bénéficier aux personnes faisant l'objet d'une interdiction d'exercice de la profession ou de l'une des professions dont l'exercice constitue l'objet de la société. ; qu'ainsi, la SOCIETE COFINDEX et autres ne sont pas fondés à soutenir que les dispositions de l'article 12 du décret du 17 juin 1992, qui sont intervenues en application des dispositions précitées de l'article 7 de la loi du 31 décembre 1990, méconnaissent le champ de compétence du législateur tel que défini par l'article 34 de la Constitution ;

Considérant, d'autre part, que nonobstant la circonstance que le litige ne comporte que des éléments se cantonnant à l'intérieur du seul territoire français, il ne peut être exclu que des sociétés gérant des établissements de santé privés dans d'autres Etats membres puissent souhaiter détenir une partie du capital de sociétés d'exercice libéral de laboratoires de biologie d'analyses médicales françaises ; que par suite, la SOCIETE COFINDEX et autres sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, les premiers juges ont décidé que le moyen tiré de l'inconventionnalité des dispositions de l'article 12 du décret du 17 juin 1992 susvisé au regard du droit communautaire, et notamment des dispositions des articles 43 et suivants et 81 et suivants du Traité instituant la Communauté européenne était sans influence sur la légalité des mises en demeure attaquées au motif de l'absence de tout élément sortant d'un cadre purement national ;

Considérant que la Cour de justice de l'Union européenne, après avoir rappelé dans son arrêt C-171/07 et C-172/07 du 19 mars 2009 que (...) il ressort tant de la jurisprudence de la Cour que de l'article 152, paragraphe 5, CE et du vingt-sixième considérant de la directive 2005/36 que le droit communautaire ne porte pas atteinte à la compétence des États membres pour aménager leurs systèmes de sécurité sociale et pour prendre, en particulier, des dispositions destinées à organiser des services de santé tels que les officines de pharmacie. Toutefois, dans l'exercice de cette compétence, les États membres doivent respecter le droit communautaire, notamment les dispositions du traité relatives aux libertés de circulation, y compris la liberté d'établissement. Lesdites dispositions comportent l'interdiction pour les États membres d'introduire ou de maintenir des restrictions injustifiées à l'exercice de ces libertés dans le domaine des soins de santé .... Dans l'appréciation du respect de cette obligation, il doit être tenu compte du fait que la santé et la vie des personnes occupent le premier rang parmi les biens et intérêts protégés par le traité et qu'il appartient aux États membres de décider du niveau auquel ils entendent assurer la protection de la santé publique et la manière dont ce niveau doit être atteint. Ce niveau pouvant varier d'un État membre à l'autre, il convient de reconnaître aux États membres une marge d'appréciation. (...) Eu égard à la marge d'appréciation laissée aux Etats membres..., un Etat membre peut estimer qu'il existe un risque que les règles législatives visant à assurer l'indépendance professionnelle des pharmaciens soient méconnues dans la pratique, étant donné que l'intérêt d'un non-pharmacien à la réalisation de bénéfices ne serait pas modéré d'une manière équivalente à celui des pharmaciens indépendants et que la subordination de pharmaciens, en tant que salariés, à un exploitant pourrait rendre difficile pour ceux-ci de s'opposer aux instructions données par cet exploitant , a dit pour droit que les articles 43 CE et 48 CE ne s'opposent pas à une réglementation nationale, telle que celle en cause au principal, qui empêche des personnes n'ayant pas la qualité de pharmaciens de détenir et d'exploiter des pharmacies ; que par ailleurs, dans son arrêt C-89/09 du 16 décembre 2010, la Cour de justice de l'Union européenne a jugé que 65. (...) eu égard, d'une part, aux similitudes existant, sous l'angle des risques pour la santé publique, entre le secteur des pharmacies et celui des analyses de biologie médicale et, d'autre part, au fait que, contrairement à ce que soutient la Commission, ces deux secteurs ne peuvent réellement être distingués l'un de l'autre, que ce soit au regard des constats effectués en matière de prescriptions médicales ou des besoins de financement, les principes énoncés dans les arrêts du 19 mai 2009, Commission/Italie, précité, et Apothekerkammer des Saarlandes e.a., précité, relatifs aux restrictions à la détention du capital des pharmacies, apparaissent pleinement transposables à la présente affaire (....) 68. Par conséquent, un État membre peut estimer, dans le cadre de la marge d'appréciation (...) que la détention de plus de 25 % des parts sociales et des droits de vote d'une telle société par des non-biologistes peut représenter un risque pour la santé publique, en particulier pour la qualité des services médicaux (...) 83. La Commission n'a pas démontré que les risques pour l'indépendance de la profession de biologiste puissent être écartés, avec la même efficacité, par des règles d'incompatibilités d'exercice telles que l'interdiction, prévue par la réglementation relative aux laboratoires d'analyses de biologie médicale pour prévenir les conflits d'intérêts, de détenir une participation dans le capital des Selarl exploitant des laboratoires d'analyses de biologie médicale visant des catégories spécifiques de personnes physiques ou morales, notamment celles exerçant une autre profession de santé ou une activité de fournisseur de matériel d'analyses de biologie médicale. En effet, ainsi que l'a relevé M. l'avocat général aux points 178 et 179 de ses conclusions, il s'agit là d'interdictions appropriées à des situations dans lesquelles il convient d'éviter simplement qu'un autre intérêt puisse orienter de manière anormale l'activité d'une Selarl exploitant des laboratoires d'analyses de biologie médicale. En revanche, lesdites interdictions n'apparaissent pas suffisantes lorsqu'il y a lieu de garantir une réelle indépendance des décisions prises par les biologistes, et ce dans tous les cas, même en l'absence d'un conflit d'intérêts déjà formellement identifié comme tel par la réglementation relative aux laboratoires d'analyses de biologie médicale. 87. Dans ces conditions, il n'est pas établi que des mesures moins restrictives permettraient d'assurer, de manière aussi efficace, le niveau de protection de la santé publique recherché. ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que les praticiens qui exercent leur activité dans des laboratoires de biologie d'analyse médicale participent avec l'équipe médicale au diagnostic ainsi qu'aux choix thérapeutiques qui devront être mis en oeuvre ; qu'ainsi compte tenu de la nécessité de protéger leur indépendance dans un but de préserver notamment la qualité des soins, les dispositions de l'article 12 du décret du 17 juin 1992 susvisé, qui ne sont pas générales, dès lors qu'elles n'interdisent la détention de capital qu'à un type précis d'établissements - en raison de leur nature et de leurs missions - dans un type précis de sociétés - les sociétés d'exercice libéral-, et sont proportionnées à l'objectif qu'elles poursuivent ne portent pas, tant au regard du contenu des règles qu'elles édictent que de leur champ d'application, une atteinte à la liberté d'établissement, qui excéderait la marge de manoeuvre reconnue aux Etats membres par la Cour de justice de l'Union européenne, pour assurer la protection de la santé publique ; que, par suite, et sans qu'il soit besoin de saisir la Cour de justice de l'Union européenne d'une question préjudicielle, les appelants ne sont pas fondés à soutenir qu'elles seraient incompatibles avec les dispositions des articles 43 et s. du Traité ;

Considérant que si, aux termes du I de l'article 81 du traité instituant la Communauté européenne, sont incompatibles avec le marché commun et interdits tous accords entre entreprises, toutes décisions d'associations d'entreprises et toutes pratiques concertées, qui sont susceptibles d'affecter le commerce entre les Etats membres et qui ont pour objet ou pour effet d'empêcher, de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence à l'intérieur du marché commun (...) , ces dispositions, telles qu'elles ont été interprétées par la Cour de justice des Communautés européennes, visent uniquement le comportement des entreprises et non les mesures législatives ou réglementaires émanant d'un Etat membre ; qu'il n'en va autrement que lorsqu'un Etat membre, soit impose ou favorise la conclusion d'ententes contraires à l'article 81 ou renforce les effets de telles ententes, soit retire à sa propre réglementation son caractère étatique en déléguant à des opérateurs privés la responsabilité de prendre des décisions d'intervention économique ; que tel n'est ni l'objet, ni l'effet des dispositions de l'article 12 du décret du 17 juin 1992 susvisé ; que, dès lors, la SOCIETE COFINDEX et autres ne sauraient utilement soutenir que ces dispositions seraient incompatibles avec l'article 81 du traité instituant la Communauté européenne et les règles communautaires relatives au droit de la concurrence ;

Considérant, enfin, qu'il est constant que la SOCIETE COFINDEX est détenue à 99, 99 % par la Compagnie générale de santé, laquelle est elle-même détenue à 100% par la société Générale de santé ; que tant la Compagnie générale de santé que la société Générale de santé, par les activités des établissements qu'elles gèrent, doivent être regardées comme des établissements de soins privés pour l'application des dispositions de l'article 12 du décret du 17 juin 1992 ; qu'ainsi, alors même qu'il est également constant que la SOCIETE COFINDEX ne gère pas d'établissements de soins privés, le capital social des sociétés d'exercice libéral Biogam et BIO CP est détenu indirectement par des établissements de soins privés ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SOCIETE COFINDEX et autres ne sont pas fondés à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté leurs conclusions tendant à l'annulation des décisions par lesquelles les directeurs des sociétés d'exercice libéral Biogam et BIO CP ont été mis en demeure de régulariser le capital de leurs sociétés au regard des dispositions de l'article 12 du décret du 17 juin 1992 ;

Sur les conclusions de la SOCIETE COFINDEX à fin d'indemnisation :

Considérant, en premier lieu, que la SOCIETE COFINDEX recherche la responsabilité de l'Ordre national des pharmaciens en raison de l'illégalité dont seraient entachées les mises en demeure litigieuses ; que, toutefois, il résulte de ce qui précède que la SOCIETE COFINDEX n'est pas fondée à soutenir que lesdites mises en demeure sont illégales ;

Considérant, en second lieu, qu'il est constant que les mises en demeure relatives à la régularisation du capital social des sociétés d'exercice libéral Biogam et BIO CP sont fondées sur les dispositions précitées de l'article 12 du décret du 17 juin 1992, lesquelles sont antérieures à la prise de participation de la SOCIETE COFINDEX dans le capital social des sociétés d'exercice libéral Biogam et BIO CP ; que l'Ordre national des pharmaciens soutient sans être utilement contredit que lors de l'inscription au tableau des sociétés il ne connaissait pas la composition du capital de celles-ci ; qu'enfin, et en tout état de cause, compte tenu des dates de la publication du décret du 17 juin 1992 et des prises de participation de la SOCIETE COFINDEX, filiale de la Compagnie générale de santé, dans les sociétés Biogam et BIO CP, la SOCIETE COFINDEX ne pouvait ignorer que celles-ci étaient illégales ; qu'ainsi la SOCIETE COFINDEX n'est pas fondée à soutenir que les principes de sécurité juridique et de confiance légitime auraient été méconnus, ni en tout état de cause, à solliciter l'indemnisation des conséquences dommageables d'une situation à laquelle elle s'est sciemment exposée ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SOCIETE COFINDEX n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Ordre national des pharmaciens à lui verser des dommages et intérêts ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Ordre national des pharmaciens, qui n'est pas la partie perdante en la présente instance, verse à la SOCIETE COFINDEX et autres la somme qu'ils demandent au titres des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu en revanche, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative de mettre à la charge de la SOCIETE COFINDEX une somme de 2 000 euros ; que de même il y a lieu de faire supporter à la SOCIETE BIO CP et à Mme A le versement, chacune, d'une somme de 1 000 euros à l'Ordre national des pharmaciens ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de la SOCIETE COFINDEX, de la SOCIETE BIO CP, de LABORATOIRE SAINT MARTIN, de Mme A et de M. B est rejetée.

Article 2 : La SOCIETE COFINDEX versera à l'Ordre national des pharmaciens une somme de 2 000 (deux mille) euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La SOCIETE BIO CP et Mme A verseront chacune à l'Ordre national des pharmaciens une somme de 1 000 (mille) euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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N° 08PA04874


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 08PA04874
Date de la décision : 31/03/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Communautés européennes et Union européenne - Règles applicables - Liberté de circulation - Libre prestation de services.

Santé publique - Autres établissements à caractère sanitaire - Laboratoires d'analyses de biologie médicale.


Composition du Tribunal
Président : M. ROTH
Rapporteur ?: Mme Nathalie AMAT-CLOT
Rapporteur public ?: Mme SEULIN
Avocat(s) : BIGOT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2011-03-31;08pa04874 ?
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