Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 28 mai 2010, présentée pour M. Willy A, demeurant ..., par Me Afoua-Geay ; M. A demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0907423/7 du 2 février 2010 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet du Val-de-Marne du 18 mai 2009 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français et fixant son pays de destination ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté ;
3°) d'enjoindre au préfet du Val-de-Marne de lui délivrer un titre de séjour dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son avocat de la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve de sa renonciation à la part contributive de l'Etat ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu la convention relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique et son décret d'application n° 91-1266 du 19 décembre 1991 ;
Vu l'arrêté du 18 janvier 2008 relatif à la délivrance, sans opposition de la situation de l'emploi, des autorisations de travail aux étrangers non ressortissants d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse ;
Vu l'arrêté du 18 janvier 2008 relatif à la délivrance, sans opposition de la situation de l'emploi, des autorisations de travail aux ressortissants des Etats de l'Union européenne soumis à des dispositions transitoires ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 22 juin 2011 :
- le rapport de Mme Dhiver, rapporteur,
- les conclusions de M. Egloff, rapporteur public,
- et les observations de Me Afoua-Geay, pour M. A ;
Sur les conclusions à fin d'annulation :
En ce qui concerne la légalité de la décision refusant la délivrance d'un titre de séjour :
Considérant, en premier lieu, que M. A, ressortissant de la République démocratique du Congo, soutient que la motivation de la décision du 18 mai 2009 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour est stéréotypée et ne fait aucune mention des circonstances relatives à sa vie privée et familiale en France ; que, toutefois, cet arrêté, qui vise le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, indique que l'intéressé ne justifie pas de liens privés et familiaux inscrits dans la durée et dans la stabilité sur le territoire français et que sa cellule familiale peut se reconstituer sans dommage en République démocratique du Congo ; que le préfet du Val-de-Marne a ainsi énoncé de façon suffisamment précise et circonstanciée les considérations de droit et de fait sur lesquelles il s'est fondé ; qu'il a suffisamment motivé son arrêté au regard des exigences de la loi susvisée du 11 juillet 1979 ;
Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ; qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ;
Considérant, d'une part, que, pour rejeter la demande de titre de séjour présentée par M. A sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet du Val-de-Marne ne s'est pas borné à relever que l'intéressé résidait irrégulièrement en France, mais a également pris en compte sa situation personnelle et familiale ; qu'ainsi, M. A n'est pas fondé à soutenir que le préfet aurait omis de faire usage du pouvoir d'appréciation dont il dispose ;
Considérant, d'autre part, que M. A fait valoir qu'il est entré en juin 2000 en France et s'y est maintenu de façon continue depuis cette date, que sa fille, née le 23 septembre 1999 en République démocratique du Congo, qui l'a ultérieurement rejoint sur le territoire français, ainsi qu'il ressort des pièces du dossier, est scolarisée en France, que ses deux soeurs sont en situation régulière et qu'il justifie d'une bonne insertion sociale ; que, cependant, s'il indique avoir perdu toute trace de sa compagne restée en République démocratique du Congo, le requérant n'établit pas être dépourvu de toutes attaches dans son pays d'origine, où il a vécu jusqu'à l'âge de 31 ans ; qu'aucune circonstance ne fait obstacle à ce qu'il poursuive sa vie familiale avec sa fille hors de France ; que, dans les circonstances de l'espèce, la décision refusant à M. A la délivrance d'un titre de séjour n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise ; qu'elle n'a, par suite, méconnu ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Considérant, en dernier lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 sur le fondement du troisième alinéa de cet article peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7 (...) ;
Considérant, d'une part, qu'il ressort des pièces du dossier que M. A a sollicité la régularisation de sa situation administrative sur le seul fondement du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que le préfet du Val-de-Marne, qui a pris en compte la circonstance que M. A joignait à sa demande une promesse d'embauche pour un poste d'électricien, a, faisant usage du pouvoir discrétionnaire qui lui appartient, examiné également cette demande sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'en relevant, dans son arrêté du 18 mai 2009, que l'emploi d'électricien ne figure pas sur la liste des métiers ouverts aux étrangers non ressortissants d'un Etat membre de l'Union européenne annexée à l'arrêté du 18 janvier 2008, le préfet a procédé à un examen suffisant de la situation du requérant et n'a pas commis d'erreur de droit ;
Considérant, d'autre part, que M. A fait valoir qu'il justifie d'une promesse d'embauche pour un emploi d'électricien ; que, si ce métier figure sur la liste annexée à l'arrêté du 18 janvier 2008 relatif à la délivrance, sans opposition de la situation de l'emploi, des autorisations de travail aux ressortissants des Etats de l'Union européenne soumis à des dispositions transitoires, il n'est pas au nombre des métiers figurant, pour la région Ile-de-France, sur la liste annexée à l'arrêté du 18 janvier 2008 relatif à la délivrance, sans opposition de la situation de l'emploi, des autorisations de travail aux étrangers non ressortissants d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'espace économique européen ou de la Confédération suisse ; que ces deux arrêtés du 18 janvier 2008 pouvaient légalement établir des listes de métiers pour l'exercice desquels la situation de l'emploi n'est pas opposable qui soient différentes dans leur contenu selon que le demandeur d'emploi est un ressortissant d'un Etat de l'Union européenne soumis à des dispositions transitoires ou un ressortissant d'un Etat tiers, dès lors que cette différence de traitement résulte d'une différence de situation qui est la conséquence nécessaire des traités d'adhésion et des dispositions de droit interne prises pour leur application ; que, l'emploi d'électricien n'étant pas au nombre, ainsi qu'il vient d'être dit, des métiers figurant, pour la région Ile-de-France, sur la liste annexée à l'arrêté susvisé du 18 janvier 2008 relatif aux ressortissants d'un Etat tiers, le préfet a pu, sans commettre d'erreur manifeste d'appréciation, refuser à M. A son admission exceptionnelle au séjour ; qu'en tout état de cause, le requérant ne saurait utilement se prévaloir de la circulaire du 24 novembre 2009, qui est dépourvue de valeur réglementaire ;
En ce qui concerne la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :
Considérant, en premier lieu, qu'il résulte des motifs du présent arrêt, par lequel la Cour rejette la demande d'annulation de la décision de refus de séjour, que M. A n'est pas fondé à soutenir que l'obligation de quitter le territoire français dont le refus de titre a été assorti serait illégale par exception de l'illégalité de cette décision ;
Considérant, en deuxième lieu, que, pour les mêmes motifs que ceux précédemment évoqués, la décision faisant obligation à M. A de quitter le territoire français ne méconnaît pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant, en dernier lieu, qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant : Dans toutes les décisions qui concernent des enfants, qu'elles soient le fait (...) des tribunaux, des autorités administratives (...), l'intérêt supérieur des enfants doit être une considération primordiale ; qu'il résulte de ces stipulations que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ;
Considérant que, si M. A fait valoir que sa fille, scolarisée à la date de l'arrêté attaqué en classe de CE2, a effectué toute sa scolarité en France et y a établi l'ensemble de ses liens affectifs et sociaux, rien ne s'oppose à ce que l'enfant retourne avec son père en République démocratique du Congo et y poursuive ses études ; que, par suite, le moyen tiré de ce que l'arrêté attaqué aurait insuffisamment pris en considération l'intérêt supérieur de cette enfant mineure protégé par les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale susvisée doit être écarté ;
En ce qui concerne la légalité de la décision fixant le pays de destination :
Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que M. A n'a contesté, devant le Tribunal administratif de Paris, la décision fixant le pays de destination que par des moyens de légalité interne ; que, si le requérant invoque devant la Cour le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de cette décision, ce moyen, qui n'est pas d'ordre public et se rattache à la légalité externe de ladite décision, est fondé sur une cause juridique distincte de celle sur laquelle reposaient les moyens soulevés en première instance ; qu'il constitue, dès lors, une demande nouvelle, présentée pour la première fois en appel et est, par suite, irrecevable ;
Considérant, en second lieu, qu'aux termes du dernier alinéa de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : L'étranger (...) qui doit être reconduit à la frontière est éloigné : 1° A destination du pays dont il a la nationalité (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ; que ce dernier texte énonce que Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ;
Considérant que, si M. A soutient qu'en raison de son appartenance à l'ethnie hutu, sa vie serait menacée en cas de retour dans son pays et que plusieurs membres de sa famille y ont fait l'objet de persécutions, il n'apporte aucun commencement de preuve à l'appui de ses allégations ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
Considérant que le présent arrêt, par lequel la Cour rejette les conclusions à fin d'annulation de M. A, n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions de l'intéressé tendant à ce qu'il soit enjoint au préfet du Val-de-Marne de lui délivrer un titre de séjour doivent être rejetées ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'a pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante, verse à M. A la somme qu'il réclame au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. A est rejetée.
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N° 10PA02637