Vu la requête, enregistrée le 7 août 2012, présentée par le préfet de police ; le préfet de police demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1206756/5-3 en date du 4 juillet 2012 par lequel le Tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté en date du 16 mars 2012 refusant de délivrer un titre de séjour à M. A...D..., faisant à celui-ci obligation de quitter le territoire français et fixant son pays de destination et a enjoint à l'administration de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention salarié ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. D...devant le Tribunal administratif de Paris ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu le code de justice administrative ;
Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience, en application de l'article R. 732-1-1 du code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 29 janvier 2013, le rapport de M. Perrier, rapporteur ;
1. Considérant que M.D..., né le 29 juin 1978, de nationalité malienne, qui a déclaré être entré en France le 2 mai 2005, a fait l'objet les 28 septembre et 2 octobre 2009, à la suite d'interpellations pour infraction à la législation sur les étrangers, d'arrêtés de reconduite à la frontière pris respectivement par le préfet de la Seine-Saint-Denis et par le préfet des Yvelines ; qu'il a sollicité le 17 janvier 2011 son admission exceptionnelle au séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par un arrêté du 11 mars 2011, le préfet de police lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire français ; que, par le jugement en date du 9 novembre 2011, le Tribunal administratif de Paris a annulé cet arrêté comme insuffisamment motivé et a enjoint à l'administration de réexaminer sa situation ; qu'à la suite de ce réexamen, par l'arrêté contesté en date du 16 mars 2012, le préfet de police lui a refusé une nouvelle fois le titre de séjour sollicité et lui a fait obligation de quitter le territoire français ; que le préfet de police fait appel du jugement en date du 4 juillet 2012 par lequel le Tribunal administratif de Paris a annulé cet arrêté et a enjoint à l'administration de délivrer à M. D...une carte de séjour temporaire portant la mention salarié ;
Sur les conclusions du préfet de police :
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. / L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans (...) " ;
3. Considérant que, si M. D...fait valoir que, s'agissant de la carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " ou " travailleur temporaire " mentionnée au 1° de l'article L. 313-10, le champ d'application des dispositions précitées n'est pas limité aux cas dans lesquels l'admission exceptionnelle au séjour est sollicitée pour exercer une activité professionnelle salariée dans un métier et une zone géographique caractérisés par des difficultés de recrutement et figurant sur la liste établie sur plan national annexée, en dernier lieu, à l'arrêté des ministres chargés de l'emploi et de l'immigration du 11 août 2011 relatif à la délivrance, sans opposition de la situation de l'emploi, des autorisations de travail aux étrangers non ressortissants d'un État membre de l'Union européenne, d'un autre État parti à l'Espace économique Européen ou de la Confédération suisse, il appartenait, toutefois, en tout état de cause, au préfet de police, ainsi qu'il l'a fait, d'apprécier si l'intéressé justifiait de circonstances humanitaires ou de motifs exceptionnels suffisants entrant dans les prévisions de l'article précité ; que le préfet de police n'a commis à cet égard aucune erreur de droit ;
4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. D...a occupé divers emplois d'intérimaires ou à temps partiel à partir du mois de mai 2006 en qualité de manoeuvre ou de poseur de voies dans le secteur du bâtiment ou en qualité de plongeur dans la restauration, et notamment, pour cette dernière activité, auprès de la société SYM BB qui l'a recruté à temps plein à partir du mois de septembre 2010 en qualité d'employé polyvalent ; qu'il se prévaut de ce dernier emploi et produit à ce titre un formulaire Cerfa de demande d'autorisation de travail en cette qualité signé par un représentant de cette société ; que, toutefois, d'une part, si M. D... fait valoir l'ancienneté de son séjour et de son expérience professionnelle sur le territoire français, il n'établit pas par les pièces versées au dossier la réalité de sa résidence habituelle sur ce territoire ni l'exercice d'une activité professionnelle significative avant le mois de mai 2006 dès lors qu'il se borne à produire, au titre de la période antérieure, une attestation d'emploi en qualité de manutentionnaire pour les mois de juin et septembre 2005 et un bulletin de salaire, dont le caractère probant est au demeurant contestable, du mois de juillet 2005 pour un emploi de " valet de chambre extra " ; que, d'autre part, si M. D...soutient que le métier d'employé polyvalent en restauration serait en tension, il n'allègue pas même que son employeur aurait connu des difficultés à pourvoir cet emploi alors, d'ailleurs, que ce métier ne figure pas sur la liste susmentionnée ;
5. Considérant dès lors que, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce et notamment de la durée insuffisante de la résidence habituelle et de l'activité professionnelle dont il se prévaut, en refusant de régulariser la situation administrative de M. D...au titre de l'admission exceptionnelle au séjour, le préfet de police n'a commis aucune erreur manifeste d'appréciation ; qu'en tout état de cause, l'intéressé ne saurait utilement se prévaloir de la circulaire du 24 novembre 2009 relative à la mise en oeuvre de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, laquelle ne présente aucun caractère réglementaire ;
6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le préfet de police est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris s'est fondé sur le motif tiré de l'erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile pour annuler l'arrêté en date du 16 mars 2012 refusant à M. D...le titre de séjour qu'il avait sollicité, l'obligeant de quitter le territoire français et fixant son pays de destination et pour enjoindre à l'administration de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention salarié ; que, toutefois, il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige, par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M.D... ;
Sur la légalité de l'arrêté du 16 mars 2012 :
7. Considérant, en premier lieu, que l'arrêté contesté a été signé pour le préfet de police par M. B...C..., adjoint au chef du 9ème bureau de la direction de la police générale, qui disposait à cet effet d'une délégation de signature régulière qui lui a été consentie par un arrêté du 24 octobre 2011, publié au recueil des actes administratifs de la préfecture de la région d'Île-de-France, préfecture de Paris et de la préfecture de police du 25 octobre 2011 ; que, dès lors, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte manque en fait ;
8. Considérant, en deuxième lieu, que, contrairement à ce que soutient M. D..., il ressort des pièces du dossier que l'arrêté litigieux comporte l'exposé des motifs de fait et de droit qui en constituent le fondement et que le préfet de police s'est livré à un examen particulier de sa situation personnelle et familiale ; que, dès lors, le moyen tiré de l'insuffisante motivation de l'arrêté contesté du 16 mars 2012 ne peut qu'être écarté ;
9. Considérant que, si M. D...soutient que le préfet de police aurait méconnu l'autorité de chose jugée en ce qu'il aurait adopté la même motivation à l'appui de l'arrêté précité que de son arrêté précédent du 11 mars 2011, de ces deux actes alors que le Tribunal administratif de Paris, par son jugement susmentionné du 9 novembre 2011 avait estimé que la motivation en fait dans cet arrêté était inexistante, il ressort des pièces du dossier que, en tout état de cause, les motivations ne sont pas identiques en ce qui concerne notamment la motivation en fait ; que, dès lors, le moyen ne peut qu'être écarté ;
10. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1°) Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2°) Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; qu'aux termes de l' article L. 313-11 code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile susvisé : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit: (...) / 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 313-21 du code précité : " Pour l'application du 7º de l'article L. 313-11, l'étranger qui invoque la protection due à son droit au respect de la vie privée et familiale en France doit apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux effectifs en France au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine " ;
11. Considérant que, si M. D...fait valoir la vie privée et professionnelle qu'il mène en France dans les conditions susmentionnées, il n'établit pas, ainsi qu'il a été dit, y avoir eu sa résidence habituelle avant l'année 2006 ; qu'il ressort des pièces du dossier qu'il est célibataire, sans enfant, et ne mène aucune vie familiale en France ; qu'il ne saurait être regardé comme dépourvu d'attaches dans son pays d'origine où il a vécu au moins jusqu'à l'âge de 27 ans et où résident notamment sa mère et sa fratrie ; que, dans ces conditions, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, l'arrêté susvisé n'a pas porté au droit de M. D...au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ; que, dès lors, l'arrêté contesté n'a méconnu ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni, en tout état de cause, les dispositions de l'article L. 313-11.7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que les circonstances susmentionnées ne sont pas davantage de nature à faire regarder l'arrêté contesté comme entaché d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressé ;
12. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le préfet de police est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté en date du 16 mars 2012 refusant à M. D...le titre de séjour qu'il avait sollicité, l'obligeant à quitter le territoire français et fixant son pays de destination et a enjoint à l'administration de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention salarié ;
Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte de M.D... :
13. Considérant que le présent arrêt, qui rejette la demande de M.D..., n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte ne peuvent qu'être rejetées ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
14. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'État, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, une quelconque somme à M. D...au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
Article 1er : Le jugement susvisé du Tribunal administratif de Paris du 4 juillet 2012 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par M. D...devant le Tribunal administratif de Paris ainsi que ses conclusions d'appel incident sont rejetées.
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N° 12PA03444