Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés le 7 et le 19 décembre 2012, présentés par le préfet de police ; le préfet de police demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1211556/2-2 en date du 29 octobre 2012 par lequel le Tribunal administratif de Paris, sur la demande de MmeC..., a annulé son arrêté en date du 27 mars 2012 en tant qu'il fixe l'Ethiopie comme pays de destination de la mesure d'éloignement prescrite par le même arrêté portant par ailleurs refus de séjour, et lui a enjoint de réexaminer la situation de l'intéressée dans un délai de deux mois ;
2°) de rejeter la demande de Mme B...présentée devant le Tribunal administratif de Paris ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
Vu le code de justice administrative ;
Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 7 novembre 2013 :
- le rapport de M. Bergeret, premier conseiller,
- et les observations de Me A...pour MmeB... ;
1. Considérant que par arrêté en date du 27 mars 2012, le préfet de police a rejeté la demande de titre de séjour formée par MmeB..., ressortissante éthiopienne née le 7 février 1982, sur le fondement du 8° de l'article L. 314-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé l'Ethiopie comme pays de renvoi ; que par jugement en date du 29 octobre 2012, le Tribunal administratif de Paris a, en son article 1, annulé cet arrêté en tant qu'il fixe l'Ethiopie comme pays de destination, pour méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et, en son article 2, a enjoint au préfet de police de réexaminer la situation de l'intéressée dans un délai de deux mois ; que par sa requête susvisée, le préfet de police relève appel de ce jugement ;
Sur les conclusions du préfet de police aux fins d'annulation :
2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 " ; qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants " ;
3. Considérant que Mme B...soutient qu'elle craint en cas de retour en Ethiopie d'être persécutée et exposée à des menaces graves en raison de son engagement politique en faveur de la Coalition pour l'Unité et la Démocratie (CUD) pendant les élections législatives de mai 2005 au cours desquelles elle a été arrêtée et emprisonnée pour avoir distribué des tracts dénonçant des irrégularités et des fraudes ; qu'elle a été frappée et soumise à des actes de torture pendant sa détention d'une durée de huit mois ; que son père, militant du même parti, a été arrêté à la même époque et est décédé en prison peu après ; qu'elle produit à l'appui de ses allégations une carte de membre de la coalition CUD, délivrée en décembre 2004, l'original d'un avis de recherche la concernant émis le 31 mars 2009, dont seule une copie avait été produite devant les juridictions spécialisées lors de l'examen de sa demande d'asile, des attestations en sa faveur rédigées par la présidente du parti UDJ, qui faisait partie en 2005 de la coalition CUD, et par une présidente d'une organisation de défense des femmes éthiopiennes, et le témoignage circonstancié d'un compatriote admis en France au statut de réfugié, confirmant les dires de l'intéressée quant à ses activités militantes et aux persécutions subies en conséquence ; qu'elle verse également au dossier un certificat médical en date du 11 juillet 2012, qu'elle n'aurait pensé à faire établir, tardivement, que sur le conseil de son avocate, décrivant les importantes cicatrices qu'elle porte au niveau des épaules, dont le préfet de police ne soutient pas qu'elles ne seraient pas compatibles avec la nature des tortures dont elle allègue avoir été victime lors de sa détention en 2005 ; qu'au vu de l'ensemble des éléments ainsi apportés, qui forment un ensemble cohérent, dont certains n'avaient pas été produits lors de la procédure d'examen de la demande d'asile par les juridictions spécialisées, Mme B...doit être regardée comme établissant suffisamment qu'elle encourrait du fait de son activité militante passée des risques réels et sérieux en cas de retour forcé dans son pays ; que le préfet de police n'est donc pas fondé à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont annulé son arrêté en tant qu'il fixe l'Ethiopie comme pays de destination de la mesure d'éloignement et lui ont enjoint de réexaminer la situation de l'intéressée dans les conditions qu'ils ont fixées ;
Sur les conclusions présentées sur le fondement des dispositions de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :
4. Considérant que Mme B...a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Degrâces, avocat de MmeB..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État, de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me Degrâces de la somme de 1 400 euros ;
D E C I D E :
Article 1er : La requête du préfet de police est rejetée.
Article 2 : L'Etat versera à Me Degrâces, avocat de MmeB..., une somme de 1 400 euros en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que Me Degrâces renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.
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N° 12PA04795