Vu la requête, enregistrée le 6 décembre 2012, présentée pour la SCP Brouard Daude, liquidateur judiciaire de la SARL Dynamis promotion, dont le siège est 34 rue Sainte-Anne à Paris (75001) par la SCP Bale et Koudoyor ; la SCP Brouard Daude demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0901279/6 du 28 septembre 2012 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la commune d'Orly à indemniser la SARL Dynamis promotion du préjudice résultant de la décision illégale du 19 avril 2004 par laquelle le maire de la commune a sursis à statuer sur sa demande de permis de construire sur un terrain sis 33/35 avenue de l'aérodrome à Orly, sauf en ce que ce jugement rejette la fin de non-recevoir opposée par la commune d'Orly ;
2°) de condamner la commune d'Orly à lui verser une indemnité totale de 2 993 573,60 euros en réparation des préjudices financiers et moraux subis par la SARL Dynamis promotion ;
3°) de mettre à la charge de la commune d'Orly une somme de 10 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 21 novembre 2013 :
- le rapport de Mme Renaudin, premier conseiller,
- les conclusions de Mme Bonneau-Mathelot, rapporteur public,
- et les observations de MeA..., pour la commune d'Orly ;
1. Considérant que la SARL Dynamis promotion a sollicité le 30 juin 2003 un permis de construire pour un ensemble immobilier comprenant des appartements et un local commercial, sur un terrain sis 33/35 avenue de l'aérodrome à Orly ; que, par décision du 19 avril 2004, le maire d'Orly a, dans le cadre de la prise en considération par le conseil municipal d'une opération d'aménagement du vieil Orly, sursis à statuer sur cette demande ; que la SARL Dynamis promotion a contesté cette décision devant le Tribunal administratif de Melun, qui par jugement du 29 novembre 2007, l'a annulée pour défaut de motivation ; que sur le fondement de l'illégalité fautive de cette décision, la SARL Dynamis promotion a recherché la responsabilité de la commune d'Orly et saisi à nouveau le Tribunal administratif de Melun d'une demande tendant à la condamnation de cette dernière à l'indemniser des préjudices résultant de cette décision illégale ; que par jugement du 28 septembre 2012, dont la SCP Brouard Daude, liquidateur judiciaire de la SARL Dynamis promotion, relève régulièrement appel, ce tribunal a rejeté sa demande ; que la commune d'Orly relève appel du jugement en ce qu'il a rejeté la fin de non-recevoir qu'elle avait soulevée en première instance ;
Sur la fin de non-recevoir opposée par la commune d'Orly :
2. Considérant que l'autorité de la chose jugée attachée au jugement du 27 novembre 2007 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté, comme n'étant pas dirigées contre une décision préalable, de précédentes conclusions indemnitaires présentées par la SARL Dynamis promotion contre la commune d'Orly, ne faisait pas obstacle à ce que ladite société saisisse de nouveau le tribunal administratif de conclusions valablement dirigées contre une décision préalable de cette commune, répondant à sa demande du 22 octobre 2008, qui ne présentaient dès lors pas la même cause ; que la commune d'Orly n'est pas davantage fondée à soutenir que la réitération de la demande de la SARL Dynamis promotion n'a donné lieu qu'à une décision confirmative de sa part, insusceptible de recours, dès lors qu'elle n'allègue pas avoir statué antérieurement à sa décision du 23 décembre 2008 sur la demande indemnitaire de l'intéressée ;
Sur la responsabilité :
3. Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article L. 111-10 du code de l'urbanisme : " Lorsque des travaux, des constructions ou des installations sont susceptibles de compromettre ou de rendre plus onéreuse l'exécution de travaux publics, le sursis à statuer peut être opposé, dans les conditions définies à l'article L. 111-8, dès lors que la mise à l'étude d'un projet de travaux publics a été prise en considération par l'autorité compétente et que les terrains affectés par ce projet ont été délimités. L'autorité compétente peut surseoir à statuer, dans les mêmes conditions, sur les demandes d'autorisation concernant des travaux, constructions ou installations susceptibles de compromettre ou de rendre plus onéreuse la réalisation d'une opération d'aménagement qui a été prise en considération par le conseil municipal (...) " ;
4. Considérant que, si l'illégalité externe qui entache une décision de sursis à statuer opposée à une demande de permis de construire constitue une faute de nature à engager la responsabilité de la collectivité, une telle faute ne peut donner lieu à réparation du préjudice subi par le pétitionnaire lorsque, les circonstances de l'espèce étant de nature à justifier légalement la décision, le préjudice allégué ne peut être regardé comme la conséquence directe du vice dont cette décision est entachée ;
5. Considérant que pour rejeter la requête de la SARL Dynamis promotion, les premiers juges ont considéré que le maire aurait pris la même décision de sursis à statuer sur la demande de permis de construire de la société Dynamis Promotion, s'il avait suffisamment motivé celle-ci, compte tenu de ce que dans le cadre de l'opération d'aménagement du Vieil Orly prise en considération par la délibération du 19 décembre 2002 du conseil municipal, la commune avait envisagé publiquement le 27 avril 2004, comme l'avait relevé le jugement du 29 novembre 2007 du Tribunal administratif de Melun, d'implanter un centre médical sur le terrain d'assiette des constructions projetées ;
6. Considérant, toutefois, que la SCP Brouard Daude fait valoir que le projet d'implantation d'un centre médical n'a été évoqué publiquement que le 27 avril 2004, soit postérieurement à l'intervention, le 19 avril 2004, de la décision de sursis à statuer, ainsi que l'a jugé le Tribunal administratif de Melun dans son jugement du 27 novembre 2007 ; que la commune ne conteste pas que ce projet n'a été évoqué publiquement qu'à la réunion du comité de pilotage chargé de la direction des études du vieil Orly, le 27 avril 2004, puis au comité de suivi du 15 juin 2004 ; que si elle soutient que ce projet aurait été discuté antérieurement à la décision contestée, soit selon ses allégations, au début de l'année 2004, elle ne verse pour toute pièce au dossier, que le procès-verbal du 15 juin 2004 du comité de suivi de l'étude d'aménagement du centre ancien, dans lequel, à la question posée sur le maintien du projet de transfert du centre médical sur la parcelle du 33/35 avenue de l'aérodrome tel qu'annoncé lors du dernier comité de suivi, le maire répond que celui-ci est confirmé car répondant aux besoins de la population ; que cette seule mention n'est pas de nature à apporter la preuve que ce projet aurait été présenté et fait l'objet d'un débat avant le 27 avril 2004 ; que dans ces conditions, alors que l'existence de l'étude d'un transfert du centre médical antérieurement à la décision litigieuse n'est pas avérée et que, par ailleurs, il ne résulte pas de l'instruction que le projet de permis de construire aurait été contraire aux orientations d'aménagement du centre ancien arrêtées par la délibération du 19 décembre 2002, la décision du maire de surseoir à statuer sur la demande de permis de construire de la SARL Dynamis promotion n'est pas légalement justifiée ;
7. Considérant qu'en l'espèce l'illégalité de la décision du 19 avril 2004 portant sursis à statuer, annulée par le jugement du 29 novembre 2007 du Tribunal administratif de Melun, constitue une faute de nature à engager la responsabilité de la commune d'Orly à l'égard de la SARL Dynamis promotion ;
8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SCP Brouard Daude est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la commune d'Orly à réparer ses préjudices résultant de la décision illégale du 19 avril 2004 par laquelle le maire de la commune d'Orly a sursis à statuer sur sa demande de permis de construire ;
9. Considérant qu'il appartient toutefois à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par la SCP Brouard Daude et la SARL Dynamis promotion tant devant elle que devant le Tribunal administratif de Melun ;
Sur les préjudices de la SARL Dynamis promotion :
10. Considérant que, comme le soutient la commune d'Orly, la SARL Dynamis promotion pouvait en vertu des dispositions de l'article L. 111-8 du code de l'urbanisme, confirmer sa demande de permis de construire à l'expiration du délai de deux ans de validité du sursis à statuer, afin que le maire de la commune prenne une décision définitive sur la délivrance de l'autorisation de construire ; qu'en effet la mesure de sursis à statuer, qui présente un caractère provisoire, ne privait pas en elle-même la société requérante de la possibilité d'obtenir un permis de construire pour l'opération envisagée, même si celle-ci était différée de deux ans ; qu'il résulte d'ailleurs de l'instruction que la SARL Dynamis promotion ne s'est désengagée de ses projets de construction sur la parcelle du 33/35 avenue de l'aérodrome à Orly qu'en juillet 2006, à l'issue du délai de validité du sursis à statuer ; que si elle verse au dossier une lettre du 4 mai 2006 par laquelle elle soutient avoir entendu confirmer sa demande de permis de construire, elle n'apporte nullement la preuve de l'envoi effectif de ce courrier au maire d'Orly, ce dernier affirmant au demeurant ne l'avoir jamais reçu ; que dans ces conditions la SARL Dynamis promotion n'est pas fondée à soutenir que c'est en raison de la décision illégale de sursis à statuer prise par le maire le 19 avril 2004 qu'elle n'a pu réaliser l'opération projetée ; que, dès lors, le préjudice qu'elle invoque quant à son manque à gagner sur une opération immobilière ne peut qu'être rejeté ; que si elle fait également valoir, s'agissant du local commercial qui était prévu dans l'opération, que le client potentiel a renoncé à ce projet compte tenu de la décision de sursis à statuer, cette circonstance ne faisait pas obstacle à ce qu'elle puisse commercialiser cette surface après obtention d'un permis de construire ; que de même si elle demande l'indemnisation des frais d'acquisition de la parcelle, de dépôts des permis de démolir et de construire, de travaux de démolition, ceux-ci ne peuvent être considérés comme ayant été exposés en pure perte du fait de la décision de sursis à statuer ;
11. Considérant que si la SARL Dynamis promotion prétend qu'elle a été contrainte de vendre la parcelle du 37 avenue de l'aérodrome à un prix dérisoire, pour lequel elle demande l'indemnisation du manque à gagner correspondant, elle n'établit nullement que cette cession présente un lien de causalité avec la décision de sursis à statuer qui concerne une parcelle voisine et alors au surplus qu'elle n'a réalisé cette vente qu'en juillet 2006 ; que ce chef de préjudice ne peut être retenu ;
12. Considérant que la SARL Dynamis promotion demande l'indemnisation de la perte de loyers des surfaces commerciales existantes dans le bâtiment qui était implanté sur la parcelle et destiné à être démoli pour permettre la réalisation du nouvel ensemble immobilier ; qu'un local était exploité à usage de café et que la SARL Dynamis promotion avait versé à son gérant une indemnité d'éviction en vue de la résiliation du bail dans l'optique de l'opération future ; que toutefois, comme le fait valoir la commune d'Orly, en procédant de manière prématurée à cette éviction, alors qu'elle n'avait pas encore obtenu le permis de construire et n'avait aucune assurance de pouvoir mener à bien l'opération escomptée, la SARL Dynamis promotion a commis une imprudence exonératoire de toute responsabilité de la commune ; que ce chef de préjudice, ainsi que celui portant sur les frais de procédure exposés pour obtenir cette éviction, doivent donc être rejetés ; que s'agissant d'un autre local qui était inoccupé, si la SARL Dynamis promotion fait valoir qu'elle a perdu les loyers y afférents, qu'elle estime à un total de 18 000 euros, elle ne justifie de ce montant par aucune pièce au dossier ; qu'elle ne peut dans ces conditions être indemnisée de ce chef de préjudice ;
13. Considérant que si la SARL Dynamis promotion a exposé des frais de publicité et de reprographie pour le lancement de son opération immobilière, cette action de communication était également prématurée en l'absence d'obtention du permis de construire ; qu'ainsi les frais supportés par cette dernière sont imputables à sa seule imprudence et non à la décision de sursis à statuer ;
14. Considérant que si la SARL Dynamis promotion demande l'indemnisation de frais d'assurance pour un montant de 250 euros, outre que la facture mentionne un bâtiment en cours de construction, ce qui ne correspond pas à la réalité, cette demande n'est pas justifiée dans son montant ;
15. Considérant que si la SARL Dynamis promotion demande l'indemnisation de divers frais tels que des frais de correspondance, des frais d'huissiers, d'une part, pour l'établissement d'un constat du 31 juillet 2003, antérieur à la décision de sursis à statuer et, d'autre part, pour le constat de ce que les travaux de démolition du bâtiment existant n'avaient pas encore eu lieu en juillet 2008, ainsi que des frais de procédure d'un conseil juridique, elle ne justifie nullement qu'ils présenteraient un lien de causalité avec la décision illégale de sursis à statuer ;
16. Considérant que la SARL Dynamis promotion fait valoir qu'elle a subi un préjudice moral résultant de la décision de sursis à statuer illégale ; que si elle n'établit pas que cette décision résulterait des agissements du maire cherchant à l'empêcher de réaliser cette opération, en revanche, un autre promoteur ayant obtenu en 2009 un permis de construire pour une opération comprenant également des logements et une surface commerciale, il y a lieu d'indemniser à ce titre, dans les circonstances de l'espèce, les conséquences dommageables du sursis à statuer qui a été opposé à tort à la SARL Dynamis promotion ; que ce chef de préjudice sera indemnisé par l'allocation d'une somme de 4 000 euros ;
17. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la commune d'Orly doit être condamnée à verser à la SCP Brouard Daude, liquidateur judiciaire de la SARL Dynamis promotion la somme de 4 000 euros en réparation des préjudices subis par cette dernière en raison de la décision illégale du 19 avril 2004 portant sursis à statuer sur sa demande de permis de construire ;
Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
18. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la SCP Brouard Daude, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que la commune d'Orly demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu en revanche de mettre à la charge de la commune d'Orly une somme de 2 000 euros à verser à la SCP Brouard Daude sur le fondement des mêmes dispositions ;
D E C I D E :
Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Melun du 28 septembre 2012 est annulé.
Article 2: La commune d'Orly est condamnée à verser à la SCP Brouard Daude, liquidateur judiciaire de la SARL Dynamis promotion, une indemnité de 4 000 euros.
Article 3 : La commune d'Orly versera à la SCP Brouard Daude une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus de la requête présentée par la SARL Dynamis promotion devant le Tribunal administratif de Melun et des conclusions de la SCP Brouard Daude devant la Cour sont rejetés.
Article 5 : Les conclusions de la commune d'Orly tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
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N° 12PA04749