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20/12/2013 | FRANCE | N°10PA03914

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 8ème chambre, 20 décembre 2013, 10PA03914


Vu la requête, enregistrée le 2 août 2010, présentée pour la société Beuralia, dont le siège est au 13 bis rue de l'Aubrac à Paris (75012), par Me Plottin ;

la société Beuralia demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0811586/7-1 du 24 juin 2010 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de deux décisions de l'Office national interprofessionnel du lait et des produits laitiers (ONILAIT) du 19 janvier 2004 réduisant le montant de l'aide attendue pour les offres 110233 et 114041 ainsi que de deux décisions du

17 décembre 2007 lui réclamant le reversement de la garantie d'adjudication p...

Vu la requête, enregistrée le 2 août 2010, présentée pour la société Beuralia, dont le siège est au 13 bis rue de l'Aubrac à Paris (75012), par Me Plottin ;

la société Beuralia demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0811586/7-1 du 24 juin 2010 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de deux décisions de l'Office national interprofessionnel du lait et des produits laitiers (ONILAIT) du 19 janvier 2004 réduisant le montant de l'aide attendue pour les offres 110233 et 114041 ainsi que de deux décisions du 17 décembre 2007 lui réclamant le reversement de la garantie d'adjudication pour lesdites offres ;

2°) d'annuler lesdites décisions ;

3°) de mettre à la charge de l'Etablissement national des produits de l'agriculture et de la mer (FranceAgriMer), venant aux droits de l'ONIEP, une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

.........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le règlement (CEE) n° 2988/95 du Conseil du 18 décembre 1995 relatif à la protection des intérêts financiers des Communautés européennes ;

Vu le règlement (CEE) n° 2220/85 de la Commission du 22 juillet 1985 fixant les modalités communes d'application du régime des garanties pour les produits agricoles, remplacé dans ses dispositions essentielles par le règlement (CE) n° 1898/2005 de la Commission du 9 novembre 2005 ;

Vu le règlement (CE) n° 2571/97 de la Commission du 15 décembre 1997 relatif à la vente à prix réduit de beurre et à l'octroi d'une aide à la crème, au beurre et au beurre concentré destinés à la fabrication de produits de pâtisserie, de glaces alimentaires et autres produits alimentaires ;

Vu le code civil ;

Vu le code rural ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 12 novembre 2013 :

- le rapport de M Sorin, premier conseiller,

- les conclusions de M. Ladreyt, rapporteur public,

- et les observations de Me Plottin, avocat de la société Beuralia et de Me Alibert, avocat de FranceAgriMer ;

1. Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'Office national interprofessionnel du lait et des produits laitiers (ONILAIT) a, par deux décisions du 19 janvier 2004, réduit le montant de l'aide accordée à la société Sodiaal Industrie, aux droits de laquelle intervient la société Beuralia, pour deux offres de fabrication de beurre tracé en raison de la non-conformité desdites offres ; que l'Office national interprofessionnel de l'élevage et de ses productions (ONIEP), venant aux droits de l'ONILAIT, a ensuite, par deux décisions du 17 décembre 2007 demandé à la société le reversement de la garantie d'adjudication constituée par la société pour chacune de ces offres pour les quantités non produites ; que la société Beuralia relève régulièrement appel du jugement du 24 juin 2010 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande d'annulation desdites décisions ;

Sur le bien fondé du jugement attaqué et sans qu'il soit besoin de statuer sur les fins de non-recevoir opposées par l'établissement national des produits de l'agriculture et de la mer :

2. Considérant, en premier lieu, que le règlement (CE) n° 2571/97 du 15 décembre 1997 a institué une aide financière à la crème, au beurre et au beurre concentré destinés à la fabrication de produits de pâtisserie, de glaces alimentaires et autres produits alimentaires ; qu'aux termes de l'article 3 de ce règlement : " Le soumissionnaire ne peut participer à l'adjudication que s'il s'engage par écrit à incorporer ou à faire incorporer le beurre ou le beurre concentré exclusivement, sans préjudice le cas échéant des produits intermédiaires visés à l'article 8, dans les produits finaux visés à l'article 4 ou, en ce qui concerne la crème, directement et uniquement dans les produits finaux visés à l'article 4 paragraphe 1 formule B, selon l'une des voies de mise en oeuvre suivantes : a) soit, moyennant l'addition des traceurs visés à l'article 6 paragraphe 1 : i) après transformation du beurre provenant de l'intervention en beurre concentré, conformément à l'article 5 ou bien ii) en l'état " ; qu'aux termes de l'article 6 de ce même règlement : " 1. En cas d'application de l'article 3 point a) et s'il s'agit de beurre concentré au cours de sa fabrication ou immédiatement après et dans le même établissement, sont additionnées, à l'exclusion de tout autre produit et de façon à en assurer une répartition homogène, les quantités minimales prescrites de : a) produits figurant à l'annexe II, si le beurre ou le beurre concentré est destiné à être incorporé dans des produits correspondant à la formule A ; b) produits figurant à l'annexe III, si le beurre ou le beurre concentré est destiné à être incorporé dans des produits correspondant à la formule B ; c) produits figurant à l'annexe IV s'il s'agit de la crème. 2. Au cas où, notamment en raison d'une répartition non homogène, le dosage pour chacun des produits visés à l'annexe II points I à V, annexe III points I à III et annexe IV point 1 se révèle inférieur de plus de 5 % mais de moins de 30 % aux quantités minimales prescrites, la garantie de transformation visée à l'article 18 paragraphe 2 est acquise, ou l'aide est réduite, à concurrence de 1,5 % de son montant par point en dessous des quantités minimales prescrites " ; qu'aux termes de l'article 18 de ce règlement : " 2. La garantie de transformation est destinée à assurer l'exécution des exigences principales concernant : a) soit, s'agissant du beurre provenant de l'intervention : i) la transformation du beurre en beurre concentré conformément à l'article 5 et l'addition éventuelle des traceurs ou l'addition au beurre des traceurs et ii) l'incorporation du beurre ou du beurre concentré additionnés ou non des traceurs dans les produits finaux ; b) soit, s'agissant des produits visés à l'article 1er paragraphe 2 et en cas d'application de l'article 3 point a), l'incorporation dans les produits finaux " ; qu'aux termes de l'article 22 de ce même règlement : " 1. Une garantie est acquise en totalité pour la quantité pour laquelle une exigence principale n'a pas été respectée. 2. Une exigence principale est considérée comme n'ayant pas été respectée si la preuve correspondante n'est pas produite dans le délai imparti pour la production de la preuve, sauf cas de force majeure " ; qu'aux termes de l'article 23 de ce règlement : " Afin d'assurer le respect des dispositions du présent règlement, les Etats membres prennent notamment les mesures de contrôle visées aux paragraphes 2 à 8 dont le coût est à la charge de l'Etat membre. (...) Les contrôles comportent la prise d'échantillons et portent notamment sur les conditions de fabrication, la quantité, la composition du produit obtenu en fonction du beurre ou de la crème mis en oeuvre (...) " ; qu'enfin aux termes de l'annexe II de ce règlement, peuvent être utilisés comme " traceurs ", pour permettre le contrôle de l'incorporation du beurre dans les produits finaux : par tonne de beurre concentré ou de beurre, " (...) 11 kg de triglycérides de l'acide énanthique (...) d'un degré de pureté d'au moins 95 % (...) " ;

3. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 1er du règlement (CEE) n° 2988/95 du Conseil du 18 décembre 1995 relatif à la protection des intérêts financiers des Communautés européennes : " 1. Aux fins de la protection des intérêts financiers des Communautés européennes, est adoptée une réglementation générale relative à des contrôles homogènes et à des mesures et des sanctions administratives portant sur des irrégularités au regard du droit communautaire. / 2. Est constitutive d'une irrégularité toute violation d'une disposition du droit communautaire résultant d'un acte ou d'une omission d'un opérateur économique qui a ou aurait pour effet de porter préjudice au budget général des Communautés ou à des budgets gérés par celles-ci, soit par la diminution ou la suppression de recettes provenant des ressources propres perçues directement pour le compte des Communautés, soit par une dépense indue " ; qu'en vertu de l'article 4 de ce règlement : " 1. Toute irrégularité entraîne, en règle générale, le retrait de l'avantage indûment obtenu : - par l'obligation de verser les montants dus ou de rembourser les montants indûment perçus, / - par la perte totale ou partielle de la garantie constituée à l'appui de la demande d'un avantage octroyé ou lors de la perception d'une avance. / 2. L'application des mesures visées au paragraphe 1 est limitée au retrait de l'avantage obtenu augmenté, si cela est prévu, d'intérêts qui peuvent être déterminés de façon forfaitaire. / 3. Les actes pour lesquels il est établi qu'ils ont pour but d'obtenir un avantage contraire aux objectifs du droit communautaire applicable en l'espèce, en créant artificiellement les conditions requises pour l'obtention de cet avantage, ont pour conséquence, selon le cas, soit la non-obtention de l'avantage, soit son retrait. / 4. Les mesures prévues par le présent article ne sont pas considérées comme des sanctions " ;

4. Considérant, en troisième lieu, qu'aucune disposition de la réglementation communautaire en vigueur au moment des contrôles litigieux ne définissait précisément la méthodologie des contrôles relatifs à la vérification de la teneur du beurre en acide énanthique, ni les modalités d'interprétation des résultats des analyses effectuées pour mesurer l'incorporation de ce " traceur " chimique ; que si aucune réglementation nationale n'était non plus applicable en la matière, l'Office avait pour mission, en vertu des dispositions du 3° de l'article L. 621-3 du code rural, dans sa rédaction alors en vigueur, " d'appliquer les mesures communautaires " ; qu'à ce titre, il était notamment chargé de mettre en oeuvre les contrôles définis par l'article 23 du règlement communautaire précité et d'appliquer les mesures prévues par l'article 6 du même règlement en cas de méconnaissance des obligations relatives à l'incorporation des " traceurs " ;

5. Considérant, qu'en application des dispositions précitées, l'irrégularité constituée par la révélation lors d'un contrôle opéré par l'ONIEP, d'une teneur en produit de traçage inférieure aux quantités minimales prescrites s'analyse comme une violation de l'article 3 du règlement

(CE) n° 2571/97 susvisé qui, en application de l'article 6 du même règlement est de nature à justifier l'appréhension de la garantie de transformation constituée par la société adjudicatrice ;

6. Considérant, d'une part, qu'ainsi que l'a jugé la Cour de justice des Communautés européennes dans son arrêt du 30 novembre 2000 HMIL Ltd (C-436/98), les autorités compétentes des Etats membres peuvent, pour assurer le respect des dispositions d'un règlement de l'Union européenne instituant un régime d'aides en matière agricole, procéder à des contrôles par sondages et à une extrapolation appropriée des résultats de ces contrôles, en conformité avec la loi des probabilités ; que le recours à une telle extrapolation est a fortiori justifié lorsque les contrôles révèlent une politique délibérée et suivie d'infractions à la réglementation communautaire ; qu'enfin, il appartient aux juridictions compétentes des Etats membres, lorsqu'elles sont saisies d'un litige sur ce point, de vérifier en l'espèce, d'une part, si les contrôles étaient suffisants et fiables et, d'autre part, si la méthode d'extrapolation était fondée ;

7. Considérant, d'autre part, que l'organisme national d'intervention est en principe fondé, lorsqu'un contrôle par sondage réalisé conformément à l'article 23 du règlement (CE) n° 2571/97 a révélé la non-conformité d'un échantillon de beurre, de beurre concentré ou de crème prélevé sur un lot de matière grasse tracée correspondant à une offre donnée, à demander à l'adjudicataire concerné la restitution de l'intégralité de l'aide communautaire qui lui a été versée au titre de cette offre de fabrication, alors même que le processus de fabrication aurait été scindé en plusieurs " déclarations de fabrication " ; que, toutefois, dans l'hypothèse où une offre a fait l'objet de plusieurs " déclarations de fabrication ", l'extrapolation des résultats d'un contrôle sur un échantillon à l'ensemble de l'offre doit être jugée irrégulière si l'adjudicataire apporte tous éléments de nature à établir que les résultats des analyses effectuées sur un échantillon de matière grasse prélevé sur la première " déclaration de fabrication " ne pouvaient être appliqués aux autres déclarations de fabrication de la même offre et que l'organisme d'intervention n'apporte pas, aux éléments ainsi fournis par l'adjudicataire, une réponse suffisante, permettant de justifier du bien-fondé de sa méthode ;

8. Considérant que la circonstance que deux déclarations de fabrication aient été réalisées à des dates différentes ne suffit pas, à elle seule, à établir que les résultats des analyses effectuées sur un échantillon prélevé sur une déclaration de fabrication d'une offre donnée ne pouvaient être appliqués aux autres déclarations de fabrication de la même offre ; que la société n'apporte par ailleurs aucun élément de nature à établir que les opérations de fabrication litigieuses auraient respecté les normes techniques imposées ; que dans ces conditions,

la société Beuralia n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le Tribunal administratif de Paris a jugé l'extrapolation régulière ;

9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société Beuralia n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation des deux décisions de l'ONILAIT du 19 janvier 2004 réduisant le montant de l'aide attendue pour les offres 110233 et 114041 ainsi que des deux décisions du 17 décembre 2007 lui réclamant le versement de la garantie d'adjudication pour lesdites offres ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

10. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de FranceAgriMer, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, une somme au titre des frais exposés par

la société Beuralia et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, en revanche, en application de ces dispositions, de mettre à la charge de la société Beuralia une somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par FranceAgriMer et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de la société Beuralia est rejetée.

Article 2 : La société Beuralia versera à l'Etablissement national des produits de l'agriculture et de la mer une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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N° 10PA03914


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 10PA03914
Date de la décision : 20/12/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme MILLE
Rapporteur ?: M. Julien SORIN
Rapporteur public ?: M. LADREYT
Avocat(s) : PLOTTIN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2013-12-20;10pa03914 ?
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