Vu la requête, enregistrée le 8 février 2013, présentée pour la Mutuelle familiale, dont le siège social est 52 rue d'Hauteville à Paris (75487), par Me Bach ; la Mutuelle familiale demande à la Cour :
1°) d'infirmer le jugement n° 1120824/3-3 du Tribunal administratif de Paris du 11 décembre 2012 en ce qu'il a annulé la décision d'autorisation de licenciement de Mme B... C...prononcée par l'inspecteur du travail le 26 septembre 2011 ;
2°) de confirmer la décision d'autorisation de licenciement du 26 septembre 2011 ;
3°) de condamner Mme C...à lui payer la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code du travail ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 6 février 2014 :
- le rapport de M. Polizzi, président assesseur,
- les conclusions de Mme Macaud, rapporteur public,
- et les observations de Me Bach, avocat de la Mutuelle familiale ;
1. Considérant que Mme B...C...a été embauchée le 21 septembre 2000 pour exercer des fonctions de direction au sein de l'Union des Mutuelles de France - Jura ; qu'elle est devenue directrice du site du Pôle Franche-Comté à compter du 1er janvier 2008 au sein de la Mutuelle familiale, en charge notamment de l'organisation administrative et de la gestion de l'organisme et du personnel ; qu'à la suite de plusieurs plaintes émises notamment par cinq de ses collaboratrices quant à son comportement et aux dégradations des conditions de travail en résultant, une procédure de licenciement a été engagée à son encontre après réalisation d'enquête interne ; qu'elle a été convoquée à un entretien préalable le 10 août 2011 ; qu'en raison du mandat de conseiller prud'homal détenu par MmeC..., M. A..., directeur général de la Mutuelle familiale, a saisi, par lettre du 22 août 2011, l'inspecteur du travail d'une demande d'autorisation de licenciement, pour insuffisance professionnelle ; qu'à la suite d'une enquête contradictoire, l'inspecteur du travail a accordé cette autorisation par décision du 26 septembre 2011 en raison " d'une insuffisance professionnelle caractérisée et d'une véritable incompétence d'encadrement " ; que la Mutuelle familiale relève appel du jugement du 11 décembre 2012 par lequel le Tribunal administratif de Paris a annulé cette décision au motif qu'elle a été prise sur le fondement d'une procédure irrégulière ;
2. Considérant, d'une part, qu'en vertu des dispositions du code du travail, les salariés légalement investis de fonctions représentatives bénéficient, dans l'intérêt de l'ensemble des salariés qu'ils représentent, d'une protection exceptionnelle ; que, lorsque le licenciement de l'un de ces salariés est envisagé, ce licenciement ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées ou l'appartenance syndicale de l'intéressé ; que, dans le cas où la demande de licenciement est motivée par l'insuffisance professionnelle, il appartient à l'inspecteur du travail et le cas échéant au ministre, de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si cette insuffisance est telle qu'elle justifie le licenciement, compte tenu de l'ensemble des règles applicables au contrat de travail de l'intéressé, des caractéristiques de l'emploi exercé à la date à laquelle elle est constatée, des exigences propres à l'exécution normale du mandat dont il est investi, et de la possibilité d'assurer son reclassement dans l'entreprise ; qu'en outre, pour refuser l'autorisation sollicitée, l'autorité administrative a la faculté de retenir des motifs d'intérêt général relevant de son pouvoir d'appréciation de l'opportunité, sous réserve qu'une atteinte excessive ne soit pas portée à l'un ou l'autre des intérêts en présence ;
3. Considérant, d'autre part, qu'à l'effet de concourir à la mise en oeuvre de la protection ainsi instituée, l'article R. 2421-4 du code du travail dispose que l'inspecteur du travail saisi d'une demande d'autorisation de licenciement d'un salarié protégé " procède à une enquête contradictoire au cours de laquelle le salarié peut, sur sa demande, se faire assister d'un représentant de son syndicat. " ;
4. Considérant que le caractère contradictoire de l'enquête menée conformément à ces dispositions impose à l'autorité administrative, saisie d'une demande d'autorisation de licenciement d'un salarié protégé fondée sur un motif d'insuffisance professionnelle, de mettre à même le salarié de prendre connaissance de l'ensemble des pièces mises en avant par l'employeur afin d'établir la réalité de cette insuffisance ; que, toutefois, lorsque la communication de ces éléments serait de nature à porter gravement préjudice aux personnes qui les ont communiqués, l'inspecteur du travail doit se limiter à informer le salarié protégé, de façon suffisamment circonstanciée, de leur teneur ; qu'il ressort des pièces du dossier que, pour autoriser le licenciement de Mme C..., l'inspecteur du travail s'est fondé sur les témoignages établis par des collaboratrices de cette dernière, dénonçant des difficultés croissantes de travail avec l'intéressée, " des conditions de travail (...) qui ne sont plus supportables ", une " ambiance déplorable, génératrice de malaise général et de stress quotidien ", un " climat de suspicion et de dénigrement " ainsi qu'une " communication impossible " ;
5. Considérant, en premier lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que la communication de ces éléments aurait été de nature à porter gravement préjudice aux personnes qui les ont communiqués ;
6. Considérant, en second lieu, que le caractère contradictoire de l'enquête préalable à la délivrance d'une autorisation administrative de licenciement, menée conformément aux dispositions précitées du code du travail, implique que le salarié protégé soit mis à même de prendre connaissance de l'ensemble des pièces produites par l'employeur à l'appui de sa demande, sans que la circonstance que le salarié est susceptible de connaître le contenu de certaines de ces pièces puisse exonérer l'inspecteur du travail de cette obligation ; que, par suite, la circonstance que Mme C...ait lu ces documents pendant l'entretien préalable à son licenciement est sans influence dès lors qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que l'inspecteur du travail ait, au cours de l'enquête contradictoire, mis à même Mme C...de prendre connaissance de l'ensemble des pièces produites par l'employeur à l'appui de sa demande, notamment en lui permettant de les lire ; que celles-ci n'ont été communiquées par la Mutuelle familiale à l'intéressée à sa demande que par courrier recommandé en date du 23 septembre 2011 dont l'avis de réception indique qu'elle ne les a reçues que le 27 septembre 2011, soit le lendemain de la date de l'autorisation de licenciement contestée ; qu'ainsi, c'est à bon droit que les premiers juges ont estimé que la décision de l'inspecteur du travail du 26 septembre 2011 était intervenue à l'issue d'une procédure irrégulière ;
7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la Mutuelle familiale n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué du 11 décembre 2012, le Tribunal administratif de Paris a annulé la décision du 26 septembre 2011 par laquelle l'inspecteur du travail a autorisé le licenciement de MmeC... ;
8. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que MmeC..., qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamnée à verser à la Mutuelle familiale une somme au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'en revanche, il y a lieu de faire droit à la demande présentée par Mme C...sur le même fondement et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la Mutuelle familiale est rejetée.
Article 2 : L'Etat versera à Mme C...la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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N° 10PA03855
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N° 13PA00527