Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 26 avril 2013 et 13 mai 2013, présentés par le préfet de police, qui demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 12211539 du 22 mars 2013 par lequel le Tribunal administratif de Paris, premièrement, a annulé son arrêté en date du 29 novembre 2012 refusant de délivrer un titre de séjour à M. B... A...et lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours en fixant son pays de destination, deuxièmement, lui a enjoint de délivrer un certificat de résidence algérien à l'intéressé et, troisièmement, a mis à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. A...devant le Tribunal administratif de Paris ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leurs familles ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 28 mars 2014 :
- le rapport de Mme Stahlberger, président,
- les conclusions de M. Boissy, rapporteur public,
- et les observations de Me Mhissen, avocat de M.A... ;
1. Considérant que M. B...A..., ressortissant algérien né le 26 juin 1984, et entré en France le 28 juillet 2008 sous couvert d'un passeport revêtu d'un visa Schengen de court séjour, a sollicité le 16 octobre 2012 le renouvellement de son titre de séjour sur le fondement des stipulations du 7) de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ; que le préfet de police relève appel du jugement du 22 mars 2013 par lequel le Tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 29 novembre 2012 opposant un refus à la demande de l'intéressé et lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours en fixant son pays de destination ;
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
2. Considérant qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du
27 décembre 1968 modifié : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) 7) au ressortissant algérien, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse pas effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays. / (...) " ;
3. Considérant qu'il résulte de ces stipulations qu'il appartient à l'autorité administrative, lorsqu'elle envisage de refuser la délivrance d'un titre de séjour à un ressortissant algérien qui en fait la demande au titre des stipulations du 7) de l'article 6, de vérifier, au vu de l'avis émis par le médecin mentionné à l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, que cette décision ne peut avoir de conséquences d'une exceptionnelle gravité sur l'état de santé de l'intéressé et, en particulier, d'apprécier, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, la nature et la gravité des risques qu'entraînerait un défaut de prise en charge médicale en Algérie ; que lorsque le défaut de prise en charge risque d'avoir des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur la santé de l'intéressé, l'autorité administrative ne peut légalement refuser le titre de séjour sollicité que s'il existe des possibilités de traitement approprié de l'affection en cause en Algérie ; que si de telles possibilités existent, mais que l'étranger fait valoir qu'il ne peut en bénéficier, soit parce qu'elles ne sont pas accessibles à la généralité de la population, eu égard notamment aux coûts du traitement ou à l'absence de modes de prise en charge adaptés, soit parce qu'en dépit de leur accessibilité, des circonstances exceptionnelles tirées des particularités de sa situation personnelle l'empêcheraient d'y accéder effectivement, il appartient à cette même autorité, au vu de l'ensemble des informations dont elle dispose, d'apprécier si l'intéressé peut ou non bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans son pays d'origine ;
4. Considérant qu'il est constant que M. A...souffre de troubles graves de l'identité sexuelle pour lesquels il suit depuis le mois d'août 2008 un traitement d'hormonothérapie féminisante et a subi une opération chirurgicale le 20 juin 2012 dans le cadre de ce traitement ; que pour refuser le renouvellement du titre de séjour de M.A..., le préfet de police a suivi l'avis émis le 3 septembre 2012 par le médecin, chef du service médical de la préfecture de police, qui a estimé que si l'état de santé de l'intéressé nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entrainer des conséquences d'une exceptionnelle gravité, il pouvait effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine ; qu'il ressort toutefois des pièces du dossier que M. A... a notamment produit, en première instance, des certificats médicaux des 30 avril 2008 et 1er juillet 2008 des docteurs Guerroumi et Haidi, indiquant que le traitement hormonal pour les transsexuels n'existait pas en Algérie ainsi qu'un certificat du 8 février 2009 du docteur Tazaint relevant " qu'il n'existe à ce jour aucune structure médicale publique ou privée qui pratique le traitement hormonal féminisant pour l'homme, d'ailleurs interdit par la législation en vigueur en Algérie " ; que ces attestations, suffisamment précises, émanent de praticiens algériens, le troisième exerçant au sein de l'hôpital central de l'armée à Alger ; que le préfet de police se borne à critiquer sommairement leur authenticité sans présenter de nouvelle pièce en appel, de nature à remettre en cause leur teneur ; que si la documentation dont le préfet de police s'est prévalu devant les premiers juges justifie de l'existence en Algérie de médicaments similaires à ceux dont dispose M. A...en France, il n'en résulte pas pour autant que la situation aurait évolué dans ce pays et que des personnes atteintes de troubles de l'identité sexuelle puissent effectivement en bénéficier ; que la circonstance que les certificats précitées ne fassent pas mention du cas de l'intéressé est indifférente à cet égard ; que par suite, et nonobstant la circonstance que le traitement dont bénéficie en France M. A...ne serait pas dispensé dans le cadre d'un protocole à but thérapeutique, le préfet de police n'est pas fondé à soutenir que la décision litigieuse a été prise en méconnaissance des stipulations précitées ;
5. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le préfet de police n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté en date du 29 novembre 2012 ;
Sur les conclusions incidentes à fin d'injonction :
6. Considérant que l'article 2 du jugement attaqué a déjà enjoint au préfet de police de délivrer à M. A...un certificat de résidence ; qu'ainsi, les conclusions susvisées de M. A... tendant à ce qu'une telle injonction soit prononcée en appel doivent être rejetées ;
Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
7. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. A...et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête du préfet de police est rejetée.
Article 2 : L'Etat versera à M. A...une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Les conclusions à fin d'injonction présentées en appel par M. A...sont rejetées.
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N° 13PA01627