Vu la requête, enregistrée le 28 septembre 2011, présentée pour l'Association Colo Vidéo, dont le siège est 278 rue de Vaugirard, à Paris (75015), par Me Amson ; l'Association Colo Video demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0913843/6-3 en date du 30 juin 2011 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du directeur régional de la jeunesse et des sports du 26 juin 2009 faisant opposition à l'ouverture de deux séjours de vacances en juillet et août 2009 ;
2°) d'annuler la décision susmentionnée du 26 juin 2009 ;
3°) d'enjoindre à la direction régionale de la jeunesse et des sports de Paris Île-de-France de lui délivrer le récépissé de déclaration de séjour de vacances du 3 mai 2009 ;
4°) de condamner ce même service de l'État à lui payer une somme globale de 38 505 euros en réparation du préjudice subi du fait de la décision contestée ;
5°) de mettre à la charge de l'État la somme de 5 000 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le décret n° 60-94 du 29 janvier 1960, concernant la protection des mineurs à l'occasion des vacances scolaires, des congés professionnels et des loisirs, modifié ;
Vu l'arrêté du 27 avril 2000 fixant les modalités de mise en oeuvre de l'article 8 du décret n° 60-94 du 29 janvier 1960, modifié ;
Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;
Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations ;
Vu le code de l'action sociale et des familles, notamment son article L. 227-5 ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 6 mai 2014 :
- le rapport de M. Privesse, premier conseiller,
- les conclusions de M. Rousset, rapporteur public,
- et les observations de Me Amson avocat de l'association Colo Vidéo ;
1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que des faits mettant en cause le comportement de M. Julien Coissac, président de l'association " Colo Video " à l'égard de jeunes participants à des séjours de vacances organisés par cette association, qui se sont déroulés en février 2009, ont été portés à la connaissance du directeur régional de la jeunesse et des sports de Paris-Île-de-France par les témoignages des animateurs et de la directrice de ces séjours ; que, par une décision en date du 26 juin 2009 faisant suite à une enquête administrative, l'administration a pris à l'encontre de l'association requérante une mesure portant opposition à l'ouverture de deux séjours de vacances prévus par celle-ci du 3 au 25 juillet 2009 et du 3 au 14 août 2009 à Cerniat en Suisse, sur les lieux des précédents séjours du mois de février ; que cette décision a été prise en application des dispositions susvisées de l'article L. 227-5 du code de l'action sociale et des familles aux termes duquel : " Les personnes organisant l'accueil de mineurs mentionné à l'article L.227-4 ainsi que celles exploitant les locaux où ces mineurs sont hébergés doivent en faire la déclaration préalable auprès de l'autorité administrative. Celle-ci peut s'opposer à l'organisation de cette activité lorsque les conditions dans lesquelles elle est envisagée présentent des risques pour la santé et la sécurité physique ou morale des mineurs (...) " ; que l'association requérante relève régulièrement appel du jugement par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 26 juin 2009 ;
2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 611-1 du code de justice administrative : " (...) La requête, le mémoire complémentaire annoncé dans la requête et le premier mémoire de chaque défendeur sont communiqués aux parties avec les pièces jointes (...). / Les répliques, autres mémoires et pièces sont communiqués s'ils contiennent des éléments nouveaux " ; qu'aux termes du premier alinéa de l'article R. 613-2 du même code : " Si le président de la formation de jugement n'a pas pris une ordonnance de clôture, l'instruction est close trois jours francs avant la date de l'audience indiquée dans l'avis d'audience prévu à l'article R. 711-2. Cet avis le mentionne." ; que le jugement attaqué vise le mémoire enregistré au greffe du tribunal le 10 juin 2011, présenté par la direction départementale de la jeunesse et des sports d'Île-de-France ; que si l'association requérante soutient que ce mémoire ne lui a pas été communiqué, non plus qu'à son conseil, ce mémoire n'était pas de ceux visés par les termes de l'article R. 611-1 susrappelés, puisqu'il succédait à un mémoire en défense enregistré le 14 janvier 2010, ainsi que d'ailleurs à un mémoire en réplique de l'association requérante enregistré le 19 mars 2010 ; qu'ainsi, et alors que l'instruction du dossier devant le tribunal n'avait pas fait l'objet d'une ordonnance de clôture d'instruction, le tribunal n'était pas tenu de communiquer les deux mémoires enregistrés le vendredi 10 juin 2011 émanant, d'une part, de l'association requérante et, d'autre part, de l'administration ; qu'au demeurant, ces deux mémoires ont fait l'objet d'une communication par fax compte tenu de l'imminence de l'audience fixée au jeudi 16 juin, dont les reçus informatiques ne comportaient pas la mention d'une absence de réception ; que dès lors, la circonstance, à la supposer même établie, que l'association requérante n'aurait pas reçu communication du mémoire en duplique de l'administration du 10 juin 2011 ne saurait constituer une irrégularité de procédure de nature à affecter la régularité du jugement attaqué ;
3. Considérant que si l'association requérante fait valoir que la décision contestée, s'analysant comme une sanction, ne comportait pas une motivation suffisante au sens des dispositions de la loi susvisée du 11 juillet 1979, il ressort de son examen que, ainsi que l'ont relevé à bon droit les premiers juges, cette décision, qui n'avait pas le caractère d'une sanction, comportait le visa et la citation du texte applicable, à savoir l'article susvisé L. 227-5 du code de l'action sociale et des familles, ainsi que la mention de l'ensemble des éléments de fait à l'origine de son édiction ; qu'au surplus, si le nom de M.A..., qui apparaît dans les visas de la décision, n'est pas expressément mentionné dans les motifs de celle-ci, cette circonstance n'est pas de nature à constituer par elle-même une insuffisance de motivation alors et surtout que l'intéressé est bien désigné, dans les motifs, par référence à sa qualité d'organisateur des séjours litigieux du mois de février 2009 ; que dans ces conditions, le moyen tiré de l'insuffisante motivation de la décision du 26 juin 2009 ne peut qu'être écarté ;
4. Considérant qu'aux termes de l'article 24 de la loi susvisée du 12 avril 2000 : " " Exception faite des cas où il est statué sur une demande, les décisions individuelles qui doivent être motivées en application des articles 1er et 2 de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public n'interviennent qu'après que la personne intéressée a été mise à même de présenter des observations écrites et, le cas échéant, sur sa demande, des observations orales. Cette personne peut se faire assister par un conseil ou représenter par un mandataire de son choix. L'autorité administrative n'est pas tenue de satisfaire les demandes d'audition abusives, notamment par leur nombre, leur caractère répétitif ou systématique. Les dispositions de l'alinéa précédent ne sont pas applicables : 1° En cas d'urgence ou de circonstances exceptionnelles ; 2° Lorsque leur mise en oeuvre serait de nature à compromettre l'ordre public ou la conduite des relations internationales ; 3° Aux décisions pour lesquelles des dispositions législatives ont instauré une procédure contradictoire particulière. Les modalités d'application du présent article sont fixées en tant que de besoin par décret en Conseil d'Etat " ;
5. Considérant qu'à l'appui de ses conclusions d'annulation dirigées contre la décision du 26 juin 2009 et relatives au caractère contradictoire de la procédure, l'association requérante reprend à hauteur d'appel les mêmes moyens que ceux soulevés en première instance, avec la même argumentation et en produisant les mêmes pièces ; que cependant, il ne ressort pas des pièces du dossier que les premiers juges auraient, par les motifs qu'ils ont retenus, non critiqués en appel, et qu'il y a lieu pour la Cour d'adopter, commis une erreur en écartant ces moyens ; qu'en outre, et ainsi qu'ils l'ont à bon droit relevé, eu égard aux termes du courrier du 19 mars 2009 informant le président de l'association requérante de l'ouverture d'une enquête administrative et le convoquant à un premier rendez-vous, l'attitude dilatoire de M.A..., demandant à quatre reprises le report de ce rendez-vous, puis, après mise en demeure du 27 mai 2009, n'honorant pas un cinquième rendez-vous, est seule à l'origine de l'impossibilité de faire valoir ses observations en défense dont il se plaint ;
6. Considérant par ailleurs, que les six témoignages précis et détaillés produits au dossier émanant de l'équipe d'animation des séjours de février 2009, n'avaient pas à être communiqués in extenso avant la notification de la décision contestée, alors que, comme rappelé au point 5, l'intéressé ne s'est présenté à aucun des rendez-vous proposés par l'administration, qui pouvait ainsi se limiter à informer de leur teneur le responsable et président de l'association concernée ; qu'il n'est pas contesté que lesdits témoignages ont été communiqués au cours de la procédure contentieuse ; qu'ainsi l'association requérante n'est pas fondée à soutenir que les droits de la défense auraient été méconnus par l'administration ;
7. Considérant en premier lieu, qu'à la suite de deux séjours organisés en février et mars 2009, comprenant, le premier 14 enfants et deux animateurs, et le second 17 enfants et trois animateurs, et la présence aux deux de la directrice du séjour, d'un cuisinier, d'un agent technique et de M. Julien Coissac, président de l'association " Colo Vidéo " et propriétaire du chalet Saint-Joseph à Cerniat en Suisse où se déroulaient ces séjours, des signalements ont été enregistrés à la direction de la jeunesse et des sports d'Île-de-France, émanant, d'une part, de M. A...lui-même mettant en cause notamment le comportement de la directrice du séjour, et, d'autre part et de façon échelonnée, de six des huit agents ou animateurs ayant participé à l'encadrement desdits séjours, détaillant par six longs témoignages les nombreuses difficultés rencontrées lors de ces séjours et mettant en cause le comportement de M. A...notamment à l'égard de certains mineurs ; qu'à la suite de ces témoignages et de l'enquête administrative conduite à compter du 19 mars 2009, comme dit au point 1, le directeur régional de la jeunesse et des sports de Paris-Île de France a pris la décision du 26 juin 2009 s'opposant à l'organisation de séjours prévus du 3 au 25 juillet et du 3 au 14 août 2009, pour lesquels une déclaration de séjour de vacances avait été déposée le 3 mai 2009 ;
8. Considérant en deuxième lieu, que ladite décision portant opposition aux deux séjours de vacances prévus en juillet et août 2009, n'est pas constitutive d'une sanction, mais relève du pouvoir de police administrative du directeur régional de la jeunesse et des sports conformément aux termes des dispositions susmentionnées de l'article L. 227-5, qui permet à l'administration, par application d'un principe de précaution qui s'impose à elle de s'opposer à l'organisation d'une activité destinée aux mineurs lorsque les conditions dans lesquelles cette activité est envisagée, présentent des risques pour leur santé psychique et morale ou leur sécurité physique ; que cette décision présente dès lors le caractère d'une mesure conservatoire ;
9. Considérant en troisième lieu, que la direction départementale de la jeunesse et des sports d'Île-de-France ne pouvait, lors de l'instruction des demandes déposées le 3 mai 2009, ignorer les six témoignages précités, comportant des détails concrets révélant des situations vécues et, des conditions d'accueil parfois attentatoires à la santé physique et psychologique des enfants, généralement de moins de 10 ans, accueillis au chalet de Cerniat, alors qu'ils n'étaient pas contredits, puisqu'aucun élément contradictoire n'avait été présenté lors de l'enquête administrative, ainsi qu'il a été précisé au point 5 ; que ces témoignages convergents quant à l'analyse des difficultés rencontrées principalement dues au comportement de M. A... durant ces séjours, mettaient en lumière, notamment, des situations à risques auxquels les enfants avaient été exposés, en particulier à l'occasion d'exercices incendie pour lesquels toutes les issues de secours avaient été bloquées, des cas de non-assistance à personne en danger, des atteintes portées à l'intimité de chacun, par effet du système de vidéosurveillance interne au chalet, et révélaient l'utilisation parcimonieuse des moyens de communication avec l'extérieur en dépit de la qualité des systèmes installés ; que la caractérisation du contexte de ces séjours, emprunts d'un stress important pour les animateurs ne plaidait dès lors pas en faveur de la réitération de ceux-ci ;
10. Considérant en quatrième lieu que, si l'association requérante déplore que la décision contestée ne soit intervenue qu'à la fin juin 2009 à une date proche des séjours d'été, cette situation découle directement de l'attitude dilatoire de M.A..., qui, après avoir en dernier lieu accepté le dernier rendez-vous fixé le 9 juin 2009 à 15 heures, ne s'y est finalement pas présenté ; qu'en outre, si celle-ci déplore également la réaction de l'administration trop prompte selon elle à s'opposer aux séjours prévus en juillet et août 2009, au risque de mettre en péril l'existence même de l'association requérante, au lieu de lui laisser continuer son activité en sanctionnant le cas échéant seulement M.A..., il apparaît que compte tenu de la concentration des fonctions et qualités sur une seule et même personne, à la fois président de l'association, propriétaire du chalet où se situaient les séjours, et animateur de ceux-ci à même de prendre des décisions déterminantes, l'administration n'avait, au moment où elle a pris sa décision et eu égard à ses responsabilités, d'autre choix que de s'opposer à la tenue des séjours d'été ;
11. Considérant en cinquième lieu que, si les services de la direction de la jeunesse et des sports de Paris-Île de France ont, par un courrier du 19 février 2010, conclu l'enquête administrative préalablement diligentée, dans le sens d'un non-lieu, sans qu'une sanction administrative pour mise en danger de mineurs ne soit prise, une telle issue ne peut avoir aucune incidence sur la légalité de la décision contestée du 26 juin 2009, laquelle n'avait que la portée d'une mesure conservatoire, ainsi que déjà précisé ;
12. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, que le directeur régional de la jeunesse et des sports de Paris-Île-de-France a pu sans commettre d'illégalité, s'opposer par la décision du 26 juin 2009, aux séjours d'été à venir pour lesquels les déclarations d'ouverture avaient été présentées le 3 mai précédent par l'association requérante ;
13. Considérant d'une part, que l'association requérante demande qu'il soit enjoint au directeur régional de la jeunesse et des sports de Paris-Île de France de lui délivrer le récépissé de la déclaration de séjour de vacances déposée le 3 mai 2009, visant principalement le séjour de juillet 2009 ; que compte tenu de ce qui a été dit précédemment, cette demande d'injonction ne peut, en tout état de cause, qu'être rejetée ;
14. Considérant d'autre part, que l'association requérante demande la condamnation de l'État à lui verser les sommes de 7 905 euros en remboursement des frais avancés pour le séjour du mois de juillet 2009, de 600 euros correspondant à la valeur des bons vacances, et de 30 000 euros en réparation du préjudice subi du fait de la décision du 26 juin 2009 ; que toutefois, il résulte de ce qui précède que la mesure contestée d'opposition à l'ouverture des séjours d'été de l'association requérante, était légale ; que dans ces conditions, et en l'absence de faute imputable à l'État, les conclusions indemnitaires présentées par l'association requérante ne peuvent en conséquence, qu'être rejetées ;
15. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que l'association " Colo Vidéo " n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté ses demandes ;
Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
16. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'État, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que l'association " Colo Vidéo " demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de l'association " Colo Vidéo " est rejetée.
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N° 11PA04293