Vu la requête, enregistrée le 3 juin 2013, présentée pour la société Nuiatea, prise en la personne de son gérant M.B..., ayant son siège à Papenoo, PK 15,5 c/ Montagne (Hitiaa O Te Ra) BP 111343 à Mahina - Tahiti (98709), par MeC... ; la société Nuiatea demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1200257 - 1200263 du 13 décembre 2012 par lequel le président du Tribunal administratif de la Polynésie française, faisant partiellement droit à la demande de la Polynésie française présentée à la suite de la constatation d'une contravention de grande voirie, l'a condamnée d'une part à une amende de 150 000 francs CFP, et d'autre part à verser à la Polynésie française une somme de 7 154 800 francs CFP représentant le coût de la remise en état d'une dépendance du domaine public fluvial ;
2°) de rejeter la requête de la Polynésie française aux fins de condamnation pour contravention de grande voirie ;
3°) de condamner la Polynésie française à lui verser une indemnité de 1 000 000 francs CFP en réparation des préjudices subis du fait de l'engagement d'une procédure injustifiée en contravention de grande voirie ;
4°) de mettre à la charge de la Polynésie française une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 portant statut d'autonomie de la Polynésie française ;
Vu la loi n° 2004-193 du 27 février 2004 complétant le statut d'autonomie de la Polynésie française ;
Vu la délibération n° 2004-34 APF du 12 février 2004 de l'assemblée de la Polynésie française portant composition et administration du domaine public en Polynésie française ;
Vu la délibération n° 68-136 du 12 décembre 1968 modifiée portant règlementation de l'extraction du sable, des roches et des cailloux dans les rivières, cours d'eau et sur les bords de la mer ;
Vu la délibération n° 77-142 du 29 décembre 1977, modifiée, de l'assemblée territoriale de la Polynésie française portant réglementation en matière d'occupation du domaine public ;
Vu le code de procédure pénale ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 27 mai 2014 :
- le rapport de M. Bergeret, premier conseiller,
- et les conclusions de Mme Bonneau-Mathelot, rapporteur public ;
1. Considérant que par jugement du 13 décembre 2012, le président du Tribunal administratif de la Polynésie française a relevé qu'en procédant dans la rivière Papenoo à l'extraction de matériaux au-delà du volume autorisé par arrêté, l'entreprise Nuiatea avait commis une contravention de grande voirie et a condamné celle-ci, prise en la personne de son gérant M. A...B..., à une amende de 150 000 francs CFP et à verser à la Polynésie française une somme de 7 154 800 francs CFP représentant le coût de la remise en état du domaine public fluvial ; que l'entreprise Nuiatea relève appel de ce jugement et demande en outre, par conclusions reconventionnelles, la condamnation de la Polynésie française à l'indemniser à hauteur de 1 000 000 de francs CFP en réparation des divers préjudices causés par l'engagement d'une procédure injustifiée pour contravention de grande voirie ;
Sur la recevabilité de la requête :
2. Considérant, en premier lieu, que si la Polynésie française soutient que la requête d'appel présentée le 3 juin 2013 à la Cour ne comportait pas un exposé des faits, moyens et conclusions soumis au juge d'appel, il résulte des termes mêmes de la requête enregistrée le 3 juin 2013 que cette assertion est infondée ; que, par suite, la fin de non-recevoir tirée de ce que le " mémoire complémentaire " enregistré le 28 juin suivant, après l'expiration du délai de recours, égal à quatre mois en l'espèce et courant à compter du 21 février 2013, jour de la signification du jugement, n'aurait pu régulariser la requête, doit être écartée ;
3. Considérant, en second lieu, que les conclusions reconventionnelles ne sont pas recevables dans une instance ayant pour objet la répression d'une contravention de grande voirie ; que, par suite, les conclusions indemnitaires présentées par l'entreprise Nuiatea, qui au demeurant n'ont pas fait l'objet d'une demande préalable de nature à lier le contentieux, ne peuvent qu'être rejetées ;
Au fond :
4. Considérant qu'aux termes de l'article 2 de la délibération n° 2004-34 de l'assemblée de la Polynésie française du 12 février 2004 susvisée : " Le domaine public naturel comprend : le domaine public maritime qui se compose notamment des rivages de la mer, des lais et relais de mer, des étangs salés communiquant librement ou par infiltration ou par immersion avec la mer, du sol et du sous-sol des eaux intérieures dont les havres et rades non aménagés et les lagons (...) " ; qu'aux termes de l'article 6 de la même délibération : " Nul ne peut sans autorisation préalable délivrée par l'autorité compétente, effectuer aucun remblaiement, travaux, extraction, installation et aménagement quelconque sur le domaine public, occuper une dépendance dudit domaine ou l'utiliser dans les limites excédant le droit d'usage qui appartient à tous (...) " ; que l'article 27 de la même délibération dispose : " Les infractions à la réglementation en matière de domaine public (...) constituent des contraventions de grande voirie et donnent lieu à poursuite devant le tribunal administratif (...) Les contrevenants pourront être punis des peines d'amende ou des peines privatives ou restrictives de droit, telles que définies dans le code pénal pour les contraventions de la cinquième classe. En cas de récidive, le montant maximum de l'amende pourra être doublé. En outre, l'auteur d'une contravention de grande voirie pourra être tenu de réparer le dommage causé, au besoin sous astreinte " ;
5. Considérant, en premier lieu, que l'entreprise Nuiatea soutient que le jugement est erroné en droit, dès lors qu'il relève à tort l'existence d'une extraction non autorisée située à 1,5 km de la route de ceinture et qu'il indique également à tort qu'elle n'aurait pas respecté un arrêté d'autorisation d'extraction n° 2660/MET, daté par erreur du 14 juin 2006 ; que, toutefois, les erreurs purement matérielles dont est ainsi entaché le jugement ne sont pas de nature à priver de fondement légal les condamnations qu'il prononce pour contravention de grande voirie, dès lors qu'il est constant qu'il se fonde sur un procès-verbal dressé le 24 janvier 2012 faisant état de la contravention de grande voirie constituée par une extraction de matériaux pour un volume excédant celui autorisé, dans la zone visée par l'arrêté d'autorisation n° 2660/MET du 14 juin 2011, située à 2 km de la route de ceinture ;
6. Considérant, en deuxième lieu, que pour contester la matérialité de l'infraction relevée par le procès-verbal précité, faisant état d'un volume total de 2 438 m3 de matériaux extraits dans la zone considérée, dont 1 938 m3 sans autorisation, l'entreprise Nuiatea soutient que la Polynésie française a procédé à un calcul fondé sur des bases erronées et incohérentes, en retenant une largeur de zone d'extraction de 74 mètres alors que celle-ci ne peut matériellement être supérieure à 44 mètres ; qu'il résulte cependant de l'instruction, et notamment d'un schéma daté du 14 octobre 2011 et signé d'un agent assermenté de la Polynésie française, que l'extraction a été faite sur une longueur de 22 mètres du lit de la rivière Papenoo, et sur deux zones superposées, l'une ayant une profondeur de 1,70 mètres sur 44 mètres de large, ce qui correspond à la largeur de lit exploitable selon les écritures de l'appelante, et l'autre une profondeur de 1,20 m, d'une largeur limitée à 30 mètres, située en totalité sous la première ; que dans ces conditions, la critique ci-dessus n'est pas pertinente ; qu'il résulte au demeurant de l'instruction que M.B..., gérant de l'entreprise Nuiatea, est réputé en vertu de l'article 41-2 du code de procédure pénale s'être rendu coupable de faux en acceptant la composition pénale qui a soldé la poursuite engagée par le parquet pour avoir rédigé et remis à l'administration, en septembre 2011, un état des quantités de matériaux extraites sur la zone considérée, indiquant de façon frauduleuse un total d'extraction limité à 560 m3 sur la zone considérée ; qu'il avait, au surplus, signé le levé réalisé le 14 octobre 2011 par les agents assermentés de la Polynésie française, faisant état des chiffres d'extraction repris au procès-verbal précité du 24 janvier 2012, et est ainsi réputé avoir avalisé ces constatations ; que la matérialité de la contravention de grande voirie doit ainsi être regardée comme établie à hauteur d'une quantité de matériaux extraits sans autorisation égale à 1 938 m3 ;
7. Considérant, toutefois, que l'entreprise Nuiatea soutient, subsidiairement, que le montant de la condamnation à prononcer au titre de la remise en état des lieux doit être réduit d'une part en appliquant au prix d'achat du tout-venant à restituer sur place un tarif de 900 francs CFP par m3 au lieu de 3 500 francs CFP par m3, et d'autre part à due concurrence de la remise en état partielle à laquelle elle aurait procédé ; que si, en se bornant à produire une facture établie par ses soins, elle ne justifie pas que la Polynésie française, qui produit un document en sens contraire, aurait appliqué un tarif excessif, elle fournit cependant un état " mis à jour le 22 février 2012 ", des volumes de tout-venant qu'elle aurait remis en place, le 27 janvier pour 240 m3, et le 14 février pour 254 m3, sur lequel figure la signature d'un agent assermenté de la Polynésie française ; que cette dernière ne contestant ni l'authenticité de ce document, ni la réalité de l'allégation de l'entreprise Nuiatea, il y a lieu de ramener la condamnation ainsi contestée à la somme de 5 331 027 francs CFP, correspondant à l'application d'un tarif de 3 500 francs CFP à une quantité de 1 444 m3 de tout-venant restant à restituer sur le domaine public fluvial, outre frais de transport et de remise en place ;
8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'entreprise Nuiatea est seulement fondée à demander la réformation du jugement dans les conditions précisées ci-dessus ;
Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
9. Considérant que dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions par lesquelles chacune des deux parties demande l'application à son bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
D E C I D E :
Article 1er : La condamnation prononcée par l'article 2 du jugement n° 1200257 - 1200263 du 13 décembre 2012 du Tribunal administratif de la Polynésie française est ramenée à la somme de 5 331 027 francs CFP.
Article 2 : Le jugement n° 1200257 - 1200263 du 13 décembre 2012 du Tribunal administratif de la Polynésie française est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 3 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.
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N° 13PA02140