Vu la requête, enregistrée le 4 juillet 2014, présentée par le préfet de police ; le préfet de police demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1408066/8 du 20 mai 2014 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté en date du 17 mai 2014 obligeant M. A...à quitter le territoire français sans délai ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. A...devant ledit tribunal ;
Le préfet de police soutient que l'arrêté querellé ne méconnaît pas les dispositions des articles L. 741-1 et L. 741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu la mise en demeure adressée le 6 septembre 2011 à M.A..., en application de l'article R. 612-3 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu le code de justice administrative ;
Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 21 janvier 2015 le rapport de
M. Magnard, premier conseiller ;
1. Considérant que le préfet de police fait appel du jugement n° 1408066/8 du
20 mai 2014 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté en date du 17 mai 2014 obligeant M. A...à quitter le territoire français sans délai ;
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 741-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Tout étranger présent sur le territoire français qui, n'étant pas déjà admis à séjourner en France sous couvert d'un des titres de séjour prévus par le présent code ou les conventions internationales, demande à séjourner en France au titre de l'asile forme cette demande dans les conditions fixées au présent chapitre " ; qu'aux termes de l'article
L. 742-3 du même code : " L'étranger admis à séjourner en France bénéficie du droit de s'y maintenir jusqu'à la notification de la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou, si un recours a été formé, jusqu'à la notification de la décision de la Cour nationale du droit d'asile " ; qu'aux termes de l'article R. 741-1 dudit code : " Lorsqu'un étranger, se trouvant à l'intérieur du territoire français, demande à bénéficier de l'asile, l'examen de sa demande d'admission au séjour relève du préfet de département et, à Paris, du préfet de police ( ...) " ; qu'aux termes de l'article L. 741-3 dudit code : " L'admission au séjour ne peut être refusée au seul motif que l'étranger est démuni des documents et des visas mentionnés à l'article L. 211-1 " ; qu'aux termes de l'article L. 741-4 du même code : " Sous réserve du respect des stipulations de l'article 33 de la convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés, l'admission en France d'un étranger qui demande à bénéficier de l'asile ne peut être refusée que si : (...) 3° La présence en France de l'étranger constitue une menace grave pour l'ordre public, la sécurité publique ou la sûreté de l'Etat; 4° La demande d'asile repose sur une fraude délibérée ou constitue un recours abusif aux procédures d'asile ou n'est présentée qu'en vue de faire échec à une mesure d'éloignement prononcée ou
imminente (...) " ;
3. Considérant que ces dispositions ont pour effet d'obliger l'autorité de police à transmettre au préfet, et le préfet à enregistrer, une première demande d'admission au séjour au titre de l'asile formulée par un étranger à l'occasion de son interpellation ; que, par voie de conséquence, elles font légalement obstacle à ce que le préfet fasse usage des pouvoirs que lui confèrent les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en matière d'éloignement des étrangers en situation irrégulière avant d'avoir statué sur cette demande d'admission au séjour au titre de l'asile ; que ce n'est que dans l'hypothèse où la demande d'admission au séjour a été préalablement rejetée par lui sur le fondement des dispositions précitées de l'article L. 741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que le préfet peut, le cas échéant sans attendre que l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ait statué, prononcer une mesure d'éloignement à l'encontre de l'étranger ;
4. Considérant qu'en se bornant à produire un document de l'association France Terre d'Asile, sise à Paris 18ème, en date du 27 mars 2014, le convoquant pour une première domiciliation administrative à la date du 21 juillet 2014, dans le but de déposer une demande d'admission au séjour au titre de l'asile, et la preuve d'une domiciliation auprès d'une association spécialisée dans l'hébergement des travailleurs migrants, M.A..., qui a été mis en possession d'éléments pour déposer une demande d'asile lors de sa rétention administrative, n'établit ni avoir déposé une telle demande, ni même avoir manifesté l'intention de le faire ; que, dans ces conditions, M. A...ne saurait valablement se prévaloir de ce que le " système administratif " l'aurait obligé à procéder à des diligences préalables ; qu'il suit de là que le préfet de police est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, les premiers juges se sont fondés, pour annuler l'arrêté litigieux, sur le motif tiré de ce que, l'intéressé ayant manifesté sa volonté non équivoque de demander le bénéfice de l'asile, au plus tard lors de son interpellation, le préfet de police était tenu de statuer sur cette demande avant de prendre à l'encontre de l'intéressé une mesure d'éloignement ;
5. Considérant, toutefois, qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. A...devant le Tribunal administratif de Paris ;
6. Considérant, en premier lieu, que, pour les motifs indiqués au point 3 ci-dessus,
M. A...ne saurait utilement invoquer sa situation de demandeur d'asile à l'encontre de la décision fixant le pays de renvoi ;
7. Considérant, en deuxième lieu, que M. A...soutient que son placement en rétention a été décidé en méconnaissance du droit d'être entendu reconnu par les dispositions de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ; que, selon la jurisprudence de la Cour de justice de 1'Union européenne (C-166/13 du 5 novembre 2014) rendue sur renvoi préjudiciel d'une juridiction administrative française, le droit d'être entendu dans toute procédure, consacré notamment par les dispositions du 2 de l'article 41 de la Charte susmentionnée, tel qu'il s'applique dans le cadre de la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du
16 décembre 2008, relative aux normes et procédures communes applicables dans les Etats membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier et, notamment, de l'article 6 de celle-ci, doit être interprété en ce sens qu'il ne s'oppose pas à ce qu'une autorité nationale n'entende pas le ressortissant d'un pays tiers spécifiquement au sujet d'une décision de retour lorsque, après avoir constaté le caractère irrégulier de son séjour sur le territoire national à l'issue d'une procédure ayant pleinement respecté son droit d'être entendu, elle envisage de prendre à son égard une telle décision, que cette décision de retour soit consécutive ou non à un refus de titre de séjour ; qu'il ressort des pièces du dossier que M. A...a été entendu par les services de police le 17 mai 2014 ; qu'il a eu ainsi la possibilité, au cours de cet entretien, de faire état des observations utiles et pertinentes de nature à influer sur la décision prise à son encontre ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que l'intéressé disposait d'informations tenant à sa situation personnelle qu'il a été empêché de porter à la connaissance de l'administration avant que ne soit prise à son encontre la mesure qu'il conteste et qui, si elles avaient pu être communiquées à temps, auraient été de nature à faire obstacle à l'édiction de cette décision ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la décision contestée méconnaîtrait le principe général du droit d'être entendu, qui est au nombre des principes fondamentaux du droit de l'Union européenne, doit être écarté ;
8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le préfet de police est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté en date du 17 mai 2014 obligeant M. A...à quitter le territoire français sans délai ;
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1408066/8 du 20 mai 2014 du magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Paris est annulé.
Article 2 : La demande présentée par M. A...devant le Tribunal administratif de Paris est rejetée.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à M. B...A....
Copie en sera adressée au préfet de police.
Délibéré après l'audience du 21 janvier 2015 à laquelle siégeaient :
Mme Tandonnet-Turot, président de chambre,
Mme Appèche, président assesseur,
M. Magnard, premier conseiller,
Lu en audience publique le 4 février 2015.
Le rapporteur,
F. MAGNARDLe président,
S. TANDONNET-TUROT
Le greffier,
S. DALL'AVA
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 11PA00434
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N° 14PA02931