Vu la requête, enregistrée le 11 juillet 2014, présentée pour l'entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée (EURL) Marne Service Décor, élisant domicile..., par Me B...; la société Marne Service Décor demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1218613 du 13 mai 2014 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie au titre de la période du 1er janvier 2006 au 31 juillet 2008 et de la pénalité pour manquement délibéré qui lui a été infligée ;
2°) de prononcer la décharge de ces impositions supplémentaires et de la pénalité pour manquement délibéré ;
La société Marne Service Décor soutient que :
- le service vérificateur a suggéré à la société que le contrôle s'effectue en dehors de la présence de son représentant et dans les locaux de l'administration ; même si l'administration dispose d'un courrier du contribuable acceptant l'emport de documents, les modalités du contrôle n'ont pas offert à la société toutes les garanties qui s'attachent à une vérification de comptabilité lorsque celle-ci se déroule au siège de la société ; l'égalité des armes a été rompue au profit exclusif de l'administration fiscale ;
- l'importance des rehaussements ne suffit pas pour démontrer l'absence de bonne foi du contribuable ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 8 décembre 2014, présenté par le ministre des finances et des comptes publics, qui conclut au rejet de la requête ;
Il fait valoir que :
- les opérations de contrôle se sont déroulées dans les locaux de l'administration à la suite de la demande écrite de la société ; lors de la deuxième intervention du 24 octobre 2008, la société a sollicité par écrit que les documents comptables soient conservés par le vérificateur le temps nécessaire au contrôle ; l'ensemble des documents a été restitué à la société avant l'envoi de la proposition de rectification ; la société ne prouve pas que l'emport des documents aurait été suggéré par l'administration ;
- la société ne démontre pas en quoi l'égalité des armes aurait été rompue au cours des opérations de contrôle ;
- le manquement délibéré est motivé par l'importance des omissions, la nature des infractions et leur répétition ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 22 mai 2015 :
- le rapport de M. Cheylan, premier conseiller,
- les conclusions de M. Boissy, rapporteur public ;
1. Considérant que la société Marne Service Décor, qui confectionne des décors de stands, de vitrines et de galeries d'art, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant, en matière de taxe sur la valeur ajoutée, sur la période du 1er janvier 2006 au 31 juillet 2008 ; que lors des opérations de vérification, qui se sont déroulées, à l'exception de la première intervention, dans les locaux de l'administration fiscale, le gérant de la société a remis au vérificateur des documents comptables ainsi que des copies de fichiers informatiques contenant les écritures comptables relatives aux exercices 2005 à 2007 ; que, par une proposition de rectification du 15 décembre 2008, l'administration a notifié à la société, suivant une procédure de rectification contradictoire, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période du 1er janvier 2006 au 31 juillet 2008, assortis d'une pénalité pour manquement délibéré ; que la société Marne Service Décor relève appel du jugement du 13 mai 2014 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été assignés et de la pénalité pour manquement délibéré qui lui a été infligée à la suite de ce contrôle ;
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
2. Considérant qu'il résulte de l'ensemble des dispositions du livre des procédures fiscales relatives aux opérations de vérification que celles-ci se déroulent chez le contribuable ou au siège de l'entreprise vérifiée ; que, toutefois, sur la demande écrite du contribuable, le vérificateur peut emporter certains documents dans les bureaux de l'administration, qui en devient ainsi dépositaire ; qu'en ce cas il doit remettre à l'intéressé un reçu détaillé des pièces qui lui sont confiées ; qu'en outre, cette pratique ne peut avoir pour effet de priver le contribuable des garanties qu'il tient des articles L. 47 et L. 52 du livre des procédures fiscales et qui ont notamment pour objet de lui assurer des possibilités de débat oral et contradictoire avec le vérificateur ;
3. Considérant, d'une part, que la société Marne Service Décor soutient que le vérificateur a " suggéré " au gérant de la société que le contrôle s'effectue en dehors de la présence de son représentant et dans les locaux de l'administration ; qu'il ressort toutefois des termes de la proposition de rectification du 15 décembre 2008 que l'interlocuteur du vérificateur a toujours été M.A..., gérant de la société, au cours du contrôle ; que ces mentions prévalent, à moins qu'il ne soit établi par des faits précis qu'elle sont inexactes ; qu'il résulte de l'instruction que, lors de la première intervention du vérificateur, qui s'est déroulée le 20 octobre 2008 au siège social de la société, M. A...a expressément demandé, par une lettre manuscrite datée du même jour, que " la vérification de la comptabilité de la société se déroule dans les locaux de l'administration fiscal[e] " ; que, par une lettre datée du 24 octobre 2008, M. A...a demandé que " le vérificateur conserve les documents comptables [...] le temps nécessaire au contrôle " ; que la circonstance que cette demande ait été formulée lors du deuxième entretien dans les locaux de l'administration, ne saurait suffire à établir que la lettre aurait été rédigée à l'initiative du vérificateur ; qu'un document intitulé " accusé de production et restitution de documents " a en outre été établi, énumérant les pièces remises au vérificateur ; que ce document comporte, sous la rubrique " production " la date du 24 octobre 2008 et sous la rubrique " restitution " la date du 25 novembre 2008 ainsi que, pour chaque rubrique, la signature de M. A...et celle du vérificateur ; qu'un formulaire de mise à disposition de copies de fichiers informatiques d'écritures comptables a également été établi le
24 octobre 2008 et signé par le gérant ; que M. A...a signé le 1er décembre 2008 un formulaire de restitution mentionnant des fichiers informatiques d'écritures comptables identiques à ceux figurant sur le formulaire de mise à disposition ; que, dans ces conditions, l'emport de ces différents documents doit être regardé comme étant intervenu dans des conditions régulières ;
4. Considérant, d'autre part, qu'il ressort des termes de la proposition de rectification du
15 décembre 2008 que M. A...a rencontré à cinq reprises le vérificateur ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier et qu'il n'est pas allégué que le vérificateur se serait refusé à tout échange de vues avec M. A...lors de ces entretiens ; qu'ainsi qu'il a été dit au point 3, les documents mentionnés dans l'accusé de production ont été restitués au gérant de la société le 25 novembre 2008, avant la clôture des opérations de vérification le 1er décembre 2008 ; que si les copies de fichiers informatiques d'écritures comptables n'ont été restitués que le 1er décembre 2008, il ressort des termes de la proposition de rectification et il n'est pas contesté que, lors du dernier entretien qui s'est tenu le même jour, le vérificateur a explicité les résultats du contrôle à M. A... ; que, dans ces conditions, la société a pu bénéficier d'un débat oral et contradictoire avec le vérificateur ;
5. Considérant, par ailleurs, que le moyen tiré de ce que " l'égalité des armes a été rompue au profit exclusif de l'administration fiscale " lors des opérations de contrôle, n'est pas assorti de précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé ;
6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société requérante n'est pas fondée à soutenir que la procédure d'imposition serait entachée d'irrégularité ;
Sur la pénalité pour manquement délibéré :
7. Considérant qu'aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : / a. 40 % en cas de manquement délibéré (...) " ;
8. Considérant que le service vérificateur, pour justifier l'application de la pénalité pour manquement délibéré, a relevé dans sa proposition de rectification du 15 décembre 2008 que la taxe sur la valeur ajoutée collectée et non reversée représentait en 2006, en 2007 et pour la période du
1er janvier au 31 juillet 2008 respectivement 27 % , 31 % et 31 % de la taxe sur la valeur ajoutée déclarée ; qu'eu égard au caractère répété des agissements reprochés à la société, à l'importance et à la nature des rehaussements, l'administration apporte la preuve, qui lui incombe, de l'intention délibérée de la société, qui ne pouvait ignorer la date d'exigibilité de la taxe sur la valeur ajoutée applicable aux prestations de service, de se soustraire à l'impôt et, par suite, du bien-fondé de la pénalité en litige ;
9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société Marne Service Décor n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la société Marne Service Décor est rejetée
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à l'EURL Marne Service Décor et au ministre des finances et des comptes publics.
Copie en sera adressée au directeur régional des finances publiques d'Ile-de-France et du département de Paris.
Délibéré après l'audience du 22 mai 2015, à laquelle siégeaient :
Mme Driencourt, président de chambre,
Mme Mosser, président assesseur,
M. Cheylan, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 5 juin 2015.
Le rapporteur,
F. CHEYLAN Le président,
L. DRIENCOURT
Le greffier,
J. BOUCLY
La République mande et ordonne au ministre des finances et des comptes publics en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 14PA03026