La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

08/12/2015 | FRANCE | N°15PA00590

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 4ème chambre, 08 décembre 2015, 15PA00590


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D...B...a demandé au Tribunal administratif de Melun d'annuler l'arrêté du 26 avril 2013 par lequel le préfet du Val-de-Marne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé son pays de destination.

Par un jugement n° 1309628/9 du 15 octobre 2014, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête sommaire et un mémoire complémentaire, respectivement enregistrés les

5 février 2015, 20 février 2015 et 20 novembre 2015, M.B..., représenté par Me A..., demande à l...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D...B...a demandé au Tribunal administratif de Melun d'annuler l'arrêté du 26 avril 2013 par lequel le préfet du Val-de-Marne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé son pays de destination.

Par un jugement n° 1309628/9 du 15 octobre 2014, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête sommaire et un mémoire complémentaire, respectivement enregistrés les 5 février 2015, 20 février 2015 et 20 novembre 2015, M.B..., représenté par Me A..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1309628/9 du 15 octobre 2014 du Tribunal administratif de Melun ;

2°) d'annuler l'arrêté du 26 avril 2013 du préfet du Val-de-Marne ;

3°) d'enjoindre, sous astreinte, au préfet du Val-de-Marne de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", ou à titre subsidiaire, de lui accorder une autorisation de séjour durant le réexamen de sa situation administrative, dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat, au profit de son conseil, la somme de 2 000 euros en application des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la décision de refus de séjour ne visant pas la circulaire du 28 novembre 2012, le préfet a donc, de ce fait, méconnu l'étendue de son pouvoir d'appréciation ;

- la décision de refus de séjour est entachée d'un vice de procédure du fait de l'absence de saisine de la commission du titre de séjour, et d'un défaut d'examen de sa situation personnelle ;

- le préfet a méconnu les disposition des articles L. 313-11-7° et L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour et du droit d'asile, les stipulations de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des Droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article 3-1 de la Convention internationale relative aux droits de l'enfant, alors que l'intéressé vit en France depuis mars 1999, et avec sa famille depuis l'année 2012, et y dispose de liens personnels et familiaux stables et intenses ;

- ces mêmes circonstances constituent des motifs exceptionnels au sens de l'article L. 313-14, le préfet ayant en outre commis une erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français est dépourvue de base légale compte tenu de l'illégalité de la décision portant refus d'un titre de séjour, et porte atteinte à l'intérêt supérieur du fils de M.B..., du fait de l'application combinée des stipulations de l'article 8 de la Convention européenne précitée et de celles de l'article 3-1 de la Convention internationale des droits de l'enfant ;

- la décision fixant le pays de destination est de même dépourvue de base légale compte tenu de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français, et ne vise pas précisément le pays de destination, devant être annulée en tout état de cause pour les mêmes motifs que ceux précédemment énumérés.

Vu les pièces dont il résulte que la requête a été communiquée au préfet du Val-de-Marne, qui n'a pas présenté de mémoire en défense.

M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Paris le 18 septembre 2014. B...

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique et son décret d'application n° 91-1266 du 19 décembre 1991 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative ;

- la circulaire du ministre de l'intérieur du 28 novembre 2012 sur les conditions d'examen des demandes d'admission au séjour déposées par des ressortissants étrangers en situation irrégulière.

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Privesse,

- et les observations de M.B....

1. Considérant que M.B..., ressortissant comorien né le 11 juin 1974, a déclaré être entré en France en mars 1999 ; qu'il a sollicité auprès du préfet du Val-de-Marne la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 et de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par un arrêté du 26 avril 2013, le préfet du Val-de-Marne lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé son pays de destination ; que M. B... fait appel du jugement en date du 15 octobre 2014 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Considérant en premier lieu, que M. B...ne peut utilement se prévaloir de la circulaire ministérielle du 28 novembre 2012 relative aux conditions d'examen des demandes d'admission au séjour déposées par des ressortissants étrangers en situation irrégulière, dont les énonciations ne constituent pas des lignes directrices ;

3. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes des dispositions de l'article L. 312-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Dans chaque département, est instituée une commission du titre de séjour (...) " et qu'aux termes des dispositions de l'article L. 312-2 du même code : " La commission est saisie par l'autorité administrative lorsque celle-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article L. 313-11 ou de délivrer une carte de résident à un étranger mentionné aux articles L. 314-11 et L. 314-12 (...) " ; qu'aux termes des dispositions de l'article L. 313-14 de ce même code : " (...) / L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l' article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans. / (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions que le préfet de police est tenu de saisir la commission du titre de séjour du cas des étrangers qui ont formé, en justifiant d'une résidence habituelle en France de plus de dix ans, une demande d'admission exceptionnelle au séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

4. Considérant que, si M. B...soutient qu'il réside habituellement en France depuis 1999, il ressort toutefois de l'examen de l'ensemble des pièces du dossier que les justificatifs produits pour attester de l'ancienneté de sa présence en France sont insuffisants pour l'établir de manière probante et attester de sa continuité sur une période de dix ans à compter du 25 avril 2003 ; qu'en effet, il ne produit, au titre de l'année 2005, que trois attestations du responsable de la résidence Adoma de Saint-Maur-des-Fossés, certifiant qu'il y réside depuis le 23 septembre 2003, une attestation de la responsable de l'établissement Saint Maur " le Port " en date du 26 septembre 2011, spécifiant les mêmes faits que les 3 attestations précédentes, ainsi qu'un relevé de situation de compte de l'agence Adoma pour son logement, courant sur la période de juillet 2012 à juin 2014 ; que pour les années 2006, 2007, et 2011, il verse les mêmes pièces que pour l'année 2005 ainsi que des avis d'imposition qui ne font état d'aucun revenu ; que dès lors, ces documents ne permettent pas d'établir le caractère habituel et continu de sa présence en France pour chacune de ces années ; qu'ainsi, le préfet n'était pas tenu de saisir la commission du titre de séjour avant de se prononcer sur la demande dont l'avait saisi le requérant ;

5. Considérant en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales: " 1°) Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2°) Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile susvisé " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit: (...) / 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée (...) " ;

6. Considérant que si M. B...fait valoir qu'il vit en France depuis 1999, qu'il dispose d'attaches familiales sur le territoire français où résident sa compagne et son fils, né le 27 septembre 2011 et qu'il a reconnu le 14 novembre 2012, et qu'ils vivent ensemble depuis 2012, il ressort toutefois de l'ensemble des pièces du dossier qu'il ne justifie pas de sa présence en France depuis 1999, ni de la perte de ses attaches dans son pays d'origine où vivent notamment ses six frères et soeurs, la preuve du décès de ses parents n'étant pas rapportée ; qu'il n'établit pas davantage vivre avec sa concubine et son enfant ni contribuer à l'éducation et l'entretien de celui-ci ; qu'enfin il n'établit pas être dans l'impossibilité de reconstituer sa cellule familiale avec la mère de son enfant, également ressortissante comorienne dont la régularité du séjour en France n'est pas établie ; que par suite, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce et eu égard aux effets d'une mesure de refus de séjour assortie d'une obligation de quitter le territoire français, l'arrêté contesté n'a pas porté au droit de M. B...au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise ; que, dès lors, cet arrêté n'a pas méconnu les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni les dispositions précitées du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que pour les mêmes motifs, il n'est pas plus entaché d'erreur manifeste d'appréciation ;

7. Considérant en quatrième lieu, qu'il résulte de ce qui a été dit au point 6 que M. B... ne justifie pas de considérations humanitaires ou de motifs exceptionnels au sens des dispositions précitées de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

8. Considérant enfin, qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant du 26 janvier 1990 : " dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale " ; qu'il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ;

9. Considérant qu'ainsi qu'il a été dit au point 6, M. B...n'établit pas que sa cellule familiale ne pourrait être reconstituée dans son pays d'origine ; que par les pièces qu'il produit, le requérant n'établit pas que son enfant souffre d'une pathologie nécessitant pour lui de rester en France ; qu'enfin la circonstance que son fils soit scolarisé en France depuis un an à la date de la décision attaquée ne suffit pas à établir que l'arrêté attaqué aurait porté atteinte à l'intérêt supérieur de l'enfant ; que dès lors le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3-1° de la convention des droits de l'enfant susvisée doit être écarté ;

10. Considérant qu'il résulte de ce qui précède le refus de titre de séjour opposé à M. B...n'est entaché d'aucune illégalité ; que, dès lors, le moyen tiré de l'exception d'illégalité du refus de titre de séjour présenté à l'appui des conclusions contestant l'obligation de quitter le territoire français ne peut qu'être écarté ; que M. B...n'est pas plus fondé à exciper, à l'appui des conclusions dirigées contre la décision fixant le pays de destination, de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français prise à son encontre ;

11. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles tendant à l'application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D...B...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet du Val-de-Marne.

Délibéré après l'audience du 24 novembre 2015, à laquelle siégeaient :

- Mme Hamon, président,

- M. Privesse, premier conseiller,

- Mme d'Argenlieu, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 8 décembre 2015.

Le rapporteur,

J-C. PRIVESSELe président assesseur,

En application de l'article R. 222-26 du code

de justice administrative

P. HAMON

Le greffier,

A-L. CALVAIRELa République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

''

''

''

''

2

N° 15PA00590


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 15PA00590
Date de la décision : 08/12/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : Mme HAMON
Rapporteur ?: M. Jean-Claude PRIVESSE
Rapporteur public ?: M. CANTIE
Avocat(s) : BOZIZE

Origine de la décision
Date de l'import : 20/01/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2015-12-08;15pa00590 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award