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31/12/2015 | FRANCE | N°15PA00639

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2ème chambre, 31 décembre 2015, 15PA00639


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société à responsabilité limitée (SARL) Café Jade a demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2005, 2006 et 2007 et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés pour la période du 1er juillet 2004 au

30 juin 2006.

Par un jugement n° 1313014/2-2 du 8 décembre 2014, le Tribunal adminis

tratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire co...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société à responsabilité limitée (SARL) Café Jade a demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2005, 2006 et 2007 et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés pour la période du 1er juillet 2004 au

30 juin 2006.

Par un jugement n° 1313014/2-2 du 8 décembre 2014, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire complémentaire enregistrés les 9 février et

9 décembre 2015, la SARL Café Jade, représentée par MeA..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement n° 1313014/2-2 du 8 décembre 2014 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2005, 2006 et 2007 et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés pour la période du

1er juillet 2004 au 30 juin 2006.

Elle soutient que :

- la méthode de reconstitution des recettes, fondée sur une extrapolation des recettes espèces, a un caractère sommaire ou vicié ;

- la fermeture pour travaux de l'établissement, du 2 novembre 2005 au 25 décembre 2005, n'a pas été prise en compte ;

- un pourcentage de 13 % correspondant aux pourboires doit être retenu au titre des charges déductibles ;

- c'est à tort que le service a refusé de comptabiliser en charges les rémunérations de la gérante ;

- le dirigeant de la société ne pouvait être présumé bénéficiaire des distributions occultes ;

- il y a lieu de réduire à 10 % la majoration pour manquement délibéré de 40 % appliquée sur le fondement de l'article 1729 du code général des impôts, notamment au regard du dégrèvement partiel du 10 juillet 2013.

Par un mémoire en défense enregistré le 16 juin 2015, le ministre des finances et des comptes publics, conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par la SARL Café Jade ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Legeai,

- les conclusions de M. Egloff, rapporteur public.

1. Considérant que la société à responsabilité limitée Café Jade, qui exploite une brasserie de même nom, sise 10 rue de Buci à Paris, relève régulièrement appel du jugement n° 1313014/2-2 du 8 décembre 2014 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2005, 2006 et 2007 et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés pour la période du 1er juillet 2004 au 30 juin 2006 suite à une vérification de sa comptabilité ;

Sur le bien-fondé des impositions :

En ce qui concerne la charge de la preuve :

3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 192 du livre des procédures fiscales : "Lorsqu'une des commissions visées à l'article L.59 est saisie d'un litige ou d'un e rectification, l'administration supporte la charge de la preuve en cas de réclamation, quel que soit l'avis rendu par la commission. Toutefois, la charge de la preuve incombe au contribuable lorsque la comptabilité présente de graves irrégularités et que l'imposition a été établie conformément à l'avis de la commission. La charge de la preuve des graves irrégularités invoquées par l'administration incombe, en tout état de cause, à cette dernière lorsque le litige ou la rectification est soumis au juge " ;

4. Considérant qu'il est constant que les bases d'imposition de la SARL Café Jade, dont la comptabilité a été écartée comme non probante au regard des graves irrégularités constatées lors de la vérification, ont été établies conformément à l'avis émis le 16 novembre 2009 par la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires ; que, par suite, il appartient à l'appelante, en application des dispositions précitées du deuxième alinéa de l'article L. 192 du livre des procédures fiscales, d'apporter la preuve de l'exagération de ses bases d'imposition ;

En ce qui concerne la méthode de reconstitution des recettes :

5. Considérant, en premier lieu, que la SARL Café Jade conteste la méthode de reconstitution de ses recettes retenue par l'administration, au motif que la répartition par trop égale retenue des recettes encaissées en espèces entre la première quinzaine et la seconde quinzaine de chaque mois constitue une méthode viciée qui aboutit à des résultats disproportionnés ; que, toutefois, il résulte de l'instruction que, pour chacun des exercices vérifiés, l'enregistrement chronologique des tickets Z était interrompu, au cours de la deuxième quinzaine de chaque mois, bien avant l'heure de fermeture du restaurant, alors que des paiements par carte bancaire étaient enregistrés, et que les recettes espèces comptabilisées diminuaient dans de fortes proportions pendant cette période, alors que les recettes provenant d'autres modes de paiement restaient stables ; que, dans ces conditions, le vérificateur était fondé à reconstituer les recettes omises en ajoutant au chiffre d'affaires déclaré le montant de la différence entre les espèces comptabilisées au titre de la première quinzaine de chaque mois et celles comptabilisées au cours de la seconde quinzaine ; que la société requérante ne fait état d'aucune circonstance de nature à expliquer les anomalies et incohérences relevées dans sa comptabilité ; que le moyen tiré de ce que le vérificateur n'a pas tenu compte des vacances scolaires ou de la météo est dépourvu de précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé ; que, d'autre part, si l'appelante fait valoir que doit être retenue une répartition des paiements en espèces de 60 % pour la première quinzaine et 40 % pour la seconde quinzaine de chaque mois, notamment pour la période du 2 novembre au 25 décembre 2005 en raison d'une fermeture de l'établissement pour travaux, elle ne produit aucun élément probant à l'appui de sa prétention, alors que la répartition des paiements en espèces finalement retenue par le service dans sa décision de dégrèvement partiel du 10 juillet 2013, correspond à une répartition de 57 % pour la première quinzaine et 43 % pour la seconde quinzaine de chaque mois, proportion qui se fonde sur une comparaison avec les recettes comptabilisées au titre des exercices antérieurs ; que, par ailleurs, compte tenu de la méthode retenue, qui se fonde sur le montant des recettes espèces comptabilisée au cours de la première quinzaine de chaque mois, la fermeture invoquée, entre le 2 novembre et le 25 décembre 2005, est nécessairement sans incidence sur les montant reconstitué des recettes, aucune recette afférente aux mois de novembre et décembre 2005 n'ayant été retenue ;

En ce qui concerne les charges admises en déduction du chiffre d'affaires :

6. Considérant, d'une part, que la SARL Café Jade soutient que le pourcentage de charges admis en déduction du chiffre d'affaires doit être porté à 38 % au lieu de 25 % afin de tenir compte des pourboires versés à ses employés ; qu'elle fait valoir que les pourboires reversés aux employés représentent 13,20 % du chiffre d'affaires déclaré hors taxe ; que, toutefois, l'appelante, qui ne produit à l'appui de sa demande aucune pièce justificative, n'établit pas le versement effectif, à ses employés, de pourboire théoriques, calculés sur les recettes non comptabilisées; que, par suite, sa demande ne peut qu'être écarté ;

7. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 39 du code général des impôts : " Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant, sous réserve des dispositions du 5, notamment : 1º Les frais généraux de toute nature, les dépenses de personnel et de main-d'oeuvre, le loyer des immeubles dont l'entreprise est locataire. Toutefois les rémunérations ne sont admises en déduction des résultats que dans la mesure où elles correspondent à un travail effectif et ne sont pas excessives eu égard à l'importance du service rendu. Cette disposition s'applique à toutes les rémunérations directes ou indirectes, y compris les indemnités, allocations, avantages en nature et remboursements de frais (...) " ; qu'en vertu des règles gouvernant l'attribution de la charge de la preuve devant le juge administratif, s'il incombe, en principe, à chaque partie d'établir les faits nécessaires au succès de sa prétention, les éléments de preuve qu'une partie est seule en mesure de détenir ne sauraient être réclamés qu'à celle-ci ; qu'il appartient, dès lors, au contribuable, que la commission départementale des impôts ait été saisie ou non, de justifier tant du montant des charges qu'il entend déduire du bénéfice net défini à l'article 38 du code général des impôts que de la correction de leur inscription en comptabilité, c'est-à-dire du principe même de leur déductibilité ; que le contribuable apporte cette justification par la production de tous éléments suffisamment précis portant sur la nature de la charge en cause, ainsi que sur l'existence et la valeur de la contrepartie qu'il en a retirée ; que, dans l'hypothèse où le contribuable s'acquitte de cette obligation, il incombe ensuite au service, s'il s'y croit fondé, d'apporter la preuve de ce que la charge en cause n'est pas déductible par nature, qu'elle est dépourvue de contrepartie, qu'elle a une contrepartie dépourvue d'intérêt pour le contribuable ou que la rémunération de cette contrepartie est excessive ;

8. Considérant que l'administration a réintégré dans les résultats de la SARL Café Jade les rémunérations allouées à MmeB..., gérante de la société, ainsi que des cotisations de retraite complémentaire prises en charge à son profit, aux motifs qu'un salarié était chargé de la gestion courante de l'établissement, que la présence de la gérante dans les locaux de l'établissement n'a jamais été constatée lors du contrôle et que l'intéressée avait mandaté son mari pour la représenter pendant les opérations de contrôle ; qu'à l'appui de sa contestation, la SARL Café Jade n'apporte aucun élément de nature à établir la nature des activités de la gérante et son rôle dans la gestion de l'établissement, alors même qu'il a été relevé, lors des opérations de contrôle, que l'intéressée n'apparaissait pas dans la prise en charge de l'embauche du personnel, ni dans le suivi et le contrôle des encaissements ou dans les relations avec les tiers ; que, dans ces conditions, faute de tout élément de preuve, qu'elle est seule en mesure d'apporter, la société appelante n'est pas fondée à contester les réintégrations opérées ;

9. Considérant que le moyen tiré de ce que l'administration ne pouvait pas valablement regarder les époux B...comme bénéficiaires des revenus distribués résultant des rehaussements apportés aux résultats déclarés est sans incidence sur le présent litige, qui porte sur les impositions établies au nom de la société appelante ;

Sur les pénalités pour manquement délibéré :

10. Considérant qu'aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : a. 40 % en cas de manquement délibéré ; b) 80 % en cas d'abus droit (...) " ; que les dispositions précitées de l'article 1729 du code général des impôts proportionnent les pénalités selon les agissements commis par le contribuable, prévoient des taux de majoration différents selon la qualification qui peut être donnée au comportement de celui-ci ; que le juge de l'impôt, après avoir exercé son plein contrôle sur les faits invoqués et la qualification retenue par l'administration, décide, dans chaque cas, selon les résultats de ce contrôle, soit de maintenir ou d'appliquer la majoration effectivement encourue au taux prévu par la loi, sans pouvoir moduler celui-ci pour tenir compte de la gravité de la faute commise par le contribuable, soit, s'il estime que l'administration n'établit, ni que celui-ci se serait rendu coupable de manoeuvres frauduleuses, ni qu'il aurait agi de mauvaise foi, de ne laisser à sa charge que des intérêts de retard ;

11. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le juge de l'impôt ne peut, contrairement à ce que soutient la SARL Café Jade qu'infirmer ou confirmer la pénalité précitée sans pouvoir la moduler ; qu'en l'espèce, la proposition de rectification en date du 16 octobre 2008 précise que le gérant de la SARL Café Jade SARL s'est délibérément abstenu de comptabiliser une part correspondant à 25 % de ses recettes au cours des trois exercices vérifiés et ce alors même que sa qualité de gérant impliquait qu'il ait à connaître des opérations de comptabilité et du montant des recettes ; que, par suite, en relevant notamment le caractère non probant de la comptabilité et le caractère répétitif des omissions constatées, l'administration doit être regardée comme rapportant la preuve de l'intention délibérée de l'appelante d'éluder l'impôt ; que, dés lors, c'est à bon droit qu'elle a fait application des pénalités pour manquement délibéré de 40 % contestées ;

12. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SARL Café Jade n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, sa requête devant la Cour, ne peuvent qu'être rejetée ,en toutes ses conclusions ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la SARL Café Jade est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL Café Jade et au ministre des finances et des comptes publics.

Copie en sera adressée au directeur régional des finances publiques d'Ile-de-France et du département de Paris.

Délibéré après l'audience du 16 décembre 2015, à laquelle siégeaient :

Mme Brotons, président de chambre,

Mme Appèche, président assesseur,

M. Legeai, premier conseiller,

Lu en audience publique le 31 décembre 2015.

Le rapporteur,

A. LEGEAI Le président,

I. BROTONS Le greffier,

S. DALL'AVA

La République mande et ordonne au ministre des finances et des comptes publics en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 15PA00639


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 15PA00639
Date de la décision : 31/12/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme BROTONS
Rapporteur ?: M. Alain LEGEAI
Rapporteur public ?: M. EGLOFF
Avocat(s) : SCP PINOS-COTTET

Origine de la décision
Date de l'import : 20/01/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2015-12-31;15pa00639 ?
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