Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société Abi One a demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés à laquelle elle a été assujettie au titre de l'exercice 2008 ;
Par un jugement n° 1313072/1-3 du 14 novembre 2014, le Tribunal administratif de Paris a rejeté cette demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 7 janvier 2015, la société Abi One, représentée par
MeA..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du Tribunal administratif de Paris du 14 novembre 2014 ;
2°) de prononcer la décharge en droits et pénalités des impositions contestées ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient que :
- l'administration n'a pas donné de base légale à sa motivation en retenant deux motifs distincts et contradictoires ;
- la réalité de la convention d'assistance avec la société Equinox et la matérialité des prestations effectuées par cette dernière sont établies ;
- il n'existait aucune obligation légale de faire enregistrer cette convention ;
- si le règlement de ces factures a été effectué au profit d'une société tierce, il s'agit d'un règlement pour ordre et pour compte auprès d'une société détenue par la société qui avait émis les factures et n'a pas abandonné la créance qu'elle détenait sur la requérante.
Par un mémoire en défense, enregistré le 4 juin 2015, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Il soutient que :
- les moyens soulevés par la société ne sont pas fondés.
Par ordonnance du 18 novembre 2015, la clôture d'instruction a été fixée au
21 décembre 2015.
Vu :
- les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Magnard,
- et les conclusions de M. Egloff, rapporteur public.
1. Considérant que la société Abi One, qui exerce une activité de commerce de gros de fournitures et d'équipements industriels, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur les exercices 2007 à 2009 ; que le vérificateur a, en particulier, rejeté des charges de sous-traitance facturées par une société détenue par les deux associés de la société requérante, d'un montant total de 475 773,94 euros, au titre de l'exercice 2008 ; que la société Abi One fait appel du jugement n° 1313072/1-3 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés à laquelle elle a été assujettie en conséquence au titre de l'exercice 2008 ;
2. Considérant en premier lieu qu'il résulte clairement de la proposition de rectification en date du 7 février 2011 reçue par la société Abi One que le vérificateur a fondé la réintégration des charges litigieuses dans le bénéfice imposable de la société requérante sur les dispositions du 1 de l'article 39 du code général des impôts ; que ce n'est qu'à titre subsidiaire qu'il a relevé que, si les charges devaient s'avérer justifiées en cours de procédure, une rectification du même montant pourrait être substituée à la première, pour abandon de créance injustifié, sur le fondement du 2 de l'article 38 du code général des impôts ; que la société Abi One n'est ainsi pas fondée à soutenir que l'administration a privé de base légale le rejet des charges en le fondant sur deux dispositions distinctes et incompatibles ;
3. Considérant en deuxième lieu qu'aux termes du 1. de l'article 39 du code général des impôts, rendu applicable à l'impôt sur les sociétés par les dispositions de l'article 209 du même code : " Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant (...) notamment : / 1° Les frais généraux de toute nature (...) " ; que si, en vertu des règles gouvernant l'attribution de la charge de la preuve devant le juge administratif, applicables sauf loi contraire, il incombe, en principe, à chaque partie d'établir les faits qu'elle invoque au soutien de ses prétentions, les éléments de preuve qu'une partie est seule en mesure de détenir ne sauraient être réclamés qu'à celle-ci ; qu'il appartient, dès lors, au contribuable, pour l'application des dispositions précitées du code général des impôts, de justifier tant du montant des charges qu'il entend déduire du bénéfice net défini à l'article 38 du code général des impôts que de la correction de leur inscription en comptabilité, c'est-à-dire du principe même de leur déductibilité ; que le contribuable apporte cette justification par la production de tous éléments suffisamment précis portant sur la nature de la charge en cause, ainsi que sur l'existence et la valeur de la contrepartie qu'il en a retirée ; que dans l'hypothèse où le contribuable s'acquitte de cette obligation, il incombe ensuite au service, s'il s'y croit fondé, d'apporter la preuve de ce que la charge en cause n'est pas déductible par nature, qu'elle est dépourvue de contrepartie, qu'elle a une contrepartie dépourvue d'intérêt pour le contribuable ou que la rémunération de cette contrepartie est excessive ;
4. Considérant qu'en vertu de ces principes, lorsqu'une entreprise a déduit en charges une dépense réellement supportée, conformément à une facture régulière relative à un achat de prestations ou de biens dont la déductibilité par nature n'est pas contestée par l'administration, celle-ci peut demander à l'entreprise qu'elle lui fournisse tous éléments d'information en sa possession susceptibles de justifier la réalité et la valeur des prestations ou biens ainsi acquis ; que la seule circonstance que l'entreprise n'aurait pas suffisamment répondu à ces demandes d'explication ne saurait suffire à fonder en droit la réintégration de la dépense litigieuse, l'administration devant alors fournir devant le juge tous éléments de nature à étayer sa contestation du caractère déductible de la dépense ; que le juge de l'impôt doit apprécier la valeur des explications qui lui sont respectivement fournies par le contribuable et par l'administration ;
5. Considérant qu'il résulte de l'instruction que la société Abi One n'a produit devant le vérificateur, pour justifier des charges en litige, que quatre factures dont trois ne mentionnaient pas d'objet ; que l'objet de la quatrième facture est d'ailleurs libellé de manière imprécise ; que ce n'est qu'au stade de la réclamation contentieuse qu'elle a produit devant l'administration une convention d'assistance entre elle et sa sous-traitante alléguée, datée du 1er décembre 2007, prévoyant des prestations pour le montant finalement facturé ; que si, comme elle le soutient, l'enregistrement d'un document de cette nature ne résulte d'aucune obligation légale, il appartient à l'administration, sous le contrôle du juge, d'apprécier le caractère probant des pièces fournies en fonction de l'ensemble des éléments du dossier ; que compte tenu du caractère tardif de cette production et des liens existant entre l'intéressée et sa sous-traitante alléguée, ce document, en l'absence de date certaine, ne peut être regardé comme probant ; que la société requérante n'a produit devant le tribunal qu'un récapitulatif des prestations facturées, non daté, non signé, dépourvu d'en-tête et ne correspondant pas à l'objet de la seule facture qui en comporte un ; que devant la Cour, elle se borne à produire le même document, transféré sur papier à en-tête, signé et daté ; que, contrairement à ce qui est soutenu, les documents produits en appel ne permettent d'identifier ni la nature des prestations en cause, ni la matérialité de leur exécution, et cela alors même que la société Abi One n'employait pas de salarié ; que l'administration était par suite fondée à rejeter les charges litigieuses ; qu'il n'y a dès lors pas lieu d'examiner l'argumentation de la requérante à l'encontre de la rectification fondée sur un abandon de créance injustifié, proposée par l'administration à titre subsidiaire au cas où les charges s'avèreraient justifiées ;
6. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société Abi One n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ; que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'État, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, le versement de la somme que la société requérante demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la société Abi One est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société Abi One et au ministre des finances et des comptes publics.
Copie en sera adressée au chef des services fiscaux chargé de la direction nationale de vérification des situations fiscales.
Délibéré après l'audience du 1er juin 2016, à laquelle siégeaient :
- Mme Appèche, président,
- M. Magnard, premier conseiller,
- M. Legeai, premier conseiller.
Lu en audience publique le 15 juin 2016.
Le rapporteur,
F. MAGNARDLe président assesseur,
En application de l'article R. 222-26 du code
de justice administrative
S. APPECHE
Le greffier,
S. DALL'AVA La République mande et ordonne au ministre des finances et des comptes publics en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 15PA00090