Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme A...B...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du
16 mars 2016 par lequel le préfet de police a ordonné sa reconduite à la frontière et a décidé son placement en rétention administrative.
Par un jugement n° 1604053/8 du 19 mars 2016, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Paris a fait droit à sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête sommaire, un mémoire ampliatif et deux mémoires complémentaires, enregistrés respectivement les 4 mai, 23 mai, 15 juin et 11 octobre 2016, le préfet de police demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1604053/8 du 19 mars 2016 ;
2°) de rejeter la demande présentée par Mme B...devant le Tribunal administratif de Paris.
Il soutient que :
- contrairement à ce qu'a estimé le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Paris, les agissements de Mme B...constituent bien une menace pour l'ordre public, et l'administration était fondée à décider son éloignement du territoire français sur le fondement du 1° de l'article L. 533-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
La requête et les mémoires du préfet de police ont été communiqués à Mme A...B..., qui n'a pas présenté de mémoire en défense, malgré une mise en demeure adressée le 6 juillet 2016.
Par une ordonnance du président de la 2ème chambre de la Cour, la clôture de l'instruction a été fixée au 11 janvier 2017 à 12 heures.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Appèche a été entendu au cours de l'audience publique ;
1. Considérant que, par un arrêté en date du 16 mars 2016, le préfet de police a ordonné la reconduite à la frontière et décidé le placement en rétention administrative de MmeB..., ressortissante paraguayenne ; que, faisant droit à la demande de cette dernière, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Paris a, par un jugement n° 1604053/8 du 19 mars 2016, annulé cet arrêté ; que le préfet de police relève régulièrement appel de ce jugement ;
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 533-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative compétente peut, par arrêté motivé, décider qu'un étranger, sauf s'il est au nombre de ceux visés à l'article L. 121-4, doit être reconduit à la frontière : / 1° Si son comportement constitue une menace pour l'ordre public. / La menace pour l'ordre public peut s'apprécier au regard de la commission des faits passibles de poursuites pénales sur le fondement des articles du code pénal cités au premier alinéa de l'article L. 313-5 du présent code, ainsi que des 1°, 4°, 6° et 8° de l'article 311-4, de l'article 322-4-1 et des articles 222-14, 224-1 et 227-4-2 à 227-7 du code pénal. / 2° Si l'étranger a méconnu l'article L. 5221-5 du code du travail. / Le présent article ne s'applique pas à l'étranger qui réside régulièrement en France depuis plus de trois mois. / Les articles L. 511-4, L. 512-1 à L. 512-3, le premier alinéa de l'article L. 512-4, le premier alinéa du I de l'article L. 513-1 et les articles L. 513-2, L. 513-3, L. 514-1, L. 514-2 et L. 561-1 du présent code sont applicables aux mesures prises en application du présent article " ; qu'aux termes de l'article L. 5221-5 du code du travail : " Un étranger autorisé à séjourner en France ne peut exercer une activité professionnelle salariée en France sans avoir obtenu au préalable l'autorisation de travail mentionnée au 2° de l'article L. 5221-2 " ;
3. Considérant que MmeB..., ressortissante paraguayenne née le 2 février 1994 à Assomption, a été interpellée le 16 mars 2016 pour des faits de racolage sur la voie publique ; que pour annuler la mesure de reconduite à la frontière prise à son encontre par le préfet de police sur le fondement du 1° de l'article L. 533-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Paris a estimé que c'est au prix d'une erreur d'appréciation que l'autorité préfectorale avait estimé que le comportement de l'intéressée constituait une menace pour l'ordre public ; que le préfet de police conteste ce motif d'annulation de son arrêté ;
4. Considérant que, si l'exercice de la prostitution est parfois lié à d'autres activités qui constituent une menace pour l'ordre public, cette pratique, qui ne relève d'ailleurs pas de la catégorie des délits réprimés par le code pénal, ne suffit pas à elle seule à caractériser une menace pour l'ordre public ; que, toutefois, le fait de procéder, publiquement, au racolage d'autrui en vue de l'inciter à des relations sexuelles en échange d'une rémunération ou d'une promesse de rémunération constituait, à la date de l'arrêté contesté, une infraction punie de deux mois d'emprisonnement et de 3 750 euros d'amende en vertu des dispositions de l'article 225-10-1 du code pénal alors encore en vigueur ; qu'en tout état de cause, et alors même que Mme B...n'aurait pas fait l'objet de poursuites pénales, il ressort des éléments relevés par le préfet de police que les conditions dans lesquelles l'intéressée s'adonnait habituellement à l'activité de prostitution, dans la zone du bois de Boulogne, concourraient à la recrudescence de la prostitution dans ce secteur caractérisé par une augmentation de la délinquance liée directement ou indirectement à la prostitution, et notamment des vols et agressions, des infractions à la législation sur le port d'armes ou sur les stupéfiants et des atteintes à la tranquillité et à la sécurité publiques ; que par suite, le préfet de police est fondé à soutenir que c'est à tort que le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Paris a, pour le motif susanalysé, estimé qu'il n'avait pu légalement décider, sur le fondement du 1° de l'article L. 533-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'éloignement de MmeB... ;
5. Considérant toutefois qu'il appartient à la Cour, saisie du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens présentés par Mme B...devant le tribunal administratif ;
6. Considérant, en premier lieu que le signataire de l'arrêté attaqué, adjoint au chef du huitième bureau de la préfecture de police, disposait d'une délégation de signature à cet effet consentie par arrêté n° 2016-00100 en date du 26 février 2016, régulièrement publié au bulletin municipal officiel de la ville de Paris le 17 février 2016, pour signer tous les actes dans la limite de ses attributions, en cas d'absence ou d'empêchement d'autorités dont il n'est pas établi qu'elles n'auraient pas été absentes ou empêchées lors de la signature de l'acte attaqué ; qu'ainsi, le moyen tiré de l'incompétence du signataire dudit arrêté, en ce qu'il décide la reconduite à la frontière et le placement en rétention de MmeB..., doit être écarté ;
7. Considérant, en deuxième lieu, que le préfet de police énonce de manière suffisamment précise, dans son arrêté, les circonstances de droit et de fait sur lesquelles il se fonde pour décider la reconduite à la frontière de Mme B...et le placement de celle-ci en rétention administrative ; que le moyen tiré du défaut ou de l'insuffisance de motivation dudit arrêté manque en fait ;
8. Considérant, en troisième lieu, que de ce qui précède, il résulte que Mme B...n'est pas fondée à contester la légalité de la mesure de reconduite à la frontière prise à son encontre ; que par voie de conséquence, elle n'est pas davantage fondée à exciper de l'illégalité de cette mesure à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision de placement en rétention administrative dont elle a fait l'objet ;
9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le préfet de police est fondé à obtenir l'annulation du jugement attaqué, et le rejet de la demande présentée devant le Tribunal administratif de Paris par Mme B...;
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1604053/8 du Tribunal administratif de Paris du 19 mars 2016 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par Mme B...devant le Tribunal administratif de Paris est rejetée.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à MmeA... B....
Copie en sera adressée au préfet de police.
Délibéré après l'audience du 1er février 2017 à laquelle siégeaient :
- Mme Brotons, président de chambre,
- Mme Appèche, président assesseur,
- Mme Jimenez, premier conseiller.
Lu en audience publique le 22 février 2017.
Le rapporteur,
S. APPECHE
Le président,
I. BROTONS
Le greffier,
S. DALL'AVA
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 16PA01512