Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. D...B...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 18 février 2015 par lequel le préfet de police a rejeté sa demande de regroupement familial en faveur de son époux, ensemble sa décision du 23 mars 2015 rejetant son recours gracieux et la décision du ministre de l'intérieur du 17 mars 2015 rejetant son recours hiérarchique, d'enjoindre au préfet de police de délivrer à M. A...une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans le cadre de la procédure de regroupement familial ou à titre subsidiaire de réexaminer sa demande et de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me C...de la somme de 1 000 euros au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un jugement n° 1508261 du 10 novembre 2015, le Tribunal administratif de Paris a fait droit à la demande de M. B...et a annulé l'arrêté attaqué, ensemble la décision du préfet de police du 23 mars 2015 et la décision du ministre de l'intérieur du 17 mars 2015, et a enjoint au préfet de police de délivrer l'autorisation de regroupement familial sollicitée par M. B...dans le délai de trois mois à compter de la notification du jugement.
Procédure devant la Cour :
Par un recours enregistré le 30 décembre 2015, le préfet de police demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du 10 novembre 2015 du Tribunal administratif de Paris ;
2°) de rejeter la requête de M.B... présentée devant le tribunal.
Il soutient que sur les douze mois précédant le dépôt de la demande de regroupement familial le demandeur et son conjoint ne justifiaient que d'un revenu global de 914 euros en moyenne, ce qui est inférieur au SMIC et justifie le rejet de la demande sur le fondement de l'article L. 411-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Par un mémoire enregistré le 13 avril 2016, M B...conclut au rejet de cette requête et à ce que soit mis à la charge de l'Etat le versement à Me C...de la somme de 1 500 euros au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.
M. B...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Paris du 18 mars 2016.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Le rapport de Mme Labetoulle a été entendu au cours de l'audience publique.
1. Considérant que M.B..., ressortissant des Etats-Unis d'Amérique, né le 6 juillet 1955, titulaire d'une carte de résident valable 10 ans jusqu'au 27 septembre 2022, a sollicité le bénéfice du regroupement familial en faveur de son époux sur le fondement des dispositions des articles L. 411-1 et suivants du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que par l'arrêté attaqué du 18 février 2015, le préfet de police a rejeté sa demande au motif que ses ressources étaient insuffisantes ; que sur recours gracieux, le préfet de police a confirmé son refus par une décision du 23 mars 2015 tandis que le ministre de l'intérieur a rejeté son recours hiérarchique par une décision du 17 mars 2015 ; que M. B...a dès lors saisi le Tribunal administratif de Paris qui a annulé cet arrêté et ces décisions par jugement du 10 novembre 2015 dont le préfet de police interjette appel ;
Sur le bien-fondé du jugement :
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 411-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Le ressortissant étranger qui séjourne régulièrement en France depuis au moins dix-huit mois, sous couvert d'un des titres d'une durée de validité d'au moins un an prévus par le présent code ou par des conventions internationales, peut demander à bénéficier de son droit à être rejoint, au titre du regroupement familial, par son conjoint, si ce dernier est âgé d'au moins dix-huit ans, et les enfants du couple mineurs de dix-huit ans (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 411-5 du même code : " Le regroupement familial ne peut être refusé que pour l'un des motifs suivants : 1° Le demandeur ne justifie pas de ressources stables et suffisantes pour subvenir aux besoins de sa famille. Sont prises en compte toutes les ressources du demandeur et de son conjoint (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 411-4 du même code : " Pour l'application du 1° de l'article 411-5, les ressources du demandeur et de son conjoint qui alimenteront de façon stable le budget de la famille sont appréciées sur une période de douze mois par référence à la moyenne mensuelle du salaire minimum de croissance au cours de cette période. Ces ressources sont considérées comme suffisantes lorsqu'elles atteignent un montant équivalent à : - cette moyenne pour une famille de deux ou trois personnes (...) " ; qu'aux termes de l'article R.421-4 du même code : " A l'appui de sa demande de regroupement, le ressortissant étranger présente les copies intégrales des pièces énumérées au 1° et joint les copies des pièces énumérées aux 2° à 4° des pièces suivantes : (...)3° Les justificatifs des ressources du demandeur et, le cas échéant, de son conjoint, tels que le contrat de travail dont il est titulaire ou, à défaut, une attestation d'activité de son employeur, les bulletins de paie afférents à la période des douze mois précédant le dépôt de sa demande, ainsi que le dernier avis d'imposition sur le revenu en sa possession, dès lors que sa durée de présence en France lui permet de produire un tel document, et sa dernière déclaration de revenus. La preuve des revenus non salariaux est établie par tous moyens " ;
3. Considérant que pour annuler les décisions contestées portant refus de regroupement familial, le tribunal administratif a estimé qu'elles étaient entachées d'une erreur d'appréciation au regard des dispositions précitées dès lors que les ressources du couple excédaient la moyenne mensuelle du salaire minimum de croissance au cours de la période correspondant aux douze mois précédant le dépôt de la demande ; que pour la période comprise entre octobre 2013 et septembre 2014, soit au cours des douze mois ayant précédé le dépôt de la demande de regroupement familial présentée par M. B...le 16 octobre 2014, le préfet de police fait à juste titre valoir en se fondant sur les pièces produites par M. B...devant les premiers juges que son revenu total pour cette période s'élève à 4 494 euros net soit un montant mensuel moyen de 374 euros ; que de même il ressort des pièces produites que M. A...justifie pour la même période d'un revenu total de 6 464 euros net, soit un revenu mensuel moyen de 539 euros ne correspondant d'ailleurs pas à un revenu stable mais à la rémunération d'un stage entre octobre 2013 et mars 2014 et à une activité professionnelle accessoire de mai à septembre 2014 ; qu'ainsi le montant mensuel des ressources du couple s'élevait pour la période considérée à 913 euros ; que M. B... fait cependant valoir qu'en cas de progression des revenus après le dépôt de cette demande et avant l'intervention de la décision attaquée il est possible à l'autorité administrative de prendre en compte cette évolution ; que toutefois il ressort des pièces du dossier d'une part que si les revenus de M. A...ont connu une évolution favorable entre le mois d'octobre 2014 et celui de février 2015, ceux de M.B..., photographe professionnel travaillant à son compte et dont les revenus varient dans des proportions importantes, ont baissé, et d'autre part que les revenus du couple ne présentaient pas un caractère de stabilité et de régularité justifiant que le préfet de police prenne en compte cette évolution ; que le préfet de police a pu dès lors sans erreur d'appréciation se fonder sur les revenus des douze mois ayant précédé le dépôt de la demande, d'un montant global inférieur à la moyenne mensuelle du salaire minimum de croissance, pour rejeter la demande présentée par M. B...en faveur de son conjoint ; qu'il est par suite fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a jugé que son arrêté était pour ce motif entaché d'erreur d'appréciation ;
4. Considérant, toutefois, qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés en première instance par M. B... ;
5. Considérant qu'il résulte des dispositions précitées des articles L. 411-5 et R. 411-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que pour apprécier si l'étranger qui présente une demande de regroupement familial en faveur de son conjoint satisfait aux conditions de ressources posées par ces dispositions l'autorité administrative doit prendre en compte les ressources de ce demandeur mais aussi de son conjoint ; qu'il ressort des termes mêmes de l'arrêté attaqué que le préfet de police n'a pris en compte que les seules ressources de M. B...à l'exclusion de celles de M.A... ; que M. B...est par suite fondé à soutenir que l'arrêté attaqué est entaché d'erreur de droit sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de sa demande ;
6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le préfet de police n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 18 février 2015 par lequel il a rejeté la demande de regroupement familial présentée par M. B... en faveur de son époux, ensemble la décision du 23 mars 2015 rejetant son recours gracieux et la décision du ministre de l'intérieur du 17 mars 2015 rejetant son recours hiérarchique ; qu'en revanche, il est fondé à soutenir que c'est à tort que ce jugement lui a enjoint de délivrer à M. B...l'autorisation de regroupement familial sollicitée au bénéfice de M.A... ; qu'en effet, le motif d'annulation de la décision contestée par M.B..., retenu par le présent arrêt implique seulement qu'il soit enjoint au préfet de police de réexaminer la demande de l'intéressé, en application de l'article L. 911-2 du code de justice administrative ; qu'il y a lieu d'enjoindre au préfet de procéder à ce réexamen dans le délai de deux mois suivant la notification du présent arrêt ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'assortir cette injonction du prononcé d'une astreinte ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative présentées en appel par M.B... :
7. Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement au conseil de M. B...de la somme qu'il demande au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
DÉCIDE :
Article 1er : L'article 2 du jugement n°1508261 du Tribunal administratif de Paris du 10 novembre 2015 est annulé.
Article 2: Il est enjoint au préfet de police de réexaminer la demande de regroupement familial présentée par M. B...au bénéfice de M. A...dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 4 : Les conclusions présentées par M. B...au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à M. D...B....
Copie en sera adressée au préfet de police.
Délibéré après l'audience du 3 février 2017, à laquelle siégeaient :
- Mme Fuchs Taugourdeau, président de chambre,
- M. Niollet, président assesseur,
- Mme Labetoulle, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 28 février 2017.
Le rapporteur,
M-I. LABETOULLELe président,
O. FUCHS TAUGOURDEAU
Le greffier,
P. TISSERANDLa République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 15PA04848