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17/05/2017 | FRANCE | N°16PA01507

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2ème chambre, 17 mai 2017, 16PA01507


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. F...B...a saisi le Tribunal administratif de Paris d'un recours pour excès de pouvoir dirigé contre l'arrêté du 29 juillet 2015 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être éloigné d'office faute pour lui d'avoir satisfait à cette obligation dans le délai de trente jours qui lui était imparti.

Par un jugement n° 1519787/3-1 du 29 mars 2016, le Tri

bunal administratif de Paris, faisant droit à la demande de M.B..., a annulé cet arrêt...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. F...B...a saisi le Tribunal administratif de Paris d'un recours pour excès de pouvoir dirigé contre l'arrêté du 29 juillet 2015 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être éloigné d'office faute pour lui d'avoir satisfait à cette obligation dans le délai de trente jours qui lui était imparti.

Par un jugement n° 1519787/3-1 du 29 mars 2016, le Tribunal administratif de Paris, faisant droit à la demande de M.B..., a annulé cet arrêté du 29 juillet 2015 et a mis à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 000 euros à son avocat sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 4 mai 2016, le préfet de police demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1519787/3-1 du 29 mars 2016 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. B...devant ce tribunal.

Il soutient que :

- c'est à tort que les premiers juges ont estimé que M. B... justifiait résider habituellement en France depuis plus de dix ans à la date de l'arrêté contesté, et qu'ils ont annulé cet arrêté au motif qu'il aurait était entaché d'un vice de procédure faute de consultation préalable de la commission du titre de séjour ;

- les autres moyens invoqués par M. B...devant le tribunal ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense enregistré le 5 janvier 2017, M. B..., représenté par Me C...D..., conclut au rejet de la requête du préfet de police et à la mise à la charge de l'Etat d'une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.

Il soutient que la requête du préfet de police n'est pas fondée, et reprend les moyens qu'il invoquait en première instance.

M. B...a été admis au bénéfice de l'aide juridique totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Paris du 22 novembre 2016.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950, ensemble le décret du 3 mai 1974 portant publication de la convention ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Appèche,

- les conclusions de M. Cheylan rapporteur public,

- et les observations deD..., avocat de M. B....

1. Considérant que M.B..., ressortissant ivoirien né le 8 octobre 1972, entré en France en 2000 selon ses déclarations, a sollicité le 30 janvier 2015 du préfet de police la délivrance d'un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par arrêté du 29 juillet 2015, le préfet de police a refusé de lui délivrer le titre demandé, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être éloigné d'office passé le délai imparti de trente jours pour quitter volontairement la France ; que le préfet de police relève appel du jugement n° 1519787/3-1 du 29 mars 2016 du Tribunal administratif de Paris, en tant qu'il a, à la demande de M. B..., annulé cet arrêté et mis à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 000 euros à l'avocat de l'intéressé ;

Sur le motif d'annulation de l'arrêté préfectoral retenu par le tribunal administratif :

2. Considérant que les premiers juges ont estimé que M. B... justifiait résider habituellement en France depuis plus de dix ans à la date de l'arrêté attaqué, ce que conteste le préfet de police ; qu'ils ont, en conséquence, annulé cet arrêté au motif que le préfet de police s'était irrégulièrement abstenu de consulter au préalable la commission du titre de séjour et que ce faisant, il avait irrégulièrement privé M. B...d'une garantie ;

3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article

L. 311-7. / L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider habituellement en France depuis plus de dix ans. " ;

4. Considérant que M. B...n'établit pas être entré en France en 2000 comme il l'allègue ; que le préfet de police soutient, sans être contredit, que M. B...s'est présenté pour la première fois dans ses services pour y demander un titre de séjour, le 16 avril 2008, titre de séjour qui lui a été délivré en qualité d'étranger malade sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et qui était valable jusqu'au 29 mai 2009 ; que par arrêté du 15 juin 2011, le préfet de police, suivant l'avis du médecin, chef du service médical de la préfecture de police, a rejeté la nouvelle demande d'autorisation de séjour sollicitée par M. B...sur le même fondement ; que le 30 janvier 2015, M. B... a demandé un titre de séjour sur le fondement des dispositions rappelées ci-dessus ;

5. Considérant que pour justifier de sa résidence habituelle sur le territoire français, M. B... ne produit, pour les années 2005, 2006 et 2013, qu'un nombre très limité de documents ; qu'ainsi, pour les années 2005 et 2006, ces documents consistent en deux certificats établis le

15 décembre 2011 par l'établissement psychiatrique de Ville Evrard faisant état d'une hospitalisation du 1er janvier au 11 février 2005 et du 19 au 27 juin 2005 et une attestation du SAMU social de Paris, établie le 19 décembre 2014, indiquant que M. B...a été hébergé 7 nuitées entre le 15 et le 21 septembre 2005, 340 nuitées entre le 26 septembre 2005 et le 31 août 2006 et 3026 nuitées entre le 7 septembre 2006 et le 19 décembre 2014 ; qu'au titre de l'année 2013, outre les mentions figurant sur le document établi par le SAMU social, M. B...ne produit qu'un avis d'impôt sur les revenus établi le 19 juillet 2013 et ne faisant état d'aucun revenu et une carte individuelle d'admission à l'aide médicale d'Etat valable du 1er octobre 2013 au

30 septembre 2014 ; que dans ces conditions, le préfet de police est fondé à soutenir que ces pièces sont trop peu nombreuses et, à elles seules, d'une valeur probante très insuffisante pour tenir pour établi que M. B...résidait de manière habituelle en France depuis plus dix ans le 29 juillet 2015, date de l'arrêté litigieux ; que dès lors, le préfet de police n'était pas tenu de saisir la commission du titre de séjour en application des dispositions précitées et est pas suite fondé à soutenir que c'est à tort que, pour le motif analysé ci-dessus, le tribunal administratif a annulé le refus de titre de séjour opposé à M. B...et par voie de conséquence l'obligation de quitter le territoire dont ce refus était assorti ;

6. Considérant qu'il y a lieu pour la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens invoqués tant devant le tribunal administratif que devant elle par M. B... ;

Sur les autres moyens soulevés par M.B... :

7. Considérant que par un arrêté du 18 juillet 2015, régulièrement publié le 24 juillet 2015 au bulletin officiel municipal de la Ville de Paris, le préfet de police a donné délégation à Mme E...A...pour signer tous les actes dans la limite de ses attributions, au nombre desquelles figure la police des étrangers ; que, dès lors, le moyen tiré de l'incompétence du signataire manque en fait et doit être écarté ;

8. Considérant que l'arrêté préfectoral litigieux comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait sur lesquelles sont auteur s'est fondé pour refuser de faire droit à la demande de titre de séjour présentée par M. B...sur le fondement des dispositions rappelées ci-dessus et assortir ledit refus d'une obligation de quitter le territoire français ; que le moyen tiré du défaut de motivation de cet arrêté doit donc être écarté comme non fondé ; qu'il résulte de la motivation de cet arrêté qu'il a été pris après un examen particulier de la situation personnelle de M. B..., cela alors même que le préfet de police n'aurait pas mentionné dans cet arrêté les problèmes de santé dont souffre M. B..., dès lors qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que celui-ci aurait fait état, à l'appui de sa demande de titre de séjour, de ses problèmes de santé ;

9. Considérant qu'ainsi qu'il a été dit, M. B...ne justifie pas de l'ancienneté alléguée de sa résidence habituelle en France ; que s'il souffre de troubles psychiatriques, pour lesquels il s'est vu délivrer un titre de séjour entre 2008 et 2010, il est constant que, par arrêté du 15 juin 2011, devenu définitif suite à l'arrêt de la cour de céans du 6 novembre 2012, la délivrance d'un nouveau titre de séjour en qualité d'étranger malade lui a été refusée au motif qu'il existait en Côte d'Ivoire des structures à même d'assurer le suivi et de traiter la pathologie dont souffre M.B... ; que dans ces conditions, et nonobstant la circonstance qu'il serait atteint d'une pathologie psychiatrique pour laquelle il s'est vu reconnaître un taux d'invalidité de 80%, M.B..., qui n'a pas d'activité professionnelle en France, est hébergé dans des conditions précaires, ne justifie pas entretenir des liens étroits avec l'une de ses soeurs résidant en France, et n'allègue d'ailleurs pas que celle-ci lui apporterait des aides et soutiens particuliers, ne peut être regardé comme démontrant que son admission au séjour répondait à des considérations humanitaires ou se justifiait au regard de motifs exceptionnels ; qu'en outre, M.B..., qui est célibataire et sans charge de famille, n'est pas dépourvu d'attaches familiales dans son pays puisqu'il indiquait lui-même en 2015 que sa seconde soeur y résidait ; que dans ces conditions, le moyen tiré de ce que le préfet de police aurait commis une erreur manifeste d'appréciation en ne lui délivrant pas à titre exceptionnel un titre de séjour en application des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté comme non fondé ;

10. Considérant qu'eu égard à la situation personnelle et familiale de M. B... rappelée ci-dessus, le refus de titre de séjour qui lui a été opposé et l'obligation de quitter le territoire français dont ce refus a été assorti, ne peuvent être regardés comme contrevenant aux stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, pour les mêmes motifs, l'obligation de quitter le territoire français ne peut être regardée comme entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le préfet de police est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a annulé l'arrêté du 29 juillet 2015 pris à l'encontre de M. B... et mis à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 000 euros à son avocat ; qu'il est en droit d'obtenir l'annulation de ce jugement et le rejet de la demande présentée par M. B...devant le tribunal administratif ainsi que des conclusions présentées par ce dernier devant la Cour, y compris celles fondées sur l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi susvisée du 10 juillet 1991 ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1519787/3-1 du 29 mars 2016 du Tribunal administratif de Paris est annulé.

Article 2 : La demande présentée devant le Tribunal administratif de Paris par M. B... ainsi que ses conclusions présentées devant la Cour sont rejetées.

Article3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à M. F... B....

Copie en sera transmise au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 3 mai 2017, à laquelle siégeaient :

Mme Brotons, président de chambre,

Mme Appèche, président assesseur,

M. Magnard, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 17 mai 2017

Le rapporteur,

S. APPECHELe président,

I. BROTONS

Le greffier,

P. LIMMOIS

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 16PA01507


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 16PA01507
Date de la décision : 17/05/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme BROTONS
Rapporteur ?: Mme Sylvie APPECHE
Rapporteur public ?: M. CHEYLAN
Avocat(s) : MAUGIN

Origine de la décision
Date de l'import : 30/05/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2017-05-17;16pa01507 ?
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