Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société à responsabilité limitée SDRC " Société des Restaurants du Cameroun " a demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés, ainsi que des pénalités y afférentes, auxquelles elle a été assujettie au titre de l'exercice clos le 31 décembre 2011.
Par un jugement n° 1501297/1-1 du 25 novembre 2015, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 22 janvier 2016, la société à responsabilité limitée SDRC, représentée par MeA..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du 25 novembre 2015 ;
2°) de prononcer la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés et, à défaut, la décharge de la majoration pour manquement délibéré ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
La société requérante soutient que :
- la procédure d'imposition est irrégulière faute de débat oral et contradictoire durant la vérification de comptabilité ;
- l'imposition est mal fondée dès lors que les deux méthodes de reconstitution des recettes retenues sont radicalement viciées ou, à tout le moins, excessivement sommaires, pour ne pas tenir compte des conditions d'exploitation réelles de l'établissement.
Par un mémoire en défense, enregistré le 26 septembre 2016, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête en toutes ses conclusions.
Il soutient qu'aucun des moyens invoqués par la société SDRC n'est fondé.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu:
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Auvray, rapporteur ;
- et les conclusions de Mme Mielnik-Meddah, rapporteur public.
1. Considérant que la société SDRC " Société des Restaurants du Cameroun ", qui exploite un fonds de commerce de restauration traditionnelle avec une spécialité de cuisine camerounaise, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité au titre de la période courue du 1er juillet 2010 au 31 décembre 2011 dont il a notamment résulté un supplément d'impôt sur les sociétés mis en recouvrement par avis du 22 avril 2014 ;
En ce qui concerne la procédure d'imposition :
2. Considérant que, dans le cas où la vérification de la comptabilité d'une société commerciale a été effectuée soit, comme il est de règle, dans ses propres locaux, soit, si son dirigeant ou représentant l'a expressément demandé, dans les locaux du comptable auprès duquel sont déposés les documents comptables, il appartient au contribuable qui allègue que les opérations de vérification ont été conduites sans qu'il ait eu la possibilité d'avoir un débat oral et contradictoire avec le vérificateur, de justifier que ce dernier se serait refusé à un tel débat, soit avec les mandataires sociaux, soit avec leurs conseils, préposés ou mandataires de droit ou de fait ;
3. Considérant qu'il résulte de l'instruction et, notamment, de la proposition de rectification du 30 juillet 2013 que, par télécopie du 5 septembre 2012, le gérant de la société requérante a demandé que la vérification de comptabilité eût lieu dans les locaux de son expert-comptable, qu'il avait mandaté pour suivre les opérations de contrôle ; qu'il n'est pas contesté qu'outre les interventions des 28 septembre et 24 octobre 2012, qui se sont déroulées au siège de l'entreprise, le premier vérificateur s'est rendu à deux reprises au cabinet du comptable de la contribuable et son successeur à trois reprises ; qu'en se bornant à soutenir qu'elle n'a pas été en mesure de faire valoir les conditions réelles d'exploitation de son fonds de commerce, la société SDRC n'établit pas, comme il lui incombe de le faire compte tenu de ce qui a été dit au point précédent, que les vérificateurs se seraient refusés à tout débat oral et contradictoire durant les opérations de contrôle sur place, le service ayant au demeurant retenu un taux de pertes et d'offerts de 10 % pour tenir compte des explications fournies par le représentant de la société requérante lors du contrôle ;
En ce qui concerne le bien-fondé de l'imposition :
4. Considérant qu'aux termes de l'article L. 192 du livre des procédures fiscales : " Lorsque l'une des commissions visées à l'article L. 59 est saisie d'un litige ou d'une rectification, l'administration supporte la charge de la preuve en cas de réclamation, quel que soit l'avis de la commission. / Toutefois, la charge de la preuve incombe au contribuable lorsque la comptabilité comporte de graves irrégularités et que l'imposition a été établie conformément à l'avis de la commission (...) " ; qu'il résulte de l'instruction qu'après avoir écarté la comptabilité de la société SDRC comme dénuée de valeur probante, rejet de comptabilité que la requérante ne conteste au demeurant pas, le service, après avoir procédé à la reconstitution de ses recettes au titre de l'exercice clos le 31 décembre 2011, a établi l'imposition résultant de cette reconstitution conformément à l'avis émis dans sa séance du 13 mars 2014 par la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires ; qu'il appartient dès lors à l'intéressée d'apporter la preuve du caractère exagéré de l'imposition qu'elle conteste ;
5. Considérant que, pour procéder à la reconstitution des recettes de la société SDRC au titre de l'exercice en cause, le vérificateur a recouru à deux méthodes, celle dite des " boissons bouchées " et celle dite des " serviettes ", et qu'il a, pour déterminer la rectification litigieuse, retenu la moyenne arithmétique des recettes reconstituées à partir de chacune de ces méthodes, dont les résultats sont en outre très proches ;
6. Considérant que, s'agissant de la première méthode, fondée sur la part que représente le chiffre d'affaires procédant de la seule vente des boissons bouchées au sein du chiffre d'affaires total résultant de l'exploitation, par le vérificateur, des notes clients se rapportant à la période " d'échantillonnage " du 19 novembre au 29 décembre 2012, la société requérante fait grief au vérificateur d'avoir pratiqué sur le chiffre d'affaires issu des boissons bouchées un abattement pour " pertes et d'offerts " limité à 10 % au motif que sa clientèle, composée de personnalités, est atypique et que ce taux de 10 %, applicable aux établissements traditionnels, ne correspond pas aux conditions d'exploitation de son fonds de commerce ; que si la société revendique un taux de 15 %, elle n'en établit cependant pas la pertinence ainsi qu'il lui incombe de le faire ; qu'en outre, la seule circonstance que le vérificateur n'ait pas retenu l'existence d'un stock à la clôture de l'exercice litigieux n'est, en tout état de cause, pas de nature à établir le caractère vicié, ni même excessivement sommaire, de la méthode en cause, dès lors que, pour reconstituer le chiffre d'affaires de la société requérante, le service, qui en outre a relevé l'absence d'état des stocks de début et de fin d'exercice, a précisément pour ce motif raisonné à stock constant ;
7. Considérant que, s'agissant de la seconde méthode, qui consiste à déterminer le nombre de couverts servis en fonction du nombre de serviettes en tissu utilisées, lequel a été déterminé par le nombre de serviettes que la requérante a donné à nettoyer, valorisé par le montant moyen de recettes par couvert établi à 39 euros, la société SDRC reproche au vérificateur de n'avoir pas pris en compte le fait que ces serviettes ne sont pas seulement utilisées pour la table, mais qu'elles le sont également par les serveurs tant pour les plats que pour les bouteilles et par le personnel en cuisine aux fins de nettoyage et que certains clients utilisent plusieurs serviettes ; la requérante relève également que le service n'a retenu que les factures de nettoyage établies au cours de l'année 2010, en ignorant celles de 2011, alors que la période vérifiée s'étendait du 1er juillet 2010 au 31 décembre 2011 ;
8. Considérant, toutefois, qu'outre que l'administration soutient, sans être contredite, que les factures établies par la société Initial, seule à assurer le nettoyage des serviettes du restaurant exploité par la requérante, concernaient également des torchons nécessairement utilisés pour le nettoyage en cuisine de verres ou de plats, il résulte de l'instruction que, pour tenir compte des conditions d'exploitation invoquées par l'intéressée, le vérificateur a appliqué un abattement de 15 % pour déterminer le nombre de couverts servis par rapport au nombre, égal à 491 par semaine, de serviettes ayant donné lieu à facture de nettoyage par la société Initial durant le second semestre de l'année 2010 ; que s'il est exact qu'à compter du 1er janvier 2011, la société Initial n'a plus facturé à l'unité mais sur la base d'un forfait, l'administration fait valoir qu'il s'agissait d'un forfait de facturation de 525 serviettes par semaine, soit supérieur aux 491 unités dont seul 85 % a été retenu ; que, dans ces conditions, la société SDRC n'établit pas, ainsi qu'il lui incombe de le faire, que l'abattement de 15 % pratiqué par le vérificateur, d'ailleurs porté à plus de 20 % pour l'année 2011 au regard du forfait de facturation, serait insuffisant ;
9. Considérant, en dernier lieu, que la société SDRC propose une méthode alternative consistant à appliquer à la période vérifiée un coefficient de marge brute de 2,15 motif pris que, durant la période " d'échantillonnage " de six semaines, entre le 19 novembre et le 29 décembre 2012, ce coefficient s'élevait à 2,13 ;
10. Considérant, toutefois, que la société SDRC n'explicite pas la détermination de la marge brute revendiquée, étant fait observer qu'il résulte de l'instruction et, en particulier, de la proposition de rectification du 30 juillet 2013, que la société SDRC n'a en réalité pas communiqué la totalité des notes de restaurant se rapportant à la période " d'échantillonnage ; qu'en outre, un tel coefficient, qualifié d'irréaliste par la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires dans sa séance du 13 mars 2014, apparaît faible compte tenu notamment du " standing " du restaurant ; que, par suite, et contrairement à ce que soutient la société requérante, c'est à juste titre que les premiers juges ont estimé qu'elle ne proposait pas de " reconstitution alternative probante de son chiffre d'affaires " et qu'elle n'apportait pas la preuve du caractère radicalement vicié ou excessivement sommaire des méthodes retenues par le service, étant au demeurant fait observer que les chiffres d'affaires résultant de ces méthodes sont extrêmement proches ;
En ce qui concerne la majoration pour manquement délibéré :
11. Considérant que si la société SDRC formule des conclusions tendant à la décharge de la majoration pour manquement délibéré de 40 % qui, prévue au a. de l'article 1729 d'un code général des impôts, a été appliquée aux suppléments d'impôts litigieux, l'intéressée n'invoque à leur soutien aucun moyen propre ; que le présent arrêt rejetant les conclusions à fin de décharge des droits supplémentaires auxquels la requérante a été assujettie, ses conclusions dirigées contre la majoration litigieuse ne peuvent qu'être rejetées ;
12. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société SDRC n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ; que les conclusions de l'intéressée tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent, par voie de conséquence, qu'être rejetées ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la société à responsabilité limitée SDRC est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société à responsabilité limitée SDRC " Société des Restaurants du Cameroun " et au ministre de l'action et des comptes publics.
Copie en sera adressée à la direction régionale de finances publiques d'Ile-de-France et du département de Paris (pôle fiscal parisien 1).
Délibéré après l'audience du 23 octobre 2017, à laquelle siégeaient :
- Mme Heers, président de chambre,
- M. Auvray, président-assesseur,
- M. Boissy, premier conseiller.
Lu en audience publique le 15 novembre 2017
Le rapporteur,
M. AUVRAYLe président,
M. HEERSLe greffier,
C. DABERT
La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 16PA00289