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22/02/2018 | FRANCE | N°17PA02045

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 1ère chambre, 22 février 2018, 17PA02045


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... C...a demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler l'arrêté du 19 avril 2017 par lequel le préfet de Seine-et-Marne lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai de départ volontaire, a fixé son pays de destination et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée de 24 mois.

Par un jugement n° 1703262 du 17 mai 2017, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :<

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Par une requête enregistrée le 16 juin 2017, M. C..., représenté par Me A..., demande à ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... C...a demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler l'arrêté du 19 avril 2017 par lequel le préfet de Seine-et-Marne lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai de départ volontaire, a fixé son pays de destination et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée de 24 mois.

Par un jugement n° 1703262 du 17 mai 2017, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 16 juin 2017, M. C..., représenté par Me A..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1703262 du 17 mai 2017 du tribunal administratif de Melun ;

2°) d'annuler l'arrêté du 19 avril 2017 du préfet de Seine-et-Marne ;

3°) d'enjoindre au préfet de Seine-et-Marne de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- les décisions attaquées sont insuffisamment motivées au regard des dispositions de la loi du 11 juillet 1979 et du code des relations entre le public et l'administration ;

- elles sont entachées d'un défaut d'examen de sa situation personnelle ;

- elles méconnaissent les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elles méconnaissent les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Par un mémoire en défense enregistré le 13 juillet 2017, le préfet de Seine-et-Marne conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens de la requête sont infondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Le rapport de M. Legeai a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que M. C..., ressortissant turc né le 5 mars 1991 et entré en France le 15 mars 2014 selon ses déclarations, y a sollicité l'asile, qui lui a été refusé le 2 mai 2015 par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) et le 19 janvier 2016 par la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) ; que, par arrêté du 17 février 2016, le préfet de la Vienne lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi ; que M. C...n'a pas exécuté cette obligation malgré le jugement du tribunal administratif de Poitiers rejetant, le 15 juin 2016, sa demande d'annulation de l'arrêté du 17 février 2016 ; qu'il a été interpellé le 19 avril 2017 usant de faux documents d'identité dans la Seine-et-Marne ; que, par un arrêté du 19 avril 2017, le préfet de Seine-et-Marne l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé son pays de destination et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée de 24 mois ; que M. C... relève appel du jugement du 17 mai 2017 par lequel le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces quatre décisions ;

2. Considérant, en premier lieu, que l'arrêté attaqué vise précisément les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui fondent chacune des décisions attaquées, notamment l'article L. 511-1 I 1° qui fonde l'obligation de quitter le territoire français, l'article L. 511-1 II 3° qui fonde le refus de délai de départ volontaire, l'article L. 511-1 III qui fonde l'interdiction de retour et l'article L. 513-2 qui fonde la décision fixant le pays de renvoi ; qu'il est donc suffisamment motivé en droit ; que l'arrêté comporte en outre les considérations de fait justifiant chacune des décisions contestées, notamment que M. C...se trouve en situation irrégulière sur le territoire français, ce qui justifie l'obligation de quitter le territoire français, qu'il est sans papiers et sans garanties de représentation, alors qu'il a fait usage de faux documents et qu'ainsi il y a un risque qu'il se soustraie à l'obligation de quitter le territoire français, ce qui justifie qu'aucun délai de départ volontaire ne lui soit accordé, qu'un examen de sa situation familiale a révélé en outre qu'il est sans ressources légales, sans charges de famille et sans domicile personnel certain, ce qui, joint aux considérations précédentes, motive la durée de l'interdiction du territoire français ; qu'enfin l'arrêté énonce que M. C...n'établit pas être exposé en Turquie à des peines ou traitements contraires à la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ce qui motive en fait la décsion fixant le pays de renvoi ; que dans ces conditions, les décisions litigieuses sont suffisamment motivées en droit et en fait conformément aux dispositions de l'article L. 211-2 et suivants du code des relations entre le public et l'administration qui se sont substituées à compter du 1er janvier 2016 à celles de la loi du 11 juillet 1979 relative à la motivation des décisions administratives ;

3. Considérant, en deuxième lieu, que M. C... soutient que le préfet a indiqué à tort qu'il est dépourvu de charge de famille, alors que sa compagne est enceinte de leur deuxième enfant, de garanties de représentation, alors qu'il a toujours demeuré à la même adresse, et qu'il n'établit pas être exposé à des traitements contraires à la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales en cas de retour en Turquie, alors qu'il appartient à la communauté kurde ; que, toutefois, les erreurs de fait ou d'appréciation que révèlerait l'arrêté ne permettent pas de caractériser en l'espèce une absence d'examen individuel de la situation personnelle de M. C..., dont les déclarations non étayées ont varié au cours de ses auditions successives ; que, par suite, le moyen de M. C... tiré du défaut d'examen de sa situation personnelle ne peut qu'être écarté ;

4. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui (...) " ;

5. Considérant que M. C... soutient séjourner sur le territoire français depuis le 15 mars 2014 et avoir établi le centre de ses intérêts privés et familiaux en Frances dès lors qu'il vit en concubinage avec une compatriote avec laquelle il a eu un premier enfant né sur le territoire français le 7 juin 2015 et qui est enceinte de leur second enfant, qu'il réside chez son oncle à Poitiers depuis son arrivée en France et qu'il ne dispose plus d'attaches familiales dans son pays d'origine, les autres membres de sa famille résidant en Allemagne ; que, toutefois, M. C..., qui a vécu hors de France au moins jusqu'à l'âge de 23 ans, dont la compagne, également en situation irrégulière en France, et l'enfant sont également de nationalité turque, n'établit pas être dépourvu d'attaches dans son pays d'origine alors qu'il ne démontre pas son insertion sociale et professionnelle en France ; que, par suite, le moyen de M. C... tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut qu'être écarté ;

6. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants. " ; qu'aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950. " ;

7. Considérant que M. C..., dont la demande d'asile a été rejetée par l'OFPRA et la CNDA, fait valoir qu'il craint d'être, du fait de son origine kurde, exposé à des traitements inhumains ou dégradants en cas de retour dans son pays d'origine et soutient qu'il est en mesure de faire valoir des éléments nouveaux et sérieux lui permettant de solliciter le réexamen de sa demande d'asile ; que, toutefois, pour établir ses allégations, il se borne à produire deux courriers, à savoir un courrier du maire de son village d'origine attestant qu'il est recherché en raison de son absence au recensement militaire et un courrier du bureau de recrutement militaire du district dont il dépend indiquant que son absence de recensement définitif en vue de son incorporation dans l'armée l'expose à une peine d'emprisonnement ; que ces courriers ne suffisent pas à démontrer la réalité des risques personnels qu'il prétend encourir ; que, par suite, il n'est pas fondé à soutenir que la décision fixant la Turquie comme pays de destination méconnaîtrait les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande ; que sa requête d'appel, y compris, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peut qu'être rejetée ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié M. B... C...et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de Seine-et-Marne.

Délibéré après l'audience du 8 février 2018, à laquelle siégeaient :

- Mme Pellissier, président de chambre,

- M. Diémert, président assesseur,

- M. Legeai, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 22 février 2018.

Le rapporteur,

A. LEGEAILe président,

S. PELLISSIERLe greffier,

A. LOUNIS La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 17PA02045


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 17PA02045
Date de la décision : 22/02/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : Mme PELLISSIER
Rapporteur ?: M. Alain LEGEAI
Rapporteur public ?: M. ROMNICIANU
Avocat(s) : AYDIN

Origine de la décision
Date de l'import : 27/02/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2018-02-22;17pa02045 ?
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