Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A...C...a demandé au Tribunal administratif de Paris, d'une part, d'annuler l'arrêté du 6 mars 2017 par lequel le préfet de police l'a obligé à quitter le territoire français, a refusé de lui accorder un délai de départ volontaire pour l'exécution de son obligation de quitter le territoire, et a fixé le pays de destination, et, d'autre part, d'annuler la décision du même jour prononçant à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée de douze mois.
Par un jugement n° 1703956 du 11 mars 2017, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 7 mai 2017, M.C..., représenté par MeB..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1703956 du 11 mars 2017 du magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Paris ;
2°) d'annuler les arrêtés en date du 6 mars 2017 par lesquels le préfet de police lui a fait obligation de quitter le territoire français, lui a refusé un délai de départ volontaire, a fixé le pays de destination et a prononcé une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de douze mois ;
3°) à titre principal, d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer un visa de retour dans un délai de 15 jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard, et à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation et de lui délivrer durant cet examen une autorisation provisoire de séjour sous les mêmes conditions de délai et d'astreinte ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la décision portant obligation de quitter le territoire français est insuffisamment motivée ;
- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle est entachée d'une erreur de fait, dès lors qu'il a des attaches en France, et pour les mêmes motifs, d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;
- le refus de lui accorder un délai de départ volontaire est insuffisamment motivé ;
- cette décision doit être annulée par voie de conséquence de l'annulation de la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation, dès lors que le risque de fuite n'est pas établi ;
- la décision fixant le pays de destination est insuffisamment motivée ;
- elle doit être annulée par voie de conséquence de l'annulation de la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français ;
- elle méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ainsi que les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la décision d'interdiction de retour sur le territoire français est insuffisamment motivée ;
- le préfet de police n'a pas procédé à un examen particulier de sa situation personnelle ;
- elle doit être annulée par voie de conséquence de l'annulation de la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français ;
- elle est entachée d'une erreur de droit en ce qu'elle méconnaît son droit au respect de sa vie privée et familiale, et d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle eu égard à l'ancienneté et à la stabilité de ses attaches.
Par un mémoire en défense, enregistré le 16 août 2017, le préfet de police conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. C...ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Lescaut a été entendu au cours de l'audience publique.
1. Considérant que M.C..., ressortissant congolais, qui déclare être né le 29 janvier 1996, est entré sur le territoire français le 29 août 2012, alors qu'il se disait mineur ; qu'il a été pris en charge par les services de l'aide sociale à l'enfance du 11 septembre 2012 au 28 août 2013 par une décision du président du conseil général d'Ille-et-Vilaine du 11 septembre 2012, à laquelle il a été mis fin à la suite d'une expertise médicale rendue le 14 septembre 2012, confirmée par un arrêt rendu le 26 novembre 2013 par la Cour d'appel de Rennes et concluant à la majorité de l'intéressé ; que par un arrêté en date du 6 mars 2015, le préfet d'Ille-et-Vilaine lui a refusé le titre de séjour sollicité sur le fondement des articles L. 313-14 et L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il sera reconduit ; que, par deux arrêtés du 6 mars 2017, le préfet de police a obligé M. C... à quitter le territoire français, a fixé le pays à destination duquel l'intéressé pourrait être reconduit en lui refusant un délai de départ volontaire et l'a interdit de retour sur le territoire français pendant un an ; que M. C... relève appel du jugement du 11 mars 2017 par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces décisions ;
Sur l'obligation de quitter le territoire français :
2. Considérant que l'arrêté litigieux comporte un énoncé suffisamment précis des circonstances de droit et de fait sur lesquelles son auteur s'est fondé pour prendre la décision faisant obligation à M. C...de quitter le territoire français ;
3. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien- être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;
4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. C..., célibataire et sans charge de famille selon ses propres déclarations lors de son audition par les services de police, ne justifie pas être dépourvu d'attaches dans son pays d'origine où résident sa mère et ses soeurs ; qu'en se bornant à faire état, sans l'établir, de liens personnels noués en France où il aurait rencontré son amie avec laquelle il serait engagé dans un projet de mariage, il ne démontre pas que l'arrêté en litige aurait porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ; que, par suite le préfet de police n'a pas méconnu l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, pour les mêmes motifs, il n'a pas davantage entaché sa décision d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de M.C... ;
5. Considérant qu'il résulte du point précédent que M.C... n'est pas fondé à soutenir que l'arrêté en litige serait entaché d'une erreur de fait ;
Sur le refus de lui accorder un délai de départ volontaire :
6. Considérant qu'aux termes du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, l'étranger dispose d'un délai de trente jours à compter de sa notification (...). / Toutefois, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, décider que l'étranger est obligé de quitter sans délai le territoire français : (...) / 3° S'il existe un risque que l'étranger se soustraie à cette obligation. Ce risque peut être regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : a) Si l'étranger, qui ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, n'a pas sollicité la délivrance d'un titre de séjour (...) f) Si l'étranger ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, notamment parce qu'il ne peut justifier de la possession de documents d'identité ou de voyage en cours de validité, ou qu'il a dissimulé des éléments de son identité, ou qu'il n'a pas déclaré le lieu de sa résidence effective ou permanente, ou qu'il s'est précédemment soustrait aux obligations prévues par les articles L. 513-4, L. 552-4, L. 561-1 et L. 561-2 " ;
7. Considérant que la décision contestée, qui énonce les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dont elle fait application, ainsi que les circonstances qui ont conduit le préfet de police à considérer que M. C...présentait un risque de se soustraire à l'exécution de la mesure d'éloignement prise à son encontre, est suffisamment motivée ;
8. Considérant que les moyens dirigés contre la décision portant obligation de quitter le territoire n'étant pas fondés, l'exception d'illégalité de cette décision invoquée à l'appui des conclusions de M. C... dirigées contre la décision portant refus de lui accorder un délai de départ volontaire ne peut qu'être écartée ;
9. Considérant que, pour refuser à M. C... un délai de départ volontaire pour l'exécution de la mesure d'éloignement prise à son encontre, le préfet de police s'est fondé sur la circonstance que le requérant ne pouvait justifier de la possession d'un document d'identité ou de voyage en cours de validité et n'a pas déclaré le lieu de sa résidence effective ou permanente ; qu'en se bornant à soutenir qu'il a déposé, dès son arrivée en France, une demande d'asile, M. C...ne conteste pas utilement les deux motifs ainsi retenus par le préfet de police, dès lors qu'il ressort des pièces du dossier que l'intéressé était, à la date de l'arrêté en litige, dépourvu de document d'identité en cours de validité et qu'il a indiqué aux agents de police qui l'ont interpellé et auditionné le 6 mars 2017, être hébergé par des amis à Rennes ; que, dans ces conditions, alors qu'au surplus, le requérant s'est soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement prise à son encontre par le préfet d'Ille-et-Vilaine le 6 mars 2015, le préfet de police était fondé à estimer que M. C... en l'absence de garanties de représentations suffisantes, présentait un risque de se soustraire à l'exécution de la mesure d'éloignement en litige ;
Sur la décision fixant le pays de destination :
10. Considérant que la décision fixant le pays à destination duquel pourra être exécutée la mesure d'éloignement vise le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ainsi que les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et comporte un énoncé suffisamment précis des circonstances de fait sur lesquelles son auteur s'est fondé pour prendre cette décision ; que, par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation doit être écarté comme manquant en fait ;
11. Considérant que les moyens dirigés contre la décision portant obligation de quitter le territoire n'étant pas fondés, l'exception d'illégalité de cette décision invoquée à l'appui des conclusions de M. C... dirigées contre la décision fixant le pays de destination ne peut qu'être écartée ;
12. Considérant qu'aux termes du dernier alinéa de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 " ; que ce dernier texte énonce que " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants " ;
13. Considérant que M. C...soutient qu'il craint pour sa sécurité du fait de violences particulièrement préoccupantes au Congo et en raison de son isolement dû à l'absence de toute attache dans ce pays ; que, toutefois, l'intéressé n'apporte au soutien de ses allégations aucun élément probant permettant d'établir la réalité des risques auxquels il serait personnellement exposé en cas de retour dans son pays d'origine ; que, dans ces conditions, la décision contestée ne méconnaît ni les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Sur la décision d'interdiction de retour sur le territoire français :
14. Considérant qu'aux termes du III. de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative, par une décision motivée, assortit l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français, d'une durée maximale de trois ans à compter de sa notification, lorsque aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger ou lorsque l'étranger n'a pas satisfait à cette obligation dans le délai imparti " / Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative ne prononce pas d'interdiction de retour. / (....). La durée de l'interdiction de retour mentionnée au premier alinéa du présent III ainsi que le prononcé et la durée de l'interdiction de retour mentionnée au quatrième alinéa sont décidés par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français (....) " ;
15. Considérant que M. C...soutient que la décision portant interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de douze mois est entachée d'un défaut de motivation ; qu'après avoir énoncé les considérations de fait et de droit fondant l'obligation de quitter le territoire français, cité le III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'arrêté du 6 mars 2017 indique que l'intéressé, célibataire et sans enfant, entré sur le territoire le 29 août 2012, ne peut se prévaloir de liens suffisamment anciens, forts et caractérisés avec la France ; qu'ainsi, la décision portant interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de douze mois comporte l'énoncé des considérations de fait et de droit qui la fondent ; que le moyen tiré du défaut de motivation de cette décision doit, par conséquent, être écarté ;
16. Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de polie n'aurait pas procédé à un examen suffisant de la situation personnelle de M.C... ;
17. Considérant que les moyens dirigés contre la décision portant obligation de quitter le territoire n'étant pas fondés, l'exception d'illégalité de cette décision invoquée à l'appui des conclusions de M. C... dirigées contre la décision portant interdiction de retour sur le territoire français ne peut qu'être écartée ;
18. Considérant qu'il résulte de dispositions susmentionnées du III. de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, en vigueur depuis le 1er novembre 2016, que, lorsque le préfet prend, à l'encontre d'un étranger, une décision portant obligation de quitter le territoire français ne comportant aucun délai de départ, ou lorsque l'étranger n'a pas respecté le délai qui lui était imparti pour satisfaire à cette obligation, il appartient au préfet d'assortir sa décision d'une interdiction de retour sur le territoire français, sauf dans le cas où des circonstances humanitaires y feraient obstacle ; que seule la durée de cette interdiction de retour doit être appréciée au regard des quatre critères énumérés au III de l'article L. 511-1, à savoir la durée de la présence de l'étranger sur le territoire français, la nature et l'ancienneté de ses liens avec la France, l'existence ou non d'une précédente mesure d'éloignement et, le cas échéant, la menace pour l'ordre public que constitue sa présence sur le territoire ;
19. Considérant qu'il résulte des termes de l'arrêté en litige que, pour fixer à douze mois la durée de l'interdiction de retour sur le territoire français, le préfet de police s'est fondé sur le caractère récent du séjour de M. C...et sur l'absence d'ancienneté des liens du requérant avec la France ; que ces motifs, dont le bien fondé n'est pas contesté par le requérant, suffisaient à justifier légalement la durée de douze mois de l'interdiction de retour sur le territoire français en litige ;
20. Considérant qu'il résulte du point 4 que le préfet de police n'a pas méconnu le droit du requérant au respect de sa vie privée et familiale en édictant la mesure d'interdiction du territoire en litige ; que pour ces motifs également, il n'a pas entaché sa décision d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de M. C...;
21. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte, ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. C...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...C...et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de police.
Délibéré après l'audience du 15 février 2018, à laquelle siégeaient :
- M. Formery, président de chambre,
- Mme Poupineau, président assesseur,
- Mme Lescaut, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 28 mars 2018.
Le rapporteur,
C. LESCAUTLe président,
S.-L. FORMERY
Le greffier,
N. ADOUANE
La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 17PA01561