Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C...E...D...a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté en date du 13 juillet 2017 par lequel le préfet de police de Paris a refusé de renouveler le titre de séjour qui lui avait été délivré en qualité de parent d'un enfant français.
Par un jugement n°1713179 du 7 février 2018 le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 3 mars 2018, M. C...D..., représenté par Me A...B..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Paris du 7 février 2018 ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du préfet de police de Paris du 13 juillet 2017 ;
3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer une carte de séjour " vie privée et familiale " ou, en cas de réexamen, un titre de séjour provisoire sous astreinte de 150 euros par jour de retard dans les quinze jours de l'arrêt à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- sa demande n'a pas fait l'objet d'un examen sérieux ;
- il contribue à l'éducation de son enfant et satisfait aux conditions de l'article
L. 313-11-6° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la décision porte une atteinte disproportionnée à son droit à une vie privée et familiale ;
- il est entré en France à l'âge de neuf ans, il y réside sans interruption depuis 1995, ses parents s'y sont régulièrement installés et ses deux soeurs ont la nationalité française ;
- le préfet s'est manifestement mépris sur les conséquences de l'arrêté sur sa situation personnelle.
Par un mémoire enregistré le 4 juin 2018, le préfet de police conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Bernier, président-assesseur, a été entendu au cours de l'audience publique.
1. Considérant que M. C...E...D..., de nationalité angolaise, né le 1er février 1986 au Portugal, relève appel du jugement du 7 février 2018 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 13 juillet 2017 par lequel le préfet de police de Paris a refusé de renouveler le titre de séjour qu'il lui avait délivré sur le fondement des dispositions du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Sur la violation du droit au respect de la vie privée et familiale :
2. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1°) Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2°) Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;
3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. D...est entré en France en 1995 à l'âge de neuf ans et qu'il y a suivi toute sa scolarité ; que le requérant produit pour la première fois en appel des rapports des services sociaux et des attestations d'hébergement en centre d'accueil dont il ressort qu'il n'a pas cessé de résider en France entre 2006 et 2013 ; que l'acte de naissance de sa fille née en 2009 confirme par ailleurs qu'il vivait à Paris à cette époque ; qu'aucune pièce ne vient contrebattre les éléments fournis qui attestent une résidence continue en France depuis 1995 ; que, par ailleurs, son père et sa mère résident régulièrement en France et ses deux soeurs ont la nationalité française ; qu'il n'est pas allégué qu'il aurait de la famille proche au Portugal, Etat où il est né, où en Angola, Etat dont il a la nationalité mais dont rien ne vient attester qu'il y aurait vécu ou qu'il y disposerait d'attaches ; que dans ces conditions, eu égard à la durée de son séjour et à l'intensité de ses relations avec la France, le refus de titre de séjour a porté au droit de M. D...au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels il a été pris ; qu'il méconnaît, par suite, les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté la demande de M.D... ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
5. Considérant qu'eu égard au motif d'annulation ainsi retenu et alors qu'il ne résulte pas de l'instruction que des éléments de fait ou de droit nouveaux justifieraient que l'autorité administrative examine à nouveau la demande de titre de séjour, le présent arrêt implique nécessairement que l'administration délivre à M. D...un titre de séjour portant la mention vie privée et familiale ; qu'il y a lieu, par suite, d'enjoindre au préfet de police de Paris de délivrer ce titre dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt ; qu'il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
6. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à M. D...au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n°1713179 du tribunal administratif de Paris du 7 février 2018 et l'arrêté du préfet de police du 13 juillet 2017 sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet de police de Paris de délivrer à M. D...une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 3 : L'Etat versera à M. D...une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...E...D..., au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et au préfet de police.
Délibéré après l'audience du 12 juin 2018, à laquelle siégeaient :
- M. Bouleau, premier vice-président,
- M. Bernier, président assesseur,
- Mme Pena, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 26 juin 2018.
Le rapporteur,
Ch. BERNIERLe président,
M. BOULEAU
Le greffier,
A. DUCHER
La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 10PA03855
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N° 18PA00750