Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. D...B...a demandé au Tribunal administratif de Melun de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquels il a été assujetti au titre de l'année 2012 pour un montant en principal de 47 609 euros.
Par un jugement n° 1600713/7 du 22 mars 2018, le Tribunal administratif de Melun a rejeté cette demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 18 mai 2018, M.B..., représenté par MeA..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du Tribunal administratif de Melun du 22 mars 2018 ;
2°) de prononcer la décharge des impositions contestées devant le tribunal ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- ayant plus de 75 ans au 31 décembre de l'année d'imposition, il doit bénéficier d'une demi-part supplémentaire de quotient familial en application de l'article 195-6 du code général des impôts ;
- le Bofip prévoit expressément que " pour bénéficier de cette mesure, les contribuables doivent remplir deux conditions. Être âgés de plus de 75 ans. Cette situation doit être appréciée au 31 décembre de l'année d'imposition " (BOI-IR-LIQ-10-20-20-20 n° 140 et 150) " ;
- les sommes inscrites à son compte courant d'associé en 2012 ne peuvent être considérées comme ayant été disponibles ;
- l'imposition de dividendes qu'il n'a pas perçus méconnait l'article 1er du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- les pénalités pour manquement délibéré ne sont pas justifiées.
Par un mémoire en défense enregistré le 2 juillet 2018, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Il soutient que :
- les moyens soulevés par M. B...ne sont pas fondés.
Par une ordonnance du 27 août 2018, la clôture de l'instruction a été fixée au
17 septembre 2018.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et son premier protocole additionnel ;
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Magnard,
- les conclusions de M. Cheylan, rapporteur public,
- et les observations de MeC..., substituant MeA..., représentant M.B....
Considérant ce qui suit :
1. M. B...relève appel du jugement du 22 mars 2018 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquels il a été assujetti au titre de l'année 2012 pour un montant en principal de 47 609 euros.
Sur l'étendue du litige :
2. Par une décision du 2 juillet 2018, postérieure à l'introduction de la requête, le directeur du contrôle fiscal Ile de France a prononcé le dégrèvement à hauteur de 2 783 euros en droits et 1 181 euros en pénalités, du supplément d'impôt sur le revenu et de contributions sociales mis à la charge de M. B...au titre de l'année 2012. Par suite, les conclusions de la requête afférentes auxdites impositions sont, dans cette mesure, devenues sans objet.
Sur le bien-fondé des impositions :
3. En premier lieu, les sommes inscrites au crédit du compte courant détenu par un contribuable dans la comptabilité d'une entreprise doivent être regardées comme mises à sa disposition, à moins que l'intéressé ne prouve que la trésorerie de l'entreprise faisait obstacle à leur prélèvement au cours de l'année d'imposition.
4. Il résulte de l'instruction que lors de l'assemblée générale de la SARL Iface en date du 9 avril 2012, il a été décidé par les associés d'attribuer à chacun un dividende de 200 euros par part sociale, soit 100 000 euros au total pour 500 parts. M.B..., détenteur de 498 parts, et MmeB..., détentrice d'une part, ont bénéficié en 2012 d'une somme de 99 800 euros, qu'ils n'ont pas déclarée. Cette distribution de dividendes a été constatée par une inscription au crédit du compte courant d'associé ouvert au nom de chacun d'eux dans les écritures de la société. Les sommes en cause sont réputées avoir été mises à la disposition de M. et
Mme B...au titre de l'année d'imposition en litige. En se bornant à produire une attestation d'un expert-comptable faisant état de pertes d'un montant de 68 251 euros à la clôture de l'exercice 2012 et de ce que la baisse du chiffre d'affaires de la société aurait affecté la trésorerie de celle-ci, attestation qui n'est en tout état de cause pas étayée des documents permettant à la Cour de suivre l'évolution de la trésorerie de la société Iface et de constater que le contribuable n'a pu disposer effectivement des sommes en litige, M. B...ne remet pas valablement en cause la présomption qui résulte de l'inscription desdites sommes à son compte courant d'associé. La circonstance qu'une assemblée générale se serait tenue en 2013 pour remettre en cause cette distribution de dividendes et ait donné lieu, d'ailleurs irrégulièrement, à l'annulation rétroactive de cette distribution, est sans influence sur l'imposition desdits dividendes, inscrits au crédit du compte courant d'associé de l'intéressé en 2012, et de ce fait mis à sa disposition.
5. En deuxième lieu, aux termes de l'article 1er du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens. Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d'utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international. Les dispositions précédentes ne portent pas atteinte au droit que possèdent les Etats de mettre en vigueur les lois qu'ils jugent nécessaires pour (...) assurer le paiement des impôts (...) ". Il résulte des termes mêmes de cet article que le droit au respect de ses biens reconnu à toute personne physique ou morale ne porte pas atteinte au droit de chaque Etat partie au protocole additionnel de mettre en oeuvre les lois qu'il juge nécessaires pour assurer le paiement des impôts. L'imposition des sommes mises à la disposition d'un contribuable par une inscription au crédit du compte courant d'associé de celui-ci ne saurait être regardée comme portant par elle-même atteinte au respect des biens au sens de l'article 1er de ce protocole. Dès lors qu'ainsi qu'il a été dit précédemment, M. B...doit être regardé comme ayant eu la disposition des sommes en cause, faute pour lui de justifier d'une impossibilité matérielle de les prélever, et en conséquence comme ayant choisi de laisser ces sommes dans la société dont il détenait des parts, le moyen tiré de ce que l'imposition desdites sommes porterait concrètement atteinte à ces stipulations ne peut en tout état de cause qu'être écarté.
6. Il résulte en conséquence des points 3. à 5. que c'est à bon droit que les sommes en cause ont été imposées entre les mains de M. B...au titre de l'année 2012 dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers.
Sur les pénalités :
7. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : a. 40 % en cas de manquement délibéré (...) ". Il résulte de ces dispositions que la majoration pour manquement délibéré a pour seul objet de sanctionner la méconnaissance par le contribuable de ses obligations déclaratives. Pour justifier du bien fondé de cette majoration, l'administration doit apporter la preuve, d'une part, de l'insuffisance, de l'inexactitude ou du caractère incomplet des déclarations et, d'autre part, de l'intention de l'intéressé d'éluder l'impôt. Pour établir le caractère intentionnel du manquement du contribuable à son obligation déclarative, l'administration doit se placer au moment de la déclaration ou de la présentation de l'acte comportant l'indication des éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt.
8. En se prévalant seulement de l'importance des sommes non déclarées, de ce que la SARL Iface, dont M. B...est gérant, avait décidé par assemblée générale du 9 avril 2012 le versement de dividendes à hauteur de 99 800 euros pour le foyer fiscal du requérant et de ce que ces dividendes n'avaient pas été déclarés alors qu'ils ont été mentionnés sur la liasse fiscale déposée par la société au titre de l'exercice clos en 2012, l'administration n'établit pas que ce défaut de déclaration a résulté d'un manquement délibéré de la part du contribuable, la décision, prise dès l'année 2013, de ne pas prélever les dividendes en cause, puis d'y renoncer, ayant eu pour objet la sauvegarde de l'entreprise.
9. Il résulte de tout ce qui précède que M. B...est seulement fondé à demander la décharge des pénalités pour manquement délibéré dont ont été assorties les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2012. Pour le surplus, il n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à la décharge des impositions restant en litige. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DECIDE :
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête de M. B...à concurrence du dégrèvement prononcé en cours d'instance.
Article 2 : M B...est déchargé des pénalités pour manquement délibéré dont ont été assorties les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2012.
Article 3 : L'Etat versera à M. B...la somme de 1 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. B...est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. D...B...et au ministre de l'action et des comptes publics.
Copie en sera adressée au chef des services fiscaux chargé de la direction de contrôle fiscal d'Ile-de-France.
Délibéré après l'audience du 13 mars 2019, à laquelle siégeaient :
- Mme Brotons, président de chambre,
- Mme Appèche, président assesseur,
- M. Magnard, premier conseiller.
Lu en audience publique le 28 mars 2019.
Le rapporteur,
F. MAGNARDLe président,
I. BROTONS
Le greffier,
S. DALL'AVA
La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 18PA01709