Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
I. La société à responsabilité limitée (SARL) CDS Distribution a demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge, d'une part, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période allant du 1er septembre 2010 au 31 août 2013 pour un montant de 274 912 euros et, d'autre part, de la cotisation de taxe sur les salaires mise à sa charge au titre de l'année 2012.
Par un jugement n° 1602813 du 19 septembre 2017, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
II. La société à responsabilité limitée (SARL) CDS Distribution a demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer le remboursement d'un crédit de taxe sur la valeur ajoutée d'un montant de 125 000 euros au titre de la période allant du 1er au 30 avril 2016.
Par un jugement n° 1711991 du 2 mai 2018, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
I. Par une requête enregistrée le 17 novembre 2017 et des mémoires enregistrés les 2 août 2018 et 21 février 2019, la société CDS Distribution, représentée par Me C... et Me B..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1602813 du Tribunal administratif de Paris en date du 19 septembre 2017 ;
2°) de prononcer la décharge, d'une part, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période allant du 1er septembre 2010 au 31 août 2013 pour un montant de 274 912 euros et, d'autre part, de la cotisation de taxe sur les salaires mise à sa charge au titre de l'année 2012.
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le tribunal n'a pas laissé à son conseil la possibilité de présenter oralement ses arguments sur la question de la saisine de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires au motif qu'il les considérerait, en toute hypothèse, comme infondés ;
- elle a été privée de la possibilité d'obtenir l'avis de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires, alors que les rectifications envisagées en matière de taxe sur la valeur ajoutée et de taxe sur les salaires reposaient sur l'appréciation d'éléments de faits relevant de la compétence de cette commission ;
- la proposition de rectification n'est pas suffisamment motivée au regard des exigences de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales, dès lors que les modalités d'établissement du coefficient de déduction de taxe sur la valeur ajoutée et les corrections effectuées ne sont pas suffisamment détaillées, ce qui l'a privée de toute discussion utile ;
- en vertu des dispositions de l'article 271 du code général des impôts, la taxe grevant les appels de charges émis par le syndic de copropriété gestionnaire de l'immeuble dans lequel est situé son siège social était déductible de la taxe collectée ; elle est fondée à se prévaloir des énonciations du paragraphe 11 de l'instruction du 5 mai 1998 référencée 3 A-3-98 ;
- les dépenses relatives à la préparation des déclarations fiscales de la SCI Balsic qu'elle a supportées entrent dans le champ d'application des conventions de prestations de service, d'hébergement et de gestion qu'elle a conclues avec ses filiales ; la taxe sur la valeur ajoutée qu'elle a acquittée au titre des prestations de services rendues par le cabinet ACM à la SCI Balsic est donc déductible dès lors que ces prestations sont utilisées pour les besoins des opérations qu'elle réalise ;
- pour le calcul du coefficient de taxation, doivent être intégrés au numérateur du rapport les intérêts perçus de l'ensemble de ses filiales qu'elle perçoit au titre de son activité de gestion de trésorerie exercée en sa qualité de holding animatrice ainsi que les intérêts versés par les filiales de Dubaï, Commercimmo et Trade Airlines, en vertu des dispositions du b. du V. de l'article 271 du code général des impôts dès lors qu'elles sont établies en dehors de l'Union européenne ;
- les produits financiers perçus présentent un caractère accessoire par rapport à son activité principale et auraient dû être exclus du rapport servant à déterminer le coefficient de taxation forfaitaire en application des dispositions du b du 3° du 3 du III de l'article 206 de l'annexe II au code général des impôts ; elle est fondée à se prévaloir des énonciations de la documentation administrative référencée BOI-TVA-DED-20-10-20-20130610, § 210 et du rescrit n° 2007/5 ;
- les produits des cessions de titres qu'elle a réalisées en 2011 et 2012 ne devaient pas figurer au dénominateur du rapport prévu à l'article 206 de l'annexe II au code général des impôts dès lors que ces cessions constituent des cessions de biens d'investissements corporels ou incorporels au sens des dispositions précitées du a du 3° du 3 du III de cet article ; elle est fondée à se prévaloir des énonciations de la documentation administrative référencée 3 D-1711 du 2 novembre 1996, reprise au §140 du BOI-TVA-DED-20-10-20-2013-06-10 ;
- la remise en cause des rappels de taxe sur la valeur ajoutée doit entraîner la décharge du rappel de taxe sur les salaires établi au titre de l'année 2012 ; le calcul du taux d'assujettissement à la taxe sur les salaires est erroné en application des énonciations de la documentation référencée BOI-TPS-TS-20-30-2016-04-06, § 100, qui prévoit que les produits nets sur cession de valeur mobilière ne doivent pas être pris en compte pour la détermination du coefficient d'assujettissement à la taxe sur les salaires ;
- elle sollicite la décharge des intérêts de retard et de la majoration qui lui ont été infligés par voie de conséquence de la décharge des impositions mises à sa charge.
Par des mémoires en défense enregistrés les 23 mars 2018, 18 décembre 2018 et 13 août 2019, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au non-lieu à statuer à concurrence des dégrèvements prononcés en cours d'instance et au rejet du surplus des conclusions de la requête.
Il soutient que :
- il est fait droit aux prétentions de la société à hauteur de 79 655 euros en droits et 8 953 euros en pénalités concernant les intérêts versés par des sociétés filiales domiciliées hors de l'Union Européenne ; s'agissant des années 2008, 2009 et 2010, la modification du coefficient de taxation compte tenu de la prise en compte au numérateur du rapport des intérêts versés par ces sociétés ne peut donner lieu à un dégrèvement complémentaire ;
- pour le surplus, les moyens soulevés par la société CDS Distribution ne sont pas fondés.
II. Par une requête enregistrée le 26 juin 2018, la société CDS Distribution, représentée par Me C... et Me B..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1711991 du Tribunal administratif de Paris en date du 2 mai 2018 ;
2°) de prononcer le remboursement d'un crédit de taxe sur la valeur ajoutée d'un montant de 125 000 euros au titre de la période allant du 1er au 30 avril 2016.
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- pour rejeter sa demande, le tribunal s'est fondé sur des rectifications contestées par l'appelante pour lesquelles aucune décision définitive n'était intervenue ;
- les intérêts perçus de ses filiales domiciliées hors de l'Union européenne auraient également dû être retenus au numérateur du rapport pour le calcul du coefficient de taxation dès lors qu'ils ouvrent droit à déduction ;
- les produits des cessions de titres qu'elle a réalisées en 2011 et 2012 ne devaient pas figurer au dénominateur du rapport prévu à l'article 206 de l'annexe II au code général des impôts, dès lors que ces cessions constituent des cessions de biens d'investissements corporels ou incorporels au sens des dispositions précitées du a du 3° du 3 du III de cet article ;
- les produits financiers perçus présentent un caractère accessoire par rapport à son activité principale et auraient dû être exclus du rapport servant à déterminer le coefficient de taxation forfaitaire en application des dispositions du b du 3° du 3 du III de l'article 206 de l'annexe II au code général des impôts ; elle est fondée à se prévaloir des énonciations de la doctrine référencée BOI-TVA-DED-20-10-20-2013-06-10 § 120 et 140.
Par un mémoire en défense, enregistré le 18 décembre 2018, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au non-lieu à statuer à concurrence des dégrèvements prononcés en cours d'instance et au rejet du surplus des conclusions de la requête.
Il soutient que :
- il est fait droit aux prétentions de la société à hauteur de 81 355 euros concernant les intérêts versés par des sociétés filiales domiciliées hors de l'Union Européenne ;
- pour le surplus, les moyens soulevés par la société CDS Distribution ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces des dossiers.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme D...,
- les conclusions de M. Lemaire, rapporteur public,
- et les observations de Me A..., pour la société CDS Distribution.
Considérant ce qui suit :
1. La société CDS Distribution est une société holding mixte, qui a pour objet social
" le conseil pour les affaires et autres conseils de gestion ". Elle détient des participations dans différentes sociétés, dont certaines sont situées en dehors de l'Union européenne, et effectue des placements financiers. Elle réalise également des prestations de services auprès de certaines filiales, avec lesquelles elle a signé des conventions de domiciliation et de gestion administrative, comptable et de trésorerie. Enfin, elle revend du champagne à ses associés et à ses salariés, ainsi qu'à ceux des autres sociétés du groupe. Elle a fait l'objet d'une première vérification de comptabilité à l'issue de laquelle le service, par une proposition de rectification du 10 décembre 2014, lui a notifié des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés au titre des exercices clos en 2011 et 2012, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée au titre des périodes correspondantes et de celle allant du 1er septembre 2012 au 31 août 2013 et des cotisations de taxe sur les salaires au titre de l'année 2012, assorties des intérêts de retard et, s'agissant de la taxe sur les salaires, de la majoration de 10 % prévue par l'article 1729 A du code général des impôts. Par la requête enregistrée sous le n° 17PA03532, la société CDS Distribution fait appel du jugement en date du 19 septembre 2017 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée et de taxe sur les salaires précités, ainsi que des intérêts de retard et pénalités correspondants.
2. Par ailleurs, l'administration a effectué une seconde vérification de comptabilité de la société CDS Distribution au titre de la période allant du 1er septembre 2013 au 31 juillet 2016, au terme de laquelle le service a annulé un crédit de taxe sur la valeur ajoutée d'un montant de 125 000 euros, dont la société s'estimait titulaire, et a procédé à des rappels de taxe sur la valeur ajoutée, assortis des intérêts de retard. La redevable a contesté devant le Tribunal administratif de Paris la décision en date du 7 juin 2017 par laquelle l'administration a rejeté la demande de remboursement du crédit de taxe précité d'un montant de 125 000 euros qu'elle avait présentée au titre du mois d'avril 2016. Par la requête enregistrée sous le n° 18PA02177, elle fait appel du jugement en date du 2 mai 2018 par lequel le tribunal a rejeté sa demande tendant au remboursement de ce crédit de taxe.
3. Les deux requêtes de la société CDS Distribution concernent un même contribuable et présentent à juger des questions semblables. Elles ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a lieu d'y statuer par le même arrêt.
Sur l'étendue du litige :
4. Par deux décisions, en date des 20 et 21 décembre 2018, postérieures à l'enregistrement des requêtes ci-dessus visées, le directeur régional d'Île-de-France et du département de Paris a prononcé, d'une part, le dégrèvement, en droits et en pénalités, à concurrence de la somme totale de 88 608 euros, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à la charge de la société CDS Distribution au titre des périodes correspondant aux exercices clos en 2012 et 2013 et, d'autre part, le remboursement du crédit de taxe sollicité par la société CDS Distribution à hauteur de la somme de 81 355 euros. Dans cette mesure, il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions des requêtes de la société CDS Distribution, qui sont devenues sans objet.
Sur la régularité des jugements attaqués :
5. En premier lieu, aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés ".
6. Il ressort des mentions du jugement n° 1602813 que les premiers juges, qui n'étaient pas tenus de se prononcer sur chacun des arguments des parties, ont répondu de façon suffisamment précise et motivée aux moyens soulevés devant eux par la société CDS Distribution et, en particulier, aux critiques formulées à l'encontre des modalités de détermination par l'administration du coefficient de déduction de la taxe sur la valeur ajoutée ayant grevé ses opérations d'amont. Par suite, la société requérante n'est pas fondée à soutenir que ce jugement n'est pas suffisamment motivé.
7. En deuxième lieu, aux termes de l'article R. 732-1 du code de justice administrative : " Après le rapport qui est fait sur chaque affaire par un membre de la formation de jugement ou par le magistrat mentionné à l'article R. 222-13, le rapporteur public prononce ses conclusions lorsque le présent code l'impose. Les parties peuvent ensuite présenter, soit en personne, soit par un avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, soit par un avocat, des observations orales à l'appui de leurs conclusions écrites. (...) ".
8. Il ressort des mentions du jugement n° 1602813, qui ne sont contredites par aucune pièce du dossier, que le conseil de la société CDS Distribution était présent à l'audience qui s'est tenue le 5 septembre 2017, à laquelle a été appelée l'affaire de sa cliente, et qu'il a formulé des observations orales pour le compte de celle-ci après le prononcé de ses conclusions par le rapporteur public. Dès lors, la société requérante n'est pas fondée à soutenir que son conseil n'aurait pas été mis en mesure de présenter ses observations sur la question de la saisine de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires et que la procédure suivie devant le tribunal administratif serait pour ce motif irrégulière.
9. En dernier lieu, contrairement à ce que soutient la société requérante, le tribunal a pu, sans entacher d'irrégularité le jugement n° 1711991, se prononcer sur le bien-fondé du refus de l'administration de rembourser le crédit de taxe sur la valeur ajoutée en litige en se fondant sur les seuls éléments du dossier qui lui étaient soumis, alors même que ce refus résultait notamment de rectifications qui lui avaient été proposées à l'issue de vérifications de comptabilité antérieures, qu'elle avait par ailleurs contestées et qui n'avaient pas encore fait l'objet d'une décision définitive.
10. Il résulte de tout ce qui précède que la société CDS Distribution n'est pas fondée à soutenir que les jugements attaqués sont entachés d'irrégularité.
Sur le bien-fondé des jugements attaqués :
En ce qui concerne la régularité de la procédure d'imposition :
11. En premier lieu, aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation (...) ". Aux termes de l'article R. 57-1 de ce livre : " La proposition de rectification prévue par l'article L. 57 fait connaître au contribuable la nature et les motifs de la rectification envisagée. L'administration invite, en même temps, le contribuable à faire parvenir son acceptation ou ses observations dans un délai de trente jours à compter de la réception de la proposition, prorogé, le cas échéant, dans les conditions prévues au deuxième alinéa de cet article ".
12. Il résulte des dispositions précitées que l'administration doit indiquer au contribuable, dans la proposition de rectification, les motifs et le montant des rehaussements envisagés, leur fondement légal et la catégorie de revenus dans laquelle ils sont opérés, ainsi que les années d'imposition concernées.
13. Il résulte de l'instruction que le vérificateur a indiqué, dans la proposition de rectification en date du 10 décembre 2014 qu'il a adressée à la société CDS Distribution au titre de la période correspondant aux exercices clos en 2011, 2012 et 2013, les années et impositions concernées, la nature, le montant, le fondement légal, ainsi que les motifs des rectifications envisagées. Il a, en particulier, exposé les raisons qui l'ont conduit à remettre en cause, d'une part, la déduction par la redevable de la taxe sur la valeur ajoutée grevant les appels de provisions émis par la société Langlois et Cie, syndic de copropriété, et de celle mentionnée sur les factures d'honoraires établies par le cabinet comptable AMC pour la rédaction des déclarations fiscales de la SCI Balsic, et, d'autre part, le coefficient de déduction retenu par la société pour la taxe ayant grevé certaines de ses opérations d'amont. A cet égard, il a relevé que la société CDS Distribution avait déduit l'intégralité de la taxe sur la valeur ajoutée qui lui avait été facturée alors qu'elle n'était pas en mesure de justifier que les dépenses d'amont n'avaient été exposées que pour les besoins d'activités soumises à la taxe et ouvrant droit à déduction, et qu'ayant collecté peu de taxe, elle avait ainsi pu bénéficier d'importants crédits de taxe sur la valeur ajoutée. Il a, en outre, exposé les modalités de calcul du nouveau coefficient de déduction applicable aux opérations de la société vérifiée. S'il n'a pas précisé lequel des coefficients d'assujettissement, de taxation ou d'admission, qui permettent de déterminer le coefficient de déduction, a été modifié, il ressort clairement des mentions de la proposition de rectification et, notamment, des différents calculs détaillés dans ce document et des explications et précisions fournies par son auteur, que les rectifications ont porté sur le coefficient de taxation, ainsi que le reconnaît d'ailleurs elle-même la société requérante dans ses écritures d'appel. Celle-ci n'est pas fondée à soutenir que les informations contenues dans la proposition de rectification ne lui permettaient pas de vérifier l'exactitude des montants retenus par le service et que, notamment, les produits financiers qu'elle avait perçus de ses filiales situées à Dubaï avaient bien été inscrits au numérateur du rapport de coefficient de taxation, dès lors que le vérificateur a précisé que la déduction de la taxe était admise à hauteur de 100 % pour les dépenses, répertoriées dans la proposition de rectification, correspondant à l'achat de champagne et aux prestations facturées par le cabinet comptable AMC/OPSIONE pour l'établissement des comptes de ses filiales, et qu'elle pouvait, par déduction, comprendre que le coefficient de taxation était remis en cause pour l'ensemble des autres opérations d'achat qu'elle avait réalisées. Enfin, il ressort des mentions de ce document que le service n'a pas intégré dans le " total des produits de l'exercice ouvrant droit à déduction " devant être inscrit au numérateur du rapport prévu à l'article 205 de l'annexe II au code général des impôts, l'ensemble des produits financiers perçus par la société CDS Distribution, y compris ceux versés par ses filiales implantées à Dubaï, ce que la redevable a d'ailleurs contesté. Dans ces conditions, la société CDS Distribution, qui disposait ainsi des éléments d'information nécessaires pour critiquer utilement les impositions mises à sa charge, n'est pas fondée à soutenir que la proposition de rectification que lui a adressée par le service ne répondait pas aux exigences de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales.
14. En second lieu, aux termes de l'article L. 59 du livre des procédures fiscales : " Lorsque le désaccord persiste sur les rectifications notifiées, l'administration, si le contribuable le demande, soumet le litige à l'avis soit de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires prévue à l'article 1651 du code général des impôts, (...) ". Aux termes de l'article L. 59 A de ce livre : " I. - La commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires intervient lorsque le désaccord porte : 1° Sur le montant du résultat industriel et commercial, non commercial, agricole ou du chiffre d'affaires, déterminé selon un mode réel d'imposition ; 2° Sur les conditions d'application des régimes d'exonération ou d'allégements fiscaux en faveur des entreprises nouvelles, à l'exception de la qualification des dépenses de recherche mentionnées au II de l'article 244 quater B du code général des impôts ; 3° Sur l'application du 1° du 1 de l'article 39 et du d de l'article 111 du même code relatifs aux rémunérations non déductibles pour la détermination du résultat des entreprises industrielles ou commerciales, ou du 5 de l'article 39 du même code relatif aux dépenses que ces mêmes entreprises doivent mentionner sur le relevé prévu à l'article 54 quater du même code ; 4° Sur la valeur vénale des immeubles, des fonds de commerce, des parts d'intérêts, des actions ou des parts de sociétés immobilières servant de base à la taxe sur la valeur ajoutée, en application du 6° et du 1 du 7° de l'article 257 du même code.(...) ".
15. La société CDS Distribution soutient qu'elle a été irrégulièrement privée de la saisine de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires. Toutefois, il résulte de l'instruction que le différend qui l'opposait à l'administration était relatif à la déductibilité de la taxe sur la valeur ajoutée facturée par des prestataires de service et à la détermination du coefficient de déduction de cette taxe. Ces questions, qui ne portaient pas sur la détermination du montant des résultats ou des chiffres d'affaires réalisés par la société, n'entraient pas dans le champ de compétence de la commission tel que défini au I de l'article L. 59 A précité du livre des procédures fiscales. Par suite, et alors même que l'examen de ces questions pouvait nécessiter l'appréciation de faits, la commission n'était pas compétente pour en connaître. Dès lors, le moyen de la société CDS Distribution ne peut qu'être écarté.
En ce qui concerne le bien-fondé des rappels de taxe sur la valeur ajoutée :
S'agissant de la déduction de la taxe grevant les factures émises par la société Langlois et Cie et par le cabinet comptable AMC/OPSIONE :
16. Aux termes de l'article 271 du code général des impôts : " I. 1. La taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé les éléments du prix d'une opération imposable est déductible de la taxe sur la valeur ajoutée applicable à cette opération. 2. Le droit à déduction prend naissance lorsque la taxe déductible devient exigible chez le redevable. (...) ".
17. Lorsque, sur le fondement des dispositions de l'article 271 du code général des impôts, l'administration met en cause la déductibilité de la taxe ayant grevé l'acquisition d'un bien ou d'un service, au motif que ce bien ou ce service n'a pas été utilisé pour les besoins des opérations imposables du redevable, ou lorsque l'existence d'un lien direct et immédiat entre les opérations en amont et la réalisation d'opérations en aval taxées ou exonérées de taxe sur la valeur ajoutée n'est pas établi, il lui appartient, lorsqu'elle a mis en oeuvre la procédure de rectification contradictoire et que le contribuable n'a pas accepté la rectification qui en découle, d'établir les faits sur lesquels elle se fonde pour prouver que les conditions posées pour une telle déduction à l'article 271 du code général des impôts ne sont pas remplies. En l'espèce, les rappels de taxe sur la valeur ajoutée en litige ont été mis en recouvrement à l'issue d'une procédure de rectification contradictoire. Il résulte de l'instruction que la société CDS Distribution a régulièrement, par une lettre en date du
11 février 2015, contesté les rectifications dont ils procèdent. Par suite, il appartient à l'administration d'établir le bien-fondé de ces impositions.
18. En premier lieu, il ressort des mentions de la proposition de rectification du 10 décembre 2014 que le service a refusé la déduction opérée par la société CDS Distribution de la taxe grevant des appels de provisions émis par la société Langlois et Cie, syndic chargé de la gestion d'un immeuble situé 31, avenue de l'Opéra à Paris, où se trouve son siège social. En l'absence de production des relevés de charge se rapportant à cet immeuble, sur lesquels figurent le montant exact et définitif des charges supportées et de la taxe sur la valeur ajoutée correspondante, la société requérante n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le service a remis en cause la déduction de la taxe grevant ces charges.
19. La société requérante n'est pas fondée à se prévaloir, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, du paragraphe 11 de l'instruction du 5 mai 1998, référencée 3 A 3 9, qui ne comporte pas d'interprétation de la loi fiscale différente de celle dont il est fait application dans le présent arrêt.
20. En second lieu, le service a également remis en cause la déduction de la taxe figurant sur les factures d'honoraires émises par le cabinet comptable AMC/OPSIONE pour la rédaction des déclarations fiscales de la SCI Balsic, après avoir relevé que cette société n'avait signé aucune convention de prestation de services avec la société CDS Distribution et qu'ainsi, les dépenses engagées ne l'avaient pas été pour les besoins d'une opération imposable. Pour critiquer cette rectification, la société requérante fait valoir qu'elle exerce une activité de conseil et de gestion administrative pour le compte de ses filiales mais également de sociétés tierces, et que les prestations dont a bénéficié la société Balsic ont été effectuées dans le cadre des conventions d'assistance qu'elle avait conclues avec la société LVS et la société SCI La Croix verte, la première détenant 40 % du capital de la SCI Balsic, qui possède la seconde. Toutefois, les conventions produites par la société CDS Distribution ne portent que sur des prestations de services à rendre aux sociétés LVS et La Croix verte, et non à la SCI Balsic, dont le nom n'y est pas mentionné. Par ailleurs, le ministre soutient, sans être contredit, qu'il n'existe pas de facturation entre les sociétés Balsic, qui ne réalise pas de chiffre d'affaires, et la redevable. Ainsi, en l'absence de production par la société requérante d'éléments probants susceptibles d'établir que les dépenses en litige présenteraient un lien direct et immédiat avec l'une de ses opérations taxables, celle-ci n'est pas fondée à contester la rectification en litige.
S'agissant de la détermination du coefficient de déduction :
21. D'une part, aux termes de l'article 205 de l'annexe II au code général des impôts : " La taxe sur la valeur ajoutée grevant un bien ou un service qu'un assujetti à cette taxe acquiert, importe ou se livre à lui-même est déductible à proportion de son coefficient de déduction. ". Aux termes de l'article 206 de cette annexe : " I.- Le coefficient de déduction mentionné à l'article 205 est égal au produit des coefficients d'assujettissement, de taxation et d'admission. II.- Le coefficient d'assujettissement d'un bien ou d'un service est égal à sa proportion d'utilisation pour la réalisation d'opérations imposables. Les opérations imposables s'entendent des opérations situées dans le champ d'application de la taxe sur la valeur ajoutée en vertu des articles 256 et suivants du code général des impôts, qu'elles soient imposées ou légalement exonérées. III.-1. Le coefficient de taxation d'un bien ou d'un service est égal à l'unité lorsque les opérations imposables auxquelles il est utilisé ouvrent droit à déduction. / 2. Le coefficient de taxation d'un bien ou d'un service est nul lorsque les opérations auxquelles il est utilisé n'ouvrent pas droit à déduction. / 3. Lorsque le bien ou le service est utilisé concurremment pour la réalisation d'opérations imposables ouvrant droit à déduction et d'opérations imposables n'ouvrant pas droit à déduction, le coefficient de taxation est calculé selon les modalités suivantes : 1° Ce coefficient est égal au rapport entre : a. Au numérateur, le montant total annuel du chiffre d'affaires afférent aux opérations ouvrant droit à déduction, y compris les subventions directement liées au prix de ces opérations ; b. Et, au dénominateur, le montant total annuel du chiffre d'affaires afférent aux opérations imposables, y compris les subventions directement liées au prix de ces opérations. Les sommes mentionnées aux deux termes de ce rapport s'entendent tous frais et taxes compris, à l'exclusion de la taxe sur la valeur ajoutée ; 2° Lorsqu'un assujetti a constitué des secteurs distincts d'activité en application de l'article 209, le chiffre d'affaires à retenir pour le calcul du rapport mentionné au 1° est celui du ou des secteurs pour lesquels le bien ou le service est utilisé ; 3° Pour l'application des dispositions du 1°, il est fait abstraction du montant du chiffre d'affaires afférent : a. Aux cessions des biens d'investissements corporels ou incorporels ; b. Au produit des opérations immobilières et financières accessoires exonérées de la taxe sur la valeur ajoutée. Sont considérées comme accessoires les opérations qui présentent un lien avec l'activité principale de l'entreprise et dont la réalisation nécessite une utilisation limitée au maximum à 10 % des biens et des services grevés de taxe sur la valeur ajoutée qu'elle a acquis. Ce pourcentage est apprécié en fonction de la proportion d'utilisation pour ces opérations de chaque bien et service grevé de taxe sur la valeur ajoutée. Cette proportion est appliquée à la valeur d'acquisition par le redevable de chacun de ces biens et services pour déterminer leur valeur d'utilisation. Le pourcentage résulte du rapport entre, au numérateur, la somme des valeurs d'utilisation ainsi déterminées et, au dénominateur, le montant total de la valeur d'acquisition de ces biens et services. (...) ".
22. D'autre part, aux termes de l'article 261 C du code général des impôts : " Sont exonérées de la taxe sur la valeur ajoutée : 1° Les opérations bancaires et financières suivantes : a. L'octroi et la négociation de crédits, la gestion de crédits effectuée par celui qui les a octroyés, les prêts de titres effectués dans les conditions prévues aux articles L. 211-22 à L. 211-26 du code monétaire et financier et les pensions réalisées dans les conditions prévues par les articles
L. 211-27 à L. 211-34 du même code ; b. La négociation et la prise en charge d'engagements, de cautionnements et d'autres sûretés et garanties ainsi que la gestion de garanties de crédits effectuée par celui qui a octroyé les crédits ; c. Les opérations, y compris la négociation, concernant les dépôts de fonds, comptes courants, paiements, virements, créances, chèques et autres effets de commerce, à l'exception du recouvrement de créances ; (...) ". Aux termes de l'article 271 du même code : " (...) V. Ouvrent droit à déduction dans les mêmes conditions que s'ils étaient soumis à la taxe sur la valeur ajoutée : (...) les services bancaires et financiers exonérés en application des dispositions des a à e du 1° de l'article 261 C lorsqu'ils sont rendus à des personnes domiciliées ou établies en dehors de l'Union européenne (...) ".
23. Il résulte de l'instruction que le service a constaté au cours des opérations de contrôle que la société CDS Distribution avait déduit la totalité de la taxe sur la valeur ajoutée grevant les dépenses d'acquisition de biens ou de prestations de services qu'elle avait supportées, alors qu'elle n'était pas en mesure de justifier que ces dépenses avaient été exposées pour les besoins d'une opération soumise à la taxe et ouvrant droit à déduction. Il a cependant admis la déduction intégrale de la taxe portée, d'une part, sur les factures d'achat de bouteilles de champagne destinées à la revente et, d'autre part, sur les factures établies par le cabinet comptable AMC/OPSIONE au titre de l'établissement des comptes des filiales auxquelles la société CDS Distribution avait facturé des prestations de gestion et de comptabilité. Pour les autres activités de la société, le service vérificateur a déterminé un coefficient de taxation selon les modalités précisées au III de l'article 206 de l'annexe II au code général des impôts. Il a ainsi exclu du numérateur du rapport prévu par ces dispositions les intérêts, les produits nets de cessions de valeurs mobilières ainsi que les produits financiers de participations perçus par la société au titre de chacun des exercices vérifiés, dont il a considéré qu'étant exonérés de taxe sur la valeur ajoutée, ils n'ouvraient pas droit à déduction, et il a inscrit au dénominateur du rapport l'ensemble des produits réalisés au cours du même exercice.
24. En premier lieu, la société requérante soutient que les intérêts que lui versent ses filiales en rémunération des avances qu'elle leur consent en exécution des conventions de gestion de trésorerie qu'elle a conclues avec elles dans le cadre de son activité de société holding mixte animatrice de son groupe se rattachent à son activité de gestion, laquelle est soumise à la taxe et ouvre droit à déduction, et qu'ils doivent, dès lors, être intégrés aux recettes figurant au numérateur du rapport servant à déterminer le coefficient de taxation. Toutefois, il résulte de l'instruction que les produits financiers en litige constituent des intérêts versés au titre de l'octroi de prêts, que la société CDS Distribution a d'ailleurs facturés à ses filiales sans taxe sur la valeur ajoutée, sous l'intitulé " intérêts suite à mise à disposition de fonds ". Ces produits financiers sont exonérés de taxe sur la valeur ajoutée en application des dispositions précitées du 1° de l'article 261 C du code général des impôts. Par suite, c'est à bon droit que le service les a exclus du numérateur du rapport servant à déterminer le coefficient de taxation.
25. En deuxième lieu, la société CDS Distribution soutient également que les intérêts qu'elle a perçus de ses filiales françaises au titre des années 2008 à 2013 d'une part, et au titre des années 2014 à 2016 d'autre part, correspondent à des opérations financières accessoires exonérées de taxe sur la valeur ajoutée et qu'ils doivent être exclus, pour ce motif, du rapport permettant de déterminer le coefficient de taxation, en application des dispositions précitées du b du 3° du 3 du III de l'article 206 de l'annexe II au code général des impôts.
26. La Cour de justice de l'Union européenne a dit pour droit, dans son arrêt du 29 avril 2004, Empresa de Desenvolvimento Mineiro (EDM) SGPS SA (C-77/01), que l'octroi annuel par une société holding de prêts rémunérés aux sociétés dans lesquelles elle détient une participation constitue une activité économique, effectuée par un assujetti agissant en tant que tel, au sens des articles 2, point 1, et 4, paragraphe 2, de la sixième directive 77/388, repris par la directive 2006/112/CE du 28 novembre 2006. Elle a également dit pour droit que, toutefois, lesdites opérations sont exonérées de la taxe sur la valeur ajoutée en vertu de l'article 13, B, sous d), points 1 et 5, de cette même directive, et que, lors du calcul du prorata de déduction visé aux articles 17 et 19 de la sixième directive 77/388, ces opérations doivent être considérées comme des opérations accessoires, au sens de l'article 19, paragraphe 2, deuxième phrase, de celle-ci, dans la mesure où elles n'impliquent qu'une utilisation très limitée de biens ou de services pour lesquels la taxe sur la valeur ajoutée est due.
27. La circonstance alléguée par le ministre que les produits financiers perçus par la société CDS Distribution représentent une part conséquente de son chiffre d'affaires n'est pas, par elle-même, de nature à faire obstacle à ce que soit reconnue la qualification d'opération accessoire à son activité d'avance de trésorerie auprès de ses filiales. Par ailleurs, il résulte de l'instruction que cette activité est liée à l'activité principale de prestations de conseils et de gestion auprès notamment de ses filiales, exercée par la société CDS Distribution, et que les opérations d'avance de trésorerie auxquelles celle-ci s'est livrée durant les périodes en litige ont impliqué une utilisation de biens ou de services pour lesquels la taxe sur la valeur ajoutée due était inférieure à 10 %. Ainsi, ces opérations financières doivent être regardées comme présentant un caractère accessoire au sens
du b du 3° du 3 du III de l'article 206 de l'annexe II au code général des impôts. Elles sont exonérées de taxe sur la valeur ajoutée en application des dispositions du 1° de l'article 261 C du code général des impôts. Par suite, les intérêts versés en rémunération de ces opérations d'avances ne devaient pas être inscrits au dénominateur du rapport servant à déterminer le coefficient de taxation.
28. En troisième lieu, la société CDS Distribution soutient que les produits des cessions de titres qu'elle a réalisées en 2011 et 2012 ne devaient pas figurer au dénominateur du rapport prévu à l'article 206 de l'annexe II au code général des impôts, dès lors que ces cessions constituent des cessions de biens d'investissements corporels ou incorporels au sens des dispositions précitées du a du 3°du 3 du III de cet article.
29. Dans son arrêt du 6 mars 2008 aff. 98/07, 4e ch., Nordania Finans et BG Factoring, la Cour de justice de l'Union européenne, après avoir rappelé que " (...) si le paragraphe 1 de l'article 19 de la sixième directive prévoit que le prorata de déduction résulte d'une fraction comportant, au numérateur, le chiffre d'affaires afférent aux opérations taxées et, au dénominateur, le chiffre d'affaires total augmenté, le cas échéant, de certaines subventions, le paragraphe 2 du même article dispose que, par dérogation, il est fait abstraction, notamment, du montant du chiffre d'affaires afférent aux livraisons de biens d'investissement utilisés par l'assujetti dans son entreprise ou afférent aux opérations accessoires immobilières et financières (...) ", a dit pour droit que : " (...) la notion de " biens d'investissement utilisés par l'assujetti dans son entreprise " au sens de l'article 19, paragraphe 2, de la sixième directive ne saurait inclure ceux dont la vente revêt, pour l'assujetti concerné, le caractère d'une activité économique habituelle. En effet, pour l'intéressé, l'acquisition puis la vente de tels biens nécessitent l'utilisation courante des biens et des services à usage mixte. Dès lors que cette vente relève des activités habituelles et taxées de l'assujetti, le chiffre d'affaires y afférent doit être pris en compte dans le calcul du prorata de déduction pour que celui-ci reflète au mieux la part d'utilisation, pour ces activités, des biens et des services affectés à un usage mixte, sauf à méconnaître l'objectif de neutralité du système commun de taxe sur la valeur ajoutée. ".
30. Ainsi qu'il a été dit précédemment, la société CDS Distribution a pour objet la réalisation de prestations de services de conseil et de gestion au profit notamment de ses filiales avec lesquelles elle a signé des conventions de domiciliation et de gestion administrative, comptable et de trésorerie. Par ailleurs, il résulte de l'instruction que la société n'a procédé à aucune cession de titres au cours des exercices clos en 2008, 2009, 2010 et 2013 et que les produits des cessions qu'elle a réalisées en 2011 et 2012 et au titre des exercices postérieurs sont d'un montant limité au regard des chiffres d'affaires déclarés. Ainsi, les cessions de titres en litige ne peuvent être regardées comme revêtant pour la société CDS Distribution le caractère d'une activité économique habituelle. Par suite, alors qu'elles constituent des cessions de biens d'investissement incorporels au sens des dispositions précitées du a du 3° du 3 du III de l'article 206 de l'annexe II au code général des impôts, c'est à tort que le service a, pour le calcul du coefficient de déduction de taxe sur la valeur ajoutée, pris en compte le produit de ces cessions au dénominateur du rapport de taxation.
31. En dernier lieu, il résulte de ce qui a été dit au point 4 que l'administration a fait droit à l'argumentation de la société CDS Distribution, qui soutenait à bon droit que les intérêts versés par ses filiales établies en dehors de l'Union européenne en rémunération des avances de trésorerie qu'elle leur avait consenties se rapportaient à des opérations ouvrant droit à déduction en application des dispositions du b du V de l'article 271 du code général des impôts, et qu'ils devaient ainsi figurer au numérateur du rapport du coefficient de taxation prévu à l'article 206 de l'annexe II à ce code, en prononçant d'une part, le dégrèvement des rappels de taxe sur la valeur ajoutée correspondants mis à la charge de la redevable au titre des périodes se rapportant aux exercices clos en 2012 et 2013 et, d'autre part, le remboursement du crédit de taxe dont elle s'estimait titulaire à concurrence de la somme de 81 355 euros. Toutefois, il résulte de l'instruction que, comme le soutient la société requérante dans son mémoire présenté en réponse à la décision de dégrèvement de l'administration, celle-ci n'a pas pris en compte au numérateur du rapport les intérêts versés dans les mêmes conditions par les mêmes filiales au titre de la période allant du 1er septembre 2007 au 31 août 2010, correspondant aux exercices clos en 2008, 2009 et 2010. Si le ministre fait valoir que la société CDS Distribution ne peut prétendre au bénéfice d'une réduction supplémentaire dès lors que le montant de la rectification proposée pour cette période est supérieur au montant du crédit de taxe correspondant à cette même période et reporté à l'ouverture de la période vérifiée, la société est toutefois fondée à demander que l'administration tire les conséquences, sur le montant de cette rectification, non seulement de ce qui a été jugé aux points 27 et 30, mais également de l'inclusion au numérateur du rapport de taxation des intérêts que lui ont versés au cours de cette période ses filiales établies en dehors de l'Union européenne en rémunération des avances de trésorerie qu'elle leur avait consenties, et qu'elle réduise en conséquence, le cas échéant, les impositions en litige.
En ce qui concerne le bien-fondé de la cotisation de taxe sur les salaires :
S'agissant de l'application de la loi fiscale :
32. Aux termes de l'article 261 du code général des impôts : " L'assiette de la taxe due par ces personnes ou organismes est constituée par une partie des rémunérations versées, déterminée en appliquant à l'ensemble de ces rémunérations le rapport existant, au titre de cette même année, entre le chiffre d'affaires qui n'a pas été passible de la taxe sur la valeur ajoutée et le chiffre d'affaires total. Le chiffre d'affaires qui n'a pas été assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée en totalité ou sur 90 p. 100 au moins de son montant, ainsi que le chiffre d'affaires total mentionné au dénominateur du rapport s'entendent du total des recettes et autres produits, y compris ceux correspondant à des opérations qui n'entrent pas dans le champ d'application de la taxe sur la valeur ajoutée. Le chiffre d'affaires qui n'a pas été passible de la taxe sur la valeur ajoutée mentionné au numérateur du rapport s'entend du total des recettes et autres produits qui n'ont pas ouvert droit à déduction de la taxe sur la valeur ajoutée ".
33. En premier lieu, il résulte de l'instruction que la société CDS Distribution n'est pas redevable de la taxe sur la valeur ajoutée sur plus de 90 % du chiffre d'affaires qu'elle a réalisé au titre de la période vérifiée. Par suite, elle n'est pas fondée à soutenir qu'elle n'entre pas, pour ce motif, dans le champ de la taxe sur les salaires.
34. En second lieu, il résulte de l'instruction qu'en faisant figurer au numérateur et au dénominateur du rapport d'assujettissement à la taxe sur les salaires les produits des cessions de titres réalisées par la société CDS Distribution en 2012, qui ne sont pas passibles de la taxe sur la valeur ajoutée, le service n'a pas méconnu les dispositions précitées de l'article 231 du code général des impôts.
S'agissant de l'interprétation administrative de la loi fiscale :
35. Aux termes de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales : " Il ne sera procédé à aucun rehaussement d'impositions antérieures si la cause du rehaussement poursuivi par l'administration est un différend sur l'interprétation par le redevable de bonne foi du texte fiscal et s'il est démontré que l'interprétation sur laquelle est fondée la première décision a été, à l'époque, formellement admise par l'administration (...). Lorsque le redevable a appliqué un texte fiscal selon l'interprétation que l'administration avait fait connaître par ses instructions ou circulaires publiées et qu'elle n'avait pas rapportée à la date des opérations en cause, elle ne peut poursuivre aucun rehaussement en soutenant une interprétation différente (...) ".
36. La société CDS Distribution se prévaut des énonciations du paragraphe n° 100 du bulletin officiel des impôts référencé BOI-TPS-TS-20-30-2016-04-06, qui prévoient que les sommes correspondant aux cessions de biens d'investissement corporels ou incorporels ne doivent pas être prises en compte pour la détermination du coefficient d'assujettissement à la taxe sur les salaires.
37. D'une part, il résulte de l'instruction que la société CDS Distribution n'a pas souscrit de déclaration de taxe sur les salaires au titre de l'année 2012 et qu'ainsi, la cotisation en litige ne procède pas du rehaussement d'une imposition antérieure. D'autre part, la société CDS Distribution ne peut être réputée avoir fait application des termes du paragraphe n° 100 de l'instruction référencée BOI-TPS-TS-20-30-2016-04-06, qui ne conduisaient pas à la placer hors du champ d'application de la taxe sur les salaires ou à l'exonérer de son paiement mais uniquement à corriger son coefficient d'assujettissement à cette taxe. Dans ces conditions, la société requérante n'est pas fondée à se prévaloir des termes de la documentation précitée sur le fondement des dispositions de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales.
En ce qui concerne les intérêts de retard et les pénalités :
38. Il résulte des points précédents que la société requérante n'est pas fondée à demander la décharge de la cotisation de taxe sur les salaires à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 2012, ainsi que, par voie de conséquence, de la majoration de 10 % correspondante, qui lui a été infligée sur le fondement des dispositions de l'article 1729 A du code général des impôts.
39. Il résulte de tout ce qui précède que la société CDS Distribution est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que, par les jugements attaqués, le Tribunal administratif de Paris a rejeté la totalité du surplus des conclusions de ses demandes.
Sur les conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
40. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par la société CDS Distribution.
DÉCIDE :
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions à fin de décharge des requêtes de la société CDS Distribution à concurrence des montants dégrevés par l'administration.
Article 2 : Les rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à la charge de la société CDS Distribution au titre de la période allant du 1er septembre 2010 au 31 août 2013 seront réduits selon les modalités fixées par le présent arrêt.
Article 3 : Le montant du remboursement du crédit de taxe sur la valeur ajoutée sollicité par la société CDS Distribution sera calculé selon les modalités fixées par le présent arrêt.
Article 4 : Les jugements n° 1602813 du 19 septembre 2017 et n° 1711991 du 2 mai 2018 du Tribunal administratif de Paris sont réformés en ce qu'ils ont de contraire au présent arrêt.
Article 5 : L'Etat versera une somme de 1 500 euros à la société CDS Distribution au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 6 : Le surplus des conclusions des requêtes de la société CDS Distribution est rejeté.
Article 7 : Le présent arrêt sera notifié à la société à responsabilité limitée (SARL) CDS Distribution et au ministre de l'action et des comptes publics.
Copie en sera adressée au directeur régional des finances publiques d'Île-de-France et du département de Paris - Pôle fiscal parisien 1 - service du contentieux d'appel déconcentré (SCAD).
Délibéré après l'audience du 19 septembre 2019, à laquelle siégeaient :
- M. Formery, président de chambre,
- Mme D..., président-assesseur,
- M. Doré, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 17 octobre 2019.
Le rapporteur,
V. D...Le président,
S.-L. FORMERY
Le greffier,
F. DUBUY
La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N°s 17PA03532-18PA02177