Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Le centre communal d'action sociale de Villejuif a demandé au Tribunal administratif de Melun d'annuler l'avis rendu le 6 novembre 2015 par le conseil de discipline de recours d'Ile-de-France concernant Mme C... B... et concluant à l'exclusion temporaire de fonctions pour une durée de deux ans de celle-ci.
Par un jugement n° 1601614/5 du 5 juillet 2018 le Tribunal administratif de Melun a annulé cet avis du 6 novembre 2015.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire enregistrés les 4 septembre et 23 décembre 2018, Mme B..., représentée par le cabinet d'avocats Bosqué et associés, demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement n° 1601614/5 du 5 juillet 2018 du Tribunal administratif de Melun ;
2°) de mettre à la charge du centre communal d'action sociale de Villejuif le versement de la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- les faits qui lui sont reprochés ne sont pas matériellement établis ;
- le CCAS ne pouvait se fonder sur son comportement en septembre 2014, alors que celui-ci a fait l'objet d'une sanction du premier groupe ;
- les premiers juges ont commis une erreur de droit en se fondant sur un faisceau d'indices alors que l'administration devait apporter la preuve de la réalité des faits et ils ne pouvaient s'en tenir à une présomption ;
- la sanction de l'exclusion temporaire de deux ans retenue par le conseil de discipline de recours n'est pas disproportionnée.
Par un mémoire en défense enregistré le 6 décembre 2018, le centre d'action sociale de Villejuif, représenté par la Selarl Claisse et associés, conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de Mme B... d'une somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- aucun des moyens de la requête n'est fondé.
La clôture d'instruction a été fixée au 28 décembre 2018.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique et son décret d'application n° 91-1266 du 19 décembre 1991 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme A...,
- les conclusions de Mme Jimenez, rapporteur public,
- et les observations de Me Potterie, avocat du centre communal d'action sociale de Villejuif.
Considérant ce qui suit :
1. Mme C... B..., agent social de 2ème classe, exerçait les fonctions d'aide-ménagère au sein du service d'aide à domicile des retraités du centre communal d'action sociale (CCAS) de Villejuif. Dans le cadre d'une procédure disciplinaire engagée à son encontre, le conseil de discipline du centre interdépartemental de gestion de la petite couronne de la région d'Ile-de-France a émis, eu égard à l'absence, selon lui, d'éléments suffisamment probants de nature à établir les faits de vols qui étaient reprochés à l'intéressée, un avis défavorable au prononcé d'une sanction. Le président du CCAS a, néanmoins, pris le 17 juin 2015, un arrêté portant révocation de Mme B... à compter du 6 juillet suivant. Cette dernière a formé, le
29 juin 2015, un recours administratif devant le conseil de discipline de recours du centre interdépartemental de gestion de la petite couronne de la région d'Ile-de-France, lequel s'est prononcé, le 6 novembre 2015, en faveur d'une exclusion temporaire de fonctions de deux ans. Le CCAS de Villejuif a demandé l'annulation de cet avis au Tribunal administratif de Melun. Le tribunal a fait droit à cette demande, par un jugement n° 1601614/5 du 5 juillet 2018, dont Mme B... relève régulièrement appel.
2. Aux termes de l'article 89 de la loi du 26 janvier 1984 susvisée : " Les sanctions disciplinaires sont réparties en quatre groupes : (...) Quatrième groupe : / la mise à la retraite d'office ; / la révocation ". Aux termes de l'article 91 de la même loi : " Les fonctionnaires qui ont fait l'objet d'une sanction des deuxième, troisième et quatrième groupes peuvent introduire un recours auprès du conseil de discipline départemental ou interdépartemental dans les cas et conditions fixés par un décret en Conseil d'Etat. / L'autorité territoriale ne peut prononcer de sanction plus sévère que celle proposée par le conseil de discipline de recours ".
3. Il appartient au juge de l'excès de pouvoir, saisi de moyens en ce sens, de rechercher si les faits reprochés à un agent public ayant fait l'objet d'une sanction disciplinaire constituent des fautes de nature à justifier une sanction et si la sanction retenue est proportionnée à la gravité de ces fautes. Il lui appartient également de rechercher si la sanction proposée par un conseil de discipline de recours statuant sur le recours d'un fonctionnaire territorial est proportionnée à la gravité des fautes qui lui sont reprochées.
4. Il est reproché à Mme B... d'être responsable de vols, notamment de bijoux, survenus en 2008 et aux mois d'avril et mai 2014 aux domiciles de retraitées chez lesquelles elle intervenait en qualité d'aide à domicile, deux de ces vols ayant fait l'objet d'une plainte à son encontre déposée auprès de services de police.
5. Le tribunal administratif a estimé que la matérialité des faits reprochés à Mme B... par le CCAS, consistant en des vols de bijoux perpétrés à l'encontre et au domicile d'usagères du service d'aide-ménagère, devait être tenue pour avérée, et en a déduit que la sanction de l'exclusion temporaire de deux ans retenue par le conseil de discipline dans l'avis qu'il a rendu le
6 novembre 2015 n'était pas proportionnée à la gravité de ces faits car insuffisamment sévère. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que les reproches faits à Mme B... par le CCAS reposent essentiellement sur les accusations formulées par les deux personnes s'étant déclarées victimes, en avril et mai 2014, de vols qu'elles imputaient à la requérante. Or ces accusations, qui sont insuffisamment corroborées par les attestations d'agents du CCAS ou d'usagers de celui-ci, sont peu circonstanciées et revêtues d'une valeur probante trop faible pour permettre de regarder les faits reprochés comme établis, la plainte déposée par l'une des victimes n'ayant d'ailleurs pas reçu de suite. Dans ces conditions, Mme B... est fondée à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont estimé que la sanction de l'exclusion temporaire de deux ans retenue par le conseil de discipline de recours dans son avis était disproportionnée car insuffisamment sévère et ont, pour ce motif, fait droit à la demande du CCAS tendant à l'annulation de cet avis.
6. De ce qui précède, il résulte que Mme B... est fondée à obtenir l'annulation du jugement attaqué en tant qu'il annule l'avis du conseil de discipline de recours du
6 novembre 2015 et le rejet de la demande présentée devant le Tribunal administratif de Melun par le CCAS de Villejuif. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du CCAS de Villejuif une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Les conclusions du CCAS de Villejuif présentées sur le même fondement ne peuvent qu'être rejetées, Mme B... n'ayant pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante.
DECIDE :
Article 1er : L'article 1er du jugement n° 1601614/5 du Tribunal administratif de Melun du
5 juillet 2018 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par le centre communal d'action sociale de Villejuif devant le Tribunal administratif de Melun est rejetée.
Article 3 : Le centre communal d'action sociale de Villejuif versera une somme de 1 500 euros à Mme B... en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Les conclusions du centre communal d'action sociale présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... B... et au centre communal d'action sociale de Villejuif.
Délibéré après l'audience du 6 novembre 2019, à laquelle siégeaient :
- Mme Brotons, président de chambre,
- Mme A..., président assesseur,
- Mme Bonneau-Mathelot, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 27 novembre 2019.
Le rapporteur,
S. APPECHELe président,
I. BROTONS
Le greffier,
P. LIMMOIS
La République mande et ordonne au préfet du Val-de-Marne en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N° 18PA02966 2