Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société SFER a demandé au Tribunal administratif de La Réunion de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie au titre de la période du 1er janvier 2009 au 31 décembre 2010.
Par un jugement n° 1400919 du 19 décembre 2016, le Tribunal administratif de La Réunion a rejeté sa demande comme étant irrecevable.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 24 février 2017, dont le jugement a été attribué à la Cour administrative d'appel de Paris par ordonnance du président de la section du contentieux de Conseil d'État du 1er mars 2019, sur le fondement des dispositions de l'article R. 351-8 du code de justice administrative, la société SFER, représentée par Me A..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1400919 du 19 décembre 2016 du Tribunal administratif de La Réunion ;
2°) de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie au titre de la période du 1er janvier 2009 au 31 décembre 2010 ;
3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- c'est à tort que le tribunal a estimé que l'autorité de chose jugée par ce même tribunal faisait obstacle à la recevabilité de sa nouvelle demande, dès lors que l'arrêt invoqué de la Cour d'appel de Bordeaux n'a pas autorité de la chose jugée s'agissant d'un litige portant sur une période différente ;
- les prestations litigieuses doivent être regardées, à titre principal, comme des prestations immobilières, et plus précisément comme des travaux immobiliers au sens de l'article 78 de l'annexe III au code général des impôts et des prises de position administratives applicables, notamment la doctrine administrative BOI-TVA-BASE-20-50-10 du 12 septembre 2012, et, à titre subsidiaire, comme des prestations de service relevant, par nature, d'une catégorie autonome ; la taxe sur la valeur ajoutée est donc exigible à la date de l'encaissement du prix, et non à celle de la facture.
Par un mémoire en défense enregistré le 3 août 2017, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par la société SFER ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme B...,
- et les conclusions de M. Lemaire, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. La société SFER, dont l'activité consiste à livrer, installer et entretenir des centrales photovoltaïques, a été assujettie, à l'issue d'une vérification de sa comptabilité, à des rappels de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période du janvier 2009 au 31 décembre 2010, au motif que les opérations en cause étaient constitutives de livraisons de biens meubles corporels, soumises à la taxe sur la valeur ajoutée au titre du mois de la livraison ou, à défaut de livraison, de la date de la facture, et non de travaux immobiliers, pour lesquels la taxe ne serait exigible qu'à la date de l'encaissement du prix. Elle relève appel du jugement du 19 décembre 2016 par lequel le Tribunal administratif de La Réunion a rejeté sa demande comme irrecevable.
2. Aux termes de l'article 256 du code général des impôts dans sa rédaction applicable à la taxe en litige : " I. Sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée les livraisons de biens et les prestations de services effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel. / II. 1° Est considéré comme livraison d'un bien, le transfert du pouvoir de disposer d'un bien meuble corporel comme un propriétaire. / (...) / IV. 1° Les opérations autres que celles qui sont définies au II, notamment la cession ou la concession de biens meubles incorporels, le fait de s'obliger à ne pas faire ou à tolérer un acte ou une situation, les opérations de façon, les travaux immobiliers et l'exécution des obligations du fiduciaire, sont considérés comme des prestations de services ; (...) ". Aux termes du 2 de l'article 269 de ce code, dans sa rédaction applicable au litige, la taxe est exigible, pour les livraisons de biens, à la date de la livraison, pour les prestations de service, lors de l'encaissement des acomptes, du prix ou de la rémunération ou, sur option, d'après les débits, et pour les travaux immobiliers, sur option du redevable et selon les conditions fixées par décret, à la date des livraisons. Aux termes de l'article 78 de l'annexe III à ce code : " Les entrepreneurs peuvent acquitter la taxe sur la valeur ajoutée au moment de la livraison, pour les travaux immobiliers exécutés dans le cadre d'un marché unique comportant la fourniture de biens meubles et l'installation ou l'incorporation à un ouvrage immobilier des matériels et appareils fournis. " Aux termes de l'article 283 du même code, dans sa rédaction applicable au litige : " (...) 3. Toute personne qui mentionne la taxe sur la valeur ajoutée sur une facture est redevable de la taxe du seul fait de sa facturation. / 4. Lorsque la facture ne correspond pas à la livraison d'une marchandise ou à l'exécution d'une prestation de services, ou fait état d'un prix qui ne doit pas être acquitté effectivement par l'acheteur, la taxe est due par la personne qui l'a facturée. / (...) ".
3. Pour l'application de l'article 256 et du 2 de l'article 269 du code général des impôts, doivent être regardées comme des travaux immobiliers les opérations qui concourent directement à l'édification d'un bâtiment, laquelle doit s'entendre non seulement de la construction du bâtiment lui-même, mais aussi de la réalisation des équipements généraux qui l'accompagnent normalement, dès lors qu'ils ne sont pas destinés à être déplacés et qu'ils s'incorporent à l'immeuble. En conséquence, les travaux immobiliers ne comprennent pas la réalisation d'installations particulières répondant à une utilisation spéciale du bâtiment édifié.
4. Il ressort des pièces du dossier que la société SFER a, au cours de la période en litige, livré à ses clients, qui sont des sociétés en nom collectif, des centrales photovoltaïques, qu'elle a installées sur des emplacements situés sur la toiture d'immeubles préalablement construits et faisant l'objet d'un contrat de location entre les sociétés clientes et les propriétaires de ces immeubles. Les équipements vendus et installés par la société requérante ne pouvaient, ainsi, être regardés comme des équipements concourant directement à l'édification des bâtiments, mais comme des installations particulières répondant à une utilisation spéciale des immeubles. Les opérations en litige ne pouvaient, dès lors, être qualifiées de travaux immobiliers au sens de l'article 256 et du 2 de l'article 269 du code général des impôts. C'est donc à bon droit que l'administration fiscale a estimé que les prestations de livraison, d'installation et de maintenance de centrales photovoltaïques fournies par la société SFER sont constitutives de livraisons de biens mobiliers soumises à la taxe sur la valeur ajoutée au titre du mois de la livraison.
5. La société requérante ne peut se prévaloir, sur le fondement des dispositions de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, de l'instruction référencée BOl-TVA-BASE-20-50-10 du 12 septembre 2012, laquelle ne retient pas une interprétation de la loi fiscale différente de celle dont il est fait application.
6. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner la recevabilité de la requête, que la société SFER n'est pas fondée à se plaindre que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de La Réunion a rejeté sa demande. Ses conclusions présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent, par suite, qu'être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la société SFER est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société SFER et au ministre de l'action et des comptes publics.
Copie en sera adressée au directeur spécialisé de contrôle fiscal sud-ouest (division des affaires juridiques - service du contentieux d'appel déconcentré - SCAD).
Délibéré après l'audience du 16 janvier 2020, à laquelle siégeaient :
- M. Formery, président de chambre,
- Mme B..., premier conseiller,
- M. Doré, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 30 janvier 2020.
Le rapporteur,
C. B...Le président,
S.-L. FORMERY
Le greffier,
F. DUBUY
La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 17PA20680