Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société Bidel Dépannage a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler la décision implicite par laquelle le maire de Paris a rejeté sa réclamation contre le titre de recette mettant à sa charge la somme de 1 663,33 euros au titre des dommages causés à un véhicule lors d'une opération de mise en fourrière, d'annuler l'article 3 de l'arrêté du 24 mars 2017 par lequel le préfet de police a ordonné le recouvrement de la somme de 1 663,33 euros mise à sa charge au titre des dommages causés à un véhicule lors d'une opération de mise en fourrière, de la décharger de l'obligation de payer la somme de 1 663,33 euros ainsi mise à sa charge et de mettre à la charge de la ville de Paris la somme de 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un jugement n° 1809399/4-1 du 23 mai 2019, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire enregistrés les 26 juillet et 16 septembre 2019 la société Bidel Dépannage, représentée par Me B..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du Tribunal administratif de Paris du 23 mai 2019 ;
2°) d'annuler la décision implicite par laquelle le maire de Paris a rejeté sa réclamation contre le titre de recette mettant à sa charge la somme de 1 663,33 euros ;
3°) d'annuler l'article 3 de l'arrêté du 24 mars 2017 par lequel le préfet de police a ordonné le recouvrement de la somme de 1 663,33 euros mise à sa charge au titre des dommages causés à un véhicule lors d'une opération de mise en fourrière ;
4°) de la décharger de l'obligation de payer la somme de 1 663,33 euros ainsi mise à sa charge ;
5°) de mettre à la charge de la ville de Paris la somme de 800 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le jugement attaqué est entaché d'irrégularité dès lors qu'il n'a pas répondu au moyen tiré de ce que le propriétaire du véhicule ne s'était pas plaint d'un dommage à la direction mais avait seulement émis des réserves sur la tenue du train avant gauche ;
- l'article 11 du cahier des clauses administratives particulières applicable au marché permet de lui imputer des dommages dont le lien avec les opérations d'enlèvement menées est plausible, uniquement si l'état descriptif n'a pas été établi ou est incomplet, ce qui n'est pas le cas en l'espèce ;
- cette clause de l'article 11 du cahier des clauses administratives particulières ne pouvait lui être opposée car elle est entachée de nullité, ayant pour effet d'engager la responsabilité du cocontractant sur une simple vraisemblance, et donc sans faute alors que le régime de la responsabilité contractuelle administrative est un régime de responsabilité pour faute et que la réalité de la faute doit être prouvée.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme A...,
- et les conclusions de M. Baffray, rapporteur public.
1. La société Bidel Dépannage est attributaire d'un marché conclu avec la préfecture de police, agissant pour le compte de la ville de Paris, lui confiant des opérations d'enlèvement et de conduite en fourrière de véhicules stationnant sur la voie publique. Elle a dans ce cadre procédé, le 25 octobre 2016, à l'enlèvement d'un véhicule immatriculé CH-835-KY et à son transfert à la préfourrière de Pantin où il a été constaté que le pneu avant gauche était crevé. Lors de la restitution de ce véhicule le 7 novembre 2016, le propriétaire a rempli une feuille de réclamation mentionnant ce pneu crevé et émettant des réserves en raison des dommages qui auraient été causés à son véhicule. Le préfet de police a, par arrêté du 24 mars 2017, alloué la somme de 1 663,33 euros au propriétaire de ce véhicule, au titre du règlement total et définitif des dommages causés à son véhicule, et a ordonné le recouvrement de cette somme auprès de la société Bidel Dépannage. Un titre de recette de même montant a en conséquence été ensuite émis le 16 mai 2017 à l'encontre de cette société. Par courrier du 7 novembre 2017, celle-ci a formé une réclamation, qui a fait l'objet d'une décision implicite de rejet du maire de Paris. Elle a alors sollicité du tribunal administratif de Paris l'annulation de l'article 3 de l'arrêté du 24 mars 2017, ensemble la décision de rejet de sa réclamation, ainsi que la décharge de l'obligation de payer la somme de 1 663,33 euros, mais le tribunal a rejeté cette demande par jugement du 23 mai 2019 dont elle interjette appel.
Sur la régularité du jugement :
2. A supposer que la société Bidel Dépannage puisse être regardée comme ayant soulevé en première instance un moyen tiré de ce que le propriétaire du véhicule concerné ne s'était pas plaint d'un dommage à la direction mais avait seulement émis des réserves sur la tenue du train avant gauche, le tribunal, qui n'était tenu de répondre qu'aux moyens et non à l'ensemble des arguments produits à l'appui de ces moyens, a en tout état de cause notamment relevé que le propriétaire, outre la crevaison du pneu avant gauche, avait mentionné sur la feuille de réclamation que " la roue ne tient plus droite " et avait relevé la " tenue " défaillante du train avant gauche avant de retenir que les dommages ainsi constatés correspondaient de manière plausible aux conséquences d'un choc au niveau de la roue avant gauche ayant entrainé des dégâts au niveau de la direction du véhicule et que cette analyse était confirmée par le rapport d'expertise établi sur pièces, qui mentionnait que les dégâts causés au train avant du véhicule étaient imputables à la société ayant procédé aux opérations de mise en fourrière du véhicule. Dès lors le moyen tiré de ce que le tribunal n'aurait pas répondu au moyen de la société requérante manque en fait.
Sur le bien-fondé du jugement :
3. Aux termes de l'article 11 du cahier des clauses administratives particulières applicable au marché: " " En cas de dégâts causés à un véhicule transporté en pré-fourrière ou en fourrière, la préfecture de police remboursera à son propriétaire le montant des dommages constatés et occasionnés à son véhicule lors de son enlèvement, de son transport, de son déchargement et de sa garde. / L'imputabilité des dégâts aux opérations supra découle de la comparaison entre la fiche d'enlèvement et la feuille de réclamation. / Toutefois, le titulaire sera responsable à l'égard de la préfecture de police de tous dégâts occasionnés aux véhicules lors : - de l'enlèvement ; - du transport ; - du déchargement. Les dégâts imputés au titulaire résulteront des différences relevées entre l'état descriptif sommaire établi par l'agent verbalisateur sur la voie publique et l'état du véhicule constaté par le contrôleur ou le préposé, permettant de compléter l'état descriptif lors de la dépose du véhicule en pré-fourrière ou fourrière. Le support principal utilisé sera la fiche descriptive répondant à la présentation réglementaire (...) / Toutefois pour chacun des lots n°1, 2 et 3 la préfecture de police se réserve la possibilité d'utiliser en complément les relevés photographiques de l'état des véhicules ou toute autre mesure d'expertise effectués à l'occasion de la réclamation du propriétaire. Dans l'hypothèse où aucun état descriptif du véhicule n'a été réalisé lors de la dépose de celui-ci en pré-fourrière ou en fourrière, ou que celui-ci est incomplet, la préfecture de police se réserve le droit d'imputer les dommages subis par ledit véhicule lorsqu'ils correspondent de manière plausible à la méthode d'enlèvement pratiquée par le titulaire. (....)".
4. Il ressort de ces stipulations, comme le soutient la société Bidel Dépannage, que sa responsabilité ne peut être engagée du fait de dommages correspondant " de manière plausible à la méthode d'enlèvement pratiquée " que lorsqu'aucun état descriptif n'a été réalisé ou lorsque celui-ci est incomplet. En l'espèce, si un état descriptif a bien été effectué lors de l'arrivée du véhicule immatriculé CH-835-KY en préfourrière, il relevait seulement la crevaison du pneu avant gauche, alors que lors de l'arrivée en fourrière il a aussi été constaté que l'étanchéité du pare-brise avait été dégradée, Ainsi l'état descriptif réalisé lors de l'arrivée en préfourrière, qui ne mentionnait qu'un pneu crevé, était incomplet et la société requérante n'est dès lors pas fondée à soutenir que ne pouvaient être pris en compte les coûts de réparation de la direction du véhicule du fait que les dommages en cause ne ressortaient pas de ce document. Dans ces conditions, dès lors que les dommages constatés, par nature non apparents de l'extérieur du véhicule, correspondent de manière plausible aux conséquences d'un choc au niveau de la roue avant gauche ayant entrainé, outre la crevaison du pneu, des dégâts au niveau de la direction du véhicule, sur laquelle d'ailleurs le propriétaire du véhicule avait émis des réserves lors de sa restitution, ils pouvaient, en application des stipulations de l'article 11 du cahier des clauses administratives particulières applicable être mis à la charge de la société Bidel Dépannage.
6. Il ressort par ailleurs de cette stipulation de l'article 11 du cahier des clauses administratives particulières applicable qu'en prévoyant l'imputabilité au cocontractant de l'administration de dommages du fait qu'ils seraient plausibles avec le mode d'enlèvement retenu ce document, qui se borne à établir le mode de preuve de l'existence d'une faute de ce cocontractant, n'a ni pour objet ni pour effet de créer un régime de responsabilité sans faute et n'instaure pas plus de présomption de faute que lorsque l'imputabilité du dommage résulte de la comparaison entre la fiche d'enlèvement du véhicule, et son état descriptif lors de son arrive en préfourrière ou la fiche de réclamation de son propriétaire. Par suite le moyen tiré du caractère illicite de la clause contestée de l'article 11 du cahier des clauses administratives particulières doit, en tout état de cause, être écarté.
7. Il résulte de tout ce qui précède que la société Bidel Dépannage n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande Sa requête ne peut dès lors qu'être rejetée, y compris ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L761-1 du code de justice administrative, sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité de la demande de première instance.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la société Bidel Dépannage est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société Bidel Dépannage et à la Ville de Paris.
Délibéré après l'audience du 26 mai 2020 à laquelle siégeaient :
- Mme Fuchs Taugourdeau, président de chambre,
- M. Niollet, président-assesseur,
- Mme A..., premier conseiller.
Lu en audience publique, le 9 juin 2020.
Le rapporteur,
M-I. A...Le président,
O. FUCHS TAUGOURDEAU
Le greffier,
P. TISSERAND
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 19PA02452