Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. D... A... a demandé au Tribunal administratif de Paris :
1°) d'annuler la décision du 21 juin 2017 par laquelle le directeur des finances publiques d'Ile-de-France et du département de Paris a procédé à la régularisation de sa situation et lui a opposé la prescription quadriennale pour l'attribution de l'avantage spécifique d'ancienneté, ensemble le rejet implicite de son recours gracieux ;
2°) d'annuler l'arrêté du 19 juillet 2016 portant régularisation de sa situation administrative, ainsi que le courrier de notification du 29 août 2016 ;
3°) d'enjoindre au ministre de l'action et des comptes publics de lui accorder le bénéfice de l'avantage spécifique d'ancienneté à compter du 1er août 2004 et de reconstituer en conséquence sa carrière, ses droits à pension et d'en tirer toutes les conséquences financières ;
4°) de condamner l'Etat à lui verser la somme globale de 24 826,37 euros assortie des intérêts au taux légal, avec capitalisation des intérêts ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un jugement n° 1801613/5-2 du 11 juillet 2019, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 12 septembre 2019, M. A..., représenté par Me C... B..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement n° 1801613/5-2 du 11 juillet 2019 du Tribunal administratif de Paris ;
2°) d'annuler la décision du 21 juin 2017, ensemble le rejet implicite de son recours gracieux ainsi que l'arrêté du 19 juillet 2016 et le courrier de notification du 29 août 2016 ;
3°) de lui accorder le bénéfice de l'avantage spécifique d'ancienneté à compter du 1er août 2004 et de reconstituer sa carrière, ses droits à pension et d'en tirer toutes les conséquences financières ;
4°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 5 116,37 euros brut au titre de la perte de rémunération consécutive au refus de lui accorder le bénéfice de l'allocation spécifique d'ancienneté à compter du 1er août 2004 ainsi qu'une somme de 1 000 euros au titre des rémunérations accessoires, indemnité de résidence et retenue pour pension civile ;
5°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 10 000 euros en réparation du préjudice moral subi ;
6°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 9 380 euros à raison de sa carence fautive à appliquer à la direction générale des finances publiques dans un délai raisonnable des dispositions légales et réglementaires en vigueur concernant l'avantage spécifique d'ancienneté ;
7°) d'ordonner la liquidation de ses droits dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, assortie des intérêts moratoires à compter de la réception de sa demande du 21 janvier 2004 tendant à son admission au bénéfice de l'avantage spécifique d'ancienneté et de la capitalisation des intérêts ;
8°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- c'est à tort que le tribunal a estimé que les conclusions dirigées contre la décision du
19 juillet 2016 étaient tardives et, par suite, irrecevables dès lors que l'accusé de réception justifiant de la date à compter de laquelle le délai contentieux a commencé à courir n'a pas été produit ; la mention des délais et voies de recours était imprécise et incomplète à défaut de toute précision sur la possibilité de former un recours administratif préalable et sur le tribunal administratif compétent ; le jugement méconnaît ainsi les dispositions de l'article R. 421-5 du code de justice administrative ;
- c'est à tort que le tribunal a distingué l'arrêté du 19 juillet 2016 de la décision du 29 août 2016 dès lors qu'elles ont été transmises ensemble, qu'elles font grief et qu'elles n'ont pas été prises séparément par l'administration ;
- c'est à tort que le tribunal a estimé que le courrier du 24 juillet 2017 ne pouvait être regardé comme une demande indemnitaire préalable, dès lors qu'il a demandé à l'administration réparation du préjudice subi en recalculant ses droits à traitement et invoqué la faute commise par l'administration à raison du retard mis à mettre en oeuvre le dispositif du décret du 21 mars 1995 ;
- le tribunal a omis de répondre au moyen tiré de ce que la prescription quadriennale n'avait pas été opposée par une autorité compétente ;
- Mme F... n'a pas reçu compétence pour opposer la prescription quadriennale ; la décision du 21 juin 2017 est insuffisamment motivée à défaut de préciser la délégation de signature accordée à Mme F... ; le tribunal a méconnu les dispositions de l'article 7 de la loi du
31 décembre 1968 ; le ministre de l'action et des comptes publics n'a pas opposé la prescription quadriennale dans son mémoire en défense ;
- c'est à tort que le tribunal a estimé que la prescription quadriennale avait été interrompue à la date de sa demande tendant à l'octroi de l'ASA, soit le 21 janvier 2014, alors qu'en la lui opposant aux créances antérieures au 1er janvier 2009, l'administration a considéré que son cours avait été interrompu par une communication écrite, soit la note de service du 23 septembre 2013 ;
- la décision par laquelle l'administration a rejeté sa demande de relèvement de la prescription quadriennale ne comporte aucune motivation ;
- cette décision est entachée d'erreur manifeste d'appréciation et d'erreur de fait ; le délai déraisonnable à mettre en oeuvre le dispositif prévu par le décret du 21 mars 1995 constitue une circonstance particulière justifiant le relèvement de la prescription quadriennale en application de l'article 6 de la loi du 31 décembre 1968 ; l'administration a méconnu le principe général du droit tiré de l'application dans un délai raisonnable des règlements qu'elle édicte ; les dispositions des décrets des 21 mars 1995 et 26 décembre 1996 méconnaissent les stipulations de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; le délai d'application du décret du 21 mars 1995 méconnaît le principe d'égalité ; le délai anormalement long pour examiner sa demande constitue également une circonstance justifiant le relèvement de la prescription quadriennale ;
- en laissant penser que sa situation antérieure au 1er septembre 2011 serait régularisée, l'administration l'a trompé; la prescription ne pouvait courir dans ces conditions ; en opposant la prescription quadriennale pour les créances antérieures au 1er janvier 2009, le directeur régional des finances publiques a fait preuve d'une attitude trompeuse à son égard en lui fournissant des renseignements inexacts laissant penser à une attribution rétroactive complète du bénéfice de l'avantage spécifique d'ancienneté ;
- il ignorait, avant 2013, l'existence de sa créance ; la prescription quadriennale n'a pu courir avant la diffusion de la note de service du 23 septembre 2013 ; contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, d'autres décrets et arrêtés ont été nécessaires, après la publication du décret du 21 mars 1995 ; il ne pouvait réclamer la régularisation de sa situation qu'à partir du moment où l'Etat a mis en place sur le terrain un dispositif concret permettant de le faire et de calculer la reconstitution de sa carrière ;
- le refus de faire droit à sa demande de relèvement de la prescription quadriennale est entaché d'erreur manifeste d'appréciation, dès lors qu'il a débuté sa carrière au sein de la DGFIP le 1er novembre 1997 en qualité d'agent du Trésor public puis à compter du 1er mars 2004 en qualité de contrôleur du Trésor public et qu'il a débuté sa carrière au sein d'une zone urbaine sensible en 2004, durant une période de huit années ; l'administration a fait preuve de mauvaise foi en envoyant ses agents dans de telles zones sans les informer de leurs droits ;
- l'administration a fait une inexacte application du décret du 21 mars 1995 en estimant qu'il n'était éligible à l'avantage spécifique d'ancienneté qu'à compter du 1er janvier 2009 ;
- les bonifications d'ancienneté permettant le classement à l'échelon 8 puis à l'échelon 9 n'ont pas été régularisées ;
- le préjudice matériel subi est évalué à la somme de 5 116,37 euros outre une somme de 1 000 euros au titre des rémunérations accessoires ;
- le préjudice moral subi est évalué à la somme de 10 000 euros ;
- le préjudice subi en raison de la carence de l'Etat à appliquer dans un délai raisonnable l'avantage spécifique d'ancienneté est évalué à la somme de 9 380 euros.
Par un mémoire en défense enregistré le 4 décembre 2019, le ministre de l'économie et des finances conclut au rejet de la requête.
Il soutient que :
- les conclusions présentées devant le tribunal tendant à l'annulation de l'arrêté du 19 juillet 2016 sont tardives et, par suite, irrecevables ; M. A... a eu connaissance de cet arrêté au plus tard le 24 juillet 2017 ; la mention des voies et délais de recours était suffisante ;
- les conclusions du requérant tendant à ce que la Cour ordonne de lui accorder le bénéfice de l'avantage spécifique d'ancienneté à compter du 1er août 2004, de reconstituer sa carrière ainsi que ses droits à pension et d'en tirer toutes les conséquences financières sont irrecevables dès lors que le juge administratif ne peut qu'annuler une décision ;
- les conclusions subsidiaires tendant à ce que la Cour condamne l'Etat à lui verser la somme de 5 116,37 euros brut au titre de la perte de rémunération consécutive au refus de lui accorder le bénéfice de l'allocation spécifique d'ancienneté à compter du 1er août 2004 ainsi qu'une somme de 1 000 euros au titre des rémunérations accessoires, indemnité de résidence et retenue pour pension civile, sont irrecevables en ce qu'elles ont le même objet que celles tendant au versement des rappels de rémunération de même montant ;
- les conclusions indemnitaires présentées par M. A... devant le tribunal sont irrecevables en l'absence de demande préalable ayant lié le contentieux ;
- à titre subsidiaire, les moyens invoqués par M. A... ne sont pas fondés.
Par une ordonnance du 21 février 2020, la clôture d'instruction a été fixée au 9 mars 2020.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968 ;
- la loi n° 91-715 du 26 juillet 1991 ;
- le décret n° 95-313 du 21 mars 1995 ;
- le décret n° 96-1156 du 26 décembre 1996 ;
- le code de justice administrative ;
- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme G...,
- les conclusions de Mme Jimenez, rapporteur public,
- et les observations de Me B..., avocat de M. A....
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., contrôleur des finances publiques, a exercé ses fonctions à la trésorerie du centre d'action sociale de Paris à Belleville, dans le XXème arrondissement de Paris, du 1er août 2004 au 31 août 2012. Le 23 septembre 2013, le directeur général des finances publiques a décidé, par une note de service, de mettre en place, au bénéfice des agents de la direction générale des finances publiques, les dispositions du décret n° 95-313 du 21 mars 1995 relatif, notamment, au droit à l'avantage spécifique d'ancienneté (ASA) accordé à certains agents de l'Etat affectés dans les quartiers urbains particulièrement difficiles. C'est dans ce contexte que, le 21 janvier 2014, M. A... a sollicité l'attribution de l'ASA au titre des services accomplis pendant huit ans et un mois à Belleville. Il a, en outre, par un courrier du 18 février 2016, vainement sollicité la reconstitution de sa carrière et le versement de l'intégralité des sommes dues assorties des intérêts moratoires et de leur capitalisation. Le directeur général des finances publiques a procédé, après que M. A... ait renouvelé sa demande, à la reconstitution de sa carrière et à la régularisation partielle de sa situation financière par un arrêté du 19 juillet 2016, qui lui a été notifié le 29 août 2016. Par une décision du 21 juin 2017, le directeur régional des finances publiques d'Ile-de-France et du département de Paris l'a avisé que les sommes restant dues allaient être mises en paiement au mois de juillet et que les créances antérieures au 1er janvier 2009 étaient prescrites. Par une demande du 24 juillet 2017, que le directeur régional des finances publiques d'Ile-de-France et du département de Paris a implicitement rejetée, M. A... lui a demandé de " reconsidérer sa décision du 21 juin 2017 " et a contesté, en équité et en droit, les modalités d'application de la prescription quadriennale. Par un jugement n° 1801613/5-2 du 11 juillet 2019, dont M. A... relève appel, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 19 juillet 2016 et du courrier de notification du 29 août 2016 ainsi que de la décision du 21 juin 2017, ensemble le rejet implicite de son recours gracieux, et à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 24 826,37 euros en réparation des préjudices subis. En appel, M. A... demande que cette somme soit portée à 25 496,37 euros.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. En premier lieu, aux termes de l'article R. 421-1 du code de justice administrative : " La juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée. / (...) ". Aux termes de l'article R. 421-5 du même code : " Les délais de recours contre une décision administrative ne sont opposables qu'à la condition d'avoir été mentionnés, ainsi que les voies de recours, dans la notification de la décision ". Il résulte de ces dispositions que cette notification doit, s'agissant des voies de recours, mentionner, le cas échéant, l'existence d'un recours administratif préalable obligatoire ainsi que l'autorité devant laquelle il doit être porté ou, dans l'hypothèse d'un recours contentieux direct, indiquer si celui-ci doit être formé auprès de la juridiction administrative de droit commun ou devant une juridiction spécialisée et, dans ce dernier cas, préciser laquelle.
3. Il résulte de l'instruction que M. A... a expressément admis, dans son recours gracieux du 24 juillet 2017, que l'arrêté du 19 juillet 2016 contesté, qui comportait bien l'indication des voies et délais de recours en application de l'article R. 421-5 du code de justice administrative, lui avait été notifié le 29 août 2016. C'est donc à compter de cette date que le délai de recours contentieux de deux mois a commencé à courir à l'encontre du seul arrêté du 19 juillet 2016 en litige, le courrier de notification du 29 août 2016 n'étant pas susceptible, ainsi que l'a relevé à juste titre le tribunal, de faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir à défaut de faire grief. Il suit de là que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal a rejeté les conclusions tendant à l'annulation de cet arrêté du 19 juillet 2016 comme tardives dès lors qu'elles avaient été enregistrées au tribunal le 31 janvier 2018 soit postérieurement à l'expiration du délai de recours contentieux.
4. En second lieu, aux termes de l'article R. 421-1 du code de justice administrative : " (...). / Lorsque la requête tend au paiement d'une somme d'argent, elle n'est recevable qu'après l'intervention de la décision prise par l'administration sur une demande préalablement formée devant elle ".
5. Il résulte de l'instruction que M. A..., qui a formé un recours gracieux le 24 juillet 2017 dirigé contre la décision du 21 juin 2017 par laquelle le directeur régional des finances publiques d'Ile-de-France et du département de Paris a procédé à la régularisation de sa situation financière, s'est borné à discuter l'exception de prescription quadriennale qui lui était opposée et à solliciter du directeur qu'il reconsidère sa décision. Compte tenu des termes de ce recours gracieux, ce courrier ne peut être regardé, contrairement à ce que soutient M. A... et ainsi que l'a relevé à juste titre le tribunal, comme une demande préalable indemnitaire au sens de second alinéa de l'article R. 421-1 du code de justice. Ni le courrier du 18 février 2016 par lequel M. A... a demandé la régularisation de sa situation administrative et financière, ni celui du 19 avril 2016 renouvelant sa demande sans préjudice, ainsi qu'il l'a précisé, " de toute demande indemnitaire du fait du retard anormal apporté à l'application des textes légaux et réglementaires en vigueur " ne constituent une demande préalable indemnitaire. Dans ces conditions, M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal a rejeté les conclusions indemnitaires qu'il avait présentées comme irrecevables à défaut de liaison du contentieux.
6. Il ressort des termes du jugement attaqué, et notamment de ses points 8 à 10, que le tribunal a relevé que M. E..., qui disposait d'une délégation régulière à l'effet de signer au nom du ministre de l'action et des comptes publics le mémoire en défense, enregistré au tribunal le
2 octobre 2018, pouvait valablement opposer la prescription quadriennale, sans que la circonstance, à la supposer établie, que Mme F... ne disposât pas d'une délégation régulière pour l'opposer dans la décision du 21 juin 2017 critiquée, au nom du ministre, ait une incidence sur l'issue du litige. Ce faisant, le tribunal, qui a estimé que l'exception de prescription quadriennale avait été régulièrement opposée en cours d'instance par le ministre, confirmant ainsi cette décision du 21 juin 2017, a nécessairement mais implicitement répondu au moyen que M. A... avait invoqué devant lui, tiré de ce que le directeur régional des finances publiques d'Ile-de-France et du département de Paris n'était pas compétent pour ce faire dès lors qu'il n'avait pas la qualité d'ordonnateur.
7. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que le jugement attaqué serait entaché d'irrégularités de nature à entraîner son annulation.
Sur la prescription quadriennale :
En ce qui concerne la décision du 21 juin 2017 :
8. En premier lieu, M. A... soutient, ainsi qu'il l'avait fait devant les premiers juges, que Mme F..., qui a signé la décision litigieuse du 21 juin 2017, ne disposait d'aucune délégation pour lui opposer la prescription quadriennale au nom du ministre de l'action et des comptes publics. Il y a lieu, par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges, d'écarter le moyen ainsi réitéré devant la Cour.
9. En second lieu, aux termes de l'article 1er de la loi du 31 décembre 1968 : " Sont prescrites, au profit de l'Etat, (...), toutes créances qui n'ont pas été payées dans un délai de quatre ans à partir du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle les droits ont été acquis. / (...) ". Aux termes de l'article 2 de cette loi : " La prescription est interrompue par : / Toute demande de paiement ou toute réclamation écrite adressée par un créancier à l'autorité administrative, dès lors que la demande ou la réclamation a trait au fait générateur, à l'existence, au montant ou au paiement de la créance, alors même que l'administration saisie n'est pas celle qui aura finalement la charge du règlement ; / (...) ; Toute communication écrite d'une administration intéressée, même si cette communication n'a pas été faite directement au créancier qui s'en prévaut, dès lors que cette communication a trait au fait générateur, à l'existence, au montant ou au paiement de la créance ; / (...) ; / Un nouveau délai de quatre ans court à compter du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle a eu lieu l'interruption. Toutefois, si l'interruption résulte d'un recours juridictionnel, le nouveau délai court à partir du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle la décision est passée en force de chose jugée ". Aux termes de l'article 3 de cette même loi : " La prescription ne court ni contre le créancier qui ne peut agir, soit par lui-même ou par l'intermédiaire de son représentant légal, soit pour une cause de force majeure, ni contre celui qui peut être légitimement regardé comme ignorant l'existence de sa créance ou de la créance de celui qu'il représente légalement ". Aux termes de l'article 6 de la loi du 31 décembre 1968 : " Les autorités administratives ne peuvent renoncer à opposer la prescription qui découle de la présente loi. / (...) ".
10. Aux termes de l'article 11 de la loi du 26 juillet 1991 : " Lorsqu'ils sont affectés dans une circonscription qui comporte un quartier pour lequel l'Etat a passé une convention de développement social urbain et qu'ils sont désignés dans des conditions prévues par décret en Conseil d'Etat pour accomplir, à titre principal, leur service dans lesdits quartiers, les fonctionnaires des administrations de l'Etat ont droit, pour le calcul de l'ancienneté requise au titre de l'avancement d'échelon, à un avantage spécifique d'ancienneté. / (...) ". L'article 1er du décret du 21 mars 1995 relatif au droit de mutation prioritaire et au droit à l'avantage spécifique d'ancienneté accordés à certains agents de l'Etat affectés dans les quartiers urbains particulièrement difficiles dispose que : " Les quartiers urbains où se posent des problèmes sociaux et de sécurité particulièrement difficiles, mentionnés (...) à l'article 11 de la loi du 26 juillet 1991 susvisée, doivent correspondre : / (...) ; / 3° En ce qui concerne les autres fonctionnaires civils de l'Etat, à des secteurs déterminés par arrêté conjoint du ministre chargé de la ville, du ministre chargé de la fonction publique et du ministre chargé du budget ". Aux termes de l'article 2 du même décret : " Lorsqu'ils justifient de trois ans au moins de services continus accomplis dans un quartier urbain désigné en application de l'article 1er ci-dessus, les fonctionnaires de l'Etat ont droit, pour l'avancement, à une bonification d'ancienneté d'un mois pour chacune de ces trois années et à une bonification d'ancienneté de deux mois par année de service continu accomplie au-delà de la troisième année. / (...) ". Aux termes de l'article 1er du décret du 26 décembre 1996 fixant la liste des zones urbaines sensibles : " Les grands ensembles et les quartiers d'habitat dégradés mentionnés au 3 de l'article 42 modifié de la loi du 4 février 1995 (...) sont ceux figurant dans la liste annexée au présent décret. Les zones concernées sont délimitées par un trait de couleur rouge sur les plans annexés au présent décret. (...) "
11. D'une part, lorsqu'un litige oppose un agent public à son administration sur le montant des rémunérations auxquelles il a droit, le fait générateur de la créance se trouve ainsi dans les services accomplis par l'intéressé et la prescription est acquise au début de la quatrième année suivant chacune de celles au titre desquelles ses services auraient dû être rémunérés.
12. M. A... soutient que c'est à tort que le tribunal a estimé que la prescription quadriennale avait été interrompue à la date de sa demande tendant à l'octroi de l'ASA, soit le 21 janvier 2014, alors qu'en la lui opposant aux créances antérieures au 1er janvier 2009, l'administration a considéré que son cours avait été interrompu par une communication écrite soit la note de service du 23 septembre 2013. Le ministre de l'action et des comptes publics fait valoir, sans être contredit sur ce point, que la date du 1er janvier 2009 résulte d'une erreur matérielle et que le point de départ de la régularisation de la situation financière de M. A... a été fixé au 1er janvier 2010. En tout état de cause, si la note de service du 23 septembre 2013 précise les modalités d'application du dispositif de l'ASA à l'égard des agents de la direction générale des finances publiques (DGFIP) en explicitant la procédure applicable, elle n'a pas trait à la créance personnelle détenue par M. A... sur l'Etat. Dans ces conditions, le délai de la prescription quadriennale n'a pu être interrompu par l'intervention de la note de service du 23 septembre 2013, laquelle ne constitue pas une communication au sens des dispositions précitées du l'article 2 de la loi du 31 décembre 1968.
13. D'autre part, M. A... soutient qu'il ignorait l'existence de sa créance avant la diffusion de la note de service du 23 septembre 2013. Toutefois, les dispositions législatives et réglementaires instituant l'avantage spécifique d'ancienneté citées au point 11 ayant été régulièrement publiées au Journal officiel respectivement les 27 juillet 1991, 23 mars 1995,
28 décembre 1996 et 11 décembre 1996, M. A... ne peut être regardé comme ayant légitimement ignoré l'existence de sa créance au sens de l'article 3 de la loi du 31 décembre 1968. Par ailleurs, et contrairement à ce que soutient le requérant, la régularisation partielle de sa situation financière au 1er septembre 2011 n'est pas de nature à caractériser une attitude trompeuse de l'administration, dès lors que celle-ci l'avait informé qu'une seconde phase de régularisation interviendrait ultérieurement, dont le point de départ avait été fixé au 1er janvier 2009 en application des dispositions de la loi du 31 décembre 1968. En effet, la circonstance que la note de service du
23 septembre 2013 ait précisé que le dispositif de l'ASA serait appliqué de manière rétroactive à l'ensemble des agents de la DGFIP n'impliquait pas que l'intégralité des droits de M. A... seraient préservés, dès lors qu'en application de l'article 6 de la loi du 31 décembre 1968, l'administration ne peut renoncer à opposer la prescription quadriennale. Dans ces conditions, il appartenait à M. A..., compte tenu de son grade et de ses responsabilités, d'être vigilant et de demander le paiement de l'ASA avant le 31 décembre 2008 pour échapper à la prescription quadriennale.
En ce qui concerne la décision refusant le relèvement de la prescription quadriennale :
14. En premier lieu, la décision refusant le relèvement de la prescription quadriennale ne constitue pas une décision refusant un avantage dont l'octroi constitue un droit et n'a donc pas à être motivée. Il suit de là que le moyen tiré du défaut de motivation de cette décision, à supposer que
M. A... ait entendu s'en prévaloir, ne peut qu'être écarté.
15. En second lieu, aux termes de l'article 6 de la loi du 31 décembre 1968 : " Les autorités administratives ne peuvent renoncer à opposer la prescription qui découle de la présente loi. / Toutefois, par décision des autorités administratives compétentes, les créanciers de l'Etat peuvent être relevés en tout ou en partie de la prescription, à raison de circonstances particulières et notamment de la situation du créancier. / (...) ".
16. Si la décision refusant un relèvement de la prescription quadriennale peut être déférée au juge administratif par la voie du recours pour excès de pouvoir, cette décision ne peut être annulée que si elle est entachée d'une erreur de droit, d'une erreur de fait, d'une erreur manifeste d'appréciation ou d'un détournement de pouvoir.
17. M. A... soutient que la décision en litige est entachée d'erreur manifeste d'appréciation et d'erreur de fait. Toutefois, les circonstances qu'il invoque, tirées de la carence de l'Etat à mettre en place le dispositif prévu par le décret du 21 mars 1995, du délai anormalement long mis par l'administration à instruire sa demande, de l'évolution de sa carrière, qu'il a débutée au sein de la DGFIP le1er novembre 1997 et de la mauvaise de foi de l'administration qui n'aurait pas informé les agents affectés en zone urbaine sensible de leurs droits, ne constituent pas des circonstances particulières au sens des dispositions précitées de l'article 6 de la loi du 31 décembre 1968. C'est donc sans commettre d'erreur manifeste d'appréciation et d'erreur de fait que l'administration a pu rejeter la demande de relèvement dont elle avait été saisie.
18. Il résulte de ce qui a été dit aux points 7 à 16 que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le ministre de l'action et des comptes publics lui a opposé la prescription quadriennale à raison des créances antérieures au 1er janvier 2010.
19. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur les fins de
non-recevoir opposées en appel par le ministre de l'action et des comptes publics, que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Il y a lieu, par voie de conséquence, de rejeter sa requête d'appel ensemble, par voie de conséquence, ses conclusions présentées sur le fondement de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... A... et au ministre de l'économie et des finances.
Délibéré après l'audience du 24 juin 2020, à laquelle siégeaient :
- Mme Brotons, président de chambre,
- Mme Appèche, président assesseur,
- Mme G..., premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 1er juillet 2020.
Le président,
I. BROTONS
La République mande et ordonne au ministre de l'économie et des finances en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 19PA02975