Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C... F... A... B... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 4 octobre 2018 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour.
Par un jugement n° 1819443 du 20 novembre 2019, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 8 janvier 2020, appuyée de pièces complémentaires enregistrées au greffe de la Cour le 10 janvier 2020 et le 6 juillet 2020, M. A... B..., représenté par Me E..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1819443 du 20 novembre 2019 du tribunal administratif de Paris ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du préfet de police du 4 octobre 2018 ;
3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer une carte de séjour temporaire sur le fondement des articles L. 313-14 et L. 131-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile à compter de la notification du présent arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
M. A... B... soutient que :
- le jugement du tribunal administratif de Paris est insuffisamment motivé ;
- la décision portant refus de titre de séjour méconnaît les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la décision portant refus de titre de séjour est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;
- la décision portant refus de titre de séjour méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la décision portant refus de titre de séjour méconnaît les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Par un mémoire en défense, enregistré le 9 octobre 2020, le préfet de police conclut au rejet de la requête.
Il soutient que :
- la décision portant refus de titre de séjour est suffisamment motivée en fait et en droit ;
- la décision portant refus de titre de séjour a été précédé d'un examen complet de la situation personnelle du requérant ;
- la décision portant refus de titre de séjour ne méconnaît pas les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la décision portant refus de titre de séjour n'est pas entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;
- le préfet n'était pas tenu d'examiner d'office le droit au séjour de M. A... B... sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'intéressé n'ayant pas demandé son admission au séjour sur ce fondement ;
- la décision portant refus de titre de séjour ne méconnaît pas l'article 8 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- l'ordonnance n° 2020-1402 du 18 novembre 2020 ;
- les décrets n° 2020-1404 et n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. D... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. A... B..., ressortissant égyptien né le 6 juillet 1968, est entré en France en 1999 selon ses déclarations. Après avoir été admis au séjour, pour raisons de santé, à compter du 29 mai 2006 et jusqu'au 19 septembre 2012, il a fait l'objet, le 3 janvier 2014, d'un refus de renouvellement de son titre de séjour assorti d'une obligation de quitter le territoire français. Le 21 mars 2017, il a sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 4 octobre 2018, le préfet de police a rejeté sa demande. M. A... B... fait appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés ".
3. Il ressort des énonciations du jugement attaqué que les premiers juges ont répondu, par une motivation qui rappelle tant les textes applicables que les faits de l'espèce, à l'ensemble des conclusions et des moyens opérants qui ont été soulevés en première instance par M. A... B.... Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation du jugement doit être écarté.
4. En second lieu, les moyens tirés ce que les premiers juges n'auraient pas fait référence, à tort, à l'avis " très favorable " de la commission du titre de séjour et n'auraient pas pris en compte sa parfaite intégration professionnelle et sociale en France depuis près de vingt ans, ainsi que son absence de retour en Égypte depuis plus de dix ans, se rapportent au bien-fondé du jugement, dont il appartient au juge d'appel de connaître dans le cadre de l'effet d'évolutif, et sont sans incidence sur sa régularité.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
Sur les conclusions à fin d'annulation :
5. En premier lieu, aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2. / L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans. / (...) ". Il appartient à l'autorité administrative, en application de ces dispositions, de vérifier, dans un premier temps, si l'admission exceptionnelle au séjour par la délivrance d'une carte portant la mention " vie privée et familiale " répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard de motifs exceptionnels, et à défaut, dans un second temps, s'il est fait état de motifs exceptionnels de nature à permettre la délivrance, dans ce cadre, d'une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " ou " travailleur temporaire ".
6. M. A... B... fait valoir qu'il est présent de manière stable et effective en France depuis 1999. S'il ne produit aucune pièce antérieure à 2005, il établit résider habituellement en France depuis juin 2006. Toutefois, l'ancienneté du séjour en France ne constitue pas, à elle seule, un motif exceptionnel d'admission au séjour ou une considération humanitaire au sens de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par ailleurs, si M. A... B... se prévaut d'une parfaite intégration en France et d'une bonne maîtrise de la langue française, il ressort des pièces du dossier que l'intéressé ne dispose d'aucune attache familiale en France et que ses trois enfants mineurs, ainsi que ses parents, résident dans son pays d'origine où il a lui-même vécu au moins jusqu'à l'âge de 31 ans. En outre, M. A... B... ne justifie pour les années 2010 à 2013, alors même qu'il était autorisé à travailler, que d'une rémunération mensuelle inférieure à 300 euros par mois, puis, au titre de l'année 2014, que d'une rémunération mensuelle d'environ 150 euros par mois. Si M. A... B... fait valoir qu'il aurait travaillé de janvier 2015 à août 2016 et de septembre 2017 à août 2018 en tant que vendeur sur les marchés, d'une part, les bulletins de paie qu'il produit au titre de l'année 2017 entrent en contradiction avec son avis imposition qui ne mentionne aucun revenu déclaré, d'autre part, il est constant que M. A... B... est demeuré non imposable à l'impôt sur le revenu. Dans ces conditions, le préfet de police, qui n'était pas lié par l'avis très favorable émis par la commission du titre de séjour le 29 mars 2018 sur la situation de l'intéressé, a pu sans erreur manifeste d'appréciation estimer que M. A... B... ne faisait pas état de considérations humanitaires ou de motifs exceptionnels justifiant une admission exceptionnelle au séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-14 précitées. Par suite, les moyens tirés de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'erreur manifeste d'appréciation doivent être écartés.
7. En deuxième lieu, M. A... B... ne peut utilement se prévaloir de la circulaire n° NOR INTK1229185C du 28 novembre 2012, qui se borne à énoncer des orientations générales que le ministre de l'intérieur a pu adresser aux préfets pour les éclairer dans la mise en oeuvre de leur pouvoir de régularisation, sans les priver de leur pouvoir d'appréciation, et dont les dispositions sont dépourvues de tout caractère impératif et ne constituent pas des lignes directrices.
8. En troisième lieu, lorsqu'il est saisi d'une demande de délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'une des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet n'est pas tenu, en l'absence de dispositions expresses en ce sens, d'examiner d'office si l'intéressé peut prétendre à une autorisation de séjour sur le fondement d'une autre disposition de ce code, même s'il lui est toujours loisible de le faire à titre gracieux, notamment en vue de régulariser la situation de l'intéressé. Il en résulte que M. A... B... ne peut pas utilement invoquer le moyen tiré de la méconnaissance du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile à l'encontre du refus opposé à sa demande de titre de séjour qui n'a pas été présentée sur le fondement de ces dispositions.
9. En quatrième lieu, aux termes des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".
10. M. A... B... fait valoir qu'il est parfaitement intégré en France où il réside depuis de nombreuses années et qu'il en maîtrise la langue. Toutefois, M. A... B... ne fait état d'aucune précision, ni n'apporte aucun élément sur les liens personnels et familiaux qu'il aurait pu nouer en France. En outre, il ressort des pièces du dossier que M. A... B..., célibataire et sans charge de famille, ne conteste pas que ses trois enfants mineurs, ainsi que ses parents, résident dans son pays d'origine où il a lui-même vécu au moins jusqu'à l'âge de 31 ans. Dans ces conditions, M. A... B... n'est pas fondé à soutenir que la décision portant refus de séjour a porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale garanti par les stipulations précitées une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.
11. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
12. Le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation présentées par M. A... B..., n'appelle aucune mesure d'exécution. Par suite, ses conclusions à fin d'injonction ne peuvent qu'être rejetées.
Sur les conclusions relatives aux frais de l'instance :
13. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'État qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme demandée par M. A... B... au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. A... B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... F... A... B... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de police.
Délibéré après l'audience du 1er avril 2021, à laquelle siégeaient :
- M. Formery, président de chambre,
- M. Platillero, président-assesseur,
- M. D..., premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe de la Cour, le 26 avril 2021.
Le rapporteur,
B. D...Le président,
S.-L. FORMERY
La greffière,
C. DABERT
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 20PA00063