Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société par actions simplifiée (SAS) Maserati West Europe a demandé au Tribunal administratif de Montreuil, qui a transmis sa requête au Tribunal administratif de Paris, la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos le 31 décembre 2012 et le 31 décembre 2013, en droits et pénalités, ainsi que des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été assignés au titre de la période allant du 1er janvier 2012 au 31 décembre 2014, en droits et pénalités.
Par un jugement n° 1814469 du 23 juin 2020, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et des mémoires enregistrés le 7 août 2020, le 6 octobre 2020 et le 27 octobre 2020, représentés par Me Ebrard-Grellety, Me Bitar et Me Raillat, la société Maserati West Europe demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1814469 du 23 juin 2020 ;
2°) de prononcer la décharge demandée en première instance ;
3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
La société Maserati West Europe soutient que :
- elle exerce une activité de négoce en parallèle à son activité de promotion et de développement de la marque Maserati qui représente environ 20 % de son chiffre d'affaires ;
- les véhicules de tourisme de démonstration, qui ont vocation à être revendus dès leur acquisition et qui sont conservés en moyenne durant moins d'une année, ne peuvent pas être immobilisés au moment de leur acquisition, et constituent naturellement des éléments du stock et non des éléments de l'actif immobilisé comme le soutient l'administration ;
- le principe de réalisme de la taxe sur la valeur ajoutée impose la déduction de la taxe sur la valeur ajoutée grevant les véhicules concernés dans la mesure où l'achat s'inscrit dans le cadre de l'exploitation commerciale ;
- la règle de l'affectation, rappelée par la doctrine administrative 3D-1-07 de 2007, impose la déduction de la taxe sur la valeur ajoutée afférente aux véhicules concernés ;
- le principe de neutralité, consacré par la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne, impose la récupération de la taxe sur la valeur ajoutée grevant les véhicules concernés ;
- elle est fondée à se prévaloir de la doctrine administrative codifié au bulletin officiel des impôts sous la référence BOI-TVA-DED-30-30-20-20170201.
Par un mémoire en défense et un mémoire enregistrés le 4 septembre 2020 et le 12 octobre 2020, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les véhicules de démonstration ne font pas partie des stocks dans la mesure où ils n'ont pas été achetés pour être revendus neufs. Ils doivent donc être immobilisés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. A...,
- les conclusions de Mme Lescaut, rapporteur public,
- et les observations de Me Raillat pour la société Maserati West Europe.
Considérant ce qui suit :
1. Consécutivement à une procédure de vérification de comptabilité portant sur les exercices 2012, 2013 et, en matière de taxe sur la valeur ajoutée étendue jusqu'au 31 décembre 2014, la société par actions simplifiée (SAS) Maserati West Europe, a fait l'objet de cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de rappels de taxe sur la valeur ajoutée, qui résultent de la remise en cause de l'inscription en stocks des véhicules de démonstration de la société et de la variation de l'actif net de la société résultant de leur immobilisation pour une valeur toutes taxes comprises, ainsi que du rejet de la déductibilité de la taxe ayant grevé leur achat. La société relève appel du jugement du 23 juin 2020 par lequel les premiers juges ont rejeté sa demande de décharge des impositions qui ont résulté de ce différent dans la qualification des véhicules de démonstration.
Sur l'étendue du litige :
2. Il résulte de l'instruction que la société a contesté à hauteur de 21 603 euros les rehaussements d'impôt sur les sociétés auxquels elle a été assujettie au titre de son exercice clos en 2013. Elle a consécutivement obtenu un dégrèvement de cette imposition d'un montant de 51 160 euros. Si comme elle le relève, les rehaussements d'impôt sur les sociétés pour cet exercice 2013 s'élevant à 131 047 euros, un reliquat de rehaussement de 78 887 euros subsiste, ce dernier montant n'avait pas été contesté dans sa réclamation préalable. Les conclusions de la requête qui s'y rapportent sont donc irrecevables comme l'ont relevé à bon droit les premiers juges qui ne se sont, dès lors, pas mépris sur l'étendue du litige.
Sur le bien-fondé de l'imposition :
En ce qui concerne les cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés :
3. Il résulte des propres assertions de la SAS Maserati West Europe qu'alors qu'avant l'année 2010, son activité principale consistait à acheter à sa mère des véhicules homonymes pour les revendre à des concessionnaires établis en France, elle s'est consacré depuis cette date à y développer une activité d'animation et de développement commercial. La société fait valoir qu'elle a conservé une activité d'achat et de revente qui représente, pour la période ayant fait l'objet de la procédure de vérification, environ 10 % de son chiffre d'affaires. Les véhicules qu'elle achète sont immatriculés comme véhicules de démonstration et sont mis à disposition de différents acteurs économiques au support de son activité commerciale, étant par exemple exposés dans des salons automobiles ou prêtés à des journalistes. La société Maserati West Europe ne soutient cependant pas qu'elle effectuerait un commerce de véhicules d'occasion puisqu'elle achète les véhicules neufs. Si elle fait valoir que les véhicules sont toujours achetés avec la perspective d'être vendus dans une période qui varie entre quelques mois et plus d'une année, il n'est pas contesté que le prix de vente est toujours inférieur au prix d'achat, car l'intention au moment de l'achat n'est pas de réaliser un profit au moment de la vente du véhicule en cause, mais de développer son activité promotionnelle en France, prestation de service qui doit aboutir, pour sa mère, à la vente de véhicules.
4. En conséquence, ces véhicules ne sont pas directement utilisés par la requérante pour le commerce de véhicules, qu'elle ne réalise pas elle-même, et n'ont pas la même nature que ceux faisant l'objet de son négoce propre, qui consiste en des prestations de services. Ainsi, même si tous ses véhicules de démonstration ont vocation à être revendus dès la date de leur acquisition, dont la moitié après une courte période inférieure à une année, ils n'ont toutefois ni la nature de charges de l'exercice ni de stocks mais font partie de l'actif immobilisé à cette date.
En ce qui concerne les rappels de taxe sur la valeur ajoutée :
5. Aux termes de l'article 271 du code général des impôts : " I. 1. La taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé les éléments du prix d'une opération imposable est déductible de la taxe sur la valeur ajoutée applicable à cette opération. (...) ". L'article 205 de l'annexe II à ce code prévoit que : " La taxe sur la valeur ajoutée grevant un bien ou un service qu'un assujetti à cette taxe acquiert, importe ou se livre à lui-même est déductible à proportion de son coefficient de déduction. ". L'article 206 de cette annexe ajoute que : " I.- Le coefficient de déduction mentionné à l'article 205 est égal au produit des coefficients d'assujettissement, de taxation et d'admission. (...) IV.-1. Le coefficient d'admission d'un bien ou d'un service est égal à l'unité, sauf dans les cas décrits aux 2 à 4. (...) 2. Le coefficient d'admission est nul dans les cas suivants : (...) 6° Pour les véhicules ou engins, quelle que soit leur nature, conçus pour transporter des personnes ou à usages mixtes, à l'exception de ceux : a. Destinés à être revendus à l'état neuf ; b. Donnés en location ; c. Comportant, outre le siège du conducteur, plus de huit places assises et utilisés par des entreprises pour amener leur personnel sur les lieux du travail ; d. Affectés de façon exclusive à l'enseignement de la conduite ; e. De type tout terrain affectés exclusivement à l'exploitation des remontées mécaniques et des domaines skiables, dans des conditions fixées par décret ; f. Acquis par les entreprises de transports publics de voyageurs et affectés de façon exclusive à la réalisation desdits transports (...) ".
6. Il résulte également des points 2 et 3 que les véhicules de démonstration acquis à l'état neuf par la SAS Maserati West Europe, inscrits à tort à l'actif de son bilan en tant que stocks et revendus d'occasion à l'issue de leur période de démonstration, n'étaient destinés ni à être revendus à l'état neuf ni à être donnés en location, et ne sont pas au nombre de ceux, énumérés au 6° du 2 du IV de l'article 206 de l'annexe II au code général des impôts, pour lesquels le coefficient d'admission n'est pas nul. Dès lors, la société requérante ne disposait d'aucun droit à déduction de la taxe sur la valeur ajoutée ayant grevé le prix d'achat de ces véhicules. Ces éléments de l'actif devant être immobilisés, et pour une somme incluant la taxe sur la valeur ajoutée grevant le prix d'acquisition, ni le principe de réalisme de la taxe sur la valeur ajoutée, ni la règle de l'affectation ou le principe de neutralité de la taxe sur la valeur ajoutée ne sont méconnus, et ce traitement comptable et fiscal est conforme à la destination du bien au moment de l'achat étant donné la nature et les conditions d'exploitation de la société.
7. La documentation administrative BOI-TVA-DED-30-30-20 du 1er février 2017 n° 60 à n° 70 et n° 190 à n° 250 étant postérieure au fait générateur des impositions litigieuses, elle ne peut pas être utilement invoquée contre les rehaussements litigieux. En tout état de cause et de surcroît, le paragraphe 70 ne s'applique qu'aux véhicules qui ont le caractère d'éléments de stock et les paragraphes 190 et suivants, ne s'appliquent qu'aux véhicules dont l'emploi est non seulement lié au négoce mais qui sont de même nature que ceux sur lesquels porte le négoce. Or, la société n'a pas l'activité d'un concessionnaire dont le but est de réaliser directement un bénéfice par la vente de véhicules. Elle n'entre dès lors pas dans les prévisions de ces doctrines.
8. Il résulte de tout ce qui précède que la SAS Maserati West Europe n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué du 23 juin 2020, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Par suite, sa requête d'appel doit être rejetée en toutes ses conclusions y compris celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la SAS Maserati West Europe est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société par actions simplifiée (SAS) Maserati West Europe et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.
Copie en sera adressée à l'administrateur général des finances publiques chargé de la direction sépcialisée de contrôle fiscal d'Île-de-France - division juridique.
Délibéré après l'audience du 24 juin 2021, à laquelle siégeaient :
- M. Formery, président de chambre,
- M. Platillero, président-assesseur,
- M. Sibilli, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 8 juillet 2021.
Le rapporteur,
B. A...Le président,
S.-L. FORMERY
La greffière,
F. DUBUY-THIAM
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la relance en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 20PA02183