Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 3 janvier 2020 par lequel le préfet de police a refusé de renouveler son titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.
Par un jugement n° 2002041 du 9 juin 2020, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 13 juillet 2020, M. B..., représenté par Me Berthilier, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 2002041 du 9 juin 2020 du tribunal administratif de Paris ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet de police en date du 3 janvier 2020 ;
3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer un titre de séjour sur le fondement des dispositions du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- l'arrêté contesté méconnaît les dispositions du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- il méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.
Par des mémoires enregistrés les 6 octobre et 17 décembre 2020, le préfet de police conclut au rejet de la requête.
Il soutient qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Doré ;
- et les observations de Me Taverdin, avocat de M. B....
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., ressortissant ivoirien né le 18 janvier 1980, est entré en France le 14 mai 2014 sous couvert d'un visa valant titre de séjour délivré le 7 mai 2014 à Abidjan, à la suite de son mariage avec une ressortissante française le 25 janvier 2014. Deux filles sont nées de cette union le 9 octobre 2014 et M. B... a été mis en possession de cartes de séjour à compter du 1er avril 2015. A la suite de la séparation du couple, le préfet de police a, par un arrêté du 3 janvier 2020 refusé de renouveler le titre de séjour de M. B..., a prononcé une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. M. B... fait appel du jugement du 9 juin 2020 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
2. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes des stipulations de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " 1. Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale (...) ".
3. Il ressort des pièces du dossier que la convention de divorce par consentement mutuel par acte sous signature privée enregistrée par un notaire le 9 janvier 2018 prévoit, s'agissant des enfants, l'exercice conjoint de l'autorité parentale, une résidence chez la mère, un droit de visite et d'hébergement du père et le versement par M. B... d'une somme mensuelle de 200 euros au titre de sa contribution à l'entretien des enfants. La mère des enfants atteste que M. B... a participé, dès la naissance et de manière continue, à leur éducation et à leur entretien, attestation partiellement corroborée par les pièces du dossier dont il ressort que M. B... a versé à son ancienne épouse, par l'intermédiaire de mandats-cash, une somme de 200 euros au titre des mois de juillet à septembre 2017, puis tous les mois de mars 2019 à la date de la décision contestée. Par ailleurs, il ressort également des pièces du dossier que M. B... travaille depuis 2015 en qualité d'agent de sécurité. Dans ces conditions, en refusant de renouveler le titre de séjour de M. B..., le préfet de police a porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts poursuivis et, par suite, a méconnu les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Il a également méconnu les stipulations précitées de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.
4. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Le jugement du 9 juin 2020 et l'arrêté du 3 janvier 2020 par lequel le préfet de police a refusé de renouveler son titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination doivent donc être annulés.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
5. Eu égard au motif d'annulation ci-dessus retenu, il y a lieu d'enjoindre au préfet de Paris de délivrer à M. B... une carte de séjour temporaire mention " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.
Sur les conclusions tendant au paiement des frais exposés et non compris dans les dépens :
6. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 000 euros à M. B... en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Paris n° 2002041 en date du 9 juin 2020 et l'arrêté du préfet de police en date du 3 janvier 2020 sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet de police de délivrer à M. B... une carte de séjour temporaire mention " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 3 : L'Etat versera à M. B... une somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de police.
Délibéré après l'audience du 9 septembre 2021, à laquelle siégeaient :
- M. D..., premier vice-président,
- M. Diémert, président-assesseur,
- M. Doré, premier conseiller,
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 7 octobre 2021.
Le rapporteur,
F. DORÉLe président,
J. D...
La greffière,
M. A...La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N° 20PA01719 3