Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société par actions simplifiée (SAS) Vivaxis a demandé au tribunal administratif de Paris de prononcer la restitution d'une fraction de crédit d'impôt recherche de 92 421 euros au titre de l'année 2014 et de 106 374 euros au titre de l'année 2015.
Par un jugement n° 1806401 du 9 janvier 2020, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et des mémoires, enregistrés les 10 mars 2020, 9 juillet 2020 et 10 septembre 2020, la SAS Vivaxis, représentée par le cabinet Briard, demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de prononcer la restitution des fractions de crédit d'impôt recherche en litige ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le jugement attaqué est irrégulier, le tribunal n'ayant pas communiqué son mémoire du 26 novembre 2019 en méconnaissance de l'article R. 611-1 du code de justice administrative ;
- la procédure de contrôle de l'éligibilité des dépenses au crédit d'impôt recherche a été conduite en méconnaissance des articles L. 45 B et R. 45 B-1 du livre des procédures fiscales ;
- le principe d'impartialité a été méconnu, faute d'indication au sein des courriers des 18 avril 2017 et 19 février 2018 du nom de l'agent mandaté par le ministère chargé de la recherche pour procéder aux vérifications relatives à ses dépenses éligibles ;
- ses dépenses sont éligibles au crédit d'impôt recherche de l'article 244 quater B du code général des impôts, conformément à l'article 49 septies F de l'annexe 3 à ce code.
Par des mémoires en défense enregistrés les 8 juin 2020 et 27 juillet 2020, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens invoqués par la SAS Vivaxis ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Fullana ;
- les conclusions de M. Sibilli, rapporteur public ;
- et les observations de Me Masquart, pour la société Vivaxis.
Considérant ce qui suit :
1. La SAS Vivaxis, créée en 2004 et qui exerce une activité de conseil en systèmes et logiciels informatiques, a souscrit le 4 mai 2015 et le 4 mai 2016 des déclarations 2069 A par lesquelles elle a demandé la restitution d'une fraction de crédit d'impôt en faveur de la recherche n'ayant pu être imputé sur l'impôt sur les sociétés dû par cette société au titre des exercices clos en 2014 et en 2015, pour des montants respectifs de 92 421 euros et 106 374 euros. Cette demande a fait l'objet d'une décision de rejet le 19 février 2018. La SAS Vivaxis relève régulièrement appel du jugement du 9 janvier 2020 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la restitution de ces crédits d'impôt recherche.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Aux termes de l'article R. 611-1 du code de justice administrative : " La requête et les mémoires, ainsi que les pièces produites par les parties, sont déposés ou adressés au greffe. / La requête, le mémoire complémentaire annoncé dans la requête et le premier mémoire de chaque défendeur sont communiqués aux parties avec les pièces jointes dans les conditions prévues aux articles R. 611-2 à R. 611-6. / Les répliques, autres mémoires et pièces sont communiqués s'ils contiennent des éléments nouveaux. ". Il résulte de ces dispositions, destinées à garantir le caractère contradictoire de l'instruction, que la méconnaissance de l'obligation de communiquer un mémoire contenant des éléments nouveaux est en principe de nature à entacher la procédure d'irrégularité. Il n'en va autrement que dans le cas où il ressort des pièces du dossier que, dans les circonstances de l'espèce, cette méconnaissance n'a pu préjudicier aux droits des parties.
3. Par un mémoire en réplique, enregistré au greffe du tribunal administratif de Paris le 26 novembre 2019 à 10 heures 42, peu avant la clôture de l'instruction, qui était fixée à 12 heures, la SAS Vivaxis contestait l'avis rendu le 9 juillet 2019 par l'expert du ministère de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation et sollicitait une nouvelle expertise sur la base d'un dossier qu'elle affirmait être plus complet. Toutefois, saisie directement de cette demande le 11 octobre 2019, l'administration, qui d'ailleurs estimait l'objet de la demande de crédit d'impôt recherche en litige identique à celle rejetée au titre des années 2011, 2012 et 2013, avait, dans son mémoire en défense enregistré le 24 octobre 2019, rejeté cette demande de réexamen. Dans ces circonstances, les premiers juges, qui, ayant visé le mémoire en date du 24 octobre 2019, l'ont nécessairement examiné, ont pu estimer frustratoire la communication de ce mémoire, sans méconnaître les dispositions précitées du code de justice administrative.
Sur le bien-fondé du jugement :
En ce qui concerne la régularité de la procédure d'imposition :
4. La demande de remboursement d'un crédit d'impôt recherche présentée sur le fondement des dispositions de l'article 199 ter B du code général des impôts constitue une réclamation au sens de l'article L. 190 du livre des procédures fiscales. La décision par laquelle l'administration rejette tout ou partie d'une telle réclamation n'a pas le caractère d'une procédure de reprise ou de redressement. Par suite, les irrégularités alléguées, à savoir la méconnaissance des articles L. 45 B et R. 45 B-1 du livre des procédures fiscales et l'absence d'impartialité de l'agent du ministère chargé de la recherche ayant procédé aux vérifications afférentes aux dépenses, sont sans incidence sur le bien-fondé de la décision de refus de rembourser une partie du crédit d'impôt recherche.
En ce qui concerne le bien-fondé de la demande de restitution :
5. Aux termes de l'article 244 quater B du code général des impôts : " I. Les entreprises industrielles et commerciales (...) peuvent bénéficier d'un crédit d'impôt au titre des dépenses de recherche qu'elles exposent au cours de l'année (...) ". L'article 49 septies F de l'annexe III à ce code précise que : " Pour l'application des dispositions de l'article 244 quater B du code général des impôts, sont considérées comme opérations de recherche scientifique ou technique : (...) c. Les activités ayant le caractère d'opérations de développement expérimental effectuées, au moyen de prototypes ou d'installations pilotes, dans le but de réunir toutes les informations nécessaires pour fournir les éléments techniques des décisions, en vue de la production de nouveaux matériaux, dispositifs, produits, procédés, systèmes, services ou en vue de leur amélioration substantielle. Par amélioration substantielle, on entend les modifications qui ne découlent pas d'une simple utilisation de l'état des techniques existantes et qui présentent un caractère de nouveauté. ".
6. Des opérations consistant à perfectionner des matériels ou procédés existants ou à en développer des fonctionnalités particulières et qui se traduisent par des améliorations non substantielles de techniques déjà existantes ne caractérisent pas des opérations de développement expérimental présentant un caractère de nouveauté au sens des dispositions précitées. Il appartient au juge de l'impôt de constater, au vu de l'instruction dont le litige qui lui est soumis a fait l'objet, qu'une entreprise remplit ou non les conditions lui permettant de se prévaloir de l'avantage fiscal institué par l'article 244 quater B du code général des impôts.
7. Il résulte de l'instruction que la SAS Vivaxis travaille depuis 2014 au développement d'un projet intitulé " Atlas ", ayant pour objectif de " redéfinir, concevoir et réaliser un moteur de gestion, de traitement et d'analyse de données, optimisé pour le traitement scientifique et statistique des données en grand nombre et/ou à fort volume de traitement afin de pouvoir exécuter très rapidement de grandes quantités d'analyses statistiques pour réaliser des diagnostics et des modèles explicatifs ou prédictifs avancés ". Dans le cadre de ce projet, l'opération de recherche et développement intitulée " Modèle de choix " dont l'objectif est la mise au point d'un outil intégré de modélisation des préférences de choix d'une population afin d'estimer si de nouveaux produits seraient adoptés par celle-ci, puis d'analyser l'état du marché suite à l'apparition de ces produits. Il résulte de l'instruction, et notamment du rapport d'expertise réalisé par l'expert mandaté par le ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche le 9 juillet 2019, que s'agissant de cette opération, il n'existe pas de nouveauté relativement au traitement, à la modélisation, à l'interprétation et à la validation des préférences, il n'existe pas de caractère systématique et reproductible de l'approche utilisée, qui se fonde sur des méthodes et techniques déjà existantes et les éléments utilisés démontrent une démarche intuitive validée par des expérimentations, soit une absence de caractère systématique et reproductible des paramètres et attributs sélectionnés et qu'enfin, le développement expérimental n'est pas transférable et ne génère pas de connaissance acquise par ces travaux ou permettant d'analyser les causes d'un échec ou de définir des possibilités de solutions. Il résulte également de l'instruction, et n'est pas sérieusement contesté par la société qui se borne à des allégations générales sur les innovations introduites par ses recherches, que les travaux sont principalement basés sur la comparaison des performances des techniques existantes afin de choisir celle qui permettrait d'obtenir les meilleures performances vis-à-vis des objectifs de la société et que ces travaux ne permettent pas d'avancer l'état de l'art dans le domaine de la modélisation des préférences de choix à travers une acquisition des connaissances scientifiques, techniques ou expérimentales. Dès lors, l'administration fiscale n'a pas fait une inexacte application de ces dispositions et de celles de l'article 244 quater B du code général des impôts en ne regardant pas le projet de la société Vivaxis comme constituant une opération de recherche scientifique ou technique ouvrant doit au crédit d'impôt recherche.
8. Si la société Vivaxis oppose la doctrine BOFIP BOI-BIC-RICI-10-10-10-20, la demande de remboursement d'un crédit d'impôt recherche ayant le caractère d'une réclamation préalable au sens des dispositions de l'article L. 190 du livre des procédures fiscales, la décision de refus de rembourser un crédit d'impôt ne constitue ni un rehaussement d'imposition ni un redressement. Par suite, la société Vivaxis ne peut utilement opposer cette doctrine afin de contester le refus de remboursement de crédit d'impôt recherche en litige.
9. Il résulte de tout ce qui précède que la SAS Vivaxis n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Sa requête doit dès lors être rejetée, y compris ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de la SAS Vivaxis est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société par actions simplifiée Vivaxis et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.
Copie en sera adressée à la direction régionale des finances publiques d'Île-de-France et de Paris (Service du contentieux d'appel déconcentré - SCAD).
Délibéré après l'audience du 24 septembre 2021, à laquelle siégeaient :
- M. Soyez, président,
- M. Simon, premier conseiller,
- Mme Fullana, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 20 octobre 2021.
La rapporteure,
M. FULLANALe président,
J.-E. SOYEZLa greffière,
C. DABERT
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la relance en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 20PA00927