Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Par un arrêt n° 16PA01384 du 2 février 2018, la Cour administrative d'appel de Paris a annulé le jugement nos 1506611, 1514904, 1514907 du 19 février 2016 du Tribunal administratif de Paris, condamné l'Etat à verser à la société Highfi les sommes de 384 787 euros et de 334 261 euros au titre des crédits d'impôt recherche lui restant dus au titre des exercices clos en 2009 et 2010, déchargé la société des intérêts de retard mis à sa charge et mis les frais de l'instance à la charge de l'Etat.
Par un arrêt n° 19PA02181 du 11 février 2020, la Cour administrative d'appel de Paris, saisie par la SAS Highfi d'une demande d'exécution de l'arrêt n° 16PA01384 du 2 février 2018, a prononcé à l'encontre de l'Etat une astreinte s'il ne justifie pas avoir, dans le délai de deux mois suivant la notification de cet arrêt, accompli toutes diligences utiles à l'exécution de l'arrêt
n° 16PA01384 du 2 février 2018, dans les conditions mentionnées au point 8 de ce même arrêt, jusqu'à la date de cette exécution. La Cour a fixé le taux de cette astreinte à 100 euros par jour.
Par des mémoires enregistrés le 22 juillet 2021, le 3 septembre 2021, le 30 septembre 2021 et le 12 octobre 2021, la SAS Highfi, représentée par Mes Legout et Dardour-Attali, demande à la Cour de liquider l'astreinte prononcée par cet arrêt de la cour du 11 février 2020.
Elle soutient que :
- l'arrêt du 11 février 2020 n'a pas été entièrement exécuté, seuls les intérêts moratoires et une partie des frais irrépétibles lui ayant été versés ;
- compte tenu du retard et de la mauvaise volonté de l'administration à exécuter l'arrêt du 2 février 2018, l'astreinte doit être liquidée à hauteur de la somme de 37 500 euros.
Par des mémoires en défense, enregistrés le 30 juillet 2021, le 7 septembre 2021 et le 8 octobre 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la relance informe la Cour que les intérêts moratoires ont été payés à la société Highfi le 30 août 2021, que le paiement de l'astreinte interviendra dès que seront déterminées les modalités comptables applicables et que les frais de l'instance seront payés à réception du relevé d'identité bancaire de la société.
Il soutient que compte tenu du contexte juridique particulier de l'affaire, il n'y a pas eu de retard significatif.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n°2020-290 du 23 mars 2020 ;
- loi n° 2020-546 du 11 mai 2020 ;
- l'ordonnance n° 306-2020 du 25 mars 2020 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Hamon,
- et les conclusions de M. Segretain, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. En premier lieu, aux termes de l'article L. 911-4 du code de justice administrative : " En cas d'inexécution d'un jugement ou d'un arrêt, la partie intéressée peut demander à la juridiction, une fois la décision rendue, d'en assurer l'exécution. / Si le jugement ou l'arrêt dont l'exécution est demandée n'a pas défini les mesures d'exécution, la juridiction saisie procède à cette définition. Elle peut fixer un délai d'exécution et prononcer une astreinte ". L'article L. 911-7 du même code dispose en outre que : " En cas d'inexécution totale ou partielle ou d'exécution tardive, la juridiction procède à la liquidation de l'astreinte qu'elle avait prononcée. / (...) / Elle peut modérer ou supprimer l'astreinte provisoire, même en cas d'inexécution constatée ". Enfin l'article R. 921-7 du même code dispose que : " Lorsqu'à la date d'effet de l'astreinte prononcée par (...) la Cour administrative d'appel, cette juridiction constate d'office ou sur la saisine de la partie intéressée, que les mesures d'exécution qu'elle avait prescrites n'ont pas été prises, elle procède à la liquidation de l'astreinte dans les conditions prévues aux articles L. 911-6 à L. 911-8. Lorsqu'il est procédé à la liquidation de l'astreinte, copie du jugement prononçant l'astreinte et la décision qui la liquide est adressée au ministère public près la cour de discipline budgétaire et financière ".
2. En second lieu, aux termes de l'article 1 de l'ordonnance 306-2020 du 25 mars 2020 : " I. ' Les dispositions du présent titre sont applicables aux délais et mesures qui ont expiré ou qui expirent entre le 12 mars 2020 et l'expiration d'un délai d'un mois à compter de la date de cessation de l'état d'urgence sanitaire déclaré dans les conditions de l'article 4 de la loi du 23 mars 2020 susvisée. ". Le dernier alinéa de l'article 4 de cette ordonnance dispose que " Le cours des astreintes et l'application des clauses pénales qui ont pris effet avant le 12 mars 2020 sont suspendus pendant la période définie au I de l'article 1er ". Enfin, en vertu I de l'article 1er de la loi n° 2020-546 du 11 mai 2020, l'état d'urgence sanitaire déclaré par l'article 4 de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d'urgence pour faire face à l'épidémie de covid-19 est prorogé jusqu'au 10 juillet 2020 inclus.
3. Il résulte de l'instruction que l'arrêt n° 19PA02181 du 11 février 2020 a été notifié au ministre de l'économie, des finances et de la relance le 17 février 2020 et qu'en application des dispositions précitées de l'ordonnance n° 306-2020 du 25 mars 2020 et de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020, le délai de deux mois imparti par la Cour a recommencé à courir à compter du 11 août 2020 pour expirer le 18 septembre 2020, point de départ de l'astreinte. Si à la date du présent arrêt l'arrêt du n° 16PA01384 du 2 février 2018 et l'arrêt n° 19PA02181 du 11 février 2020 doivent être considérés comme exécutés depuis le 3 août 2021, en se bornant à invoquer la complexité de la question juridique posée au Conseil d'Etat concernant les intérêts applicables en matière de crédit d'impôt recherche, alors que l'arrêt du 11 février 2020 était revêtu de l'autorité de la chose jugée et devait être exécuté en dépit du pourvoi en cassation contestant le bien-fondé de sa solution relative aux intérêts, le ministre de l'économie, des finances et de la relance ne justifie d'aucune circonstance particulière qui aurait fait obstacle, postérieurement au 18 septembre 2020, au versement des sommes dues à la société Highfi, qu'elle n'a commencé à verser qu'après s'être désistée de son pourvoi.
4. Dans ces conditions, compte tenu du retard injustifié de 320 jours à exécuter l'arrêt du 11 février 2020, il y a lieu de procéder à la liquidation définitive de l'astreinte et d'en fixer le montant, qu'il n'y a pas lieu de moduler, à la somme de 32 000 euros à verser à la société Highfi.
DÉCIDE :
Article 1er : L'Etat est condamné à verser à la société Highfi la somme de 32 000 euros au titre de la liquidation définitive de l'astreinte prononcée par l'arrêt de la Cour n° 19PA02181 du 11 février 2020.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SAS Highfi, au ministre de l'économie, des finances et de la relance.
Copie en sera adressée au ministère public près la Cour de discipline budgétaire et financière.
Délibéré après l'audience du 9 novembre 2021, à laquelle siégeaient :
- M. Jardin, président de chambre,
- Mme Hamon, présidente assesseure,
- Mme Jurin, première conseillère,
Rendu public par mise à disposition au greffe le 30 novembre 2021.
La rapporteure,
P. HAMONLe président,
C. JARDIN
La greffière,
C. BUOT La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la relance en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 19PA02181