Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... a demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge, en droits et en pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu mises à sa charge au titre de l'année 2006.
Par un jugement n° 1801846/1-2 du 14 avril 2020, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et des mémoires enregistrés les 8 juin 2020, 19 octobre 2020, 17 novembre 2020 et 1er février 2021, M. A..., représenté par Me Philippe Albert, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n°1801846/1-2 du 14 avril 2020 du Tribunal administratif de Paris ;
2°) de prononcer la décharge des impositions litigieuses ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros en application de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la procédure de taxation d'office est irrégulière en l'absence de mise en demeure préalable, dès lors que l'absence de déclaration d'un revenu occasionnel résulte d'une erreur ;
- la procédure d'évaluation d'office n'est pas applicable, la somme perçue étant taxable dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers ;
- les éventuelles omissions relatives à l'année 2006 étaient prescrites à la date de la mise en recouvrement des impositions contestées soit le 31 mars 2017, l'omission mentionnée à l'article L 188 C du livre des procédures fiscales ne pouvant être regardée comme réparée par l'émission d'une proposition de rectification ;
- la proposition de rectification ouvrait en tout état de cause un nouveau délai expirant la fin de l'année suivant son émission ;
- une telle interprétation est confirmée par la doctrine administrative référencée BOI-CF-IOR-10-50 n°50, 12-09-2012 ;
- le jugement est insuffisamment motivé sur ce point ;
- c'est à tort que l'administration a qualifié d'activité commerciale un seul encaissement constaté en 2006 pour le compte d'une société ;
- cette somme était taxable dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers ;
- l'encaissement avait comme contrepartie une dette, qui a été remboursée, à l'égard de la société ;
- la majoration de 80 % pour manœuvres frauduleuses n'est pas fondée, l'absence de déclaration procédant d'une erreur ;
- la jurisprudence et la doctrine administrative prévoient la taxation des détournements de fonds des associés dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers.
Par des mémoires en défense enregistrés les 1er octobre 2020, 6 novembre 2020, 12 janvier 2021 et 9 février 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés.
Par une ordonnance du 2 février 2021, la clôture de l'instruction a été fixée au
16 février 2021.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Magnard,
- les conclusions de Mme Jimenez, rapporteure publique,
- et les observations de Me Albert, représentant M. A....
Considérant ce qui suit :
1. M. A... a fait l'objet d'un contrôle sur pièces à l'issue duquel lui ont été notifiées des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu au titre de l'année 2006. Par la présente requête, il relève appel du jugement n° 1801846/1-2 du 14 avril 2020 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande en décharge des impositions en litige et des majorations y afférentes.
2. Aux termes de l'article 34 du code général des impôts : " Sont considérés comme bénéfices industriels et commerciaux, pour l'application de l'impôt sur le revenu, les bénéfices réalisés par des personnes physiques et provenant de l'exercice d'une profession commerciale, industrielle ou artisanale (...) ". Aux termes de l'article 35 dudit code : " I. Présentent également le caractère de bénéfices industriels et commerciaux pour l'application de l'impôt sur le revenu, les bénéfices réalisés par les personnes physiques désignées ci-après : 1° Personnes qui, habituellement, achètent en leur nom, en vue de les revendre, des immeubles, des fonds de commerce, des actions ou parts de sociétés immobilières ou qui, habituellement, souscrivent, en vue de les revendre, des actions ou parts créées ou émises par les mêmes sociétés (...)
2° Personnes se livrant à des opérations d'intermédiaire pour l'achat, la souscription ou la vente des biens visés au 1° (...) ".
3. Il résulte de l'instruction et notamment du jugement du 18 avril 2014 du Tribunal correctionnel de Lyon que M. A... a perçu fin décembre 2006, sur son compte personnel ouvert en suisse, une somme de 300 000 euros, cette somme ayant été versée à fin de rémunération d'une activité d'intermédiaire dans le cadre de transactions immobilières. Il résulte également des mêmes éléments que l'acte d'intermédiation a été effectué par M. A... en tant que salarié de la société L'Office Immobilier, laquelle bénéficiait d'un mandat à cet effet et a établi une facture à l'issue de la transaction. Cette somme de 300 000 euros devait, en conséquence, être regardée non comme une rémunération d'une activité personnelle de
M. A... mais comme un complément de prix dû à la société, mais encaissé par l'intéressé sur un compte personnel. Contrairement à ce que soutient le ministre, la circonstance que
M. A... ait été condamné à titre personnel pour recel d'abus de biens sociaux révèle sa participation à une opération de détournement de fonds et non l'existence d'une activité personnelle d'intermédiation immobilière distincte de celle exercée par la société l'Office Immobilier. M. A... ne saurait donc être regardé comme ayant exercé, au cours de l'année 2006, une activité occulte taxable dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux. C'est par suite à tort que la somme de 300 000 euros a été imposée dans cette catégorie selon la procédure d'évaluation d'office.
4. L'administration demande toutefois à titre subsidiaire que, par voie de substitution de base légale, cette somme soit imposée dans la catégorie des bénéfices non commerciaux, sur le fondement des dispositions de l'article 92 du code général des impôts. Il résulte toutefois de l'instruction, et notamment des énonciations du jugement du 18 avril 2014 du Tribunal correctionnel de Lyon condamnant M. A... pour recel d'abus de biens sociaux, que celui-ci a détourné à son profit le montant de la rémunération due à la société L'Office Immobilier, dont il était associé. Les sommes en litige doivent par suite être regardées comme des revenus distribués, imposables dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers sur le fondement des dispositions de l'article 109 du code général des impôts aux termes desquelles : " 1. - Sont considérés comme revenus distribués : (...) 2° Toutes les sommes ou valeurs mises à la disposition des associés, actionnaires ou porteurs de parts et non prélevées sur les bénéfices " et non dans la catégorie des bénéfices non commerciaux. Contrairement à ce que soutient le ministre, la circonstance que la somme litigieuse n'a pas été comptabilisée par la société ni n'a été réintégrée dans le résultat de cette dernière n'est pas de nature à faire obstacle à sa qualification dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers sur le fondement de l'article 109, 1-2° du code général des impôts, dès lors que, pour l'application de cet article, doivent seules être regardées comme prélevées sur les bénéfices, au sens de ces dispositions, les sommes ou valeurs réparties entre les associés, actionnaires ou porteurs de parts en vertu d'une décision régulière des organes compétents de la société. Il n'y a par suite pas lieu de faire droit à la demande de substitution de base légale présentée par le ministre.
5. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête, que M. A... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris, a rejeté sa demande et à obtenir la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu mises à sa charge au titre de l'année 2006. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DECIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1801846/1-2 du 14 avril 2020 du Tribunal administratif de Paris est annulé.
Article 2 : M. A... est déchargé, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu mises à sa charge au titre de l'année 2006.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. A... est rejeté.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.
Copie en sera adressée au chef des services fiscaux chargé de la direction nationale des vérifications des situations fiscales.
Délibéré après l'audience du 24 novembre 2021, à laquelle siégeaient :
- Mme Brotons, président de chambre,
- M. Magnard, premier conseiller,
- Mme Bonneau-Mathelot, premier conseiller,
Rendu public par mise à disposition au greffe le 8 décembre 2021.
Le rapporteur,
F. MAGNARDLe président,
I. BROTONS
Le greffier,
S. DALL'AVA
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la relance en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 20PA01403