Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 20 août 2019 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.
Par un jugement n° 2008693/1-2 du 22 septembre 2020, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 15 mars 2021, M. C..., représenté par Me Le Goff, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 2008693/1-2 du 22 septembre 2020 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 20 août 2019 ;
3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer un titre de séjour dans le délai de 15 jours suivant la notification de l'arrêt sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) à titre subsidiaire, d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans le délai de 8 jours suivant la notification de l'arrêt et de réexaminer sa situation dans le délai de 3 mois à compter de ladite notification ;
5°) de mettre à la charge du préfet de police la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 à verser à son conseil sous réserve de sa renonciation le cas échéant à percevoir la part contributive de l'Etat allouée au titre de l'aide juridictionnelle.
Il soutient que :
S'agissant de la décision de refus de séjour :
- elle a été prise par une autorité incompétente pour ce faire ;
- elle n'est pas suffisamment motivée ;
- elle est entachée d'un défaut d'examen ;
- elle est entachée d'un vice de procédure en ce que l'avis du collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration ne lui a pas été communiqué ;
- elle méconnait les stipulations du 7 de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;
- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;
S'agissant de la décision portant obligation de quitter le territoire français :
- elle méconnait les dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle est illégale du fait de l'illégalité de la décision de refus de séjour sur laquelle elle est fondée ;
- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation.
La requête a été communiquée au préfet de police qui n'a pas produit de mémoire en défense.
M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Paris du 15 février 2021.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Gobeill,
- et les observations de M. C....
Considérant ce qui suit :
1. Par un arrêté du 20 août 2019, le préfet de police a refusé de délivrer un titre de séjour à M. C..., lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination. M. C... relève appel du jugement n° 2008693/1-2 du 22 septembre 2020 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa requête contre cet arrêté.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. Aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention "vie privée et familiale" est délivré de plein droit : (...) 7° Au ressortissant algérien, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse pas effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays (...) ".
3. Pour refuser de délivrer à M. C..., le titre de séjour sollicité, le préfet de police s'est fondé sur l'avis du collège de médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration du 20 juin 2019, qui indique que si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, il peut effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans ce pays.
4. M. C..., atteint d'une sclérose en plaques, est suivi depuis l'année 2017 ainsi qu'en atteste notamment le certificat médical du 10 mai 2019, établi par le Docteur B..., médecin à l'hôpital de La Pitié Salpetrière, qui relève que du fait des allergies liées au traitement au Copaxone, le requérant est désormais traité au Rebif 22. Deux autres certificats médicaux, établis le 27 mai 2020 par le Docteur B... et le 17 juin 2020 par le Professeur Meininger de l'Hôpital des Peupliers, confirment que plusieurs traitements ont été essayés mais que le seul supporté par le patient, le Rebif 22, est de nature à lui éviter de subir des séquelles inéluctables telles que la perte de la vision, une paralysie et des douleurs intraitables auxquelles l'exposerait l'arrêt de ce traitement. Le requérant communique par ailleurs une attestation du service de neurologie de l'établissement hospitalier Ali Aït-Idir à Alger du 29 août 2019, postérieure à la décision attaquée mais relative à une situation antérieure, selon lequel que le Rebif 22 est inexistant en Algérie. Dans ces conditions, M. C... est fondé à soutenir qu'en estimant que le traitement qu'il suit est disponible en Algérie, le préfet de police a méconnu le 7° de l'article 6 de l'accord franco-algérien précité et que c'est à tort que le tribunal administratif a rejeté sa demande. Par suite, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de la requête, ce jugement doit être annulé, ainsi que l'arrêté du préfet de police du 20 août 2019 refusant de délivrer un titre de séjour à l'intéressé, lui faisant obligation de quitter le territoire dans le délai de trente jours et fixant le pays de destination.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
5. Eu égard au motif d'annulation de l'arrêté attaqué ci-dessus retenu, le présent arrêt implique nécessairement que le préfet de police délivre à M. C... un titre de séjour dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt. Il y a donc lieu d'enjoindre au préfet de police d'y procéder sans qu'il soit besoin d'assortir cette injonction d'une astreinte.
Sur les frais liés à l'instance :
6. M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale. Par suite, son avocate peut se prévaloir des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'État une somme de 1 000 euros au profit de Me Le Goff, sous réserve que celle-ci renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État.
D E C I D E :
Article 1er : Le jugement n° 2008693/1-2 du 22 septembre 2020 du tribunal administratif de Paris ainsi que l'arrêté du 20 août 2019 du préfet de police sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet de police de délivrer à M. C... un titre de séjour dans le délai de deux mois à compter de la notification qui sera faite du présent arrêt.
Article 3 : L'Etat versera à Me Le Goff une somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, sous réserve que celle-ci renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.
Article 4 : Le surplus des conclusions est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C..., au ministre de l'intérieur et au préfet de police.
Délibéré après l'audience du 24 février 2022, à laquelle siégeaient :
- M. Lapouzade, président de chambre,
- M. Gobeill, premier conseiller,
- M. Doré, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 24 mars 2022.
Le rapporteur, Le président,
J.-F. GOBEILL J. LAPOUZADE
La greffière,
Y. HERBER
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 21PA01323