Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme B... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 10 juin 2020 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer le titre de séjour sollicité, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.
Par un jugement n° 2010097/6-3 du 4 février 2021, le tribunal administratif de Paris a annulé l'arrêté du 10 juin 2020 et a enjoint au préfet de police de réexaminer la situation administrative de Mme B....
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 4 mars 2021, le préfet de police demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 2010097/6-3 du 4 février 2021 du tribunal administratif de Paris ;
2°) de rejeter la demande présentée par Mme B... devant le tribunal administratif de Paris.
Il soutient que :
- la décision de refus de titre de séjour n'est pas illégale dès lors que l'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) a été rendu en formation collégiale conformément aux articles R. 313-22 et R. 313-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- les autres moyens soulevés par Mme B... ne sont pas fondés.
Par un mémoire en défense, enregistré le 4 janvier 2022, Mme B..., représentée par Me Le Gall, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle soutient que les moyens soulevés par la requête ne sont pas fondés.
Mme B... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 10 mai 2021.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Portes,
- et les observations de Me Le Gall pour Mme B...,
Considérant ce qui suit :
1. Mme B..., de nationalité algérienne, née le 1er octobre 1977 à Oran, est entrée en France en 2018 selon ses déclarations. Par un arrêté du 10 juin 2020, le préfet de police a refusé de lui délivrer le titre de séjour sollicité, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. Le préfet de police relève appel du jugement du 4 février 2021 par lequel le tribunal administratif de Paris a annulé l'arrêté du 10 juin 2020 et lui a enjoint de réexaminer la situation administrative de Mme B..., en lui délivrant dans cette attente, une autorisation provisoire de séjour.
Sur le moyen d'annulation retenu par le tribunal:
2. Aux termes de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa version applicable au présent litige : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé ". Aux termes de l'article R. 313-23 alinéa 3 du même code : " Le collège à compétence nationale, composé de trois médecins, émet un avis dans les conditions de l'arrêté mentionné au premier alinéa du présent article. La composition du collège et, le cas échéant, de ses formations est fixée par décision du directeur général de l'office. Le médecin ayant établi le rapport médical ne siège pas au sein du collège ". En outre, aux termes de l'article 5 de l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Le collège de médecins à compétence nationale de l'office comprend trois médecins instructeurs des demandes des étrangers malades, à l'exclusion de celui qui a établi le rapport (...) ". L'article 6 de ce même arrêté dispose que : " Au vu du rapport médical mentionné à l'article 3, un collège de médecins désigné pour chaque dossier dans les conditions prévues à l'article 5 émet un avis (...) Cet avis mentionne les éléments de procédure. Le collège peut délibérer au moyen d'une conférence téléphonique ou audiovisuelle. L'avis émis à l'issue de la délibération est signé par chacun des trois médecins membres du collège ".
3. Il ressort des pièces du dossier, et notamment de l'avis du collège de médecins de l'OFII du 28 février 2020 présenté par le préfet de police dans son premier mémoire en défense devant le tribunal, que la signature du docteur D... E... ne figure pas sur l'avis. Si le préfet de police a produit, devant les premiers juges, un document dont il soutient qu'il s'agirait de la version complète et lisible de l'avis du 28 février 2020, il ressort de la lecture de cette pièce qu'elle comporte des mentions non concordantes avec le premier avis versé au dossier, notamment la mention " Dr A... F... " figurant au-dessus de la signature dans la première version et au-dessous de la signature dans la seconde version. Ce document, qui ne peut donc pas être regardé comme étant l'original de l'avis du 28 février 2020, n'est pas de nature à régulariser l'absence de signature du docteur D... E.... L'identification des auteurs de cet avis, qui est une exigence prévue par les articles R. 313-22 et R. 313-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa version applicable au présent litige, constitue une garantie dont la méconnaissance entache d'irrégularité l'ensemble de la procédure. Dans ces conditions, la décision du préfet de police refusant la délivrance du titre de séjour sollicité à Mme B... est illégale.
4. Il résulte de tout ce qui précède que le préfet de police n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 10 juin 2020.
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991:
5. Mme B... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle. Par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Le Gall, avocat de Mme B..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État, de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me Le Gall de la somme de 1 0000 euros.
DECIDE :
Article 1er : La requête du préfet de police est rejetée.
Article 2 : L'Etat versera à Me Le Gall la somme de 1 000 euros en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que Me Le Gall renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... B..., à Me Le Gall et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de police.
Délibéré après l'audience du 11 mars 2022, à laquelle siégeaient :
- Mme Heers, président de chambre,
- M. Mantz, premier conseiller,
- Mme Portes, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 25 mars 2022.
La rapporteure,
C. PORTESLa présidente,
M. HEERS
La greffière,
V. BREME
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N° 21PA01122 2