Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme D... A... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler la décision implicite par laquelle la ministre de la culture a rejeté sa réclamation du 21 mars 2017 tendant à l'indemnisation des préjudices résultant de l'illégalité fautive de la gestion, des conditions de détermination et du calcul des différentes composantes de son régime indemnitaire et à se voir octroyer un régime indemnitaire porté à la même hauteur que celui des autres agents affectés au sein d'une administration centrale ainsi que la décision implicite de rejet de son recours gracieux formé le 21 juillet 2017, d'ordonner avant-dire droit de produire tout élément de nature à éclairer le débat, de condamner l'Etat à lui verser la somme de 19 020,41 euros, assortie des intérêts et de la capitalisation des intérêts et d'enjoindre à la ministre de régulariser sa situation.
Par un jugement n°1718274/5-3 du 6 novembre 2019, le tribunal administratif de Paris a rejeté les conclusions à fin d'annulation de la décision implicite de rejet de sa réclamation préalable ainsi que de la décision implicite de rejet du recours gracieux de Mme A... et a ordonné, avant dire droit, un supplément d'instruction à l'effet de produire, pour le ministère de la culture et le service des archives nationales, tous les éléments nécessaires à la détermination du régime indemnitaire des agents appartenant au corps des adjoints techniques d'accueil, de surveillance et de magasinage.
Par un jugement n° 1718274/5-3 du 14 octobre 2020, le tribunal administratif de Paris a rejeté la demande de Mme A....
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 14 décembre 2020 et le 30 avril 2021, Mme A..., représentée par Me Crusoé, demande à la Cour :
1°) d'annuler les jugements du 6 novembre 2019 et du 14 octobre 2021 du tribunal administratif de Paris ;
2°) d'annuler la décision implicite par laquelle la ministre de la culture a rejeté sa réclamation du 21 mars 2017 tendant à l'indemnisation des préjudices résultant de l'illégalité fautive de la gestion, des conditions de détermination et du calcul des différentes composantes de son régime indemnitaire et à se voir octroyer un régime indemnitaire porté à la même hauteur que celui des autres agents affectés au sein d'une administration centrale ainsi que la décision implicite de rejet de son recours gracieux formé le 21 juillet 2017 ;
3°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 19 020,41 euros, assortie des intérêts et de la capitalisation des intérêts.
4°) d'enjoindre à la ministre de la culture de régulariser sa situation en lui versant la différence entre le montant du régime indemnitaire qu'elle aurait dû percevoir et celui qu'elle a effectivement perçu, dans un délai de deux mois à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;
5°) de mettre à la charge de la ministre de la culture une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- les jugements attaqués sont irréguliers dès lors qu'ils ne sont pas revêtus de la signature du président, du magistrat rapporteur et du greffier ;
- ils sont irréguliers du fait de la méconnaissance du caractère contradictoire de la procédure dès lors qu'ils sont fondés sur un mémoire en défense reçu postérieurement à la clôture d'instruction ;
- ils sont insuffisamment motivés ;
- les décisions implicites par lesquelles la ministre de la culture a rejeté sa demande de révision de son régime indemnitaire et d'indemnisation de ses préjudices ainsi que son recours gracieux sont entachés d'une erreur de droit et d'une violation du principe d'égalité entre les agents de la fonction publique ;
- ces décision sont entachées d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- ces illégalités sont constitutives d'une faute de nature à engager la responsabilité de l'administration.
Par un mémoire en défense, enregistrés le 25 mars 2021, la ministre de la culture conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de Mme A... la somme de
2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que les moyens soulevés par la requête ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le décret n° 95-239 du 2 mars 1995 ;
- le décret n° 95-545 du 2 mai 1995 ;
- le décret n° 2002-61 du 14 janvier 2002 ;
- le décret n° 2014-513 du 20 mai 2014 ;
- l'arrêté du 24 août 1999 fixant le montant de la prime de sujétions spéciales attribuée aux personnels d'accueil, de surveillance et de magasinage du ministère chargé de la culture ;
- l'arrêté du 14 janvier 2002 fixant les montants de référence de l'indemnité d'administration et de technicité ;
- l'arrêté du 29 janvier 2002 portant application du décret n° 2002-61 du
14 janvier 2002 relatif à l'indemnité d'administration et de technicité susceptible d'être allouée à certains fonctionnaires du ministère de la culture et de la communication ;
- l'arrêté du 24 décembre 2006 érigeant le service Archives nationales en service à compétence nationale ;
- l'arrêté du 13 février 2012 relatif à l'organisation du service à compétence nationale Archives nationales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme C...,
- les conclusions de M. Baronnet, rapporteur public,
- et les observations de Me Crusoe, représentant Mme A..., et de Me Magnaval, représentant la ministre de la culture.
Considérant ce qui suit :
1. Mme A..., adjointe technique principale de 2ème classe, 9ème échelon, relevant du corps des adjoints techniques d'accueil, de surveillance et de magasinage, est affectée au service à compétence nationale des archives nationales. Elle a, par courrier du 21 mars 2017, demandé à la ministre de la culture l'octroi du régime indemnitaire applicable aux agents appartenant au même corps affectés en administration centrale et la réparation du préjudice résultant de la différence entre ce régime indemnitaire et celui dont elle a bénéficié. En l'absence de réponse, elle a exercé un recours gracieux le 21 juillet 2017. Par un jugement du 6 novembre 2019, le tribunal administratif de Paris a rejeté ses conclusions à fin d'annulation des décisions implicites ministérielles et a ordonné, avant dire droit, un supplément d'instruction à l'effet de produire, pour le ministère de la culture et le service des archives nationales, tous les éléments nécessaires à la détermination du régime indemnitaire des agents appartenant au corps des adjoints techniques d'accueil, de surveillance et de magasinage. Par un jugement du 14 octobre 2020,
le tribunal administratif de Paris a rejeté ses conclusions indemnitaires. Mme A... relève appel de ces deux jugements.
Sur la régularité des jugements attaqués :
En ce qui concerne le jugement du 6 novembre 2019 :
2. En premier lieu, aux termes de l'article R. 741-7 du code de justice administrative : " Dans les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, la minute de la décision est signée par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier d'audience. ".
3. La minute du jugement attaqué, produite en cours d'instruction par le greffe du tribunal administratif de Paris, comporte bien la signature du président de la formation de jugement, du rapporteur et du greffier d'audience. Par suite, le moyen tiré de l'irrégularité du jugement doit être écarté.
4. En second lieu, les premiers juges ont, ainsi qu'il leur appartenait, qualifié le recours de Mme A... de recours de plein contentieux. Ce faisant, ils ont pu rejeter les conclusions d'excès de pouvoir sans examiner le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation qu'ils ont entendu examiner dans le cadre du bien-fondé des conclusions indemnitaires. La pertinence de cette qualification relève du bien-fondé du jugement et non de sa régularité. Par suite, le moyen tiré de l'omission à statuer doit être écarté.
En ce qui concerne le jugement du 14 octobre 2020 :
5. Aux termes de l'article R. 611-8-6 du code de justice administrative : " Les parties sont réputées avoir reçu la communication ou la notification à la date de première consultation du document qui leur a été adressé par voie électronique, certifiée par l'accusé de réception délivré par l'application informatique, ou, à défaut de consultation dans un délai de deux jours ouvrés à compter de la date de mise à disposition du document dans l'application, à l'issue de ce délai. (...) ". Aux termes de l'article R. 613-2 du même code : " Si le président de la formation de jugement n'a pas pris une ordonnance de clôture, l'instruction est close trois jours francs avant la date de l'audience indiquée dans l'avis d'audience prévu à l'article R. 711-2. Cet avis le mentionne. ".
6. Il ressort des pièces du dossier qu'un mémoire produit par la ministre de la culture a été communiqué à la requérante le vendredi 25 septembre 2020 et consulté par son avocat le lundi 28 septembre 2020, dans le délai de deux jours ouvrés prévu par l'article R. 611-8-6 du code de justice administrative. Cependant, l'audience s'est déroulée le mercredi 30 septembre, soit deux jours suivant la réception du mémoire. La requérante n'a donc pas été mise à même de répliquer en temps utile alors que le jugement attaqué s'est fondé, pour rejeter sa demande, sur l'argumentation développée par la ministre. Par suite, le jugement attaqué doit être annulé.
7. Il y a lieu d'évoquer l'affaire et de statuer immédiatement sur la demande présentée par Mme A... devant le tribunal administratif de Paris.
Sur la légalité des décisions implicites ministérielles :
8. En premier lieu, la requérante n'établit ni même n'allègue avoir sollicité la communication des motifs des décisions attaquées. Par suite, elle ne peut utilement invoquer le moyen tiré de leur défaut de motivation.
9. En deuxième lieu, le moyen tiré du défaut d'examen n'est assorti d'aucune précision permettant d'en apprécier le bien-fondé. Il doit donc être écarté.
10. En troisième lieu, le régime indemnitaire des agents relevant du corps des adjoints techniques d'accueil, de surveillance et de magasinage a procédé, d'une part, pour la période du 1er janvier 2013 au 31 décembre 2016, s'agissant de l'indemnité d'administration et de technicité, du décret n° 2002-61 du 14 janvier 2002 relatif à l'indemnité d'administration et de technicité, de l'arrêté du 29 janvier 2002 portant application du décret n° 2002-61 du 14 janvier 2002 relatif à l'indemnité d'administration et de technicité susceptible d'être allouée à certains fonctionnaires du ministère de la culture et de la communication et de l'arrêté du 6 mars 2006 fixant les montants de référence de l'indemnité d'administration et de technicité en faveur de certains personnels du ministère de la culture et de la communication, s'agissant des sujétions spéciales, du décret n° 95-545 du 2 mai 1995 portant attribution d'une prime de sujétions spéciales aux personnels d'accueil, de surveillance et de magasinage du ministère chargé de la culture et de l'arrêté du 24 août 1999 fixant le montant de la prime de sujétions spéciales attribuée aux personnels d'accueil, de surveillance et de magasinage du ministère chargé de la culture. Si ce régime comprenait également une indemnité pour travail dominical issue du décret n° 2002-857 du 3 mai 2002 relatif à l'indemnité pour travail dominical régulier susceptible d'être allouée à certains personnels du ministère de la culture et de la communication et des indemnités jours fériés issues du décret n° 2002-856 du 3 mai 2002 relatif à l'indemnisation des personnels des corps d'accueil, de surveillance et de magasinage du ministère de la culture et de la communication et des techniciens des services culturels et des Bâtiments de France effectuant leur service un jour férié, Mme A... n'établit ni même n'allègue qu'elle aurait bénéficié de ces deux dernières indemnités ou aurait dû en bénéficier. A compter du 1er janvier 2017, un régime indemnitaire unique a été mis en place par le décret n° 2014-513 du 20 mai 2014 portant création d'un régime indemnitaire tenant compte des fonctions, des sujétions, de l'expertise et de l'engagement professionnel dans la fonction publique de l'Etat et se compose d'une indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise et d'un complément indemnitaire annuel. Il est exclusif de tout autre régime indemnitaire, seules la nouvelle bonification indiciaire et les primes et indemnités relevant des exceptions prévues à l'article 5 du décret n° 2014-513 du 20 mai 2014, détaillées dans l'arrêté du 27 août 2015, demeurant cumulables.
11. Tant pour la période allant du 1er janvier 2013 au 31 décembre 2016 que pour celle débutant le 1er janvier 2017, les textes régissant le régime indemnitaire dont Mme A... a bénéficié ne font pas la distinction entre les agents affectés au sein de l'administration centrale et ceux affectés au sein des services déconcentrés. Son affectation au sein du service à compétence nationale des archives nationales n'est donc pas un critère de détermination du montant des indemnités qui lui sont allouées. Si, lors de l'instruction de la demande de première instance, il a été produit des tableaux comparatifs des montants alloués aux deux types d'agents et qu'il a été constaté que le montant moyen et médian du régime indemnitaire des adjoints techniques d'accueil, de surveillance et de magasinage affectés en administration centrale est toujours supérieur à celui des agents du même corps exerçant dans le service à compétence nationale des Archives nationales entre 2013 et 2016, ces documents ne permettent pas d'établir une différence de traitement entre eux dès lors que l'allocation du régime indemnitaire est fondée sur des critères tenant à la personne de chaque agent. Ainsi que l'ont relevé à bon droit les juges de premières instance, l'arrivée d'agents intégrant le corps des adjoints techniques d'accueil, de surveillance et de magasinage a eu une influence sur ces montants en raison du critère de l'ancienneté. Enfin, la requérante ne peut utilement se prévaloir des solutions adoptées par le tribunal administratif de Montreuil dès lors que ces affaires concernaient des agents appartenant à un corps différent et portaient sur des indemnités régies par des textes différents selon l'affectation de l'agent en administration centrale ou en services déconcentrés. Par suite, les moyens tirés de l'erreur de droit et la violation du principe d'égalité de traitement des agents publics doivent donc être écartés.
12. En quatrième lieu, si la requérante produit les bulletins de paie d'un adjoint technique d'accueil, de surveillance et de magasinage affecté en administration centrale qui, à ancienneté égale, perçoit des indemnités supérieures à celles qui lui ont été allouées, cette circonstance n'est pas suffisante pour établir que l'administration aurait commis une erreur manifeste d'appréciation dès lors que l'écart peut se justifier par d'autres critères tels le niveau de responsabilité et le mérite de l'agent. Mme A... n'établit ni même n'allègue que le montant des indemnités qui lui ont été versées ne correspond pas aux critères définis par les textes mentionnés plus haut. Par suite, le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation doit être écarté.
Sur les conclusions indemnitaires :
13. En l'absence de toute illégalité fautive des décisions attaquées au vu des moyens soulevés, les conclusions indemnitaires de Mme A... ne peuvent qu'être rejetées.
Sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte :
14. Le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation, n'implique aucune mesure d'exécution. Par suite, les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte doivent être rejetées.
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
15. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme demandée par Mme A..., au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme A... la somme demandée par la ministre de la culture au même titre.
D E C I D E :
Article 1er : Le jugement n° 1718274/5-3 du 14 octobre 2020 du tribunal administratif de Paris est annulé.
Article 2 : La demande de Mme A... présentée devant le tribunal administratif de Paris ainsi que le surplus des conclusions de la requête sont rejetés.
Article 3 : Les conclusions du ministère de la culture tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : Le présent jugement sera notifié à Mme D... A... et au ministre de la culture.
Délibéré après l'audience du 22 avril 2022, à laquelle siégeaient :
- Mme Heers, présidente,
- Mme Briançon, présidente-assesseure,
- Mme Portes, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 12 mai 2022.
La rapporteure,
C. C...
La présidente,
M. B... La greffière,
V. BREME
La République mande et ordonne à la ministre de la culture en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
2
N° 20PA03937