Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société Design Germain a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 28 novembre 2019 confirmée sur recours le 11 mars 2020, par laquelle la maire de Paris a fait opposition à l'exécution de travaux portant sur le remplacement d'une fenêtre par une porte au rez-de-chaussée sur cour au 19 boulevard Raspail à Paris (7ème arrondissement).
Par un jugement n° 2007751/4-1 du 31 mars 2022, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 10 mai 2022, la société Design Germain, représentée par Me Cazin, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 2007751/4-1 du 31 mars 2022 du tribunal administratif de Paris ;
2°) d'annuler la décision du 28 novembre 2019 ;
3°) de mettre à la charge solidaire de la Ville de Paris et de l'Etat la somme de 6 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le jugement est entaché de dénaturation des faits en ce qu'il a considéré que la création de la porte fenêtre consistait en un percement nouveau et d'erreur manifeste d'appréciation, l'agrandissement ne portant pas une atteinte irréversible à l'authenticité de l'immeuble et l'absence de notification de l'avis défavorable de l'architecte des bâtiments de France en date du 29 octobre 2018 ne lui a pas permis d'appréhender les motifs du refus qui lui a été opposé ;
- le projet ne porte pas atteinte à la volumétrie, aux structures et éléments décoratifs des façades et des couvertures de l'immeuble, ce dernier n'étant pas caractérisé par une stricte cohérence architecturale ;
- la décision du 28 novembre 2019 n'est pas suffisamment motivée.
La requête a été communiquée à la Ville de Paris qui n'a pas produit de mémoire en défense.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code du patrimoine ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. A...,
- les conclusions de M. Doré, rapporteur public,
- et les observations de Me Maallem substituant Me Cazin, représentant la société Design Germain.
Considérant ce qui suit :
1. La société Design Germain a déposé, le 15 octobre 2019, auprès des services instructeurs de la Ville de Paris, une déclaration préalable de travaux portant sur le remplacement d'une fenêtre par une porte-fenêtre côté cour. Par une décision du 28 novembre 2019 confirmée le 11 mars 2020, la Ville de Paris a fait opposition à l'exécution de ces travaux, en conséquence du refus d'accord du 29 octobre 2019 de l'architecte des Bâtiments de France. La société Design Germain relève appel du jugement du 31 mars 2022 par lequel le tribunal administratif de Paris, saisi aux fins d'annulation de ces décisions, a rejeté sa demande.
2. En premier lieu, aux termes des dispositions de l'article R. 424-14 du code de l'urbanisme : " Lorsque le projet est situé dans le périmètre d'un site patrimonial remarquable ou dans les abords des monuments historiques, le demandeur peut, en cas d'opposition à une déclaration préalable ou de refus de permis fondé sur un refus d'accord de l'architecte des Bâtiments de France, saisir le préfet de région, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, d'un recours contre cette décision dans le délai de deux mois à compter de la notification de l'opposition ou du refus. Le demandeur précise lors de sa saisine s'il souhaite faire appel à un médiateur désigné dans les conditions prévues au III de l'article L. 632-2 du code du patrimoine. Dans ce cas, le préfet de région saisit le médiateur qui transmet son avis dans le délai d'un mois à compter de cette saisine. / Le préfet de région adresse notification de la demande dont il est saisi au maire s'il n'est pas l'autorité compétente, et à l'autorité compétente en matière d'autorisations d'urbanisme. / Le délai à l'issue duquel le préfet de région est réputé avoir confirmé la décision de l'autorité compétente en cas de recours du demandeur est de deux mois à compter de la réception de ce recours (...). ".
3. La Ville de Paris étant en situation de compétence liée dès lors que l'architecte des bâtiments de France avait donné un avis négatif au projet, le moyen dirigé contre la décision du 28 novembre 2019 et tiré de ce que celle-ci est insuffisamment motivée, en particulier en l'absence de communication de l'avis de l'architecte des bâtiments de France, ne peut qu'être écarté comme inopérant.
4. En second lieu, aux termes de l'article US 11.1.1 du plan de sauvegarde et de mise en valeur du 7ème arrondissement : " Dispositions générales (...) Type A - Immeuble ou partie d'immeuble à conserver, dont la démolition, l'enlèvement ou l'altération sont interdits et dont la modification est soumise à des conditions spéciales. (...) Ces immeubles doivent être maintenus, restaurés ou améliorés, ainsi que l'ensemble des caractéristiques et éléments extérieurs et intérieurs d'intérêt patrimonial. / Des modifications sont admises : / - si elles vont dans le sens d'une restauration ou d'une mise en valeur et si elles ne portent pas atteinte aux caractéristiques et éléments d'intérêt patrimonial ; / - si elles portent sur l'adaptation des locaux afin d'intégrer les normes d'habitabilité (hygiène, isolation thermique et phonique...), d'accessibilité et de sécurité, sans altérer les éléments protégés au titre de leur intérêt patrimonial (...) ". Aux termes de l'article US 11.1.3 du même plan : " / (...) /7°- Traitement des ouvertures / a) - Percements en façades / Les ouvertures existantes présentant un intérêt patrimonial doivent être conservées en l'état et si elles ont été occultées, elles doivent être rouvertes. / Les ouvertures qui ont été modifiées ou créées au mépris de la cohérence architecturale de la façade doivent être rebouchées pour retrouver les dispositions d'origine ou en lien avec le caractère patrimonial de l'immeuble. / Règles spécifiques aux immeubles à conserver de type A. / La création de percements nouveaux est interdite. / Si les ouvertures du rez-de-chaussée sont incohérentes avec celles des étages, leur adaptation est admise sous réserve que ces modifications soient compatibles avec le caractère patrimonial de l'immeuble (...) ".
5. Pour refuser de donner son accord, requis en application de l'article L. 632-1 du code du patrimoine, l'architecte des bâtiments de France a relevé que l'immeuble est protégé au titre de son intérêt patrimonial de type A dans le secteur sauvegardé et que la démolition de l'allège et le remplacement d'une fenêtre par une porte-fenêtre peut constituer une altération irréversible de l'authenticité de l'immeuble.
6. En se bornant à soutenir que le projet ne constitue pas un percement nouveau et ne porte pas atteinte à la volumétrie, aux structures et éléments décoratifs des façades et des couvertures de l'immeuble, alors qu'il ressort des pièces du dossier qu'il a notamment pour objet de modifier une fenêtre en la transformant en porte-fenêtre, la société requérante ne conteste pas utilement que son projet méconnait les dispositions précitées, lesquelles n'ont pas entendu permettre la réalisation de travaux autres notamment que ceux qui ont pour objet des modifications qui vont dans le sens d'une restauration ou d'une mise en valeur de l'immeuble, les travaux en litige ayant pour effet, en l'espèce, de rompre l'alignement des fenêtres de la façade, ce, quand bien même d'autres façades situées dans la cour de l'immeuble ne comporteraient pas la même harmonie.
7. Il résulte de tout ce qui précède que la société Design Germain n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande d'annulation de la décision du 28 novembre 2019. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'annulation ainsi que celles présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de la société Design Germain est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société Design Germain et à la Ville de Paris.
Délibéré après l'audience du 15 décembre 2022, à laquelle siégeaient :
- M. Lapouzade, président de chambre,
- Mme Bernard, première conseillère,
- M. Gobeill, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 20 janvier 2023.
Le rapporteur, Le président,
J.-F. A... J. LAPOUZADE
La greffière
Y. HERBER
La République mande et ordonne au préfet de la région Île-de-France, préfet de Paris en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
2
N° 22PA02166