Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... C... a demandé au Tribunal administratif de Melun d'annuler l'arrêté du président du conseil départemental du Val-de-Marne du 31 juillet 2018 en tant qu'il prononce à son encontre une sanction d'exclusion temporaire de fonctions d'une durée de deux ans à compter du 5 août 2018.
Par un jugement n° 1808087/5 du 8 juillet 2021, le Tribunal administratif de Melun a considéré qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur cette demande et a rejeté le surplus de conclusions de M. C....
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire enregistrés les 9 septembre 2021 et 26 janvier 2022, M. C..., représenté par Me Pascal Andrieux, demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du 8 juillet 2021 ;
2°) d'annuler la décision du 31 juillet 2018 par laquelle le président du conseil départemental du Val-de-Marne a prononcé la sanction d'exclusion de fonctions d'une durée de deux ans ;
3°) d'enjoindre au conseil départemental du Val-de-Marne de prononcer sa réintégration ;
4°) de mettre à sa charge la somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le jugement attaqué est irrégulier dès lors que ses visas ne procèdent pas à l'analyse des moyens développés par les parties et que ses motifs ne reprennent pas l'argumentation des parties en méconnaissance de l'article R. 741-2 du code de justice administrative ;
- le tribunal ne pouvait prononcer un non-lieu à statuer en raison du caractère non définitif de l'arrêt de la Cour administrative de Paris n° 18PA02982 du 17 mars 2021 frappé d'un pourvoi en cassation ;
- la sanction prononcée par la décision du 31 juillet 2018 doit être regardée comme s'étant substituée à la sanction du 7 août 2015 ;
- les faits justifiant la sanction du 31 juillet 2018 ne sont pas établis ;
- cette décision méconnaît l'autorité de la chose jugée par le Tribunal administratif de Melun le 13 juillet 2015 ;
- la sanction est disproportionnée.
Par un mémoire en défense enregistré le 20 décembre 2021, le département du Val-de-Marne, représenté par Me Lorène Carrère, conclut au rejet de la requête et demande qu'il soit mis à la charge de M. C... la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.
Par une ordonnance du 29 novembre 2022, la clôture d'instruction a été fixée au 15 décembre 2022.
Par un courrier du 21 novembre 2022, les parties ont été informées de ce que la solution du litige était susceptible d'être fondée sur un moyen relevé d'office, tiré de ce la décision attaquée méconnaît le champ d'application de la loi (article 29 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983) dès lors qu'à la date de la décision attaquée, M. C..., réputé avoir été mis à la retraite d'office en application de la décision du 7 août 2015 et en conséquence de l'arrêt n° 18PA02982 du 17 mars 2021, n'était plus fonctionnaire.
Par un mémoire enregistré le 7 décembre 2022, le conseil départemental du Val-de-Marne a présenté des observations en réponse au moyen d'ordre public.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme B...,
- les conclusions de Mme Prévot, rapporteur public,
- et les observations de Me Arbal, représentant le département du Val-de-Marne.
Considérant ce qui suit :
1. M. C..., adjoint technique des établissements d'enseignement de première classe a été placé en position de détachement auprès du département du Val-de-Marne à compter du 1er janvier 2009. Par un arrêté du 21 novembre 2013, le président du conseil départemental du Val-de-Marne a prononcé sa mise à la retraite d'office à titre de sanction disciplinaire. Par un jugement n° 1404651 du 13 juillet 2015, le Tribunal administratif de Melun a annulé pour erreur d'appréciation cette sanction. Par un nouvel arrêté du 7 août 2015, le président du conseil départemental du Val-de-Marne a prononcé à son encontre une nouvelle sanction disciplinaire de mise à la retraite d'office à compter du 1er septembre 2015. Par un jugement n° 1508057 du 5 juillet 2018, le Tribunal administratif de Melun a annulé cette décision du 7 août 2015 et a enjoint au département de procéder à la réintégration de M. C... dans ses effectifs et de reconstituer sa carrière dans un délai d'un mois. Par des décisions du 31 juillet 2018, le département a procédé à la réintégration dans les effectifs du département de M. C... à compter du 1er septembre 2015 et a prononcé, à titre disciplinaire, l'exclusion temporaire de fonctions de M. C..., pour une durée de deux ans à compter du 5 août 2018. Par un arrêt n° 18PA02982 du 17 mars 2021, la Cour administrative d'appel de Paris a annulé le jugement n° 1508057 du Tribunal administratif de Melun et a rejeté la demande de M. C... tendant à l'annulation de la sanction disciplinaire du 7 août 2015 de mise à la retraite d'office à compter du 1er septembre 2015. Par le jugement du 8 juillet 2021, dont M. C... relève appel, le Tribunal administratif de Melun a jugé qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur sa demande dirigée contre la décision du président du conseil départemental du Val-de-Marne du 31 juillet 2018 l'excluant temporairement de ses fonctions pour une durée de deux ans, et a rejeté le surplus de ses conclusions.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Un recours pour excès de pouvoir dirigé contre un acte administratif n'a d'autre objet que d'en faire prononcer l'annulation avec effet rétroactif. Si, avant que le juge n'ait statué, l'acte attaqué est rapporté par l'autorité compétente et si le retrait ainsi opéré acquiert un caractère définitif faute d'être critiqué dans le délai du recours contentieux, il emporte alors disparition rétroactive de l'ordonnancement juridique de l'acte contesté, ce qui conduit à ce qu'il n'y ait lieu pour le juge de la légalité de statuer sur le mérite de la requête dont il était saisi. Le juge de l'excès de pouvoir ne peut, en principe, déduire d'une décision juridictionnelle rendue par lui-même ou par une autre juridiction qu'il n'y a plus lieu de statuer sur des conclusions à fin d'annulation dont il est saisi, tant que cette décision n'est pas devenue irrévocable. Il incombe au juge d'appel de censurer totalement ou partiellement comme irrégulier le jugement d'un tribunal administratif ayant omis de prononcer un non-lieu à statuer sur tout ou partie des conclusions dont il était saisi ou ayant prononcé à tort un tel non-lieu à statuer.
3. Il ressort des termes du jugement attaqué que les premiers juges ont prononcé un non-lieu à statuer sur les conclusions à fin d'annulation de la décision du 31 juillet 2018 à raison du caractère définitif de l'arrêt du 17 mars 2021 de la Cour administrative d'appel de Paris. Toutefois, à la date à laquelle le tribunal a statué, l'arrêt de la Cour, frappé d'un pourvoi en cassation, n'était pas irrévocable. C'est donc à tort que le tribunal a prononcé un non-lieu à statuer sur les conclusions dirigées contre la décision du 31 juillet 2018. Par suite, le jugement du 8 juillet 2021 est irrégulier et doit être annulé.
4. Il y a lieu pour la Cour de statuer immédiatement, par voie d'évocation, sur la demande présentée par M. C... devant le Tribunal administratif de Melun.
Sur la demande présentée par M. C... devant le tribunal et sur les conclusions présentées en appel par les parties :
5. A la date du présent arrêt, l'arrêt de la Cour administrative de Paris du 17 mars 2021 est irrévocable à la suite de la non admission, par une ordonnance n° 452587 du 29 octobre 2021, du pourvoi en cassation de M. C... contre cet arrêt. La décision du 7 août 2015 portant sanction de mise à la retraite d'office à compter du 1er septembre 2015 a donc été rétablie à titre rétroactif dans l'ordre juridique. Cette décision a eu pour effet de créer une situation juridique équivalente au retrait de la décision attaquée, dès lors que les conséquences de la sanction d'exclusion temporaire de fonction durant deux ans sur la situation de M. C... ne sont pas plus graves que celles de mise à la retraite d'office et qu'en particulier, M. C..., qui a été privé de rémunération durant l'exécution de la sanction de suspension temporaire de deux ans sur la période du 5 août 2018 au 4 août 2020, peut solliciter, s'il s'y croit fondé, le rappel d'éventuels droits à pension résultant de sa mise à la retraite. Par suite, les conclusions de M. C... dirigées contre la décision attaquée sont devenues sans objet et il n'y a pas lieu d'y statuer. Il y a lieu, par voie de conséquence, de rejeter ses conclusions à fin d'injonction et celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit à la demande du département du Val-de-Marne au titre des frais liés au litige.
DECIDE :
Article 1er : Le jugement du 8 juillet 2021 du Tribunal administratif de Melun est annulé.
Article 2 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de M. C... dirigées contre la décision du 31 juillet 2018.
Article 3 : Le surplus de la demande présentée par M. C... devant le Tribunal administratif de Melun et de ses conclusions présentées devant la Cour est rejeté.
Article 4 : Les conclusions du conseil départemental du Val-de-Marne présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C... et au conseil départemental du Val-de-Marne.
Délibéré après l'audience du 11 janvier 2023, à laquelle siégeaient :
- Mme Brotons, président de chambre,
- Mme Topin, président assesseur,
- M. Magnard, premier conseiller,
Rendu public par mise à disposition au greffe le 25 janvier 2023.
Le rapporteur,
Signé
E. B...
Le président,
Signé
I. BROTONSLe greffier,
Signé
A. MOHAMAN YERO
La République mande et ordonne au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
2
N° 21PA05027