Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 13 juin 2022 par lequel le préfet de police l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.
Par un jugement n° 2213752 du 26 juillet 2022, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 26 août 2022, M. B... A..., représenté par
Me Azoulay-Cadoch, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Paris ;
2°) d'annuler l'arrêté du 13 juin 2022 du préfet de police ;
3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer un titre de séjour l'autorisant à travailler dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ou à défaut de procéder à un nouvel examen de sa situation dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et de lui délivrer, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- l'arrêté contesté est insuffisamment motivé ;
- il est entaché d'une erreur de droit en ce qu'il est fondé sur l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et non sur l'accord franco-marocain ;
- il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation dès lors qu'il est entré régulièrement en France et préparait un dossier de demande de titre de séjour ;
- il méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par un mémoire en défense enregistré le 17 février 2023, le préfet de police conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention d'application de l'accord de Schengen, signée le 19 juin 1990 ;
- l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Saint-Macary a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., ressortissant marocain né le 21 janvier 1988, est entré en France le
28 décembre 2019 selon ses déclarations. Il a fait l'objet d'une retenue à la suite d'un contrôle d'identité le 12 juin 2022. Par un arrêté du 13 juin 2022, le préfet de police lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.
2. En premier lieu, l'arrêté contesté comporte les considérations de droit sur lesquelles il se fonde ainsi que les considérations de fait, à savoir l'entrée irrégulière en France de M. A... et son séjour irrégulier. Il n'avait pas à mentionner le code des relations entre le public et l'administration, qui ne constitue pas un motif de l'arrêté contesté et ne constitue au demeurant pas le fondement légal de l'obligation de motiver les obligations de quitter le territoire français. Le moyen tiré de l'insuffisante motivation de l'arrêté contesté doit, par suite, être écarté.
3. En deuxième lieu, M. A... ne peut utilement invoquer la méconnaissance des stipulations de l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 dès lors que l'arrêté contesté ne se prononce pas sur son droit au séjour en qualité de salarié et qu'il n'a pas formé de demande à ce titre. Ce moyen doit, par suite, être écarté.
4. En troisième lieu, d'une part, aux termes de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut obliger un étranger à quitter le territoire français lorsqu'il se trouve dans les cas suivants : / 1° L'étranger, ne pouvant justifier être entré régulièrement sur le territoire français, s'y est maintenu sans être titulaire d'un titre de séjour en cours de validité (...) ".
5. D'autre part, aux termes de l'article 19 de la convention d'application de l'accord de Schengen, signée le 19 juin 1990 : " 1. Les étrangers titulaires d'un visa uniforme qui sont entrés régulièrement sur le territoire de l'une des Parties contractantes peuvent circuler librement sur le territoire de l'ensemble des Parties contractantes pendant la durée de validité du visa, pour autant qu'ils remplissent les conditions d'entrée visées à l'article 5, paragraphe 1, points a, c, d et e (...) 4. Les dispositions du présent article s'appliquent sans préjudice des dispositions de l'article 22 ". L'article 22 de cette même convention précise : " I- Les étrangers entrés régulièrement sur le territoire d'une des Parties contractantes sont tenus de se déclarer, dans des conditions fixées par chaque Partie contractante, aux autorités de la Partie contractante sur le territoire de laquelle ils pénètrent. / Cette déclaration peut être souscrite au choix de chaque Partie contractante, soit à l'entrée, soit, dans un délai de trois jours ouvrables à partir de l'entrée, à l'intérieur du territoire de la Partie contractante sur lequel ils pénètrent (...) ". La souscription de la déclaration prévue par cet article 22 et qui est imposée aux articles L. 621-2 et L. 621-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, est une condition de la régularité de l'entrée en France de l'étranger soumis à l'obligation de visa et en provenance directe d'un Etat partie à cette convention qui l'a admis à entrer ou à séjourner sur son territoire. Sont toutefois dispensés de cette formalité les étrangers qui ne sont pas astreints à l'obligation de visa pour un séjour inférieur à trois mois et ceux qui sont titulaires d'un titre de séjour en cours de validité, d'une durée supérieure ou égale à un an, délivré par un État partie à la convention d'application de l'accord de Schengen.
6. Si M. A... soutient être entré en France régulièrement le 28 décembre 2019, sous couvert d'un visa délivré par les autorités italiennes valable du 17 décembre 2019 au
19 juin 2020, il ne justifie pas avoir souscrit la déclaration prévue par l'article 22 de l'accord de Schengen. Il est par ailleurs constant que l'intéressé n'est pas titulaire d'un titre de séjour. Dans ces conditions, le préfet de police n'a pas méconnu les dispositions précitées de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour et du droit d'asile en l'obligeant à quitter le territoire français.
7. En dernier lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...). / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
8. M. A..., qui produit un contrat de travail à durée déterminée daté du
11 octobre 2021 et des fiches de paie postérieures à cette date pour un poste d'employé en boucherie à temps partiel de 10 heures par semaine, ne justifie ainsi pas d'une insertion professionnelle stable et ancienne sur le territoire français. Il a en outre vécu dans son pays d'origine jusqu'à l'âge de 31 ans et n'établit ni même n'allègue y être dépourvu d'attaches. Il ne justifie enfin pas avoir noué en France des attaches d'une particulière intensité. Dans ces conditions, le préfet de police n'a pas porté à sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée en prenant l'arrêté contesté. Ce moyen doit, dès lors, être écarté.
9. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent, par voie de conséquence, également être rejetées.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Copie en sera transmise au préfet de police.
Délibéré après l'audience du 29 septembre 2023, à laquelle siégeaient :
Mme Heers, présidente de chambre,
Mme Bruston, présidente-assesseure,
Mme Saint-Macary, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 13 octobre 2023.
La rapporteure,
M. SAINT-MACARY
La présidente,
M. HEERS
La greffière,
A. GASPARYAN
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 22PA03973