Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... a demandé au Tribunal administratif de Paris, à titre principal, de prononcer la décharge de l'impôt sur le revenu et des prélèvements sociaux mis à sa charge au titre de l'année 2016, et, à titre subsidiaire, de surseoir à statuer sur sa requête dans l'attente du traitement de la plainte pour escroquerie, abus de confiance et faux et usage de faux qu'il a déposée le 26 janvier 2021 auprès du procureur de la République de Paris à l'encontre de M. B... et de son avocat.
Par un jugement n° 2102566/2-2 du 11 avril 2022, le Tribunal administratif de Paris a rejeté cette demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire enregistrés les 1er juin et 18 novembre 2022, M. A..., représenté par Me Alexandre Baux, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du 11 avril 2022 du Tribunal administratif de Paris ;
2°) de prononcer la décharge des impositions litigieuses.
Il soutient que :
- dès lors qu'il n'a pu avoir conscience qu'en 2019 de l'escroquerie dont il a fait l'objet, sa réclamation datant de 2020 est recevable ;
- il n'a jamais reçu les sommes déclarées ;
- il y a lieu de surseoir à statuer en l'attente de la décision du juge judiciaire relative à l'escroquerie dont il a fait l'objet.
Par un mémoire en défense enregistré le 19 septembre 2022, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.
Il soutient que :
- les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés.
Par une ordonnance du 2 novembre 2022, la clôture de l'instruction a été fixée au
18 novembre 2022.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Magnard,
- les conclusions de M. Segretain, rapporteur public,
- et les observations de Me Baux, représentant M. A....
Considérant ce qui suit :
1. M. et Mme A... ont été imposés à l'impôt sur le revenu et aux prélèvements sociaux au titre de l'année 2016 sur la base de leur déclaration réalisée le 6 juin 2017, laquelle indiquait la perception, en 2016, d'une somme de 770 000 euros correspondant aux intérêts des placements à revenu fixe encaissés au Royaume-Uni par l'intermédiaire de la société Global World New Invest Limited. L'imposition correspondante a été mise en recouvrement le 31 juillet 2017. Par une réclamation contentieuse adressée au service le 16 novembre 2020, M. A... a contesté cette imposition au motif qu'il avait été victime d'agissements frauduleux de la part de la société Global World New Invest Limited, représentée par M. B.... Par la présente requête, M. A... relève appel du jugement par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant, à titre principal, à ce que soit prononcée la décharge de l'impôt sur le revenu et des prélèvements sociaux mis à sa charge au titre de l'année 2016 et, à titre subsidiaire, à ce qu'il soit sursis à statuer sur sa requête dans l'attente du traitement de sa plainte pour escroquerie par l'autorité judiciaire.
2. Aux termes de l'article R* 196-1 du livre des procédures fiscales : " Pour être recevables, les réclamations relatives aux impôts autres que les impôts directs locaux et les taxes annexes à ces impôts, doivent être présentées à l'administration au plus tard le 31 décembre de la deuxième année suivant celle, selon le cas : / a) De la mise en recouvrement du rôle ou de la notification d'un avis de mise en recouvrement ; / b) Du versement de l'impôt contesté lorsque cet impôt n'a pas donné lieu à l'établissement d'un rôle ou à la notification d'un avis de mise en recouvrement ; / c) De la réalisation de l'événement qui motive la réclamation. Ne constitue pas un tel événement une décision juridictionnelle ou un avis mentionné aux troisième et cinquième alinéas de l'article L. 190 ". Seuls doivent être regardés comme constituant le point de départ du délai ainsi prévu les événements qui sont de nature à exercer une influence sur le bien-fondé de l'imposition, soit dans son principe, soit dans son montant.
3. M. A... qui a déclaré le 6 juin 2017, au titre de ses revenus pour 2016, une somme de 770 000 euros, soutient avoir été victime d'une escroquerie de la part de
M. B... et de M. D..., son avocat. Il fait valoir qu'en raison de cette escroquerie, il n'a pas perçu ladite somme correspondant aux gains attendus du placement du capital de 490 000 euros auprès de la société d'investissement Global World New Invest Limited, dont
M. B... est le gérant, et, a en outre perdu le capital investi. Il soutient que cette escroquerie lui a été révélée à la lecture d'un courrier du 2 août 2019 de sa banque, la BNP Paribas, par lequel il a appris que, contrairement à ce que lui avaient assuré MM. B... et D..., la banque portugaise Bankinter SA n'avait jamais émis les virements de 150 000 et 170 000 euros qui lui étaient dus en avance de la somme totale de 770 000 euros oralement promise. Il soutient que le courrier du 2 août 2019 doit être regardé comme un événement au sens des dispositions précitées du c) de l'article R* 196-1 du livre des procédures fiscales de nature à ouvrir, à compter de cette date, le délai de réclamation, lequel expire par suite le 31 décembre 2021, et non le 31 décembre 2019 en application du a) du même article comme le soutient l'administration fiscale en défense.
4. L'événement de nature à fonder l'ouverture du délai de recours à ce titre ne saurait être constitué par la découverte de la fraude dont M. A... soutient avoir été victime, mais par la seule constatation de l'absence de perception de la somme de 770 000 euros en cause. Or, il résulte de l'instruction, que M. A..., qui avait déclaré en 2017 la somme de 770 000 euros, sur la simple base, selon ses propres dires, d'une information orale relative à une promesse de versement, a été informé, dès le 30 novembre 2017, de l'absence de réception, par sa banque, du virement des sommes de 150 000 euros et 170 000 euros censées en représenter une avance. M. A... à qui il était loisible, dans ces circonstances, d'engager, par lui-même, dès l'année 2017, des démarches auprès de la banque Bankinter SA afin de s'assurer que les virements avaient bien été émis, non seulement n'avait en 2017 aucun indice sérieux relatif à la matérialité de ces virements, mais disposait au contraire des éléments de nature à en remettre en cause leur existence. Il était d'ailleurs ainsi en mesure dès l'année 2017, ayant constaté qu'il n'avait pas perçu la somme déclarée au titre de ses revenus 2016, de former une réclamation auprès de l'administration fiscale pour faire modifier sa déclaration. Le courrier du 2 août 2019 par lequel la BNP Paribas l'a informé que la banque Bankinter SA lui avait signalé ne pas avoir émis les virements ne saurait en conséquence constituer un événement au sens des dispositions précitées du c) de l'article R* 196-1 du livre des procédures fiscales de nature à ouvrir, à compter de cette date, le délai de réclamation. Par suite, dès lors que M. A... n'a adressé sa réclamation contentieuse que le 16 décembre 2020, soit à une date postérieure à la deuxième année suivant celle de la mise en recouvrement du rôle, sa réclamation était tardive et par suite irrecevable.
5. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il y ait lieu de sursoir à statuer, que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
Copie en sera adressée au directeur régional des finances publiques d'Ile-de-France et du département de Paris.
Délibéré après l'audience du 8 novembre 2023, à laquelle siégeaient :
- Mme Topin, présidente,
- M. Magnard, premier conseiller,
- Mme Fullana, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 22 novembre 2023.
Le rapporteur,
F. MAGNARDLa présidente,
E. TOPIN
Le greffier,
C. MONGIS
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N° 22PA02508 2