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05/06/2024 | FRANCE | N°22PA05467

France | France, Cour administrative d'appel de PARIS, 2ème chambre, 05 juin 2024, 22PA05467


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



La société à responsabilité limitée (SARL) Gondwana Puen et la société anonyme (SA) Outremer Finance ont demandé au Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie d'annuler la décision en date du 3 décembre 2021 par laquelle le ministre chargé du budget a refusé d'accorder l'agrément prévu par les dispositions de l'article 199 undecies B du code général des impôt.



Par un jugement n° 2200092 du 25 octobre 2022, le Tribunal administratif de Nouvelle

-Calédonie a rejeté leur demande.





Procédure devant la Cour :



Par une requête et des...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société à responsabilité limitée (SARL) Gondwana Puen et la société anonyme (SA) Outremer Finance ont demandé au Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie d'annuler la décision en date du 3 décembre 2021 par laquelle le ministre chargé du budget a refusé d'accorder l'agrément prévu par les dispositions de l'article 199 undecies B du code général des impôt.

Par un jugement n° 2200092 du 25 octobre 2022, le Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie a rejeté leur demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoire enregistrés les 23 décembre 2022, 23 mars et 27 juillet 2023, les sociétés Gondwana Puen et Outremer Finance, représentées par Me Hervé Quéré, demandent à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 25 octobre 2022 du Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie ;

2°) d'annuler la décision attaquée devant ce tribunal ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elles soutiennent que le ministre a commis une erreur d'appréciation en estimant que le projet ne présentait pas un intérêt économique pour le territoire dans lequel il était réalisé et ne garantissait pas la protection des investisseurs et des tiers.

Par des mémoires en défense enregistrés les 24 février, 12 juillet et 1er septembre 2023, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par les requérantes ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 25 janvier 2024, la clôture d'instruction a été fixée au 15 février 2024.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Topin,

- les conclusions de M. Segretain, rapporteur public,

- et les observations de Me Quéré, représentant les sociétés Gondwana Puen et

Outremer Finance.

Considérant ce qui suit :

1. La SA Outremer Finance, mandatée par la SARL Gondwana Puen, a sollicité, le 7 juin 2019, le bénéfice d'un agrément auprès de la direction générale des finances publiques afin de bénéficier du régime d'aide à l'investissement prévu par les dispositions de l'article 199 undecies B du code général des impôts, au titre d'un programme d'investissement consistant en la construction d'un établissement hôtelier classé trois étoiles, de type " écolodge " sur l'îlot Puen, au large de Boulouparis dans la province Sud de la Nouvelle-Calédonie, ayant pour exploitant la SARL Gondwana Puen. Par un courrier du 1er juillet 2021, le ministre chargé du budget a informé la société demanderesse qu'il envisageait de refuser cette demande. A la suite de la saisine de la commission consultative nationale et de l'avis rendu par cette commission le 9 septembre 2021, le ministre chargé du budget a refusé l'agrément sollicité par une décision du 3 décembre 2021 aux motifs que le service ne disposait pas d'éléments suffisants pour estimer que la viabilité du projet était assurée sur la durée d'exploitation minimale de quinze ans requise et que dès lors le projet ne satisfaisait pas aux conditions tenant à l'intérêt économique du projet pour la Nouvelle Calédonie et à la garantie de protection des investisseurs et des tiers. La SARL Gondwana Puen et la SA Outremer Finance relèvent appel du jugement du 25 octobre 2022 par lequel le Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie a rejeté leur demande tendant à l'annulation de cette décision.

2. En premier lieu, aux termes de l'article 199 undecies B du code général des impôts : " I. Les contribuables domiciliés en France au sens de l'article 4 B peuvent bénéficier d'une réduction d'impôt sur le revenu à raison des investissements productifs neufs qu'ils réalisent (...) en Nouvelle-Calédonie (...) dans le cadre d'une entreprise exerçant une activité agricole ou une activité industrielle, commerciale ou artisanale relevant de l'article 34 (...) La réduction d'impôt prévue au présent I s'applique, dans les conditions prévues au vingt-sixième alinéa, aux investissements réalisés, par une société soumise de plein droit à l'impôt sur les sociétés dont les actions sont détenues intégralement et directement par des contribuables, personnes physiques, domiciliés en France au sens de l'article 4 B. En ce cas, la réduction d'impôt est pratiquée par les associés dans une proportion correspondant à leurs droits dans la société. L'application de cette disposition est subordonnée au respect des conditions suivantes : 1° Les investissements ont reçu un agrément préalable du ministre chargé du budget dans les conditions prévues au III de l'article 217 undecies (...) ". Et aux termes de l'article 217 undecies du même code : " III. - 1. Pour ouvrir droit à déduction, les investissements mentionnés au I (...) concernant la rénovation et la réhabilitation d'hôtel, de résidence de tourisme et de village de vacances classés (...) doivent avoir reçu l'agrément préalable du ministre chargé du budget, après avis du ministre chargé de l'outre-mer. (...) / L'agrément est délivré lorsque l'investissement : a) Présente un intérêt économique pour le département dans lequel il est (...) d) Garantit la protection des investisseurs et des tiers. (...) ".

3. Le ministre a refusé de délivrer l'agrément sollicité pour la construction d'une structure hôtelière comprenant une composante immobilière d'un montant de 13 424 551 CFP hors taxes et une composante mobilière de 3 632 778 CFP hors taxes sur le fondement du a) et du d) du 1. du III de l'article 217 undecies, estimant que la viabilité du projet n'était pas établie en particulier en l'absence d'actualisation de l'étude de marché réalisée en 2010 au regard notamment des tarifs des nuitées envisagées et des conséquences de la crise sanitaire de 2020, de l'absence de comparables permettant d'accréditer les taux d'occupation envisagés, ainsi que de l'absence de budgétisation d'un certain nombre d'infrastructures et de prise en compte de certaines charges.

4. Il ressort des pièces du dossier que l'étude de marché initiale a été réalisée en 2010. Si les sociétés requérantes font valoir que cette étude a été actualisée en 2020, il n'est pas justifié de l'identité et de la qualité de l'auteur de cette actualisation, et s'il apparaît qu'un certain nombre d'organisateurs de voyage ont été consultés sur le concept du projet, le seul sondage réalisé auprès de vingt-cinq clients de l'hôtel exploité par la société Gondwana Puen à Nouméa sur le projet est insuffisant au regard de son ampleur. Les carences de cette actualisation de l'étude de marché ne peuvent par ailleurs être compensées par les comparables soumis par les sociétés requérantes. A ce titre, l'hôtel exploité en centre-ville de Nouméa ne peut, ainsi que le soutient à bon droit l'administration, servir de terme de comparaison avec l'exploitation d'un hôtel situé en brousse sur un îlot, et les conditions d'exploitation de l'hôtel Betikure Park Lodge, situé en brousse, sont très éloignées de celles afférentes au projet en litige, compte tenu des contraintes liées à la situation sur une île. Par ailleurs, les sociétés requérantes ne contestent pas utilement les critiques exprimées par le ministre sur la viabilité du projet en se bornant à soutenir que les travaux de réalisation d'un ponton et d'un parking destiné à accueillir les véhicules des clients seraient à la charge de la commune ou qu'elles n'auraient à supporter que le coût d'une partie de la réalisation du parking. Il est également constant que le financement de ces infrastructures, dont le montant n'est pas connu, ainsi que d'une piscine dont la construction n'a été décidée qu'en 2021, n'est pas budgété. Enfin, si après les échanges avec l'administration lors de l'instruction de la demande, l'effectif du personnel en équivalent temps plein a été porté à 21,5, l'exactitude des prévisions afférentes aux charges de personnel au regard en particulier de l'activité de restauration n'est pas établie par la seule référence au fonctionnement de l'hôtel exploité à Nouméa, lequel n'assure que le service du petit-déjeuner, alors que, par ailleurs, il n'est pas justifié du ratio-type invoqué, qui serait admis par la profession et ressortirait d'une étude du cabinet KPMG. Sur la base de ces seuls éléments, l'administration était fondée à refuser l'agrément sollicité aux motifs que le projet ne satisfaisait pas aux conditions tenant à l'intérêt économique du projet pour la Nouvelle-Calédonie et à la garantie de protection des investisseurs et des tiers, et n'a dès lors pas entaché sa décision d'erreur d'appréciation.

5. Il résulte de ce qui précède que les sociétés Gondwana Puen et Outremer Finance ne sont pas fondées à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué le Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie a rejeté leur demande. Les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées par voie de conséquence.

DECIDE :

Article 1er : La requête présentée par la société Gondwana Puen et la société Outremer Finance est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société à responsabilité limitée Gondwana Puen, à la société anonyme Outremer Finance et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Copie en sera adressée au haut-commissaire de la République en Nouvelle-Calédonie.

Délibéré après l'audience du 22 mai 2024, à laquelle siégeaient :

- Mme Brotons, président de chambre,

- Mme Topin, présidente assesseure,

- M. Magnard, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 5 juin 2024.

La rapporteure,

E. TOPINLe président,

I. BROTONS

Le greffier,

C. MONGIS

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 22PA05467 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de PARIS
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 22PA05467
Date de la décision : 05/06/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme BROTONS
Rapporteur ?: Mme Emmanuelle TOPIN
Rapporteur public ?: M. SEGRETAIN
Avocat(s) : SELARL VILLEMOT, BARTHES, ET ASSOCIÉS

Origine de la décision
Date de l'import : 09/06/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-06-05;22pa05467 ?
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