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23/04/2024 | FRANCE | N°22TL20631

France | France, Cour administrative d'appel de Toulouse, 2ème chambre, 23 avril 2024, 22TL20631


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler la décision du 17 octobre 2019 par laquelle la société anonyme Orange a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de son état dépressif au titre de sa pathologie reconnue imputable au service, une dysphonie, contractée en service le 3 mai 2009 et, à titre subsidiaire, d'ordonner, avant dire droit, une expertise médicale aux fins, notamment, de préciser si son état dépressif est imputable à sa

pathologie reconnue imputable au service, une dysphonie contractée en service le 3 mai 200...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler la décision du 17 octobre 2019 par laquelle la société anonyme Orange a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de son état dépressif au titre de sa pathologie reconnue imputable au service, une dysphonie, contractée en service le 3 mai 2009 et, à titre subsidiaire, d'ordonner, avant dire droit, une expertise médicale aux fins, notamment, de préciser si son état dépressif est imputable à sa pathologie reconnue imputable au service, une dysphonie contractée en service le 3 mai 2009, et de déterminer la date de consolidation de son état dépressif, l'étendue des préjudices en résultant et, le cas échéant, la date de son aptitude à la reprise du service.

Par un jugement n° 1907188 du 28 décembre 2021, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté ses demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 24 février 2022 au greffe de la cour administrative d'appel de Bordeaux sous le n°22BX00631, puis le 1er mars 2022 au greffe de la cour administrative d'appel de Toulouse sous le n°22TL20631, et un mémoire enregistré le 9 novembre 2023, Mme B... A..., représentée par Me Hudrisier, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 28 décembre 2021 ;

2°) d'ordonner, avant dire droit, une expertise médicale aux fins de préciser si ses pathologies actuelles sont imputables à sa pathologie contractée en service le 3 mai 2009 et ont un lien avec le service, et de déterminer la date de consolidation de sa pathologie, l'étendue des préjudices en résultant et son aptitude à reprendre un poste de travail et, dans l'affirmative, d'en préciser la date ;

3°) d'annuler la décision n° 19-228 du 17 octobre 2019 de la société anonyme Orange ;

4°) d'enjoindre à la société anonyme Orange de prendre un arrêté de reconnaissance d'imputabilité au service de la rechute du 30 novembre 2018 à la maladie à caractère professionnel du 3 mai 2009 ;

5°) de mettre à la charge de la société anonyme Orange la somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi que les entiers dépens.

Elle soutient que :

- la décision du 17 octobre 2019 n'est pas motivée ;

- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation dès lors que la dysphonie et la dépression qui s'en est suivie constituent une seule et même maladie ;

- il appartenait à la société Orange de se prononcer sur l'imputabilité au service de la rechute du 30 novembre 2018 ;

- il y a lieu d'ordonner une expertise médicale afin de confirmer l'existence d'un lien entre ses troubles et la maladie reconnue imputable au service et l'existence d'une seule et même pathologie.

Par un mémoire en défense, enregistré le 27 avril 2023, la société Orange, représentée par la société d'avocats Delvolvé et Trichet, conclut au rejet de la requête et demande de mettre à la charge de Mme A... le versement de la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- la requête est irrecevable en l'absence de moyen d'appel de nature à critiquer le jugement attaqué ;

- aucun des moyens invoqués n'est fondé.

Par ordonnance du 9 novembre 2023, la clôture d'instruction a été fixée au 11 décembre 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

- la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Anne Blin, présidente-assesseure,

- les conclusions de Mme Michèle Torelli, rapporteure publique,

- et les observations de Me Albarède substituant Me Hudrisier, représentant Mme A....

Considérant ce qui suit :

1. Mme A..., fonctionnaire de la société Orange, a contracté, le 3 mai 2009, une dysphonie, qui a été reconnue imputable au service par une décision du 4 juillet 2013. La date de consolidation de cette pathologie a été fixée au 31 décembre 2011. La requérante a de nouveau souffert de troubles dysphoniques en 2016 et, par une décision du 8 juin 2018, la société Orange a pris en charge les soins orthophoniques exposés par Mme A... et a fixé la nouvelle date de consolidation au 19 janvier 2018. Le 30 novembre 2018, l'intéressée a demandé la prise en charge par le service de nouveaux troubles dysphoniques et anxio-dépressifs, apparus au cours de l'automne 2018, qu'elle estime liés de manière directe et certaine à la dysphonie contractée en service en mai 2009. Mme A... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler la décision du 17 octobre 2019 par laquelle la société Orange a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de ses troubles anxio-dépressifs et d'ordonner avant-dire-droit une expertise médicale. Elle relève appel du jugement du 28 décembre 2021 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté ses demandes.

Sur le bien-fondé du jugement :

2. En premier lieu, Mme A... reprend en appel et sans critiquer utilement la réponse apportée par les premiers juges, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la décision. Dès lors, il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus à juste titre par le tribunal au point 2 du jugement contesté.

3. En deuxième lieu, aux termes de l'article 29 de la loi susvisée du 2 juillet 1990 qui a créé, aux termes de son article 1er, les exploitants publics La Poste et France Télécom : " Les personnels de La Poste et de France Télécom sont régis par des statuts particuliers, pris en application de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droit et obligations des fonctionnaires et de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat, qui comportent des dispositions spécifiques dans les conditions prévues aux alinéas ci-après, ainsi que dans les conditions de l'article 29-1 ". La société France Télécom est devenue la société anonyme Orange à compter du 1er juillet 2013.

4. Aux termes de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat, dans ses dispositions applicables au litige : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. Le fonctionnaire conserve, en outre, ses droits à la totalité du supplément familial de traitement et de l'indemnité de résidence. Le bénéfice de ces dispositions est subordonné à la transmission par le fonctionnaire, à son administration, de l'avis d'arrêt de travail justifiant du bien-fondé du congé de maladie, dans un délai et selon les sanctions prévues en application de l'article 35. / Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite, à l'exception des blessures ou des maladies contractées ou aggravées en service, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident ; / (...). "

5. Une maladie contractée par un fonctionnaire, ou son aggravation, doit être regardée comme imputable au service si elle présente un lien direct avec l'exercice des fonctions ou avec des conditions de travail de nature à susciter le développement de la maladie en cause, sauf à ce qu'un fait personnel de l'agent ou toute autre circonstance particulière conduisent à détacher la survenance ou l'aggravation de la maladie du service.

6. Il ressort des pièces du dossier que la dysphonie fonctionnelle survenue le 3 mai 2009 dont souffre Mme A..., qui a été reconnue comme maladie professionnelle par décision du 4 juillet 2013, a été considérée comme ayant deux causes, à savoir l'hypersollicitation de la voix dans le cadre de ses fonctions de téléopératrice et le stress dû à la période de restructuration du service dans lequel l'intéressée était alors affectée. Ainsi, dans son avis rendu le 13 juin 2013, la commission de réforme a déterminé un taux d'incapacité permanente partielle de 5% au titre de la dysphonie, et un même taux de 5% au titre d'un état anxio-dépressif. La date de consolidation de l'état de Mme A... a été fixée au 31 décembre 2011. Par la suite, à l'occasion d'une cure thermale qu'elle effectuait en mai 2016 pour soigner un syndrome dépressif, l'intéressée a présenté une dysphonie de rechute. Elle a été placée en arrêt de travail de manière continue à compter de septembre 2016 jusqu'au 31 octobre 2019. Par décision du 8 juin 2018 prise après avis favorable de la commission de réforme le 17 mai 2018, les arrêts de travail et les soins orthophoniques ont été pris en charge au titre de la maladie professionnelle, la consolidation de son état étant fixée au 19 janvier 2018 et un taux d'incapacité permanente partielle de 5% déterminé au titre du syndrome anxieux modéré. La requérante soutient que les troubles dysphoniques et le syndrome anxio-dépressif qui sont de nouveau réapparus à l'automne 2018 relèvent de la même maladie professionnelle reconnue par décision du 4 juillet 2013. Selon le rapport de l'expert en date du 17 janvier 2019, Mme A... qui souffre d'un syndrome anxio-dysphorique entrecoupé d'épisodes dysphoniques, a essentiellement un trouble anxio-dépressif qui se manifeste de façon intermittente par des épisodes de dysphonie. Toutefois si cet expert a relevé que l'utilisation fréquente de la voix au cours de l'exercice de sa profession favorisait la somatisation laryngée de sa dépression, il est constant que Mme A... a cessé toute activité professionnelle dès septembre 2016 ainsi qu'il a été exposé ci-dessus. En outre, selon le rapport en date du 24 septembre 2019 établi par le dernier expert psychiatre qui l'a examinée, il est possible que la dysphonie ait une origine psychogène de type conversion du fait des troubles de la personnalité que présente Mme A.... Cet expert a toutefois estimé qu'elle ne présentait pas de symptomatologie dépressive à la date à laquelle il l'a examinée, après avoir relevé que si Mme A... cultive une rancœur vis-à-vis des difficultés que son employeur lui aurait fait supporter, elle n'est pas en mesure d'en préciser les détails en dehors de la période difficile de restructuration, soit en 2009, outre " une opposition franche à toute perspective de reprise d'activité professionnelle ". Au regard notamment des conclusions de cet expert, la commission de réforme a émis, le 10 septembre 2019, un avis défavorable à la reconnaissance du caractère professionnel de la pathologie psychiatrique. Mme A... se prévaut des expertises rendues dans le cadre de la reconnaissance de sa maladie professionnelle et de la première rechute en 2016, ainsi que des certificats médicaux en date du 18 décembre 2019 d'un médecin généraliste et du psychiatre qui la suit depuis février 2013 selon lequel " en 2016 elle a présenté des troubles de la voix (dysphonie) qui sont toujours présents à ce jour et intriqués dans le tableau dépressif ", ajoutant que ces troubles dysphoniques sont identiques à ceux survenus en 2009 dans un contexte de stress professionnel. Toutefois, alors que la décision contestée a admis l'imputabilité au service de la résurgence de ses troubles dysphoniques, les documents produits ne sont pas de nature à remettre en cause l'absence de lien direct et certain entre l'état dépressif évoqué et le service. Dans ces conditions, en refusant de reconnaître l'imputabilité au service des troubles anxio-dépressifs apparus à l'automne 2018, la société Orange n'a entaché la décision contestée d'aucune erreur d'appréciation.

7. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par la société Orange et d'ordonner l'expertise que sollicite la requérante dès lors qu'elle ne revêtirait pas de caractère utile, que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté ses demandes.

Sur les frais liés au litige :

8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la société Orange, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme que Mme A... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

9. Il y a lieu en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme A... une somme de 1 000 euros à verser à la société Orange au titre des mêmes dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

10. Le litige n'ayant donné lieu à aucun dépens, au sens de l'article R. 761-1 du code de justice administrative, les conclusions de Mme A... relatives à l'attribution de leur charge doivent être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.

Article 2 : Mme A... versera à la société Orange une somme de 1 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et à la société anonyme Orange.

Délibéré après l'audience du 26 mars 2024, à laquelle siégeaient :

Mme Geslan-Demaret, présidente de chambre,

Mme Blin, présidente assesseure,

Mme Arquié, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 23 avril 2024.

La rapporteure,

A. Blin

La présidente,

A. Geslan-Demaret

La greffière,

M-M. Maillat

La République mande et ordonne au ministre de l'économie et des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

N°22TL20631 2


Synthèse
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 22TL20631
Date de la décision : 23/04/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Fonctionnaires et agents publics - Positions - Congés - Congés de maladie.

Fonctionnaires et agents publics - Contentieux de la fonction publique - Contentieux de l'annulation.


Composition du Tribunal
Président : Mme GESLAN-DEMARET
Rapporteur ?: Mme Anne BLIN
Rapporteur public ?: Mme TORELLI
Avocat(s) : SARL DELVOLVE TRICHET

Origine de la décision
Date de l'import : 28/04/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.toulouse;arret;2024-04-23;22tl20631 ?
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