La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

27/06/2024 | FRANCE | N°22TL21596

France | France, Cour administrative d'appel de TOULOUSE, 4ème chambre, 27 juin 2024, 22TL21596


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. D... B... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 19 novembre 2019 par lequel le maire de Colombiers ne s'est pas opposé à la déclaration préalable de Mme C....



Par un jugement n° 2003265 du 19 mai 2022, le tribunal administratif de Montpellier a annulé cet arrêté et mis à la charge de la commune de Colombiers une somme de 1 500 euros à verser à M. B... sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du cod

e de justice administrative.



Procédure devant la cour :



Par une requête, enregis...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... B... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 19 novembre 2019 par lequel le maire de Colombiers ne s'est pas opposé à la déclaration préalable de Mme C....

Par un jugement n° 2003265 du 19 mai 2022, le tribunal administratif de Montpellier a annulé cet arrêté et mis à la charge de la commune de Colombiers une somme de 1 500 euros à verser à M. B... sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 18 juillet 2022, Mme C..., représentée par la société civile professionnelle Verbateam Montpellier, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. B... devant le tribunal administratif de Montpellier ;

3°) de mettre à la charge de M. B... une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'arrêté attaqué ne méconnaît pas les dispositions combinées de l'article 7 du règlement du plan local d'urbanisme applicable à la zone Ub et les dispositions du règlement du lotissement dès lors que ces dernières permettent l'implantation en limite séparative nord sur son lot de son projet, qui est une extension et non une annexe de sa maison d'habitation, ce qui permet une hauteur maximale de 6, 60 mètres ;

- saisie par l'effet dévolutif de l'appel, la cour constatera que l'arrêté attaqué ne méconnaît pas les dispositions de l'article R. 421-14 du code de l'urbanisme et a été signé par une personne ayant compétence à cet effet.

Par un mémoire, enregistré le 16 septembre 2022, la commune de Colombiers, représentée par la Selarl Valette-Berthelsen, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. B... devant le tribunal administratif de Montpellier ;

3°) de mettre à la charge de M. B... une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'arrêté attaqué ne méconnaît pas les dispositions combinées de l'article 7 du règlement du plan local d'urbanisme applicable à la zone Ub et les dispositions du règlement du lotissement dès lors que ces derniers permettent l'implantation en limite séparative nord sur le lot de l'appelante de son projet, qui est une extension et non une annexe de sa maison d'habitation, ce qui permet une hauteur maximale de 6, 60 mètres ;

- saisie par l'effet dévolutif de l'appel, la cour constatera que l'arrêté attaqué ne méconnaît pas les dispositions de l'article R. 421-14 du code de l'urbanisme, il a été signé par une personne ayant compétence à cet effet et il ne méconnaît pas les dispositions de l'article 7 du plan local d'urbanisme et de l'article AU 7 du règlement du lotissement.

Par un mémoire, enregistré le 14 novembre 2022, M. B..., représenté par Me Baltazar, conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge solidaire de Mme C... et la commune de Colombiers la somme de 4 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir qu'aucun des moyens soulevés par Mme C... et la commune de Colombiers n'est fondé.

Par ordonnance du 11 octobre 2023, la clôture d'instruction a été fixée au 2 novembre 2023.

Par courrier du 6 juin 2024, les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt à intervenir est susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office tiré du caractère tardif des conclusions tendant à l'annulation du jugement attaqué présentées par la commune de Colombiers dans son mémoire du 16 septembre 2022.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Lasserre, première conseillère,

- les conclusions de Mme Meunier-Garner, rapporteure publique,

- et les observations de Me Rémy, représentant Mme C....

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 19 novembre 2019, le maire de Colombiers (Hérault) ne s'est pas opposé à la déclaration préalable de Mme C... portant sur une extension de sa maison à usage d'habitation implantée en secteur Ub-c du plan local d'urbanisme et faisant partie du lotissement " Le Clos La Martine ". Par jugement du 19 mai 2022, le tribunal administratif de Montpellier, saisi par M. B... qui est un voisin immédiat du projet, a annulé cet arrêté. Par la présente requête, Mme C... demande l'annulation de ce jugement.

Sur les conclusions de la commune de Colombiers :

2. Aux termes de l'article R. 811-2 du code de justice administrative : " Sauf dispositions contraires, le délai d'appel est de deux mois. Il court contre toute partie à l'instance à compter du jour où la notification a été faite à cette partie dans les conditions prévues aux articles R. 751-3 et R. 751-4-1 (...) ".

3. La commune de Colombiers, partie au litige devant les premiers juges, avait qualité pour relever appel du jugement du tribunal administratif de Montpellier annulant l'arrêté du 19 novembre 2019 par lequel le maire de Colombiers ne s'est pas opposé à la déclaration préalable de Mme C.... Il ressort par ailleurs des pièces du dossier que la commune a reçu notification du jugement attaqué le 19 mai 2022 via l'application Télérecours. Les conclusions par lesquelles la commune demande l'annulation de ce jugement ont toutefois été enregistrées au greffe de la cour administrative d'appel de Toulouse le 16 septembre 2022, soit après l'expiration du délai prévu par les dispositions précitées. Par suite, les conclusions d'appel de la commune de Colombiers, présentées tardivement, sont irrecevables et ne peuvent qu'être rejetées.

Sur le bien-fondé du jugement :

En ce qui concerne la règle d'urbanisme applicable :

4. Aux termes de l'article L. 421-6 du code de l'urbanisme : " Le permis de construire ou d'aménager ne peut être accordé que si les travaux projetés sont conformes aux dispositions législatives et réglementaires relatives à l'utilisation des sols, à l'implantation, la destination, la nature, l'architecture, les dimensions, l'assainissement des constructions et à l'aménagement de leurs abords et s'ils ne sont pas incompatibles avec une déclaration d'utilité publique. ". L'article L. 424-5 du même code dispose que : " Le permis de construire, d'aménager ou de démolir, tacite ou explicite, ne peut être retiré que s'il est illégal et dans le délai de trois mois suivant la date de cette décision. Passé ce délai, le permis ne peut être retiré que sur demande explicite de son bénéficiaire. ". Aux termes de l'article L. 442-14 du même code, dans sa rédaction alors applicable : " Le permis de construire ne peut être refusé ou assorti de prescriptions spéciales sur le fondement de dispositions d'urbanisme nouvelles intervenues dans un délai de cinq ans suivant / : 1° La date de la non-opposition à cette déclaration, lorsque le lotissement a fait l'objet d'une déclaration préalable ; / 2° L'achèvement des travaux constaté dans les conditions prévues par décret en Conseil d'Etat, lorsque le lotissement a fait l'objet d'un permis d'aménager. Toutefois, les dispositions résultant des modifications des documents du lotissement en application des articles L. 442-10, L. 442-11 et L. 442-13 sont opposables. ". Enfin, l'article L. 442-9 de ce code dispose que : " Les règles d'urbanisme contenues dans les documents du lotissement, notamment le règlement, le cahier des charges s'il a été approuvé ou les clauses de nature réglementaire du cahier des charges s'il n'a pas été approuvé, deviennent caduques au terme de dix années à compter de la délivrance de l'autorisation de lotir si, à cette date, le lotissement est couvert par un plan local d'urbanisme ou un document d'urbanisme en tenant lieu. ".

5. D'une part, il résulte de ces dispositions que le document d'urbanisme applicable aux demandes de permis de construire présentées dans le cadre d'un lotissement est celui en vigueur à la date à laquelle a été délivrée l'autorisation de lotir et ce, pendant un délai de cinq ans à compter de la réception, par l'administration, de la déclaration d'achèvement du lotissement. Durant ce délai, les dispositions des documents d'urbanisme intervenues postérieurement à l'autorisation de lotir ne sont pas opposables aux demandes de permis de construire. D'autre part, il résulte de ces mêmes dispositions que, tant qu'ils ne sont pas caducs, l'autorité administrative applique le règlement du lotissement et les seules clauses des cahiers des charges, approuvés ou non, qui contiennent des règles d'urbanisme aux demandes de permis de construire présentées dans le cadre d'un lotissement.

6. Il ressort des pièces du dossier qu'un règlement de lotissement a été annexé au permis d'aménager le lotissement " Le Clos La Martine " délivré le 13 mars 2012 et que le lotisseur a déclaré avoir achevé les travaux d'aménagement le 7 mai 2013. Il s'ensuit qu'il y a lieu de faire application des règles d'urbanisme issues des documents du lotissement et de celles du plan local d'urbanisme adopté le 11 mars 2013 et révisé le 15 septembre 2017.

En ce qui concerne le motif retenu par le tribunal administratif de Montpellier :

7. L'article 7 du règlement du plan local d'urbanisme applicable à l'ensemble de la zone Ub prévoit, s'agissant de l'implantation des constructions par rapport aux limites séparatives, une règle générale imposant une marge de recul au moins égale à la moitié de la différence d'altitude entre le bâtiment et le point de la limite parcellaire qui en est le plus rapproché, sans pouvoir être inférieure à trois mètres. En outre, il précise que : " En cas d'accord avec les propriétaires intéressés, les bâtiments pourront être édifiés dans la marge de reculement définie et jusqu'à la limite séparative ". Pour la zone Ub-c, il précise en outre que : " les constructions s'inscriront dans les zones constructibles portées au plan de composition et respecteront les alignements ou les implantations définies dans le plan de composition de l'opération d'ensemble, y compris les mitoyennetés ". Par ailleurs, au titre des règles alternatives pour la construction en limite séparative, le même article 7 de ce plan précise pour la zone Ub-c que : " des constructions annexes peuvent être édifiées si elles répondent à l'une des conditions suivantes : - lorsque la hauteur totale au pignon de la construction ne dépasse pas 4,50 mètres et 10 mètres de longueur mesurée le long de la limite séparative ; - lorsque le bâtiment peut être adossé à un bâtiment de gabarit sensiblement identique ; - lorsque les propriétaires voisins s'entendent pour réaliser simultanément un projet d'ensemble présentant une unité architecturale ". Enfin, l'annexe relative aux définitions de ce même plan indique que " Les annexes sont des constructions indépendantes physiquement du corps principal d'un bâtiment, mais constituant, sur une même parcelle, un complément fonctionnel à ce bâtiment (exemples : abris de jardin, remise, bûchers, garages, etc ...) " et que constituent une extension " Tous travaux ayant pour effet de modifier le volume existant par addition contiguë ou surélévation ".

8. Quant au règlement du lotissement " Le Clos La Martine ", il invite à se référer au plan local d'urbanisme s'agissant de l'implantation des constructions par rapport aux limites séparatives tout en prévoyant les prescriptions particulières suivantes : " après subdivision des macrolots faite par l'aménageur, l'implantation devra se conformer aux indications du plan PA 4 bis et des plans de vente. Si la zone constructible permet d'implanter en limite de propriété sans être jumelé avec la construction voisine, la construction devra respecter le plan local d'urbanisme (voir schéma ci-dessous) ". Ces prescriptions sont accompagnées d'un schéma faisant figurer une maison à usage d'habitation respectant un prospect égal à H/2 et de minimum 3 mètres ainsi qu'une construction annexe, implantée en limite séparative dont la hauteur maximale est de 4,50 mètres et la longueur maximale de 10 mètres.

9. Il résulte de la combinaison de ces dispositions que, sauf accord entre les propriétaires intéressés, les constructions du lotissement " Le Clos La Martine " doivent s'implanter au sein des zones définies sur chaque parcelle par le règlement du lotissement avec une marge de recul au moins égale à la moitié de la différence d'altitude entre le bâtiment et le point de la limite parcellaire qui en est le plus rapproché, sans pouvoir être inférieure à trois mètres. Toutefois, pour les terrains dont la zone constructible permet d'implanter une construction en limite de propriété sans être jumelée avec la construction voisine, il résulte de la combinaison de ces dispositions que les seules constructions autorisées sont celles prévues par le plan local d'urbanisme, c'est-à-dire des bâtiments édifiés avec l'accord des propriétaires concernés et des annexes dont la hauteur maximale est de 4,50 mètres et la longueur maximale de 10 mètres ou pouvant être adossées à un bâtiment de gabarit sensiblement identique ou celles pour lesquelles les propriétaires voisins s'entendent pour réaliser simultanément un projet d'ensemble présentant une unité architecturale.

10. Il ressort des pièces du dossier que le projet s'implante sur le lot n°5 du lotissement " Le Clos La Martine " pour lequel le plan de composition du lotissement permet, sur sa limite séparative nord, une implantation en limite séparative sous réserve des conditions rappelées au point précédent. Il ressort également des pièces du dossier que le projet de Mme C... consiste à surélever et ajouter une avancée de 1.5 mètre à son garage édifié en limite séparative nord de sa parcelle. En outre, il est constant que M. B..., qui est le propriétaire voisin du lot n°5 sur sa limite séparative nord, n'a pas donné son accord à une implantation du projet sur la limite séparative nord. Dans ces conditions, l'extension projetée par Mme C..., qui ne constitue ni une annexe, ni un bâtiment adossé à un bâtiment de gabarit sensiblement identique ni un projet d'ensemble avec son voisin ne pouvait légalement être autorisée en l'absence d'accord du propriétaire voisin concerné par la limite séparative nord de sa parcelle. Par suite, l'arrêté attaqué par lequel le maire de Colombiers ne s'est pas opposé à la déclaration préalable de Mme C... méconnaît les dispositions combinées du règlement du plan local d'urbanisme et du règlement du lotissement précitées aux points 7 à 9 du présent arrêt. Il s'ensuit que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Montpellier a accueilli le moyen tiré de la méconnaissance des règles locales d'urbanisme relatives à l'implantation des constructions par rapport aux limites séparatives.

11. Il résulte de tout ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a annulé l'arrêté du 19 novembre 2019 par lequel le maire de Colombiers ne s'est pas opposé à sa déclaration préalable.

Sur les frais liés au litige :

12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de M. B..., qui n'est pas la partie perdante à la présente instance, une somme quelconque au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Elles font également obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Colombiers, qui, ayant seulement produit des observations en réponse à la communication de la requête par la cour, n'est pas partie à la présente instance, une somme quelconque au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de Mme C... la somme demandée par M. B... sur le fondement de ces mêmes dispositions.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par la commune de Colombiers sont rejetées.

Article 3 : Les conclusions présentées par M. B... au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... C..., M. D... B... et à la commune de Colombiers.

Délibéré après l'audience du 13 juin 2024, à laquelle siégeaient :

M. Moutte, président,

M. Jazeron, premier conseiller,

Mme Lasserre, première conseillère,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 27 juin 2024.

La rapporteure,

N. Lasserre

Le président,

J.-F. MoutteLa greffière,

N. Baali

La République mande et ordonne au préfet de l'Hérault en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N°22TL21596


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de TOULOUSE
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 22TL21596
Date de la décision : 27/06/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. Moutte
Rapporteur ?: Mme Nathalie Lasserre
Rapporteur public ?: Mme Meunier-Garner
Avocat(s) : BALTAZAR

Origine de la décision
Date de l'import : 28/07/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-06-27;22tl21596 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award