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09/07/2024 | FRANCE | N°23TL01864

France | France, Cour administrative d'appel de TOULOUSE, 3ème chambre, 09 juillet 2024, 23TL01864


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. A... E... et Mme D... H..., épouse E..., ont demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler les décisions du 21 juillet 2022 par lesquelles la commission académique du rectorat de Toulouse a rejeté leur recours préalables contre les décisions du 27 juin 2022 par lesquelles le directeur académique des services de l'éducation nationale de l'Aveyron a rejeté les demandes d'autorisation d'instruction dans la famille qu'ils avaient formées pour leurs enfants G... et F

... au titre de l'année scolaire 2022-2023.



Par un jugement n° 2204335-2204...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... E... et Mme D... H..., épouse E..., ont demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler les décisions du 21 juillet 2022 par lesquelles la commission académique du rectorat de Toulouse a rejeté leur recours préalables contre les décisions du 27 juin 2022 par lesquelles le directeur académique des services de l'éducation nationale de l'Aveyron a rejeté les demandes d'autorisation d'instruction dans la famille qu'ils avaient formées pour leurs enfants G... et F... au titre de l'année scolaire 2022-2023.

Par un jugement n° 2204335-2204336 du 17 mai 2023, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

I. Par une requête, enregistrée le 22 juillet 2023 sous le n° 23TL01864, M. et Mme E..., représentés par Me Bomstain, demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 17 mai 2023 du tribunal administratif de Toulouse ;

2°) d'annuler la décision du 21 juillet 2022 par laquelle la commission académique du rectorat de Toulouse a rejeté leur recours préalable contre la décision du 27 juin 2022 par laquelle le directeur académique des services de l'éducation nationale de l'Aveyron a rejeté la demande d'autorisation d'instruction dans la famille qu'ils avaient formée pour leur enfant G... au titre de l'année scolaire 2022-2023 ;

3°) d'enjoindre à l'administration de procéder au réexamen de leur demande d'autorisation d'instruction en famille dans le délai d'un mois à compter de la décision à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'État une somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- la décision attaquée est entachée d'un défaut de motivation au regard de la situation propre à l'enfant et de son intérêt supérieur ;

- elle est entachée d'un vice substantiel de procédure au regard de la composition de la commission telle qu'elle est prévue à l'article D. 131-11-11 du code de l'éducation ;

- elle est constitutive d'une rupture d'égalité de traitement devant la loi et de discrimination ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation en raison de ce que le rythme et la psychologie de leur enfant sont incompatibles avec celui d'un établissement scolaire.

Par un mémoire en défense, enregistré le 22 avril 2024, le recteur de l'académie de Toulouse conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par les appelants ne sont pas fondés.

II. Par une requête, enregistrée le 22 juillet 2023 sous le n° 23TL01865, M. et Mme E..., représentés par Me Bomstain, demandent à la cour, par les mêmes moyens que ceux exposés dans leur requête n° 23TL01864 :

1°) d'annuler ce jugement du 17 mai 2023 du tribunal administratif de Toulouse ;

2°) d'annuler la décision du 21 juillet 2022 par laquelle la commission académique du rectorat de Toulouse a rejeté leur recours préalable contre la décision du 27 juin 2022 par laquelle le directeur académique des services de l'éducation nationale de l'Aveyron a rejeté la demande d'autorisation d'instruction dans la famille qu'ils avaient formée pour leur enfant F... au titre de l'année scolaire 2022-2023 ;

3°) d'enjoindre à l'administration de procéder au réexamen de leur demande d'autorisation d'instruction en famille dans le délai d'un mois à compter de la décision à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'État une somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative

Par un mémoire en défense, enregistré le 22 avril 2024, le recteur de l'académie de Toulouse conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par les appelants ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces de ces deux dossiers.

Vu :

- le code de l'éducation ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 2021-1109 du 24 août 2021, notamment son article 49 ;

- le décret n° 2022-182 du 15 février 2022 ;

- la décision n° 2021-823 DC du Conseil constitutionnel du 13 août 2021 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport B... Rey-Bèthbéder, président rapporteur,

-les conclusions de Mme Perrin, rapporteure publique,

- et les observations de Me Bomstain représentant M. et Mme E....

Considérant ce qui suit :

1. M. et Mme E... ont sollicité, au titre de l'année scolaire 2022-2023, par deux demandes distinctes, l'autorisation d'instruction dans la famille de leurs enfants G... et F.... Par deux décisions du 21 juillet 2022 prise après recours administratifs préalables obligatoires, la commission académique du rectorat de Toulouse a rejeté leurs recours contre les décisions du 27 juin 2022 par lesquelles le directeur académique des services de l'éducation nationale de l'Aveyron a rejeté leurs demandes d'autorisation précitées.

2. M. et Mme E... relèvent appel, par deux requêtes distinctes n° 23TL01864 et n° 23TL01865, qui présentent à juger les mêmes questions et qu'il y a lieu de joindre, du jugement du 17 mai 2023 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation des décisions précitées du 21 juillet 2022.

3. En premier lieu, M. et Mme E... reprennent en appel le moyen tiré de l'insuffisance de la motivation des décisions litigieuses, sans assortir ce moyen d'arguments nouveaux ou de critique utile du jugement. Il convient d'écarter ce moyen par adoption des motifs pertinents retenus par les premiers juges.

4. En deuxième lieu, aux termes de l'article D. 131-11-10 du code de l'éducation : " Toute décision de refus d'autorisation d'instruction dans la famille peut être contestée dans un délai de quinze jours à compter de sa notification écrite par les personnes responsables de l'enfant auprès d'une commission présidée par le recteur d'académie ". Selon l'article D. 131-11-11 du même code : " La commission est présidée par le recteur d'académie ou son représentant. Elle comprend en outre quatre membres : 1° Un inspecteur de l'éducation nationale ; 2° Un inspecteur d'académie-inspecteur pédagogique régional ; 3° Un médecin de l'éducation nationale ; 4° Un conseiller technique de service social. / Ces membres sont nommés pour deux ans par le recteur d'académie. / Des membres suppléants sont nommés dans les mêmes conditions que les membres titulaires ". Et aux termes de l'article D. 131-11-12 de ce code : " La commission siège valablement lorsque la majorité de ses membres sont présents. La commission rend sa décision à la majorité des membres présents. En cas de partage égal des voix, celle du président est prépondérante ".

5. Par un arrêté du 20 juin 2022 régulièrement publié, le recteur de l'académie de Toulouse a défini la composition de la commission chargée d'examiner les recours formés contre les décisions de refus d'autorisation d'instruction dans la famille, laquelle correspond en tous points aux exigences des dispositions précitées. Par ailleurs, il ressort des pièces du dossier que la décision litigieuse a été prise à l'unanimité des membres de cette commission, dont la majorité était présente. En conséquence, le moyen tiré de ce que ces décisions auraient été prises par une commission irrégulièrement composée, qui n'est au demeurant assorti d'aucun élément à l'appui, ne peut qu'être écarté.

6. Aux termes de de l'article L. 131-5 du code de l'éducation, dans sa rédaction issue de la loi du 24 août 2021 confortant le respect des principes de la République : " Les personnes responsables d'un enfant soumis à l'obligation scolaire définie à l'article L. 131-1 doivent le faire inscrire dans un établissement d'enseignement public ou privé ou bien, à condition d'y avoir été autorisées par l'autorité de l'État compétente en matière d'éducation, lui donner l'instruction en famille. / Les mêmes formalités doivent être accomplies dans les huit jours qui suivent tout changement de résidence. / La présente obligation s'applique à compter de la rentrée scolaire de l'année civile où l'enfant atteint l'âge de trois ans. / L'autorisation mentionnée au premier alinéa est accordée pour les motifs suivants, sans que puissent être invoquées d'autres raisons que l'intérêt supérieur de l'enfant:/ (...) 4° L'existence d'une situation propre à l'enfant motivant le projet éducatif, sous réserve que les personnes qui en sont responsables justifient de la capacité de la ou des personnes chargées d'instruire l'enfant à assurer l'instruction en famille dans le respect de l'intérêt supérieur de l'enfant. Dans ce cas, la demande d'autorisation comporte une présentation écrite du projet éducatif, l'engagement d'assurer cette instruction majoritairement en langue française ainsi que les pièces justifiant de la capacité à assurer l'instruction en famille. / L'autorisation mentionnée au premier alinéa est accordée pour une durée qui ne peut excéder l'année scolaire. Elle peut être accordée pour une durée supérieure lorsqu'elle est justifiée par l'un des motifs prévus au 1°. Un décret en Conseil d'État précise les modalités de délivrance de cette autorisation. / L'autorité de l'État compétente en matière d'éducation peut convoquer l'enfant, ses responsables et, le cas échéant, les personnes chargées d'instruire l'enfant à un entretien afin d'apprécier la situation de l'enfant et de sa famille et de vérifier leur capacité à assurer l'instruction en famille. / En application de l'article L. 231-1 du code des relations entre le public et l'administration, le silence gardé pendant deux mois par l'autorité de l'État compétente en matière d'éducation sur une demande d'autorisation formulée en application du premier alinéa du présent article vaut décision d'acceptation. / La décision de refus d'autorisation fait l'objet d'un recours administratif préalable auprès d'une commission présidée par le recteur d'académie, dans des conditions fixées par décret. / Le président du conseil départemental et le maire de la commune de résidence de l'enfant sont informés de la délivrance de l'autorisation (...) ". Pour la mise en œuvre de ces dispositions, dont il résulte que les enfants soumis à l'obligation scolaire sont, en principe, instruits dans un établissement d'enseignement public ou privé, il appartient à l'autorité administrative, lorsqu'elle est saisie d'une demande tendant à ce que l'instruction d'un enfant dans la famille soit, à titre dérogatoire, autorisée, de rechercher, au vu de la situation de cet enfant, quels sont les avantages et les inconvénients pour lui de son instruction, d'une part dans un établissement d'enseignement, d'autre part, dans la famille selon les modalités exposées par la demande et, à l'issue de cet examen, de retenir la forme d'instruction la plus conforme à son intérêt.

7. En ce qui concerne plus particulièrement les dispositions de l'article L. 131-5 du code de l'éducation prévoyant la délivrance par l'administration, à titre dérogatoire, d'une autorisation pour dispenser l'instruction dans la famille en raison de " l'existence d'une situation propre à l'enfant motivant le projet éducatif ", ces dispositions, telles qu'elles ont été interprétées par la décision n° 2021-823 DC du Conseil constitutionnel du 13 août 2021, impliquent que l'autorité administrative, saisie d'une telle demande, contrôle que cette demande expose de manière étayée la situation propre à cet enfant motivant, dans son intérêt, le projet d'instruction dans la famille et qu'il est justifié, d'une part, que le projet éducatif comporte les éléments essentiels de l'enseignement et de la pédagogie adaptés aux capacités et au rythme d'apprentissage de cet enfant, d'autre part, de la capacité des personnes chargées de l'instruction de l'enfant à lui permettre d'acquérir le socle commun de connaissances, de compétences et de culture défini à l'article L. 122-1-1 du code de l'éducation au regard des objectifs de connaissances et de compétences attendues à la fin de chaque cycle d'enseignement de la scolarité obligatoire.

8. En troisième lieu, pour rejeter les demandes des appelants, la commission académique s'est fondée sur le motif tiré de ce que les éléments constitutifs de ces demandes n'établissaient pas une situation propre aux enfants nécessitant un projet éducatif particulier. S'il ressort du projet éducatif présenté par M. et Mme E... qu'ils ont entendu justifier la situation propre à leurs enfants par leurs besoins en termes de rythme d'apprentissage et de sommeil, outre que ces éléments n'étaient assortis d'aucun élément justificatif et ne l'ont pas davantage été en première instance et en appel, ils ne sauraient caractériser une situation propre à l'enfant de nature à justifier un projet pédagogique d'instruction en famille par dérogation au principe de l'instruction dans un établissement d'enseignement public ou privé, lequel est en mesure de prendre en compte de telles considérations générales et fréquentes chez des enfants de trois ans. En conséquence et comme l'ont estimé les premiers juges, c'est à bon droit et sans méconnaître les dispositions précitées ni entacher sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation que la commission académique a rejeté la demande de Mme C....

9. En quatrième et dernier lieu et à supposer même que des familles auraient, dans d'autres académies que celle de Toulouse, obtenu l'autorisation d'instruire en famille leurs enfants, cette circonstance n'est pas de nature à elle seule et dans la mesure où il n'est pas établi que les situations propres de ces derniers seraient analogues à celle des enfants B... et Mme E..., à établir que les décisions litigieuses procèderaient d'une rupture d'égalité et d'une discrimination à l'égard des appelants

10. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme E... ne sont pas fondés à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté leurs demandes. Par voie de conséquence, leurs conclusions à fins d'injonction et tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.

DÉCIDE:

Article 1er : Les requêtes B... et Mme E... sont rejetées.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... E..., à Mme D... H..., épouse E..., et au ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse. Copie en sera adressée au recteur de l'académie de Toulouse.

Délibéré après l'audience du 25 juin 2024, à laquelle siégeaient :

M. Rey-Bèthbéder, président,

M. Bentolila, président-assesseur,

Mme Beltrami, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 9 juillet 2024.

Le président-assesseur,

P. Bentolila

Le président-rapporteur,

É. Rey-Bèthbéder

La greffière,

C. Lanoux

La République mande et ordonne au ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 23TL01864-23TL01865


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de TOULOUSE
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 23TL01864
Date de la décision : 09/07/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

30-01-03 Enseignement et recherche. - Questions générales. - Questions générales concernant les élèves.


Composition du Tribunal
Président : M. Rey-Bèthbéder
Rapporteur ?: M. Eric Rey-Bèthbéder
Rapporteur public ?: Mme Perrin
Avocat(s) : BOMSTAIN JONATHAN

Origine de la décision
Date de l'import : 14/07/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-07-09;23tl01864 ?
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